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Assurance chômage, emploi des séniors, réforme de la fonction publique, licenciement des fonctionnaires… Le gouvernement multiplie les chantiers. « Il y a beaucoup d’annonces et peu de concrétisations », commente, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, invitée des 4 Vérités ce lundi 15 avril 2024, sur France 2. « On a un gouvernement et un patronat qui sont complètement dogmatiques et qui, quelle que soit la question, répondent toujours de la même façon : en faisant payer toujours aux mêmes. Il y a un sentiment de ras-le-bol dans la population des salariés qui n’en peuvent plus », souligne-t-elle, estimant que la réforme des retraites a été « imposée en force » et que la réforme de l’assurance chômage est « totalement injuste ». Sur la fonction publique, les premières concertations autour du futur projet de loi ont débuté. Dans ce cadre, le ministre de la Transition et de la Fonction publiques Stanislas Guerini souhaite « lever le tabou du licenciement » des fonctionnaires. « La fonction publique n’est pas le privé. Il y a un statut des fonctionnaires qui garantit l’adossement de la fonction publique à l’intérêt général et protège des conflits d’intérêts », souligne Sophie Binet. En 2022, sur 5,6 millions d’agents, 13 ont été licenciés pour « insuffisance professionnelle », 222, pour faute. « C’est un dispositif en dernière instance. Aujourd’hui, le problème de la fonction publique n’est pas le licenciement, c’est l’attractivité. (…) Ce qui est inquiétant c’est que des fonctionnaires démissionnent pour aller dans le privé. C’est à ça que devrait s’attaquer le gouvernement », affirme la responsable syndicale. Selon elle, cette mesure est « presque une déclaration de guerre aux salariés et aux fonctionnaires », a-t-elle tweeté sur X. « La seule mesure que le gouvernement prétend annoncer aux fonctionnaires, c’est de leur dire qu’on va pouvoir les licencier. C’est comme jeter une allumette sur un baril de poudre », affirme Sophie Binet. 






En parallèle, le gouvernement souhaite aussi récompenser les agents les plus méritants et aller vers une individualisation de la rémunération au mérite. « On en connaît les résultats dans le privé. Plus on individualise la rémunération, plus on creuse les écarts entre les femmes et les hommes car ce sont des critères très arbitraires et indirectement discriminants » souligne-t-elle. 






Préavis de grève : les JO menacés ? 






Dans la foulée de l’annonce de Stanislas Guerini, la cheffe de file de la CGT a annoncé vouloir accélérer le dépôt d’un préavis de grève pour la période du 15 avril au 15 septembre, soit pendant la période des Jeux Olympiques de Paris. « Des jeux oui, mais il faut respecter le cahier des charges », affirme Sophie Binet. « Il n’y a pas de négociations, ni dans le public, ni dans le privé, sur les conditions sociales d’organisation des JO. (...) Il faut que le gouvernement comprenne que la réussite des JO dépend de centaines de milliers de travailleuses et travailleurs dans le pays ». Parmi les revendications syndicales ? Le versement des primes en contrepartie des contraintes particulières demandées aux salariés des JO, le logement et la prise en charge des enfants pour celles et ceux qui vont devoir travailler pendant l’été et le chômage partiel pour celles et ceux dont le secteur sera fermé pendant la quinzaine. 






Dans le cadre la réforme sur l’assurance chômage, les négociations entre les partenaires sociaux ont eu lieu la semaine du 8 avril pour faciliter le taux d’emploi des séniors, mais n’ont pas abouti. « Le patronat et le gouvernement se sont mis d’accord dans notre dos pour faire échouer les négociations », estime Sophie Binet.  

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Transcription
00:00 Bonjour Sophie Binet, bienvenue dans les 4 Ré.
00:03 Bonjour.
00:04 J'imagine que ce qu'a accéléré de parler, ça va effectivement vous faire réagir
00:06 les propos de Bruno Le Maire.
00:08 On va beaucoup parler évidemment de ce climat social.
00:10 Je fais la liste quand même pour commencer.
00:12 Assurance chômage, emploi des seniors, réforme de la fonction publique,
00:15 lever le tabou du licenciement des fonctionnaires et j'en passe.
00:18 On a l'impression vraiment que le gouvernement multiplie les chantiers en ce moment.
00:21 Est-ce que vous arrivez à suivre la CGT face à tous ces chantiers qui s'ouvrent simultanément ?
00:25 Oui, surtout il y a beaucoup d'annonces et assez peu de concrétisation
00:28 puisqu'on a bien remarqué que le gouvernement n'a plus de majorité à l'Assemblée nationale
00:32 et donc qu'il en est réduit à faire beaucoup de gesticulations dans la presse.
