Le manga Enzo (Blacklephant éditions) s’inspire de l’histoire d’Enzo Lefort, champion olympique et champion du monde d’escrime, qui incarne avec charisme les valeurs de ce sport.
L’occasion de retracer son parcours et sa mise en récit et en images, en compagnie de la mangaka Madana, avec exercice de dessin en direct.
Séance animée par Xavier Guilbert, spécialiste de la bande dessinée.
Enregistré le 20 mars 2024, dans la cadre de la thématique Fair Play au Forum des images.
Infos : https://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/rencontre-avec-enzo-lefort-et-madana-avec-dessin-en-direct
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Rencontres exceptionnelles, cours de cinéma et conférences, festivals… un concentré du meilleur de ce qui se passe toute l’année au Forum des images.
Toute la programmation : http://www.forumdesimages.fr/
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SportTranscription
00:00:00 - Bonsoir.
00:00:07 - Alors, on va rentrer dans le vif du sujet.
00:00:10 Enzo Lefort est ici présent avec Madame Aki, la dessinatrice.
00:00:15 Pour commencer, on a évoqué rapidement le palmarès.
00:00:20 J'ai essayé de faire la liste du palmarès d'Enzo.
00:00:25 Je suis allé sur Wikipédia, j'ai pris la liste, j'ai mis ça en
00:00:28 forme. Comme vous voyez, c'est riche et assez,
00:00:34 pas dire chargé, mais c'est un très, très beau palmarès,
00:00:38 dont la médaille d'or aure fleurait par équipe aux Jeux Olympiques de Tokyo.
00:00:43 Qu'est-ce qu'on peut dire là-dessus ?
00:00:46 Et la première question que je voulais poser, puisque on est
00:00:52 réunis pour parler de ce manga, c'était de savoir justement
00:00:58 d'où vient l'idée de faire un manga ?
00:00:59 Quelle est la jeunesse du projet ?
00:01:02 - La jeunesse du projet, elle est toute simple, dans le sens où,
00:01:07 au sortir des Jeux Olympiques de Tokyo, en août 2021,
00:01:12 je suis rentré en Guadeloupe dans ma maison familiale avec ma famille
00:01:16 pour passer des vacances.
00:01:17 Et Philippe Bonhomme, qui est responsable de la maison d'édition
00:01:21 Black Elephant, me contacte, je crois, sur Instagram,
00:01:24 il me semble, et me demande, me propose un projet de BD.
00:01:29 Donc, on s'appelle, on échange, on part sur le fait de faire
00:01:34 une BD ensemble parce que Philippe me dit qu'il aime bien les valeurs
00:01:40 que je véhicule à travers tout ce que je fais dans le sport
00:01:45 et au-delà du sport.
00:01:46 Et il me dit qu'il aimerait bien qu'on essaie de transmettre
00:01:50 ces valeurs à travers une BD.
00:01:52 Donc, moi, j'y donne mon accord, à seule condition que ce ne soit
00:01:55 pas une œuvre auto-centrée sur moi, une quelque sorte ode à ma personne,
00:01:59 mais que ce soit vraiment quelque chose qui s'intéresse aux valeurs
00:02:02 que le sport transmet, parce que je pense que le sport a
00:02:06 énormément de valeurs éducatives qui sont utiles à des enfants.
00:02:12 Et donc, quelques mois plus tard, je prends le train, je vais en Bretagne
00:02:16 le rencontrer et quand je monte à la voiture, Philippe me dit,
00:02:19 "J'ai une idée, est-ce que ça te dit de faire un manga ?"
00:02:22 Et j'ai tout de suite acquiescé parce que je ne vais pas dire que je suis
00:02:26 fan de manga, mais j'aime beaucoup ce médium.
00:02:29 Et j'en ai eu quelques-uns, j'ai tous les Dragon Ball Z, les Naruto,
00:02:34 les Death Note, j'en ai eu quelques autres, mais j'aime beaucoup ça.
00:02:39 Et à partir de ce moment-là, on a commencé à parler un peu
00:02:42 de la production, de comment j'allais m'organiser pour l'écrire,
00:02:46 parce que je ne suis pas du tout auteur.
00:02:48 Donc, c'est quelque chose que j'ai appris sur le taf.
00:02:50 Il m'a parlé de comment rédiger un scénario.
00:02:53 Donc, je me souviens très bien.
00:02:55 J'ai directement commencé à écrire dans le train retour,
00:02:58 parce que j'étais totalement excité à cette idée.
00:03:01 Et j'ai d'abord écrit sous forme narrative, sous forme de récit conté.
00:03:07 Et ensuite, j'ai mis en forme les dialogues, l'édite d'Ascali.
00:03:12 Je me suis vraiment servi de mes souvenirs de collège et lycée
00:03:15 par rapport à la forme théâtrale.
00:03:18 Et pour écrire ça, je me suis astreint à une certaine discipline.
00:03:22 Donc, tous les matins, entre 6h30 et 7h30,
00:03:26 j'écrivais une heure avant le réveil de ma fille,
00:03:30 qui à l'époque avait un an et quelques.
00:03:33 Et voilà.
00:03:35 Et ensuite, par la suite, j'ai rencontré Madonna, la dessinatrice.
00:03:39 Et Philippe m'a aussi introduit à Tony Lourenço, le co-scénariste.
00:03:45 Il m'a aidé à mettre en forme, parce que comme j'ai dit,
00:03:49 je ne suis pas auteur.
00:03:50 Donc, il m'a aidé à combler et à enrichir l'arc narratif
00:03:56 pour faire en sorte qu'il soit le plus cohérent possible.
00:03:58 Et il a servi également de passerelle entre Madonna et moi.
00:04:01 C'est-à-dire qu'il a fait tout ce travail de documentation
00:04:03 pour faciliter le travail de Madonna,
00:04:05 qui au début n'est pas du tout familière du monde de l'escrime,
00:04:08 mais qui a très vite appris.
00:04:10 - Madonna, justement, de votre côté, comment ça s'est passé ?
00:04:14 - Ça s'est bien passé.
00:04:15 Ça s'est bien passé.
00:04:16 Moi, j'aime bien les challenges.
00:04:18 J'ai trouvé immédiatement que le fleuret, notamment l'escrime,
00:04:22 mais notamment le fleuret, c'est très graphique.
00:04:25 C'est vraiment...
00:04:27 Quand on fait pause sur une image, il y a vraiment un côté presque
00:04:30 danse, en fait.
00:04:31 Danse violente, mais danse quand même.
