Globewatch of May 12, 2024

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00:00 [Musique]
00:13 Bonjour et bienvenue à cet entretien exclusif qu'accorde à la Cameroun Radio Television,
00:20 le nouvel ambassadeur de l'Union Européenne au Cameroun.
00:24 Cette interview vient au lendemain de la célébration de la Journée de l'Europe.
00:29 Cette année, la Journée de l'Europe qui consacre ainsi l'existence même de l'Union Européenne,
00:37 une association de 27 États qui a construit son image, sa diplomatie,
00:43 sur le développement partout dans le monde, dans un contexte extrêmement difficile.
00:49 L'Union Européenne fait preuve de la résilience dont beaucoup de sociétés parlent aujourd'hui dans le monde.
00:57 Pour sa première interview exclusive intercamerounaise, notre invité ce soir est M. Jean-Marc Châtaignier.
01:05 Excellence, bonjour et bienvenue d'accepter l'invitation de la Cameroun Radio Television.
01:11 Bonjour, merci beaucoup pour votre invitation.
01:13 Excellence, M. l'ambassadeur, la Journée de l'Europe est une émanation de la déclaration de Robert Schuman en 1950,
01:24 le document fondateur de ce que nous appelons aujourd'hui l'Union Européenne.
01:31 A l'époque, on pouvait parler de la communauté européenne.
01:35 Depuis presque 75 ans, il y a un grand homme, Jean-Marie France Giraud, qui qualifiait en 1984, je vous donne la citation,
01:56 "Nous sommes dans une société, dans une institution dont on parle le besoin vite ou il n'y a pas d'enfant".
02:04 C'est bien de qualifier l'Union Européenne aujourd'hui ?
02:07 Écoutez, je crois que ça a beaucoup changé depuis 1984.
02:10 Pour ne rien vous cacher, je n'étais pas forcément des opinions des jeunes de Marie France Giraud en 1984.
02:15 Mais depuis 1984, l'Union Européenne est passée de 9 Etats membres à 27 Etats membres.
02:22 Elle est passée de 150 millions d'habitants à 450 millions d'habitants.
02:26 Il y a eu plusieurs traités. Le traité de Maastricht, le traité de Lisbonne.
02:30 Nous avons évolué vers davantage d'intégration. Et l'Europe, plus que jamais, pour moi maintenant, représente une espérance.
02:37 Elle représente une espérance pour un certain nombre de peuples.
02:39 Vous savez qu'il y a encore 9 Etats qui sont candidats pour entrer dans l'Union Européenne.
02:44 Et parmi ces 9 Etats, il y en a 4 qui connaissent un petit peu des crises en ce moment.
02:48 Enfin, qui connaissent parfois des grosses crises.
02:50 Que sont l'Ukraine, que sont la Georgie, que sont l'Arménie, que sont la Moldavie.
02:58 Et il y a beaucoup de manifestations dans ces pays où les gens sortent le drapeau européen.
03:03 Où ils s'enroulent du drapeau européen. Où ils en font le drapeau de liberté.
03:07 Ils en font le drapeau de l'avenir. Et moi, ça me meut énormément.
03:11 L'Union Européenne, c'est une construction qui date pendant longtemps.
03:16 Depuis même la conférence de Vienne, ou bien le congrès de Vienne de 1815,
03:21 lorsque George Cunningham, le premier ministre britannique à l'époque, parlait que
03:25 "Chacun pour soi-même, Dieu pour nous tous".
03:28 Il ne voulait pas faire partie de l'Union Européenne.
03:33 Lorsque j'écoute les citations, les vocations que vous faites aujourd'hui des membres qui sont candidats,
03:40 vous pensez que vous restez constant dans la construction européenne ?
03:46 Oui, je crois qu'on reste constant. Alors vous avez cité cette citation.
03:49 L'Union Européenne est née véritablement en 1958, la Communion.
03:54 C'est eux, et donc 1950, bien sûr, le discours de Robert Schuman.
03:58 Mais ce qui est très fort, c'est que dans les années 1950, il y avait un autre homme d'État britannique,
04:03 un petit peu plus connu, qui s'appelait Winston Churchill,
04:06 et qui a dit "Il nous faut les États-Unis d'Europe".
04:09 Et quelque part, on a besoin effectivement, parce que nous sommes nombreux en Europe,
04:13 on s'est fait la guerre pendant longtemps entre nous,
04:16 et malheureusement on a arrêté, on a décidé de se mettre ensemble
04:20 pour construire des sociétés plus justes, plus prospères entre nous.
