• il y a 8 mois
Pour endiguer la violence des jeunes, Gabriel Attal s'est dit prêt à "ouvrir le débat" autour de l'excuse de minorité. Cette mesure vise à appliquer des peines moins lourdes aux mineurs. Dans de rares cas, une atténuation est déjà possible. 

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Transcription
00:00 Gabrielle Attal va recevoir à partir d'aujourd'hui les représentants de tous les partis pour évoquer la violence, voire l'ultra-violence des jeunes et les moyens de Landiguet.
00:09 Ça va durer deux mois. La promesse avait été faite après la mort de Shem Sedin à Viry-Châtillon le 18 avril.
00:15 Forcément, le débat revient avec d'autant plus d'acuité ce matin après la mort de ce jeune de 15 ans à Châteauroux samedi, poignardé à mort par un autre jeune de 15 ans qui est en garde à vue.
00:26 Parmi les pistes évoquées par le Premier ministre, il y a l'atténuation de ce qu'on appelle l'excuse de minorité.
00:33 On va en parler dans un instant avec vous, mais d'abord on voudrait écouter ce que disait hier sur le plateau de BFM TV Éric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, à propos justement de cette excuse de minorité. Écoutez-le.
00:44 Ça a provoqué un débat et c'est bien normal parce que j'appartiens à une équipe gouvernementale, donc il est bien normal que nous échangions.
00:53 Pour le reste, je rappelle que le président de la République, et il a eu raison à souhaiter une concertation parce que ce sont des sujets qui doivent être ou qui peuvent être transpartisans.
01:05 Moi, ma boussole, elle est constitutionnelle et elle est d'une certaine façon principielle parce que j'estime qu'on ne peut pas traiter un adolescent comme un adulte.
01:15 Alors, on ne peut pas traiter un adolescent comme un adulte, sauf que certains disent peut-être qu'un peu quand même. C'est quoi l'excuse de minorité, Alexandra ?
01:22 Alors, c'est en réalité même l'atténuation de la responsabilité. Ça veut dire qu'entre 16 et 18 ans, on est jugé comme un adolescent, comme un mineur.
01:30 C'est-à-dire qu'entre 16 et 18, on risque la moitié de la peine encourue par un adulte. Donc, par exemple, un adulte en cours pour des faits 20 ans,
01:39 eh bien lui, l'adolescent entre 16 et 18, pourrait être condamné au maximum à 10 ans de prison. Mais, il y a un mais, et d'ailleurs pour la perpétuité,
01:47 c'est 30 ans de prison maximum pour l'adolescent entre 16 et 18 ans. Mais, il y a un mais, c'est ce qu'on appelle l'excuse de minorité, l'atténuation de la peine.
01:55 C'est de dire que cette excuse de minorité, cette atténuation de la peine, elle peut être écartée si les magistrats estiment au cours du procès,
02:05 avec tous les éléments qu'ils ont d'enquête, avec les déclarations de l'adolescent, avec son profil psychiatrique, etc., s'ils estiment qu'il...
02:14 cette excuse doit être écartée parce qu'il est suffisamment responsable pénalement, il avait suffisamment de discernement sur les faits qu'il a commis,
02:22 et ces faits sont suffisamment graves pour le justifier. Et dans ce cas-là, on le juge comme un adulte, c'est-à-dire qu'il encoure la même peine qu'un adulte.
02:30 Donc, ce que vous dites, c'est que l'atténuation de l'excuse de minorité existe déjà, mais que le débat porte au-delà. On se demande si il ne faudrait pas aller plus loin.
02:38 L'atténuation de la peine existe déjà, et on peut l'écarter, ça existe déjà. On peut juger un adolescent comme un adulte, mais c'est extrêmement rare.
02:48 Est-ce qu'il faudrait que ce soit moins rare, Aurélien Martini ?
02:51 Alors, c'est une question qui est dans le débat, elle n'est évidemment pas taboue. Simplement, le garde des Sceaux a rappelé une chose intéressante,
02:57 c'est qu'on a des engagements constitutionnels, conventionnels même, qui disent qu'on ne peut pas juger un enfant, un mineur,
03:05 parce qu'il faut parler de mineur, c'est les termes de la loi, un mineur comme un majeur.
03:10 Ça, c'est une première chose. Donc, on ne pourrait pas avoir le même régime calqué sur le régime de majeur.