00:35 Moi ce que je retiens c'est qu'on a un gouvernement et un patronat
00:38 qui sont totalement dogmatiques et qui, quelle que soit la question,
00:41 répondent toujours de la même façon en faisant payer toujours au même.
00:46 Et donc il y a un sentiment de ras-le-bol dans la population des salariés
00:49 qui n'en peuvent plus qu'après la réforme des retraites qui nous a été imposée en force.
00:54 On nous serine toujours la même musique en nous disant qu'il faut faire des sacrifices
00:57 pour satisfaire les agences de notation.
00:59 Justement depuis la réforme des retraites, on a l'impression que le monde syndical
01:02 a du mal à mobiliser, à trouver un thème fédérateur
01:05 pour s'opposer justement aux mesures du gouvernement.
01:07 Non, ce n'est pas vrai.
01:08 Le thème fédérateur aujourd'hui ce sont les salaires
01:11 puisque les salaires ne suivent pas l'inflation.
01:13 Il y a des mobilisations salariales dans tout le pays
01:16 et puis l'ensemble des organisations syndicales ont dit leur opposition
01:20 aux différentes annonces du gouvernement,
01:21 que ce soit en matière de réforme de la fonction publique
01:24 ou en matière de réforme de l'assurance chômage qui est totalement injuste.
01:26 Alors justement, on va commencer par la fonction publique
01:28 avant d'en venir au chômage.
01:29 Ça concerne 5,6 millions d'agents à peu près en France.
01:32 Le ministre Stanislas Guérini annonce envisagé, je cite,
01:35 "la fin du tabou sur le licenciement des fonctionnaires".
01:38 En quoi en fait ce serait une si mauvaise chose que d'aligner
01:41 les règles de la fonction publique sur ce qui se passe pour tous les salariés ?
01:44 Eh bien parce que justement la fonction publique ce n'est pas le privé.
01:47 Il y a un statut des fonctionnaires qui est là, pourquoi ?
01:50 Pour garantir l'adossement de la fonction publique à l'intérêt général
01:54 et protéger des conflits d'intérêt.
01:56 Le licenciement dans la fonction publique c'est déjà possible en cas de faute grave.
02:00 13 licenciements en 2022 pour insuffisance professionnelle,
02:03 222 pour révocation pour faute.
02:05 Pas beaucoup sur 5,6 millions d'agents.
02:07 Oui tout à fait, mais c'est un dispositif en dernière instance
02:12 et c'est cette protection contre le licenciement qui permet que les fonctionnaires
02:17 soient adossés à leur mission d'intérêt général.
02:20 Aujourd'hui le problème de la fonction publique ce n'est pas les licenciements,
02:23 c'est l'attractivité.
02:24 On est dans une situation où on n'arrive pas à recruter des médecins,
02:28 des chercheurs, des enseignants et enseignantes
02:30 parce que les métiers de la fonction publique ne payent plus.
02:33 Les fonctionnaires ont perdu 5% de pouvoir d'achat en trois ans
02:37 parce que les missions sont toujours plus difficiles à remplir
02:40 et on a aujourd'hui ce qui est très inquiétant,
02:42 des fonctionnaires qui démissionnent pour partir dans le privé.
02:44 C'est à ça que devrait s'attaquer le gouvernement
02:46 et pas à faciliter les licenciements.
02:49 Mais Sophie Vidal vous avez tweeté que c'était presque une déclaration de guerre
02:52 de la part du gouvernement.
02:53 Déclaration de guerre vraiment ?
02:54 Oui tout à fait.
02:55 On a des fonctionnaires qui n'en peuvent plus.
02:58 Une fonction publique qui est en train de cratiquer
03:00 parce que nos hôpitaux ne peuvent plus remplir leurs missions.
03:03 On sait que maintenant il y a des morts
03:06 du fait de ce manque de moyens dans les services publics.
03:09 Et la seule mesure que le gouvernement prétend annoncer aux fonctionnaires
03:12 c'est leur dire qu'on va pouvoir les licencier.
03:14 Il faut arrêter de se moquer du monde.
03:15 C'est comme jeter une allimette sur un baril de poudre.
03:17 À côté de ça il y a d'autres mesures effectivement souhaitées par le gouvernement.
03:20 Je pense par exemple à l'élargir et récompenser financièrement
03:22 les agents les plus méritants avec une individualisation de la rémunération.
03:26 Au mérite pour les motiver peut-être davantage ?