04:24 Et quelque part, c'est cette unité auquel on aspire à construire.
04:30 Et je crois qu'il y a véritablement une adhésion.
04:32 Alors, c'est pas un long fleuve tranquille, tout le monde n'est pas toujours content.
04:37 Mais ce qui est essentiel dans l'Europe, c'est que malgré toutes les crises que nous connaissons,
04:43 nous arrivons à les traverser, nous arrivons à les surmonter,
04:46 et nous avons une, je dirais, l'Europe est un extraordinaire appareil de résilience,
04:51 pour en parler à un terme moderne.
04:53 Nous sommes capables de faire face aux crises, de les surmonter,
04:55 et de sortir plus fort avant qu'après.
04:58 La déclaration de Robert Schuman, document fondateur de ce que nous appelons aujourd'hui l'Union Européenne,
05:04 intervenait au cinquième anniversaire de l'affaire de la deuxième guerre mondiale,
05:10 un déclar qui a déchiré les sociétés européennes,
05:14 et donnait l'idée de l'élimination absolue de la rivalité franco-allemande,
05:19 sous des tensions mortières auparavant.
05:22 Est-il logique de conclure qu'il y a la paix aujourd'hui en Europe ?
05:26 C'est parce que les rivalités franco-allemandes sont disparues.
05:30 Écoutez, il y a toujours une, je veux pas dire une rivalité,
05:34 mais il y a toujours une compétition, il y a toujours des relations diplomatiques,
05:37 c'est toujours deux États souverains.
05:39 Mais l'Europe, c'est pas uniquement la France et l'Allemagne.
05:41 L'Europe, comme je disais tout à l'heure, c'est maintenant 27 États membres.
05:44 C'est des États latins, comme l'Espagne, l'Italie, la Grèce, Malte,
05:48 c'est des États nordiques, comme la Finlande, comme la Suède, comme le Danemark,
05:53 c'est des États de l'Europe de l'Est, comme la Litanie, la Lituanie, la Pologne, c'est l'Irlande.
05:58 Donc c'est un ensemble, en fait.
06:00 Et c'est un ensemble, bon, il y a eu des guerres, bien sûr, entre la France et l'Allemagne, mais pas uniquement.
06:05 On a connu de très nombreuses guerres au XVIIe, XVIIIe, XIXe siècle,
06:10 entre la France, l'Espagne, les provinces italiennes, les provinces allemandes,
06:15 l'Empire au Srongroi, donc ça, vraiment, l'Europe, c'est quelque chose qui nous est fait à ces guerres.
06:20 Et l'aspiration, juste après la fin de la Seconde Guerre mondiale,
06:23 l'aspiration des grands pères fondateurs de l'Union européenne,
06:27 bien sûr Schumann, bien sûr Jean Monnet, bien sûr Conrad Adenauer, bien sûr de Gaulle,
06:33 et ensuite d'ailleurs François Mitterrand et le mot de côte, c'est de dire plus jamais ça,
06:37 plus jamais la guerre entre nous, la paix.
06:40 Constuisons cette paix. Nous ne voulons plus connaître les horreurs
06:43 que nous avons nous-mêmes connues ou que nos parents avaient connues.
06:47 Donc c'est un mouvement fort pour dire, voilà, quelque part, construisons une nouvelle société.
06:54 Et c'est ce qu'on essaye de faire maintenant depuis, effectivement, près de 75 ans.
06:59 Vous avez voulu construire une nouvelle société avec une valet commune pour les 27 États,
07:05 aujourd'hui, après le départ des Britanniques, et cette valet s'appelle la démocratie.
07:11 Et l'Union européenne est considérée également comme un modèle d'intégration continentale.
07:19 Quels sont les piliers sur lesquels ce modèle est basé ?
07:23 Bon, c'est ce que vous m'excitez. D'abord, c'est le partage d'un certain nombre de valeurs et de principes démocratiques,
07:29 de respect des droits de l'homme. C'est ensuite une construction plus institutionnelle,
07:37 une construction économique, parce que l'Europe, ça a été aussi un modèle d'intégration économique.
07:42 Se dire, par le commerce, par les échanges économiques, on va être aussi plus forts ensemble.
07:49 Et c'est comme ça que Robert Schuman a lancé en 1950 la Communauté économique du charbon et de l'acier.
07:56 C'est comme ça qu'a été créée la Communauté économique européenne en 1958.
08:01 Et ensuite, on a évolué vers davantage, je dirais, d'intégration politique, d'intégration sociale.