03:14 Après, est-ce qu'on peut avoir des réformes ? Oui, la réforme, elle est toujours possible.
03:20 Mais simplement, une chose, quand on parle d'excuse de minorité, on n'excuse pas le comportement, et je crois que les termes sont assez mal choisis.
03:26 C'est plutôt une cause légale de l'éminution de la peine, c'est-à-dire que c'est la peine encourue qui est divisée par deux.
03:31 Les peines prononcées ne sont pas systématiquement divisées par deux, c'est bien ça qu'il faut comprendre.
03:35 Et entre 16 et 18 ans, effectivement, comme votre journaliste en plateau l'a dit, on peut y déroger.
03:41 Donc la question se pose, me semble-t-il, essentiellement pour les mineurs entre 13 et 16 ans,
03:44 puisqu'en deçà de 13 ans, on ne peut pas être puni d'une peine.
03:47 Entre 13 et 16 ans, cette cause légale de diminution de la peine, elle est automatique.
03:52 Et me semble-t-il, c'est là que le débat est né.
03:54 Il faut bien faire attention parce que la responsabilité pénale, elle est fondée sur le discernement.
03:59 Et en fond, elle progresse au fur et à mesure que le discernement lui-même progresse.
04:04 Est-ce qu'on peut parler de personnes parfaitement discernantes à 13 ans ? C'est une vraie question qui est posée.
04:09 – Mais ce que je comprends à travers vos propos, c'est qu'en fait, il faudrait que ces peines soient appliquées.
04:16 La perception qu'on a, c'est que ces peines, pour les 13-16 ans, ne sont pas systématiquement appliquées.
04:20 C'est ça que vous voulez dire ?
04:23 – Non, c'est pas exactement ça.
04:24 Alors, on pourrait parler de l'effet des jugements.
04:27 C'est-à-dire qu'une fois qu'on a jugé un mineur, que se passe-t-il ?
04:30 Ça, c'est une vraie question parce que bien souvent, quand on juge et quand on décide de quelque chose,
04:34 il y a une prise en charge qui ne se fait pas ou qui se fait trop tardivement.
04:38 Et ça, c'est l'effet de nos jugements.
04:40 Et au fond, parfois, on se demande même pourquoi on juge lorsque l'on prononce des mesures,
04:45 elles sont prises en compte un an ou 18 mois plus tard.
04:47 Vous imaginez ce que c'est un an ou 18 mois dans la tête d'un enfant, d'un mineur de 14 ans.
04:52 – Aurélien Martini, on a un cas d'école ce matin avec Châteauroux.
04:57 Le suspect qui est en garde à vue pour l'agression mortelle de ce jeune Mathis, 15 ans, à Châteauroux,
05:02 il se trouve que lundi dernier, il avait été mis en examen pour un vol avec violence commis une semaine plus tôt.
05:10 Il avait été placé sous contrôle judiciaire. Il a 15 ans.
05:14 – Oui, mais il n'est pas jugé encore.
05:16 – Oui, mais le contrôle judiciaire, par exemple, les parents de Mathis vont sans doute dire
05:23 comment est-ce que son contrôle judiciaire lui a permis d'être dans la rue samedi après-midi
05:28 et de poignarder un autre adolescent de 15 ans.
05:32 – Alors, pour être tout à fait clair, une mesure de contrôle judiciaire,
05:36 ce n'est pas une mesure de détention provisoire.
05:38 Donc vous êtes astreint à certaines obligations,
05:41 à charge pour les services de police et de gendarmerie de les faire respecter.
05:44 Mais effectivement, vous voyez, moi quand il m'est arrivé de requérir des contrôles judiciaires
05:49 dont on parle beaucoup, dits couvre-feu, avec obligation de ne pas quitter son domicile la nuit.
05:54 Eh bien, si le mineur ne respecte pas son contrôle judiciaire,
05:57 alors il encouvre une révocation et donc éventuellement une détention provisoire.
06:00 Mais encore faut-il le savoir.
06:02 Et encore faut-il avoir des policiers et des gendarmes en nombre suffisant pour contrôler ces mesures.
06:06 C'est pour ça que je vous dis que c'est une chose de prendre des mesures,
06:09 de rendre des décisions de justice.
06:11 C'en est une autre de s'assurer de leur effectivité.