00:04:33 - Là, vous en parlez, c'est une évidence, mais on en discutait
00:04:39 un peu avant.
00:04:40 Quand on vous parle, dit, on va faire un manga sur l'escrime,
00:04:44 vous ne connaissez rien à l'escrime.
00:04:45 - Non, mais on m'a dit...
00:04:46 - Donc, oui, c'est un challenge.
00:04:47 Cool, on y va.
00:04:48 - Cap, tout simplement.
00:04:50 Vraiment, ça a été ça.
00:04:51 Il n'y a pas eu de réflexion.
00:04:55 La réponse a été quasi immédiate.
00:04:57 - Donc, ça a été une découverte aussi de votre côté.
00:05:00 Donc, parce que là, vous parlez, bon, le fleuret, le sabre, etc.
00:05:03 Déjà, il y a cette idée qu'il y a dans l'escrime, il y a le fleuret,
00:05:08 l'épée et le sabre qui ne sont pas du tout la même chose,
00:05:10 qui ne fonctionnent pas avec les mêmes règles, si je comprends bien
00:05:13 aussi.
00:05:14 Donc, comment vous avez plongé dedans ?
00:05:19 Ça a été se renseigner ?
00:05:22 - Alors, évidemment, il y a eu...
00:05:23 Après le cap, il y a eu tout le moment où j'ai dû faire un gros,
00:05:31 gros travail de recherche et de compréhension du devoir,
00:05:33 parce que je veux bien commencer un manga, mais on ne peut pas commencer
00:05:36 sans aucune base.
00:05:38 Donc, oui, là, il y a eu toute cette recherche, en fait.
00:05:42 Donc, tous ces conseils, toute cette recherche.
00:05:44 - On parle de manga, vous êtes dessinatrice, illustratrice.
00:05:48 Votre style n'est pas un style manga à la base.
00:05:52 Vous avez une palette assez versatile.
00:05:54 - Alors, en manga, moi, je faisais surtout des guides pour apprendre
00:05:58 à dessiner le manga et des illustrations.
00:06:00 Pas du manga pur et dur, mais je suis une grosse lectrice, par contre.
00:06:04 - Alors, mon rôle, ça va être d'introduire quelques éléments
00:06:12 théoriques, notamment sur le manga et le sport.
00:06:13 Donc, juste en préparant, j'ai ressorti ces doubles pages qui sont...
00:06:20 C'est un magazine que j'ai chez moi qui retrace l'histoire du manga de sport.
00:06:26 Alors, comme je suis sympa, je vous les traduis pour que vous ayez
00:06:29 l'idée.
00:06:30 Donc, ce qu'on voit, c'est que très tôt, dès les années 60,
00:06:33 on a des mangas de sport qui apparaissent, avec le baseball qui est
00:06:36 probablement le premier, parce qu'il faut savoir, ça peut être
00:06:39 déprenant, mais en fait, le baseball est introduit dans les années 1870
00:06:43 au Japon par des jésuites et aujourd'hui, probablement le sport
00:06:46 national.
00:06:47 Si vous êtes au Japon, à Tokyo, vous allumez la télé et sur une chaîne,
00:06:50 il y a forcément les Giants, qui est l'équipe de Tokyo, qui est en train
00:06:53 de jouer un match contre un autre.
00:06:54 C'est tous les soirs, quasiment tous les jours, pendant six à huit
00:06:57 mois de l'année, le baseball.
00:06:58 Et puis, durant l'été, c'est le Koshien, qui est le tournoi
00:07:01 universitaire, qui est à nouveau sur la télé.
00:07:03 Donc, ça fait vraiment partie de la culture.
00:07:09 Ensuite, on voit comment il y a les sports de combat, puis le volleyball,
00:07:11 le football et d'autres qui vont prendre plus ou moins d'importance.
00:07:14 Il y a quelques oeuvres que j'ai placées, mais ce qui est intéressant
00:07:19 là-dessus, c'est de voir qu'en fait, on a une sorte d'aller-retour
00:07:28 entre le manga et la réalité.
00:07:30 C'est-à-dire que l'un des premiers mangas qui va être influencé par
00:07:34 la réalité, c'est "Attack No.
00:07:36 1", qui est un manga de volleyball, qui paraît juste après, c'est en
00:07:40 1966, je crois, c'est juste après les Jeux olympiques de Tokyo de 64,
00:07:44 où l'équipe féminine japonaise de volleyball va gagner la médaille d'or.
00:07:49 Et donc, là, forcément, on a un impact, c'est-à-dire la réalité
00:07:53 qui déclenche un intérêt au niveau du manga.
00:07:55 Et puis, on a des choses dans lesquelles c'est plutôt le manga qui
00:07:58 va toucher la réalité.
00:08:01 Je pense à la judokata Ryokotani, qui est double médaillée olympique,
00:08:07 septuple championne du monde, qui est considérée probablement comme
00:08:13 l'une des plus grandes judokatas de toute l'histoire.
00:08:15 Elle fait 1m46, elle est en moins de 48 kilos et qui va être surnommée
00:08:19 "Yawara-chan" parce que "Yawara", c'est un manga qui parle de judo,
00:08:24 de Naoki Urasawa.
00:08:26 Et puis ensuite, dans les choses qui sont un petit peu plus marrantes,
00:08:29 mais qui ne voudraient pas vous intéresser puisque je sais que vous
00:08:31 êtes fan de basket et de NBA, c'est Slam Dunk, qui est un manga
00:08:37 sur le basket, qui s'inspire beaucoup de la grande époque.
00:08:42 Enfin, de la grande époque, d'une certaine époque où il y a
00:08:45 Jordan, Pate et Wing et toute cette époque-là, donc le milieu
00:08:52 des années 90 du basket, début des années 90, et qui part un truc
00:08:59 un peu bizarre, est le manga de sport le plus vendu au Japon, alors que
00:09:02 le Japon n'a jamais été une terre de basket et qui a déclenché
00:09:05 des vocations aussi.
00:09:06 Donc, on voit bien comment il y a un passage entre cette fiction
00:09:13 et cette réalité.
00:09:14 Alors, j'ai regardé, j'ai cherché un petit peu en préparant,
00:09:16 en essayant de voir s'il y avait des mangas qui parlaient des screams.
00:09:19 Alors, il y en a quelques-uns.
00:09:20 Voici ce que j'ai trouvé, c'est relativement récent.
00:09:24 Il y en a un seul qui est traduit en français, qui est celui du milieu.