08:08 Sous les 27 pays membres de l'Union européenne, 19 partagent une monnaie commune qu'on appelle l'euro.
08:17 La Suisse ne fait pas partie de l'Union européenne, mais elle fait partie de l'espace Schengen,
08:26 la politique dédiée à l'immigration, les visas, par exemple.
08:31 Comment se vit au quotidien cette cohabitation curieuse ?
08:38 Pour moi, ce point de cohabitation curieuse, c'est en fait, au fur et à mesure, on en a parlé un petit peu tout à l'heure,
08:45 l'Europe s'est élargie. Nous étions 6 en 1958, nous sommes passés à 9 en 1972, nous sommes passés à 15 en 1995,
08:55 puis à 28, et puis il y a eu le départ du Royaume-Uni, maintenant 27.
09:00 Quand on s'élargit, ça devient de plus en plus difficile de mener sur tous les sujets des politiques identiques.
09:07 Donc on a choisi sur certains sujets, parce que tout le monde n'était pas d'accord, par exemple, pour adopter l'euro parmi les 27,
09:14 ou parce que sur les migrations, il y avait certains pays qui souhaitaient préserver totalement leurs compétences,
09:19 on a choisi de mettre en place ce qu'on peut appeler des coopérations différenciées.
09:23 Et donc sur un certain nombre de sujets, un certain nombre d'États ont décidé d'avancer ensemble,
09:28 d'approfondir ensemble une coopération plus poussée.
09:32 C'est bien sûr le cas de l'euro, c'est la création de la Banque Centrale Européenne,
09:36 et ensuite on voit au fur et à mesure, d'ailleurs, qu'un certain nombre de pays européens se joignent à ces politiques.
09:42 Donc en fait on crée, par ces coopérations différenciées, des dynamiques partenariales,
09:48 avec les gens qui veulent vraiment avancer, qui veulent aller au bout de certaines idées,
09:52 d'autres qui sont plus prudents, qui se disent "attention, c'est ma souveraineté, je ne veux pas lâcher ma monnaie comme ça".
09:58 Et puis voilà, on construit ensemble, et on construit, alors c'est aussi une des valeurs européennes très fortes,
10:03 on construit les choses avec beaucoup de pragmatisme.
10:06 On avance pas à pas, et on crante les choses, on crante les progrès,
10:12 et puis on voit ce qui marche, ce qui ne marche pas, parfois on peut même un petit peu reculer,
10:16 mais l'essentiel c'est qu'on progresse ensemble.
10:20 À côté de ça, il y a ce qu'on vient de créer, la communauté politique européenne.
10:29 Est-ce que ça ne fait pas concurrence avec l'Union Européenne ?
10:32 Il y a certains pays qui ne font pas partie de l'Union Européenne, mais ils font partie de la communauté politique européenne.
10:39 Il y a différents niveaux de partage, de responsabilité, il y a toujours eu un particulier sur les droits de l'homme,
10:48 le Conseil Européen des droits de l'homme ne se confond pas avec l'Union Européenne.
10:51 Ce qui est l'arc fondateur, c'est véritablement l'Union Européenne, c'est l'Union des 27.
10:57 C'est bien sûr notre moteur commun de l'intégration européenne, avec nos institutions européennes communes,
11:04 avec le Conseil Européen, avec le Parlement Européen dont je viens de parler, avec la Commission Européenne,
11:10 avec le Service Européen d'Action Extérieure, le Service Diplomatique dont je suis ici le représentant, le SEE.
11:16 Ce sont ces institutions-là, à 27, qui font fonctionner l'Europe.
11:20 Parlons maintenant de l'Union Européenne dans le monde. Vous êtes la plus grande institution planétaire en matière d'assistance humanitaire.
11:30 Actuellement, l'enveloppe se chiffre à presque 2 milliards d'euros.
11:37 Quelle est la place du Cameroun dans cet élan de générosité ?
11:40 Alors la place du Cameroun n'est pas négligeable, parce que nous intervenons et nous soutenons le Cameroun dans la gestion de ces différentes crises qu'il traverse.
11:49 Il y a une crise, bien sûr, dans le nord et l'extrême nord du Cameroun, qui est marquée par les activités terroristes du groupement Boko Haram.
11:59 Il y a bien sûr la crise dans les provinces du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, qui a aussi provoqué des mouvements importants de personnes internes déplacées.