06:13 Et c'est là, me semble-t-il, qu'on a une vraie difficulté,
06:16 à la fois en termes de personnel aux lieux gendarmerie,
06:19 mais aussi, surtout s'agissant de cette matière,
06:22 en termes d'éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse.
06:25 Il ne s'agit pas seulement de rendre des décisions, il s'agit aussi de les faire respecter.
06:29 Marie-Hélène Thoraval, maire d'Hiver-Droite de Romand,
06:32 donc confrontée régulièrement, comme beaucoup de communes, à la violence.
06:35 Votre quartier s'appelle le quartier de la Monnaie.
06:37 Je rappelle que Zacharie, âgée de 15 ans, a été tuée après s'être interposée dans une bagarre il y a une quinzaine de jours.
06:42 Ses agresseurs ont tous été mis en examen,
06:43 dont l'auteur du coup de couteau, âgée de 27 ans.
06:46 Quel est, selon vous, l'outil qui ment contre la délinquance des mineurs ?
06:51 Parce que des mineurs agissants, il y en a évidemment beaucoup aussi dans votre commune.
06:56 Bien sûr, je pense qu'aujourd'hui, il n'y a pas un territoire qui ne soit épargné.
07:02 C'était Romand il y a quelques jours, aujourd'hui, enfin hier, c'est Châteaurouf.
07:07 C'était Vierry-Châtillon aussi, il y a quelques semaines.
07:10 On assiste à une escalade de la violence des mineurs,
07:13 et qui traduit très largement ce qui pouvait être considéré il y a quelques temps comme des faits divers.
07:18 Aujourd'hui, à un constat de faits de société.
07:21 De votre point de vue, quel est l'outil judiciaire qu'il manque pour que les mineurs qui agissent,
07:27 qui se rendent coupables de faits délictueux ou criminels, ne se retrouvent pas ?
07:31 Parce que c'est aussi le sentiment qu'ont les habitants dans la rue, quelques semaines ou quelques mois plus tard.
07:36 Bien sûr, le sentiment des habitants aussi, c'est que depuis des années, on pratique une culture de l'excuse.
07:43 Face à cela, on a une culture de la violence qui est sans limite.
07:49 Je considère aujourd'hui que l'âge n'est plus un critère.
07:52 Donc pour moi, l'excuse de minorité, elle doit être revue.
07:57 Mais au-delà de cela, elle ne peut être revue sans y associer la responsabilité parentale.
08:05 Je dis qu'aujourd'hui, les parents de délinquants mineurs doivent être considérés à un niveau de responsabilité,
08:12 d'implication au regard des faits commis par les mineurs.
08:17 Ça, pour moi, c'est un point qui est essentiel.
08:22 Les choses bougent, puisque la maman du suspect à Châteauroux a aussi été placée en garde à vue.
08:29 La semaine dernière, on recevait le préfet du Val-d'Oise qui avait expulsé toute une famille d'un logement HLM
08:34 et les délinquants de deux de ses enfants.
08:37 À la précision sur cette histoire, on ne parlait pas d'enfants, ils avaient 19 et 23 ans.
08:42 Ce n'était pas des mineurs.
08:43 Ils étaient adultes.
08:44 Mais ce qui est important de comprendre, c'est que l'incarcération pour les mineurs est quelque chose de très exceptionnel,
08:53 qui est prononcé pour des faits extrêmement graves.
08:57 Aujourd'hui, il y en a quand même qui vont en prison.
09:00 Mais ils ne vont pas en prison pour un vol aggravé, ils ne vont pas en prison pour avoir arraché un collier dans la rue.
09:05 Ça, c'est clair.
09:07 On en a bien conscience, Alexandra, et c'est ce que l'opinion demande, qu'il faut qu'il y ait des réponses à ça.
09:13 Aujourd'hui, est-ce que les sanctions qui sont prononcées, mais qui sont peut-être aussi d'ordre éducatif, sont suffisantes ?
09:19 Est-ce qu'elles arrivent en temps et en heure ?
09:20 Parce qu'on sait que la justice des mineurs a accéléré le prononcer des peines.
09:24 Avant, c'était beaucoup plus long. Maintenant, dans les neuf mois, le mineur qui a commis un délit a une réponse pénale.
09:31 Mais même neuf mois. Est-ce que ça a du sens, neuf mois plus tard, d'être puni pour quelque chose qu'on a commis neuf mois auparavant ?

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