00:09:29 Alors, ce qui est amusant, c'est que c'est celui qui, en plus,
00:09:31 a un titre qui a une situation en français, puisque le français est
00:09:35 la langue internationale de la scream.
00:09:37 Toutes les commandes, les ordres sont donnés en français.
00:09:41 Et le titre, en fait, c'est "Minasama, êtes-vous prêts ?"
00:09:44 C'est "Vous tous, êtes-vous prêts ?" qui a été traduit logiquement
00:09:48 par "En garde".
00:09:49 Voilà.
00:09:50 Mais ce qui est assez marquant aussi, et là, je vais poser la question
00:09:53 à Enzo, c'est qu'on a aussi beaucoup de choses qui sont liées avec
00:09:58 un vocabulaire chevaleresque.
00:09:59 On a ici "Sakura no chivalry", on a "Romance no kishi kishi",
00:10:03 c'est le chevalier, le paladin de blé en argent.
00:10:09 Et en fait, sur votre Instagram, à un moment, il y a une photo avec
00:10:14 un gros plan de la poignée de l'épée de votre fleuret et vous
00:10:21 mettez à côté le chevalier de Saint-Georges.
00:10:23 Est-ce que c'est quelque chose qui fait partie de l'imaginaire
00:10:27 des escrimeurs ou est-ce que c'est plus le regard de l'extérieur
00:10:32 qui vient là ?
00:10:33 Est-ce qu'on se sent un petit peu, à certains moments, on a des envies
00:10:36 de chevalerie ?
00:10:37 Je vais parler à titre personnel, mais je pense que quand on fait
00:10:42 de l'escrime sportive, on se détache un peu de l'histoire et de tout
00:10:47 ce qui a trait à l'histoire de l'escrime.
00:10:50 Déjà, dans un premier temps, parce qu'avant, l'escrime,
00:10:56 c'était un duel à se gagner au premier sang versé, chose qui n'est
00:10:59 plus le cas aujourd'hui, fort heureusement.
00:11:01 Mais non, par contre, on ne peut pas occulter le fait que
00:11:06 l'escrime est un sport français qui tire bien sûr son origine des
00:11:11 chevaliers, des temps médiévaux et plus récemment, surtout des
00:11:14 mousquetaires.
00:11:15 Donc, bien sûr, il y a toute cette mythologie chevaleresque des
00:11:21 mousquetaires dont on ne peut pas se défaire.
00:11:23 Mais en tout cas, quand on fait de l'escrime sportive, en tout cas,
00:11:29 je pense à haut niveau, parce qu'après, il y a l'escrime artistique
00:11:32 aussi, où là, par contre, cet univers un peu chevaleresque prend
00:11:34 un peu plus le dessus.
00:11:36 Quand on fait de l'escrime sportive, je pense qu'on ne peut pas
00:11:39 essayer de reproduire ce qui se passait dans les siècles précédents.
00:11:44 Quand on parlait d'escrime artistique, c'est quoi ?
00:11:46 L'escrime artistique, c'est un peu tout ce qu'on va voir dans
00:11:49 les reconstitutions, un peu comme, par exemple, le Puy du Fou.
00:11:51 C'est vraiment avec de vraies épées où ce sont des chorégraphies
00:11:56 sérieusement étudiées.
00:11:57 Alors, c'est assez fascinant parce qu'on dirait vraiment un assaut,
00:12:00 mais un assaut chorégraphié, parce que le but n'est pas de se
00:12:03 blesser, bien évidemment.
00:12:04 Et là, le but n'est pas forcément de toucher son adversaire,
00:12:07 c'est vraiment de produire des assauts comme il y a quelques siècles.
00:12:14 - On reviendra aussi sur la manière dont vous découvrez l'escrime
00:12:18 un petit peu plus tard, mais étant en France, ce n'est pas
00:12:20 un truc qui vous a justement de faire la différence entre l'image
00:12:24 des chevaliers que vous aviez et la réalité de ce qu'a été.
00:12:27 Il n'y a pas eu de déception ?
00:12:28 Ou est-ce que finalement, il n'y avait pas de lien du tout
00:12:31 entre des chevaliers qui se tabaient dessus et la pratique ?
00:12:34 - Il n'y a pas de lien du tout.
00:12:35 Quand on voit la télé, les chevaliers, ils courent,
00:12:37 ils se battent.
00:12:38 Quand on est dans une salle d'escrime, on se met en position de garde.
00:12:41 C'est vraiment totalement différent.
00:12:43 C'est un peu le jour et la nuit.
00:12:44 Après, oui, moi, je m'aime bien regarder les films de chevaliers,
00:12:48 Zorro, tout ça, mais je le dissociais vraiment.
00:12:52 - Alors, Enzo commence, le manga, j'ai été obligé de préciser,
00:13:00 le manga Enzo, commence à parler des Jeux olympiques de Tokyo.
00:13:06 Vous dites, c'est juste après les Jeux olympiques qu'on vous a contacté.
00:13:12 C'était pour ça que vous l'avez choisi, parce que vous avez fait
00:13:14 des Olympiades auparavant.
00:13:15 C'était juste parce que c'était encore frais ou parce que c'était là
00:13:19 où il y avait des choses plus intéressantes puisque vous aviez
00:13:21 été médaillé ?
00:13:22 - Oui, c'est ça.
00:13:24 Je pense que c'était comme une évidence de commencer un peu par ce
00:13:29 point culminant de ma carrière, avec une espèce de double narration,
00:13:33 avec des retours dans le passé, des flashbacks sur comment j'ai
00:13:38 commencé l'escrime.
00:13:39 Cette espèce de double narration qui avance en parallèle avec le temps
00:13:43 présent et la compétition à Tokyo et mes débuts en escrime.
00:13:49 Et je trouvais ça intéressant dans le sens où, en fait,
00:13:53 peu importe le degré, le niveau de compétition dans lequel
00:13:56 on se trouve, il ne faut pas oublier qu'on fait toujours un sport,
00:13:58 qu'il y a une autre passion et qu'on pratique toujours avec notre âme
00:14:00 d'enfant.
00:14:01 Je trouvais ça intéressant comme parallèle.
00:14:02 - Alors, vous parlez d'âme d'enfant, il y a aussi une chose qu'on
00:14:06 perçoit, c'est que vous descendez du bus, vous commencez à prendre
00:14:10 des photos.
00:14:11 En fait, vous avez aussi une pratique de la photographie.