12:08 Il y a la crise dans l'Est, qui n'est pas une crise non plus au Cameroun, mais qui est la conséquence de la crise en Centrafrique, de centaines de milliers de réfugiés.
12:17 Et donc nous sommes mobilisés.
12:21 En termes d'assistance humanitaire ?
12:23 En termes d'assistance humanitaire, c'est 10, 15, 20 millions d'euros.
12:27 Ça varie beaucoup suivant les années, suivant les crises.
12:30 C'est de la gestion qui vise à faire face aux besoins.
12:35 Nous soutenons des ONG, nous soutenons les organisations internationales, nous soutenons le Haut-Commissariat aux réfugiés.
12:41 Et j'ai été voir des actions extrêmement concrètes.
12:45 J'ai été rencontrer des personnes déplacées, qu'on aidait, auxquelles on apportait véritablement de l'aide.
12:51 Enfin, c'est pas virtuel toutes ces sommes.
12:54 On peut parler de dizaines de millions d'euros, mais ce n'est pas virtuel.
12:58 C'est réel, c'est de l'aide concrète.
13:00 J'ai vu des puits qu'on avait fait creuser.
13:02 Donc voilà, c'est du pragmatique, c'est du tangible, c'est du concret.
13:06 Et ça, j'en suis fier.
13:07 Est-ce que vous êtes satisfait de votre investissement dans le domaine de la paix ?
13:12 Je pose cette question parce que partout dans le monde aujourd'hui, on a l'impression que le monde va mal.
13:17 Il y a des guerres partout.
13:19 Il y a des guerres dans beaucoup d'endroits.
13:21 Il me semble que l'investissement dans le domaine de la paix aujourd'hui, c'est simplement le salaire pour les gens envoyés pour discuter, manger, dormir dans les hôtels.
13:30 Non, non, non. Je ne partage pas tout à fait votre avis.
13:34 Enfin, je ne partage pas votre avis.
13:36 Je pense que nous vivons d'abord dans un monde, vous avez raison de le dire, dans un monde de crise.
13:41 On a retrouvé un monde de crise.
13:43 Les crises, ces siècles passés, ont toujours été là.
13:46 Mais on voit bien qu'il y a une dimension de crise.
13:48 Il y a les crises, il y a les guerres, mais il y a aussi d'autres crises qui viennent se surajouter à ces guerres.
13:53 Il y a la crise climatique, les crises alimentaires, l'accès aux produits.
14:00 Il y a beaucoup de choses qui se jouent en ce moment.
14:03 Sur la paix, bien sûr, l'Europe porte partout un discours de paix.
14:08 Elle le porte à l'ONU, à l'Organisation des Nations Unies.
14:11 Elle est l'un des principaux contributeurs aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies.
14:17 Elle travaille aussi avec ses propres missions qu'elle déploie dans un certain nombre de pays,
14:23 d'accompagnement et souvent de formation des différentes troupes, que ce soit de police, de gendarmerie, des armées.
14:31 Nous déployons un certain nombre de moyens.
14:34 Alors bien sûr, vous pourrez dire, est-ce que ça évite les crises ?
14:38 Non, ça n'évite pas les crises. Parfois, on accompagne les efforts pour sortir de ces crises.
14:43 On se place toujours sous un angle positif, on fait le maximum.
14:46 Mais nous voyons bien, effectivement, comme vous venez de le dire, que nous sommes dans un monde de tensions.
14:51 Et donc, il y a des équilibres qui se font.
14:54 Et parfois, nous sommes même obligés de nous battre, de faire la guerre pour avoir la paix.
15:01 La préoccupation majeure en Europe, aujourd'hui, que je pense une priorité de priorité pour vous,
15:07 c'est la situation en Ukraine, que vous estimez constituer même une menace directe de l'existence des valeurs actuelles européennes,
15:18 si vous voulez, la civilisation européenne.
15:21 Alors, je ne qualifierais pas exactement les choses comme ça.
15:25 Pour moi, l'Ukraine, c'est un vrai souci de droit international, de question internationale.
15:30 Vous avez un pays qui est plus gros, qui a décidé d'envahir un pays plus petit, qui s'appelle l'Ukraine,
15:35 pour annexer un certain nombre de territoires du pays voisin.
15:38 C'est une violation majeure du droit international.
15:41 C'est le non-respect total des conventions de l'ONU, c'est le non-respect total des frontières,
15:47 c'est le non-respect de la souveraineté de l'Ukraine.
15:51 Donc, nous sommes dans la loi du plus fort, la loi de la guerre.