03:29 Les fonctionnaires sont très motivés pour remplir leurs missions.
03:32 Le problème c'est qu'ils et elles n'ont pas les moyens de les remplir ces missions
03:35 et donc c'est là-dessus qu'il faut travailler.
03:37 Quant à la rémunération dite au mérite, on en connaît le résultat dans le privé.
03:41 Plus on individualise la rémunération,
03:43 plus on creuse les écarts entre les femmes et les hommes
03:46 parce que c'est des critères qui en général sont très arbitraires
03:49 et indirectement discriminants.
03:50 C'est la raison pour laquelle il y a moins d'écarts entre les femmes et les hommes
03:53 dans le public que dans le privé.
03:55 Bravo au gouvernement s'il veut augmenter encore l'écart de salaire
03:59 entre les femmes et les hommes parce que ce sera ça le résultat
04:01 de la rémunération au mérite.
04:02 Alors Sophie Bidon après les propos de Stanislas Guérini,
04:04 vous avez voulu accélérer le dépôt d'un préavis de greffe
04:06 pour la période du 15 avril au 15 septembre,
04:09 soit évidemment pendant la durée des Jeux Olympiques.
04:12 C'était de toute façon votre plan de départ,
04:14 mettre cette pression maximum sur les Jeux Olympiques jusqu'au dernier moment ?
04:18 Non pas du tout, la CGT s'est battue pour que la candidature de Paris
04:22 aux Jeux Olympiques soit retenue.
04:24 On était à Lima au moment de l'annonce du CIO.
04:27 Alors pourquoi cette menace jusqu'au bout,
04:29 ces préavis de grève à répétition sur les Jeux ?
04:31 Eh bien parce que des Jeux oui,
04:32 mais il faut respecter le cahier des charges des Jeux Olympiques
04:35 qui était d'être exemplaire socialement et d'un point de vue environnemental.
04:39 La CGT s'est battue pour gagner une charte sociale des Jeux Olympiques,
04:42 ça a permis de diviser par quatre le nombre d'accidents sur les chantiers des JO.
04:46 Le problème c'est que cette charte aujourd'hui n'est plus appliquée
04:49 parce qu'il n'y a pas de négociation, ni dans le public ni dans le privé,
04:52 sur les conditions sociales d'organisation des JO.
04:55 Ce sont des milliers de salariés à qui on demande de décaler leur congé d'été,
04:59 qui n'auront pas de congé cet été.
05:00 Ils en auront avant ou après ?
05:01 C'est ça, sauf que quand on a des enfants,
05:03 les congés d'été c'est le seul moment où on peut voir ces enfants
05:06 et passer du temps avec ces enfants, c'est quelque chose de très important.
05:09 Et donc à ces salariés, en général, on ne leur donne même pas de prime
05:14 et même pas de réponse sur la prise en charge pour leurs enfants,
05:16 ce n'est pas possible.
05:17 Vous pensez vraiment que ça peut améliorer la condition de travail des salariés
05:20 que de menacer l'événement mondial le plus important organisé en France ?
05:24 Ça fait quasiment deux mois que je demande au Premier ministre
05:28 d'organiser une table ronde pour mettre tout le monde autour de la table
05:32 et faire le point sur ce qui va et ce qui ne va pas sur l'organisation des JO.
05:34 Je n'ai même pas eu de réponse sur cette demande que j'ai faite par courrier.
05:37 Vous voulez qu'on s'y prenne comment pour que les droits des salariés
05:40 soient enfin entendus et que le gouvernement comprenne
05:42 que la réussite des JO dépend du travail de centaines de milliers de travailleuses
05:46 et de travailleurs dans le pays ?
05:47 Et concrètement, vous demandez quoi ?
05:48 Juste un exemple parce qu'en fait, on a du mal à s'y retrouver.
05:50 On a l'impression juste que vous servez des Jeux olympiques
05:52 pour mettre une pression et faire avancer d'autres sujets.
05:54 Eh bien, pas du tout. Nous avons des demandes très concrètes.
05:56 La première, c'est qu'il y ait des primes en contrepartie
05:59 des contraintes particulières qui seront demandées aux salariés des JO
06:02 et qu'il y ait des critères d'égalité pour ces primes.
06:05 Ce n'est pas normal que ce qui a été fait pour les policiers ou les douaniers
06:08 ne puisse pas l'être, par exemple, pour tous les fonctionnaires.
06:10 La deuxième chose, c'est que nous demandons des réponses sur le logement
06:14 et la prise en charge des enfants pour celles et ceux qui devront travailler pendant l'été
06:18 et qui devront, par exemple, venir de province pour travailler à Paris.