00:14:14 Je me suis permis d'aller en emprunter quelques-unes sur votre site
00:14:18 qui sont justement liées à Tokyo.
00:14:19 Il y a plein d'autres endroits puisque vous voyagez, vous prenez
00:14:22 plein de photos.
00:14:23 Moi, j'ai vécu à Tokyo, c'est une ville que j'aime beaucoup.
00:14:26 Et donc, c'était aussi chaud.
00:14:28 Donc ça, c'est le besoin de sortir de l'escrime.
00:14:33 Ça fait partie d'un...
00:14:36 Enfin, ce sont deux choses véritablement différentes.
00:14:39 - Oui, oui.
00:14:42 Alors, je commençais à faire de la photographie en 2018, quand j'ai
00:14:46 fini mes études de kiné, parce que tout simplement, avant,
00:14:48 je n'avais pas le temps de faire autre chose.
00:14:50 C'est vrai que la photographie est quelque chose d'un peu thérapeutique
00:14:55 dans le sens où quand on pratique le sport de haut niveau, on a quand
00:14:58 même énormément de pression.
00:15:00 Et le fait de faire autre chose à côté, ça m'aide à relativiser,
00:15:04 c'est-à-dire que quand ça m'arrive d'échouer à des compétitions
00:15:08 d'escrime, je peux me changer les idées en faisant de la photographie.
00:15:12 Et de fil en aiguille, cette façon a commencé à prendre
00:15:16 de plus en plus de place jusqu'à devenir quelque chose de
00:15:19 professionnel aujourd'hui, parce que je pense que par des formations
00:15:23 dans mon sport, j'ai beaucoup d'ambition.
00:15:26 Je ne vois pas pourquoi je n'en aurais pas dans d'autres
00:15:29 comportements de ma vie.
00:15:31 Et donc, j'ai pris des photos à Tokyo pendant les Jeux,
00:15:36 mais aussi hors des Jeux olympiques, parce que j'ai la chance d'avoir
00:15:39 une fois par saison une compétition à Tokyo, généralement au mois
00:15:42 de décembre.
00:15:43 Et donc, je prends pas mal de photos de Tokyo parce que cette ville
00:15:48 m'inspire énormément de par sa culture, de par ses contradictions,
00:15:52 de par les contrastes qu'elle a en son sein.
00:15:55 Et pendant les Jeux olympiques, qui étaient en pleine période
00:15:59 de pandémie, sans public, nous, on était un peu coupé du monde.
00:16:02 Ça m'a un peu permis de relativiser, de me changer les esprits avant
00:16:09 que la compétition ne débute.
00:16:10 C'est quelque chose que j'ai lu, alors je n'arrive pas à retrouver
00:16:14 dans mes notes, mais ce n'est pas grave, vous le dites à un moment
00:16:16 que, en gros, vous arrivez à couper fortement quand vous êtes
00:16:21 dans l'escrime, il y a des screams, et puis ensuite, vous coupez
00:16:24 fortement et vous arrivez à laisser les screams, finalement,
00:16:27 dans la salle d'escrime.
00:16:28 Donc, c'est aussi ça.
00:16:30 C'est un autre Enzo qui devient le photographe qui prend le pas.
00:16:36 Oui, c'est ça.
00:16:37 C'est que la scream, c'est un sport qui est, je ne veux pas dire
00:16:41 compliqué, mais la dimension mentale est très importante.
00:16:45 Parfois, tout marche comme on a envie et tout marche sur des roulettes.
00:16:49 On voit tout, on s'entoure.
00:16:50 On est dans des cercles vertueux, des cercles de confiance et parfois,
00:16:53 on ne sait pas pourquoi on n'y arrive pas.
00:16:54 Et du coup, ça peut prendre une place assez importante dans la vie.
00:16:59 On entend de plus en plus parler de la dépression du sportif de haut
00:17:03 niveau.
00:17:04 Et moi, je pense qu'avoir des passions autres que les screams,
00:17:07 ne pas faire en sorte que les screams soient omniprésentes dans ma vie,
00:17:11 ça m'aide à relativiser, à prendre un peu de recul et avoir
00:17:16 un rapport plus sain à ma discipline.
00:17:18 Oui, d'ailleurs, j'ai trouvé qu'il y avait un long texte que vous
00:17:21 faisiez, vous parliez, vous dites que vous êtes épicurien.
00:17:24 Il y a notamment ce passage, je vais me permettre de le lire,
00:17:26 c'est en avril 2016.
00:17:28 Je rencontre ma copine, c'est le top, on sort beaucoup,
00:17:29 on fait plein de trucs et dans le même temps, je me défense à
00:17:31 l'entraînement.
00:17:32 C'est là que je comprends que le plus important, c'est d'être bien
00:17:34 dans ses baskets, bien dans sa vie, que la balance soit équilibrée,
00:17:37 que je sois moi-même.
00:17:38 Mais je suis qui, au fait ?
00:17:40 Et ensuite, il y a tout un...
00:17:41 Vous développez tout un tas de facettes de ce que vous êtes.
00:17:46 Je ne me souviens plus du tout où est-ce que j'ai dit ça, mais oui,
00:17:48 c'est vrai.
00:17:49 Non, en fait, c'est un long texte de blog, je crois, dans lequel
00:17:52 vous parlez notamment et vous terminez notamment sur l'anecdote
00:17:55 avec Laura Flessel aux Jeux Olympiques de 2016.
00:17:57 Oui, bien sûr.
00:17:59 En fait, généralement, on entend beaucoup parler des
00:18:07 success stories des sportifs qui sont destinés à devenir des
00:18:13 champions, qui sont élevés depuis, qui sont tout jeunes pour être
00:18:15 des champions.
00:18:16 Je pense aux Sir Williams, à Tiger Woods, Raphael Nadal,
00:18:20 Kobe Bryant, etc.
00:18:22 Et en fait, quand on est athlète et qu'on est un peu fan de tous
00:18:28 ces sportifs, on se dit, voilà, c'est comme ça, il faut que je fasse
00:18:30 comme ça, il faut que je dédie ma vie à mon sport, il faut que je
00:18:33 mange de ma discipline, il faut que je ne pense qu'à ça, etc.
00:18:35 Alors qu'avec l'expérience, je me suis rendu compte qu'il n'y a
00:18:39 pas qu'un seul chemin qui mène à la performance.
00:18:40 Le plus important, c'est de se connaître soi-même, de savoir
00:18:43 ce dont on a besoin.
00:18:46 Et il y a différentes recettes qui peuvent nous permettre d'être
00:18:48 performants.