15:54 J'espère que vous avez suivi Monsieur l'ambassadeur de la Russie, il y a quelques semaines, dans cette même émission.
16:00 Vous avez suivi ce qu'il avait dit ?
16:01 Je n'ai pas suivi exactement ce qu'il a dit, mais je connais bien les arguments russes.
16:04 Ils sont erronés. On ne peut pas se permettre une telle chose dans le droit international, aujourd'hui.
16:11 Donc, l'Europe défend, dans le cas ukrainien, des principes, des principes importants de respect du droit international.
16:19 Et donc, elle soutient effectivement l'Ukraine dans la défense et l'intégrité territoriales, dans le respect total de sa souveraineté.
16:26 Et ce que fait la Russie a bien sûr été condamné unanimement au niveau international, est inacceptable.
16:32 Alors, voilà ce que je peux dire sur ce conflit.
16:36 Mais je ne voudrais pas, malgré que votre question me révèle l'idée qu'il ne faut pas non plus oublier d'autres conflits qui se développent dans le monde aujourd'hui.
16:43 Et qui pour moi sont aussi, il n'y a pas de conflit plus important les uns que les autres, mais il y a des choses dont il faut parler aussi.
16:51 Bien sûr, on parle beaucoup du conflit à Gaza, au Moyen-Orient, qui est aussi une crise majeure dans le système international,
16:58 dans lequel nous devons travailler pour apporter une solution, un armicice dans un premier temps,
17:03 une cessation, un cessez-le-feu et ensuite un travail sur un accord de paix.
17:06 Et ensuite, laissez-moi développer, je voudrais dire aussi qu'il faudrait qu'on parle plus des conflits qui ont lieu en Afrique.
17:13 La crise majeure qui a lieu dans l'Est du Congo, avec des centaines de milliers de réfugiés.
17:17 La crise majeure qui a lieu au Soudan, avec aussi des centaines de milliers de réfugiés.
17:21 Le Congo c'est depuis 1960.
17:23 Non, ce n'est pas 1960.
17:25 La guerre...
17:26 La guerre, on n'a jamais connu la paix permanente depuis son indépendance.
17:29 L'histoire ne va pas me trahir.
17:31 L'histoire vous trahit parce que la grande guerre du Congo commence en 1997-98.
17:38 Et voilà, donc pendant toute la période du maréchal Mbutu, il n'y a pas eu la guerre.
17:43 Entre 1960 et 1998.
17:46 Et ensuite, ce n'est pas parce qu'un conflit est ancien qu'il ne doit pas être traité.
17:52 Si on ne le traite pas et si on le voit renaître sous différents aspects, comme à Gaza,
17:57 parce que vous pouvez me dire aussi que le conflit entre Israël et la Palestine n'est pas récent et qu'il date de 1948.
18:04 Voilà, ce sont des conflits majeurs dont il faut aussi parler.
18:08 Le message que je voulais vous passer en particulier, c'est le message sur l'Afrique.
18:12 Nous ne parlons pas, de mon point de vue d'ambassadeur européen en Afrique,
18:16 nous ne parlons pas assez des conflits qui ont lieu en Afrique.
18:18 Nous allons parler de l'Afrique dans un instant, mais la dernière question sur la situation en Ukraine,
18:24 il me semble, lorsque j'écoute certains dirigeants européens parlent,
18:29 il me semble qu'il y aura l'entrée en scène des autres acteurs bientôt.
18:33 Par exemple, j'ai suivi le président français évoquer l'idée d'envoyer un contingent européen en Ukraine.
18:42 Si vous tentez cette option, la conséquence directe sera la troisième guerre mondiale.
18:50 Il me semble que vous êtes confortable avec cette option.
18:53 Je ne suis pas confortable avec cette option et d'ailleurs je ne la partage pas du tout.
18:58 Je ne vois pas du tout une mécanique qui puisse amener à une troisième guerre mondiale.
19:05 C'est un conflit grave, c'est un conflit où la Russie ne respecte pas du tout les valeurs et le droit international.
19:12 C'est un conflit dans lequel l'Union européenne s'est engagée derrière l'Ukraine.
19:17 Elle a décidé au mois de février dernier un paquet militaire de 50 milliards d'euros pour soutenir les efforts militaires ukrainiens pour résister à l'invasion russe.
19:26 Voilà, nous sommes engagés dans le soutien à l'Ukraine.
19:29 Mais en tant que, vous me permettrez de dire, en tant que vieux diplomate, je ne pense pas qu'il faille extrapoler l'histoire.