06:21 Et puis enfin, il y a aussi des questions qui se posent pour les salariés
06:24 des secteurs qui seront fermés pour cause de sécurité pour les JO.
06:29 Nous demandons à ce que le chômage partiel soit rémunéré à 100%
06:32 et à ce qu'il n'y ait pas de télétravail obligatoire
06:34 parce qu'il y a plein de gens qui ne peuvent pas travailler de chez eux,
06:36 surtout l'été.
06:37 Un mot Sophie Binette de l'assurance chômage et de l'emploi des seniors.
06:40 Les organisations syndicales et patronales n'ont pas réussi à trouver un compromis
06:43 pour faciliter l'emploi des seniors.
06:45 Le taux d'emploi des seniors, on le rappelle, en France,
06:47 est l'un des plus bas des pays européens.
06:48 Qu'est-ce que vous espérez à la CGT ?
06:50 Parce que la menace maintenant, c'est que l'État reprenne la main,
06:52 notamment sur l'Unedic.
06:54 Oui, le problème de cette négociation, c'est que le patronat et le gouvernement
06:57 se sont mis d'accord dans notre dos pour faire échouer la négociation.
07:00 Dès le début, vous pensiez qu'ils voulaient faire échouer ces négociations ?
07:03 On a eu des interrogations dès le début, puis ça s'est accéléré à la fin.
07:07 Le patronat y avait intérêt, puisqu'il veut s'en servir de prétexte
07:10 pour reprendre en main l'assurance chômage.
07:12 Enfin, le gouvernement, pardon.
07:13 Oui, parce que c'est le gouvernement qui veut reprendre la main.
07:15 C'est le gouvernement qui veut reprendre en main l'assurance chômage.
07:17 Et le patronat ne voulait pas faire de concessions aux organisations syndicales.
07:21 Le résultat, c'est grave.
07:22 C'est qu'on parle de la situation de 5 millions de seniors
07:26 qui sont victimes du triple peine,
07:28 puisqu'on leur dit qu'ils doivent travailler deux ans de plus,
07:31 qu'ils sont toujours les premiers à être licenciés par le patronat.
07:34 Et en plus, le gouvernement menace de leur retirer les allocations chômage spécifiques.
07:39 Donc, nous en appelons aux parlementaires.
07:41 La balle est désormais dans leur camp.
07:42 Nous allons travailler avec l'ensemble des parlementaires
07:45 pour qu'enfin, il y ait des mesures pour protéger le droit au travail des seniors.
07:49 Un mot sur la limitation du droit de grève
07:51 que le gouvernement souhaitait mettre en place sur certaines périodes.
07:54 Gabriel Attal en avait parlé.
07:55 Finalement, il y a eu un projet de loi déposé au Sénat
07:58 et le gouvernement et la majorité ont voté contre.
08:00 Vous vous dites que c'est une première victoire.
08:01 On a pour l'instant réussi à repousser cette mesure,
08:04 au moins après les Jeux olympiques.
08:05 On est très vigilants à ce projet de loi
08:07 parce qu'on est inquiet sur des positions politiques qui peuvent être très variables.
08:11 Je le rappelle ici très solemnement,
08:14 le droit de grève et les libertés syndicales,
08:16 c'est un indicateur de nos démocraties.
08:18 Quand on remet en cause le droit de grève,
08:20 on fait reculer les droits démocratiques de l'ensemble du pays.
08:24 C'est pour ça que ce projet de loi ne doit pas être voté et qu'il est dangereux.
08:27 Mais si c'est juste pour protéger, par exemple,
08:29 certains grands départs en vacances,
08:31 pour que les Français puissent partir et pouvoir faire grève à d'autres moments,
08:34 c'est peut-être un équilibre qu'il faudrait trouver ?
08:36 La grève, ça n'est jamais un choix ou un plaisir.
08:38 Je rappelle que quand on fait grève, on perd son salaire.
08:41 Et donc, une grève qui est suivie,
08:43 c'est toujours parce qu'il n'y a pas eu de négociation au préalable.
08:45 Donc, ce sur quoi le gouvernement devrait travailler,
08:48 c'est augmenter et favoriser les négociations collectives,
08:52 ce qu'il ne fait absolument pas sur les Jeux olympiques.
08:54 Il est encore temps de changer de braquet, mais il y a urgence.
08:57 Merci beaucoup, Sophie Buynet, secrétaire générale de la CGT,
08:59 d'avoir été l'invité des quatre V.
09:01 Bonne journée à vous.
09:02 Merci à tous les deux.
09:03 Merci également à Sophie Charmé qui a traduit.

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