00:18:49 C'est ce que j'essaie un peu de passer comme valeur dans ce manga.
00:18:54 C'est qu'on n'est pas obligé de penser qu'à son sport tout le
00:18:59 temps, de faire tout le temps que des sacrifices, entre guillemets.
00:19:03 On peut se permettre d'explorer d'autres choses et tout en étant
00:19:06 très ambitieux dans sa discipline sportive et tout en se donnant
00:19:10 à 100 % dans l'entraînement.
00:19:15 Petite question pour Madame, puisque quand on fait les screams,
00:19:20 il y a un équipement qui est assez particulier.
00:19:22 Qu'est ce que ça pose comme problème de dessin, justement,
00:19:26 de se lancer là-dedans ?
00:19:28 Il y a le masque qui rend les personnages...
00:19:32 Déjà, même quand on voit dans la compétition, mais le masque,
00:19:36 il y a un moment où vous dites "je passe une partie de ma vie
00:19:40 cachée sous un masque".
00:19:41 Je crois qu'il n'y a rien de plus positif qu'être soi-même.
00:19:44 Donc, on revient sur cette idée d'être bien, mais cette idée
00:19:46 d'être toujours masqué.
00:19:47 En termes de dessin, j'imagine qu'il y a une problématique
00:19:53 aussi pour permettre d'identifier le personnage.
00:19:55 Il y a l'équipement aussi.
00:19:57 On peut voir le visage un peu.
00:20:02 Moi, j'ai pris le parti près de montrer quand même un peu le
00:20:05 visage d'aller sous le masque pendant les combats.
00:20:07 De temps en temps, on peut voir les expressions de souffrance,
00:20:12 mais moi, ma problématique, ma vraie grande problématique,
00:20:17 ce n'était pas les masques.
00:20:18 C'était de différencier un fleuret d'une épée d'un sabre.
00:20:22 Et honnêtement, pour moi, ce n'était pas facile au début.
00:20:25 Franchement, entre un fleuret et une épée, Enzo me dit "c'est
00:20:31 super ton truc, mais ça, c'est une épée".
00:20:33 Je dis "quelle est la différence ?"
00:20:36 Donc, il a fallu quand même que j'aille voir les armes pour de vrai.
00:20:40 - Vous vous êtes allé voir des compétitions pour décider,
00:20:45 pour comprendre.
00:20:46 Vous parliez des enfants, donc il y a cette double page,
00:20:48 notamment, qui montre l'apprentissage des gestes.
00:20:53 - Sans les armes.
00:20:54 - Oui, sans les armes.
00:20:56 Donc ça, c'était le truc qu'on a parlé, qui était amusant,
00:20:59 c'est de se dire "on va apprendre le fleuret".
00:21:02 Et puis, les premières séances, elles se font sans épée,
00:21:06 juste en faisant des gestes.
00:21:07 C'est frustrant.
00:21:10 - Quand on est un gamin, on vient de voir des choses comme ça,
00:21:13 "je vais avoir une épée".
00:21:13 - Non, du tout, parce qu'on a de la chance en France.
00:21:17 On a des...
00:21:18 On appelle les entraîneurs, on les appelle des maîtres d'armes,
00:21:20 très pédagogues.
00:21:21 La grande majorité sont très pédagogues, donc ils font ça
00:21:26 sous forme de jeu.
00:21:27 Ils font ça sous forme de jeu.
00:21:28 Bien sûr, directement, ils ne nous feront pas faire ça,
00:21:30 ils nous feront faire des jeux pour nous échauffer, etc.
00:21:32 Donc, en fait, c'est comme quand on est à l'école,
00:21:35 en maternelle ou au primaire.
00:21:37 On apprend des choses sans se rendre compte, forcément.
00:21:40 - Après, Maître Moderne, il n'a pas l'air commode.
00:21:43 - Oui, après, voilà, il ne faut pas non plus que ça parte
00:21:47 dans tous les sens.
00:21:48 - C'est du jeu, mais c'est du jeu sérieux.
00:21:51 - Oui, mon maître d'armes formateur, il était militaire,
00:21:53 donc il y avait la rigueur qui allait avec.
00:21:56 Donc, il y avait de la pédagogie, quelque chose de ludique,
00:22:00 mais avec une certaine rigueur et beaucoup de notions de respect,
00:22:04 de travail et d'assiduité.
00:22:07 - Au niveau du dessin, dessiner des escrimeurs enfants,
00:22:10 c'est différent de dessiner des adultes ?
00:22:12 Au niveau des cordes, c'est la même chose ?
00:22:14 - Oui, là, c'est surtout des enfants dans le style du manga,
00:22:20 pas des enfants réalistes,
00:22:21 donc on les fait peut-être un peu plus court sur pattes,
00:22:24 peut-être avec des grosses têtes, des très gros yeux.
00:22:27 Mais je n'ai pas trouvé ça...
00:22:33 Je ne sais pas si c'est le côté mignon qui m'a adouci ou quoi,
00:22:37 mais j'ai trouvé que c'était vraiment ma partie préférée,
00:22:40 personnellement, parce que comme ils font des erreurs encore au début,
00:22:45 c'était rigolo de ne pas tous les mettre dans la même position
00:22:48 quand ils sont censés faire une fente,
00:22:51 faire une attaque spécifique.
00:22:53 Ça m'a fait un peu rigoler de cacher des petits détails.
00:22:55 - Un peu plus libre aussi pour toi.
00:22:57 - C'est ça, oui, tout à fait.
00:22:58 - Sur la question, on parle de fente de mouvement,
00:23:02 je vais revenir avec la perspective historique.
00:23:04 En fait, je vais ressortir,
00:23:06 me centrer sur deux œuvres qui sont toutes au début,
00:23:09 qui sont "Hachinanojo", qui est un manga de boxe,
00:23:14 scénarisé par Takamori Asao, dessiné par Chiba Tetsuya,
00:23:17 qui est disponible en français aux éditions Glénat,
00:23:20 peut-être pas facilement trouvable,
00:23:22 mais qui est très, très bien, qui est un grand monument.
00:23:25 Et vous avez "Kyojin no Hoshi",
00:23:27 qui est de Kajiwara Iki et Kawasaki Noboru,
00:23:31 qui est un manga de baseball.
00:23:34 Et la raison pour laquelle je me rends rouge
00:23:36 à Takamori Asao et Kajiwara Iki,
00:23:38 c'est qu'en fait, c'est le même scénariste
00:23:40 qui va être l'un des fondateurs du manga de sport
00:23:44 en introduisant tout un tas de choses que vous connaissez aujourd'hui.
