• il y a 7 mois
Le ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini a lancé ce mardi 9 avril à Paris la concertation autour de son projet de réforme de la Fonction publique, se heurtant d'emblée à la colère des syndicats. Annoncée en septembre 2023, la réforme sera présentée au Conseil des ministres pour l'automne.

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Transcription
00:00 La politique Mathieu Croissando, Stanislas Guérini, le ministre de la fonction publique, veut lever ce matin un tabou.
00:08 Le tabou du licenciement des fonctionnaires.
00:11 Ça veut dire que c'est la fin de l'emploi à vie ?
00:14 On en est encore loin, mais c'est évidemment pas une petite phrase innocente.
00:18 Alors je rappelle qu'aujourd'hui, contrairement à une idée reçue,
00:20 la loi autorise le licenciement des fonctionnaires pour insuffisance professionnelle ou pour des motifs disciplinaires.
00:26 Ça, c'est dans les textes, mais dans les faits, c'est une autre affaire parce que la lourdeur juridique, le flou des définitions font qu'en fait, c'est rarissime.
00:33 Le Parisien qui révèle cette petite phrase, enfin qui publie cette petite phrase de Stanislas Guérini, a fait les calculs.
00:39 En 2022, 13 licenciements pour insuffisance professionnelle, un peu plus de 200 pour des motifs disciplinaires.
00:44 C'est une paille quand on voit le nombre de fonctionnaires dans la fonction publique d'État, 2,5 millions, voire 5,5 millions si on additionne toutes les fonctions publiques.
00:52 L'emploi à vie, après, c'est une autre chose.
00:54 C'est d'ailleurs une forme d'habit de langage parce que la particularité de la fonction publique, en fait, c'est qu'elle ne fait pas de lien entre l'agent et le poste.
01:01 En gros, si le poste est supprimé, l'agent voit maintenu sa rémunération et son grade.
01:08 C'est ça qui est garanti, en fait.
01:09 Mais les syndicats, qui ne sont pas naïfs, se disent que si on commence à mettre le doigt sur le licenciement, évidemment, c'est tout le bras qui va y passer.
01:17 Est-ce que sur le fond, ce serait une mauvaise idée ?
01:19 Alors, des pays ont fait ce choix.
01:20 Au Pays-Bas, les fonctionnaires sont recrutés par des contrats de droit privé.
01:23 En Allemagne, l'emploi à vie est réservé à des fonctions régaliennes, dans la sécurité notamment.
01:29 Tout ça peut donc faire l'objet d'un débat.
01:31 Mais il y a trois choses à avoir en tête.
01:32 C'est d'abord étonnant parce que ça ne figurait pas dans le programme d'Emmanuel Macron en 2022.
01:37 Emmanuel Macron, en 2022, à la présidentielle, promettait une augmentation générale et une refonte des grilles de rémunération, vous savez, des catégories A, B, C.
01:45 Ensuite, on est à un moment où la fonction publique, elle est quand même beaucoup moins attractive qu'avant.
01:51 Il y a des démissions en cascade, des postes vacants, on manque de profs, on manque d'infirmières.
01:55 Si vous enlevez cette forme de garantie de l'emploi, ça ne risque pas de s'arranger.
02:00 Et puis enfin, est-ce que c'est une bonne affaire d'un point de vue économique pour les finances publiques ?
02:03 Pas forcément, parce que si vous supprimez cet avantage, les gens vont peut-être faire le choix d'aller dans le privé où ils sont mieux payés.
02:10 Selon l'INSEE, en 2022, on gagnait en moyenne, je dis bien en moyenne, 2 300 euros net par mois dans la fonction publique contre 2 424 euros dans le secteur privé.
02:20 Et donc, ça peut donc entraîner, surtout si on arrivait au plein emploi, une forme de compétition entre le secteur privé et le secteur public.
02:26 Et le secteur public devrait augmenter les rémunérations et donc les dépenses publiques.
02:30 Mais pourquoi est-ce que Stanislas Guérini parle de ça maintenant ?
02:33 Alors, ça s'inscrit dans le cadre d'un projet de loi plus large sur l'efficacité de la fonction publique qui sera présenté à l'automne prochain
02:40 avec d'autres sujets tout aussi brûlants comme la rémunération au mérite, par exemple.
02:45 On voit bien, en fait, la volonté d'afficher une ambition réformatrice, montrer que ce n'est pas fini, que Emmanuel Macron continue à réformer.
02:53 On ne réforme plus grand-chose, avait dit il y a quelques semaines Édouard Philippe.
02:56 Voilà, l'idée, c'est d'afficher un démenti.
02:59 D'ailleurs, les mots "lever le tabou du licenciement" comme si on était super courageux, c'est comme ça, c'est un usage.
03:05 On voit bien cette volonté-là.
03:07 Il y a une volonté aussi, il faut le dire, d'envoyer un signal à Bruxelles, aux agences de notation pour dire "regardez comme on est costauds, on montre les muscles,
03:13 on va se payer les fonctionnaires, après cette paix, les retraités, après cette paix, les chômeurs, on va faire ce qu'il faut".
03:18 Et c'est tout à fait probable.
03:19 Et puis enfin, il y a peut-être aussi une forme de piège tendue à la droite parce qu'on sait que plusieurs voix de droite réclamaient depuis plusieurs années
03:25 qu'on s'attaque à ce sujet, on verra bien quand le projet de loi sera présenté ce qu'elle en dira.

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