19:38 Vous savez, faites des choses qu'on n'attend pas. Et les choses qu'on attend n'arrivent pas.
19:43 Parlons donc maintenant de l'Afrique, l'une des parties de la planète où vous êtes présente.
19:52 Actuellement, pour la période 2021-2027, vous avez décidé d'injecter environ 150 milliards d'euros.
20:03 Beaucoup d'Africains estiment que c'est les chiffres entre les chefs d'État, les ministres des Affaires étrangères, les ministres des Finances, les ministres de l'Économie.
20:14 Quand vous arrivez dans la vie quotidienne, il n'y a absolument rien.
20:19 Pouvez-vous me dire, qu'est-ce que vous faites concrètement en Afrique pour le développement ?
20:26 Alors, c'est un programme qu'on appelle Global Gateway, qui n'est pas que pour l'Afrique, qui est aussi pour l'Amérique latine, pour l'Asie, pour le monde,
20:32 qui est l'idée de relier le monde et de favoriser les connexions physiques, humaines, digitales, enfin, beaucoup de choses.
20:41 Alors, effectivement, quand on fait des grands cumuls d'annonces comme ça, on ne voit pas ce que ça représente.
20:46 Moi, je voudrais vous dire en termes très simples ce que ça peut représenter ou ce que ça va représenter pour un pays comme le Cameroun, sur deux sujets.
20:53 Le sujet des corridors stratégiques.
20:55 L'Union européenne avec l'Union africaine a déterminé qu'il y avait dix corridors qui devaient être construits, stratégiques,
21:03 pour faciliter le commerce, faciliter les échanges, faciliter le développement économique.
21:10 Sur ces dix corridors, il y en a deux qui sont au Cameroun.
21:13 Un premier qui traverse le Cameroun.
21:15 Le premier vient de Libreville et va jusque à Jaména.
21:19 Et très concrètement, qu'est-ce que ça veut dire ce corridor économique ?
21:21 Ça veut dire des investissements économiques européens, dont un que je vous invite à visiter, qui est le pont sur le Logone,
21:26 que nous sommes en train de terminer et que les autorités camounaises souhaitent inaugurer d'ici la fin de l'année.
21:31 Un autre projet très concret, c'est la voie de contournement de Yaoundé, sur lequel nous sommes en train de travailler,
21:36 alors qu'il n'est pas encore en place, mais bien sûr, là, ce sont des études qui vont être mises en place et faites pour ça.
21:42 C'est bien sûr la route Ngaoundere-Garoua.
21:46 C'est, voilà, des projets très concrets.
21:49 Il y a une autre route, un autre corridor stratégique qui est Douala-Campala, donc la route S.O.S.
21:57 Là aussi, c'est un travail que nous faisons sur un certain nombre d'infrastructures pour mettre en place ces corridors.
22:05 Le second...
22:06 Analysé en démait 1945 ?
22:08 Non, non, non, non, non, non, non, non, non, non, non.
22:11 Il y a des projets qui sont en cours de finition.
22:14 Je vous citais le pont sur le Logone.
22:16 Il y a le pont sur le Ntem qui va relier la Guinée équatoriale au Camoun,
22:21 qui va être aussi mis en place dès l'an prochain, enfin qui va commencer à être construit dès l'an prochain.
22:26 C'est des projets qui sont mis en place 2-3 ans.
22:28 On n'est pas sur des dizaines d'années.
22:31 Deuxième grand axe, l'énergie.
22:34 L'énergie et l'énergie verte, la transition.
22:36 Au Camoun, il y a quelque chose de très matériel que je vous invite à aller visiter.
22:41 C'est le barrage de Nachtigal.
22:43 50% de financement européen, un barrage de 400 MW qui va approvisionner...
22:49 Alors qu'il n'approvisionne pas encore au jour d'aujourd'hui les villes de Yaoundé et Douala,
22:53 mais qui d'ici la fin de l'année va approvisionner ces villes-là.
22:56 Bien entendu. L'actualité de la coopération l'Union Européenne-Cameroun est également marquée
23:03 par l'accord de partenariat économique que vous avez signé il y a quelques années
23:10 pour les opposants au gouvernement du Cameroun.
23:15 Estime, dans une expression bien connue, Yaoundé a vendu le Cameroun à Bruxelles.
23:22 Que répondriez-vous ?
23:24 Que Bruxelles a vendu l'Europe au Cameroun, puisque si on regarde objectivement les chiffres de la balance commerciale...