00:23:46 Alors "Kyojin no Hoshi", notamment, c'est l'étoile des géants.
00:23:49 "Kyojin", c'est les géants, c'est l'équipe de Tokyo de baseball.
00:23:52 Ça se passe à une époque où l'équipe va...
00:23:56 Alors, c'est juste un peu après où l'équipe va dominer le baseball
00:23:59 en gagnant neuf championnats d'affilée.
00:24:04 C'est un petit peu comme l'Olympique de Ligue a pu l'être
00:24:05 à un moment sur le championnat de France.
00:24:09 Et en fait, ce qu'il va introduire sont plusieurs éléments qui sont...
00:24:12 Tout d'abord, vous avez à la fois des personnages
00:24:15 qui commencent dans la misère, donc il y a une réalité dans l'adversité,
00:24:19 et qui ont des capacités incroyables.
00:24:22 Si vous regardez la case du milieu, vous voyez que le jeune
00:24:25 Houshi Yuma, qui est le personnage principal,
00:24:28 s'entraîne parce qu'il y a un trou dans le mur de sa maison.
00:24:32 Il lance la balle par le trou, la balle rebondit sur l'arbre
00:24:35 et revient en passant exactement dans le trou et il rattrape la balle.
00:24:38 C'est pour indiquer la maîtrise qu'il a.
00:24:40 Et il y a un entraîneur qui passe et qui va prendre la balle,
00:24:43 qui va taper dans la balle avec sa batte et qui va réussir lui aussi
00:24:46 à la renvoyer directement dans le trou.
00:24:47 Donc, on est vraiment dans un côté absolument exceptionnel.
00:24:52 Et l'autre chose que va introduire Kajiyawa Araiki,
00:24:55 qui va être ensuite réutilisé, c'est...
00:24:58 Alors, c'est la seule image que j'ai pu trouver,
00:25:00 mais qui vous donne une idée,
00:25:02 ce sont des engins de torture pour l'entraînement.
00:25:05 Donc, le jeune Houshi Yuma va s'entraîner comme ça,
00:25:09 avec des ressorts extrêmement forts.
00:25:11 Alors, ça paraît au milieu des années 60.
00:25:13 Donc, il faut imaginer, à cette époque-là,
00:25:16 on est dans le top du top de la technologie de pointe.
00:25:19 Mais en gros, il a ces sortes d'énormes ressorts
00:25:22 qui font que lorsqu'il enlève les ressorts brusquement,
00:25:24 il a sa force à décupler.
00:25:26 Si vous avez lu "Dragon Ball", il y a un peu la même chose
00:25:28 quand il est en train de porter des habits
00:25:29 qui sont lestés de sable et puis il les enlève.
00:25:32 Voilà, on est toujours sur ces idées
00:25:34 d'entraînement un peu incroyables.
00:25:36 Ça me fait penser brusquement aussi à "Princess Bride",
00:25:38 où ils sont en train de se battre à l'épée.
00:25:40 Et puis, il y en a un qui fait "Ha ha,
00:25:41 je me bats contre toi avec la main droite,
00:25:43 mais en fait, je suis gaucher."
00:25:44 Et l'autre qui fait "Ha ha,
00:25:45 je me bats contre toi avec la main droite,
00:25:46 mais en fait, je suis gaucher."
00:25:47 Et puis, il continue le duel comme ça.
00:25:48 Donc, il y a toujours cette histoire de recherche
00:25:51 de la performance de plus en plus loin.
00:25:54 Et l'une des choses que va aussi introduire Kajiwara Iki
00:25:57 à ce moment-là,
00:25:58 ce sont des choses que vous avez probablement vues
00:26:01 dans "Olivetum".
00:26:02 Je vous ai mis quelques séquences animées pour montrer.
00:26:04 En fait, c'est le coup spécial.
00:26:05 C'est-à-dire que, brusquement,
00:26:06 on est sur la démesure du sport.
00:26:09 Si on donne un coup de pied, et puis le ballon,
00:26:10 il fait tellement fort qu'il fait un trou dans le filet.
00:26:14 Je vous ai pas mis, mais j'ai trouvé la même chose
00:26:16 avec un moment où il y a deux jumeaux,
00:26:18 il y a une équipe où il y a des jumeaux,
00:26:19 et les jumeaux ont un coup spécial
00:26:20 où il donne un coup dans le ballon à deux,
00:26:23 extrêmement synchronisés,
00:26:24 ce qui fait que le ballon devient, se transforme
00:26:26 en une traînée de lumière.
00:26:28 Et bien sûr, voilà.
00:26:29 Et ça, dans "Enzo",
00:26:33 les aspects les plus proches que j'ai pu trouver
00:26:36 sont ces oppositions-là, avec John Patrick,
00:26:39 si je ne me trompe pas,
00:26:40 dans lesquelles on a quelque chose qui approche peut-être le plus
00:26:43 d'un personnage un petit peu hors norme
00:26:47 qu'il peut y avoir dans le manga.
00:26:48 Mais on est quand même sur quelque chose qui va être...
00:26:51 On est sur une biographie, sur du réel.
00:26:53 Et donc, c'est des choses qui ne sont pas forcément autorisées.
00:26:57 -Alors, oui.
00:27:00 En fait, pour être honnête,
00:27:04 le manga, il est encore en cours de scénarisation
00:27:09 et on ne s'interdit pas que sur un prochain tome,
00:27:13 on puisse faire des coups spéciaux.
00:27:15 C'est vrai que quand j'y ai pensé au début,
00:27:17 j'avais comme référence "Olive et Tom"
00:27:20 et j'avais comme...
00:27:21 J'avais en idée, en tête, de faire des spéciales,
00:27:23 que chaque personnage ait un peu des spéciales,
00:27:26 ce qui est un peu le cas dans la vraie vie.
00:27:29 Alors, ce n'est pas des tirs du tigre ou des choses comme ça,
00:27:31 mais c'est vrai que chaque "Screamer",
00:27:33 on a des coups qu'on affectionne plus particulièrement.
00:27:36 Et j'avais comme idée de faire, je ne sais pas,
00:27:41 des coups spéciaux avec des fatales, des choses comme ça,
00:27:44 avec un vocabulaire un peu emprunté aux jeux vidéo,
00:27:47 comme "Tekken 4" avec des fatales, etc.