23:30 Je répète que Yaoundé a vendu le Cameroun à Bruxelles.
23:35 Et moi je dis que Bruxelles a vendu l'Europe au Cameroun, et je vais vous dire pourquoi.
23:39 Parce que, en fait, les chiffres de la balance commerciale, si vous regardez objectivement les chiffres
23:43 de la balance commerciale entre l'Europe et le Cameroun, qui est en déficit ? C'est l'Europe.
23:51 Il y a plus de produits camerounais qui sont exportés vers l'Europe que de produits européens qui sont importés au Cameroun.
23:58 Vous savez qui est le premier importateur de produits ici ?
24:02 C'est pas l'Europe, c'est la Chine. J'ai rien contre la Chine, mais c'est pas l'accord de partenariat économique
24:07 qui fait que la Chine importe le plus de produits au Cameroun.
24:10 Qui est le premier partenaire commercial sur lequel le Cameroun exporte ses produits ?
24:15 C'est l'Union Européenne. Plus de 50% des exportations camerounaises partent vers l'Europe.
24:22 Alors c'est quand même un sacré accord pour être défavorable au Cameroun.
24:26 Et quand ça arrive à Marseille, quand ça arrive à Antwepp, en Belgique,
24:32 quand ça arrive dans les autres métropoles économiques européennes,
24:39 lorsque les marchandises sont déjà arrivées là-bas, vous dites que c'est pas conforme avec les standards européens.
24:44 Mais à la fin de la journée, vous ne les retournez pas aussi.
24:47 Non, on ne les retourne pas. Ce sont les chiffres de la balance commerciale.
24:50 Il n'y a aucune discussion. C'est la balance commerciale.
24:54 Là, c'est des chiffres froids que vous retrouvez dans des statistiques de produits importés et exportés.
25:01 Vous pensez vraiment que l'accord économique est gagnant-gagnant avant la dernière question ?
25:08 Ah oui, totalement gagnant-gagnant. Ce que je voulais vous rajouter aussi...
25:11 Mais c'est une expression vide et indiplomable.
25:14 Oui, c'est pour ça que derrière gagnant-gagnant, je voulais vous dire que ce qu'on faisait, c'est quand même un apport...
25:19 D'abord, sur deux sujets, un apport très concret.
25:21 D'abord, il faut que vous sachiez que l'accord de partenariat économique,
25:24 il y a 30% d'importations européennes qui ne sont pas concernées.
25:27 Toutes les importations européennes qui touchent les produits camonnés doivent payer des droits de douane et de taxes.
25:33 Donc on protège les produits camonnés.
25:35 Et puis ensuite, là aussi, il y a un effort à faire, on en discute beaucoup.
25:39 Il y a effectivement, vous l'avez cité, mais pas totalement la façon dont j'aurais cité,
25:44 il y a un effort de mise à niveau à faire pour les entreprises camonnès,
25:48 pour qu'elles répondent aux normes européennes et qu'elles puissent encore plus exporter de produits finis.
25:54 Et là, il y a un gros travail de partenariat.
25:56 Et là où on peut être gagnant-gagnant, et je voudrais revenir sur votre win-win,
26:00 c'est effectivement que moi, je voudrais qu'on importe plus de machines-outils,
26:04 de produits d'installation de production, donc plus de produits européens sur ces installations de production,
26:11 qui permettent aux producteurs camonnés de développer la transformation
26:16 et de leur permettre d'exporter des produits transformés.
26:18 Donc gagnant parce que plus de produits européens sur des outils de production
26:22 et gagnant pour le camon parce que plus de produits camonnés sur le marché européen.
26:26 Avant la dernière question, Excellence, cette question qui vient dans mon esprit pour l'instant,
26:31 cette année il y a naturellement les élections au Parlement européen,
26:36 et au Cameroun il y aura bientôt les élections l'année prochaine.
26:40 Si le calendrier constitutionnel électoralement établi et respecté,
26:49 il y a un élément sur ces élections qu'on appelle les inscriptions sur les listes électorales.
26:57 Je lis dans les réseaux sociaux, comme nous vivons dans un montillage de fake news,
27:01 que l'Union européenne entre en scène pour encourager les Camerounais à s'inscrire dans les listes électorales.
27:07 Si c'est vrai, il y a une débatte, considérer ça comme une ingérence dans les affaires intérieures du pays.
27:13 Est-il vrai ou bien c'est notre fake news ?
27:15 Nous n'entrons pas dans les affaires intérieures du Cameroun, bien évidemment.
27:18 Partout dans le monde, nous soutenons, comme en Europe, le fait que les électeurs s'inscrivent,
27:25 le fait que les électeurs aillent voter.
27:28 J'appelle d'ailleurs mes concitoyens européens à aller voter au mois de juin pour le Parlement européen.
27:34 Sur les inscriptions électorales, nous sommes en travail et en coopération,
27:37 notamment avec ELECAM et avec un certain nombre d'organisations de la société civile,
27:41 en partenariat avec le gouvernement Camerounais, évidemment,
27:44 pour encourager et favoriser les inscriptions sur les listes électorales.
27:49 Enfin, la Journée de l'Europe 2024 a donc eu lieu cette semaine.
27:57 Sur quels signes avez-vous célébré et quelles sont les projections lorsque vous regardez le monde aujourd'hui ?
28:04 Alors, le signe que j'ai voulu passer, c'est agir ensemble.
28:09 Agir ensemble, être ensemble, faire ensemble, construire ensemble.
28:13 Nous sommes dans un monde qui va mal, pour différentes raisons.
28:17 On en a parlé de certaines.
28:19 Un monde qui va mal, vous avez deux tentations, deux possibilités.
28:23 Une tentation qui est celle de l'isolement.
28:25 Je vais être plus fort tout seul, je vais m'en tirer, je ne vais pas coopérer avec les autres,
28:29 ça va être moi le plus fort, je vais taper sur les autres.
28:31 Et c'est le réflexe un peu nationaliste qu'on a en Europe, qu'on a aux États-Unis,
28:36 qu'on retrouve aussi dans certains pays africains.
28:38 Donc chacun pour soi.
28:40 Et puis vous avez l'autre option.
28:42 Le populisme.
28:43 Le populisme.
28:44 Et vous avez l'autre option qui est de dire, face à ces crises majeures,
28:47 la paix, le changement climatique, l'environnement, le monde qui change,
28:51 comment nous en sortons-nous ?
28:53 On se met ensemble.
28:54 On est sur le même bateau.
28:55 Et si on veut que le bateau ne coule pas, il faut qu'on navigue tous ensemble.
28:59 Et donc cette action ensemble, nous devons la faire,
29:02 dans le cadre pour moi d'un partenariat qui s'inscrit dans la longue durée,
29:05 qui est revu aussi par l'accord de Samoa,
29:08 donc c'est aussi un petit peu un signal que j'envoie.
29:10 On a signé un nouvel accord de coopération avec les pays ACP l'an dernier à Samoa.
29:14 C'est un partenariat fondé sur le respect.
29:16 Afrique, Caraïbes, Pacifique.
29:18 Afrique, Caraïbes, Pacifique.
29:19 Un accord de partenariat.
29:21 Nous ne parlons plus de dialogue politique, nous parlons de dialogue de partenariat.
29:25 Ça veut dire quelque chose.
29:27 Ça veut dire que derrière ce mot de partenariat,
29:29 il y a le respect.
29:31 Le respect mutuel.
29:32 Il y a l'écoute.
29:33 On est dans un dialogue, on doit écouter l'autre.
29:35 Il y a la réciprocité.
29:37 Quelque part, je crois que nos amis africains ont aussi le droit et le devoir de nous dire
29:41 quand ils sentent que leurs amis européens ne vont pas dans le bon sens,
29:45 ou ne travaillent pas dans le bon sens.
29:47 Donc nous devons être ensemble dans ce même bateau
29:50 pour que notre planète soit vivable pour nos enfants, nos petits-enfants,
29:55 et qu'on continue à construire un monde meilleur.
29:58 Donc c'est pour moi tout le fondement de mon action diplomatique,
30:01 tout le sens de ce que je veux donner,
30:03 et le sens, je crois, que l'Union européenne porte aujourd'hui dans le monde.
30:06 Et avec ça, nous conclons l'interview.
30:08 L'ambassadeur de l'Union européenne à Cameroun,
30:10 merci beaucoup d'avoir été mon guest.
30:12 J'espère que la prochaine fois, nous aurons notre conversation en anglais.
30:15 Comme vous le savez, Cameroun est constitutionnellement un pays bilingue,
30:18 mais aujourd'hui, nous avons décidé de le faire en français.
30:20 Merci beaucoup d'avoir été mon guest.
30:21 Merci beaucoup.
30:22 La prochaine fois, je le ferai en anglais.
30:24 Bien sûr.
30:25 Merci.
30:26 Merci beaucoup.
30:28 [Musique]