00:27:49 Mais c'est vrai que mettre en perspective
00:27:53 sur des compétitions comme les Jeux olympiques,
00:27:54 c'est pas...
00:27:56 Narrativement, ça se tient pas forcément.
00:27:58 Alors pourquoi pas, à un moment donné, dans un scénario,
00:28:00 quand ce sera des entraînements, des galas,
00:28:03 des choses qui s'y prêteront un peu plus, pourquoi pas ?
00:28:06 Mais le but aussi, c'était de rendre les "Screamers"
00:28:08 un peu aussi plus...
00:28:10 C'est un sport attractif, mais de démontrer
00:28:14 et d'intégrer cette attractivité, du coup, via le dessin.
00:28:21 Ce que Madonna a très bien réussi à faire
00:28:23 avec les petits éclairs qu'on voit,
00:28:26 les choses qui suggèrent de la vitesse, de la puissance,
00:28:31 des esquives qui sont pas...
00:28:34 Dans la vraie vie, on fait pas des esquives comme ça non plus.
00:28:37 On a quand même fait quelque chose d'un peu exagéré
00:28:39 tout en restant assez réaliste.
00:28:41 -Une chose que je n'ai pas mentionné,
00:28:43 c'est que le manga est réalisé avec le soutien
00:28:45 de la Fédération française d'extrême, il me semble.
00:28:48 Donc il y a aussi cette volonté de partager, d'expliquer,
00:28:52 de donner à voir ce qui est vraiment l'extrême.
00:28:56 Là, effectivement, on voit, ce dont vous parliez, Madonna,
00:28:58 tout à l'heure, le fait de voir derrière le masque,
00:29:01 sur la casque, au milieu,
00:29:03 où on voit les visages derrière le masque.
00:29:06 Alors ça, en fait, ça m'effet...
00:29:09 C'est amusant parce que si vous regardez des films d'action,
00:29:14 des choses comme ça, où, par exemple,
00:29:16 vous avez des policiers qui vont faire un assaut,
00:29:20 ils sont tous carapacé avec le casque,
00:29:22 sauf le héros, parce que le héros, il faut voir son visage,
00:29:25 qui est sans casque, ce qui, d'un point de vue de réalisme,
00:29:29 est totalement idiot.
00:29:30 On ne fonce pas...
00:29:31 Si on a un truc qui protège, on ne le fait pas.
00:29:33 Donc il y a toujours cette problématique
00:29:35 qu'on a dans le cinéma de rendre visible quelqu'un,
00:29:38 de rendre identifiable un héros,
00:29:40 même lorsqu'à priori, il est dans un uniforme
00:29:42 qui devrait le rendre non-identifiable.
00:29:44 Et là, on retrouve aussi cette question de voir le visage.
00:29:47 Vous, quand vous avez le masque, vous voyez quoi ?
00:29:49 Est-ce qu'on voit normalement
00:29:51 ou est-ce qu'il y a une vision tunnelle ?
00:29:54 -Non, on voit normalement.
00:29:55 Après, je pense que...
00:29:58 Voilà, j'ai 32 ans aujourd'hui,
00:30:01 ça fait 27 ans que je fais de l'escrime,
00:30:02 donc je vois hyper clair dans un masque d'escrime,
00:30:07 mais Madalena qui me disait qu'elle a essayé l'escrime cette année,
00:30:09 je pense qu'elle ne voit peut-être pas...
00:30:10 -On ne voit pas normalement. -Oui, c'est ça.
00:30:13 Je pense qu'elle voit la différence
00:30:14 entre sa vision sans et avec le masque,
00:30:17 alors que moi, honnêtement, ça ne me gêne absolument pas.
00:30:20 -On voit, mais comme à travers un filet.
00:30:24 On voit, mais...
00:30:26 Ça me fait penser à une chose qu'on colle sur les vitres des voitures
00:30:30 pour empêcher le soleil.
00:30:31 On peut voir à travers, mais moi, ça m'a fait cet effet.
00:30:34 -Mais j'imagine que toi, t'es trop habituée.
00:30:36 -Alors là, il y a quelques planches qui sont des planches,
00:30:42 notamment de combat,
00:30:43 où il y a toutes les questions de la gestuelle, du mouvement.
00:30:48 Donc là, Madalena, vous avez travaillé d'après photo,
00:30:52 d'après nature.
00:30:54 Est-ce qu'il y a eu des corrections de la part de Enzo
00:30:56 qui trouvaient qu'à certains endroits, ça ne va pas
00:30:58 ou ce n'est pas comme ça ?
00:31:00 -À aucun moment, Enzo, il a corrigé
00:31:03 quoi que ce soit.
00:31:05 Enfin, je crois, si, pour la larme.
00:31:09 Quand on avait vraiment quelque chose qui n'allait pas.
00:31:13 Mais globalement, les erreurs sont tolérées quand même dans Enzo.
00:31:16 Maintenant, moi, je m'étais rapprochée quand même
00:31:19 de Club des Screams.
00:31:20 Il y a des maîtres d'armes qui sont toujours ravis
00:31:22 de constater, d'aider.
00:31:26 -Quand on parle d'erreurs tolérées, là, il n'y en a pas.
00:31:30 -Après, moi, j'ai été soit sur des championnats,
00:31:34 soit sur des entraînements où j'ai moi-même fait des photos
00:31:36 pour avoir des références, soit sur Internet.
00:31:38 Franchement, on peut regarder tout simplement les compétitions.
00:31:43 Et puis quand on trouve un truc...
00:31:45 Mais ce n'est pas facile de faire pause sur le moment...
00:31:48 Oui, le moment qui intéresse.
00:31:51 La plus grande problématique, c'était de mettre les screamers
00:31:53 dans tous les sens.
00:31:55 Quand on voit une compétition, on a tendance à l'avoir
00:31:57 toujours du même point de vue.
00:31:58 Mais globalement...
00:32:00 -Vous disiez la première fois que vous allez voir une compétition.
00:32:05 C'était très bruyant, c'était très animé.
00:32:07 -Honnêtement, à la télé, on ne voit pas ça.
00:32:09 Moi, je ne m'attendais pas du tout.
00:32:13 C'était à Nantes.
00:32:14 -Et puis ça crie.
00:32:15 -Ils hurlaient, ils hurlent.
00:32:16 Mais au début, je me dis "C'est quoi ces screamers ?
00:32:21 Ils sont tous copains, déjà."
00:32:22 Et c'est sympa.
00:32:25 Limite ambiance de Kermesse.
00:32:27 J'ai une compétition.
00:32:28 Et d'un coup, il y a un switch.
00:32:31 Quand ça commence à mettre les...
00:32:33 -Les touches.
00:32:34 -Les cuirasses.
00:32:36 -Les cuirasses.
00:32:37 Quand ça commence à aller chercher les casques.
00:32:39 Là, je ne sais pas, il y a un truc qui se passe.
00:32:40 Et quand ils sont sur la piste, ça hurle.
00:32:42 Mais ils font des têtes quand ils rentrent.
00:32:44 Vraiment, je me suis dit "Il faut qu'on mette ça dans le tome 2."
00:32:46 Parce que c'était impressionnant.
00:32:49 Les femmes aussi.
00:32:50 Je ne m'attendais pas à ça.
00:32:52 Et après, une fois que c'est fini, c'est bon.
00:32:54 Il n'y a plus de...
00:32:55 Mais je ne pensais pas.
00:32:58 Et puis c'est bête, je veux dire un truc.
00:33:00 Je ne pensais pas que ça suait autant.
00:33:04 Ils vont sur la piste, ça ne dure pas longtemps.
00:33:06 Ça ne dure pas longtemps.
00:33:07 Et ils enlèvent, ils sont trempés.
00:33:09 On dirait qu'on les a passés sous une douche.
00:33:10 Ça monte fort.
00:33:12 Vraiment...
00:33:13 Je pense que sans être dans une compétition,
00:33:16 on ne peut pas voir ça.
00:33:18 -C'est drôle.
00:33:19 C'est intéressant d'avoir ce retour d'extérieur.
00:33:23 Parce que moi, c'est toute ma vie, donc je ne me rends plus compte.
00:33:26 C'est ma normalité.
00:33:27 C'est intéressant d'avoir ton retour sur ça.
00:33:29 -Quand on n'est pas prévenu, ça fait drôle.
00:33:33 -Je trouve intéressant ces pages aussi.
00:33:36 Au-delà du fait que votre adversaire s'appelle Cervantes,
00:33:39 que je trouve assez fabuleux dans un jeu de death crime,
00:33:44 d'avoir un adversaire qui s'appelle Cervantes,
00:33:46 la référence "Donkey Shot" ressort.
00:33:49 Par contre, d'avoir une planche comme ça,
00:33:51 avec une multiplicité d'actions à parler,
00:33:54 donc il y a, d'un point de vue,
00:33:56 dans les mangas, on a généralement une extension
00:33:59 du nombre de pages avec des ralentis,
00:34:02 des arrêts sur image, etc.
00:34:04 Et c'est vrai que là, d'un point de vue,
00:34:07 il n'y a pas de studio, vous êtes tout seul à dessiner.
00:34:10 Au niveau de l'éditeur, on sait que c'est...
00:34:13 Vous parliez, c'est un éditeur qui est local.
00:34:15 Donc il y a des contraintes.
00:34:17 Et déjà, il va y avoir trois volumes, a priori,
00:34:21 donc c'est déjà 290 pages.
00:34:23 On a déjà de l'espace.
00:34:24 Et là, pourtant, encore,
00:34:25 on a une forme de concentration du combat en deux planches.
00:34:31 Ce n'est pas un peu frustrant de devoir, comme ça,
00:34:33 gérer la montée d'adrénaline un petit peu,
00:34:38 de le traiter aussi rapidement ?
00:34:41 -Techniquement, là, tout se passe
00:34:43 dans un temps qui est très court, en réalité.
00:34:47 Donc c'est vraiment mouvement sur mouvement.
00:34:49 Et j'aimais bien ce système de double planche
00:34:53 pour qu'on comprenne que tout arrive quasiment en simultané.
00:34:58 Mais frustrant, moi, si je pouvais décider,
00:35:02 oui, on pourrait en faire 27 des tomes.
00:35:04 Ce n'est pas un problème.
00:35:05 Et si on doit découper chaque combat,
00:35:09 on pourrait en faire...
00:35:11 Enfin, on pourrait faire huit planches
00:35:13 pour chaque combat, vraiment.
00:35:16 Est-ce que ce serait plus intéressant après ?
00:35:19 Est-ce que ça peut devenir aussi redondant ?
00:35:23 Moi, il faut que je me garde quand même des idées
00:35:25 pour ce qui va suivre.
00:35:26 Il ne faut pas...
00:35:28 Voilà, pour que le lecteur ne se fatigue pas non plus
00:35:32 d'avoir toujours les mêmes...
00:35:34 A Enzo disait, un fleurettiste,
00:35:37 il va pouvoir avoir ses petites habitudes.
00:35:40 Et donc, bon, voilà.
00:35:43 -C'est en fait le dilemme qu'on peut avoir
00:35:45 quand on est dans un "Dragon Ball" ou "Les Chevaliers du Zodiaque"
00:35:48 où on a un combat qui est tiré, tiré, tiré.
00:35:51 Moi, qui lis beaucoup de mangas de baseball,
00:35:54 c'est mon péché mignon.
00:35:56 Voilà, le manga de baseball, c'est pareil.
00:35:59 C'est-à-dire qu'on va détailler chacune des actions.
00:36:01 Au bout d'un moment, le moindre match va se tirer sur trois volumes.
00:36:04 Après, on en parlait juste avant,
00:36:07 j'ai un souvenir de l'un des derniers chapitres de "Slam Dunk",
00:36:11 qui est un chapitre qui est l'apothéose.
00:36:14 On a toute la série qui fait 31 volumes qui amène vers ça.
00:36:18 Et le chapitre fait 15 pages.
00:36:20 Il est quasiment entièrement muet et on le lit en retenant son souffle.
00:36:24 Et c'est 12 secondes de match, peut-être.
00:36:28 Et encore, je pense que j'exagère en disant que c'est 12 secondes de match.
00:36:32 Mais par contre, il y a cette dramatique, ce ressort qui est aussi fort.
00:36:37 Moi, j'avoue, en lisant Enzo, j'étais un peu...
00:36:43 Enzo, le manga.
00:36:45 J'étais un petit peu...
00:36:47 Il y avait un petit goût de pas assez, ce qui est une bonne chose.
00:36:52 C'est vrai que le fait que les choses passent vite,
00:36:55 il y avait un aspect dramatique pour arriver justement à ce moment de libération
00:37:00 et les moments qu'on a juste avant, avec le "allé" qu'on voit ici,
00:37:05 même s'il correspond plus à la frustration,
00:37:07 mais cette montée d'attente.
00:37:11 En plus, il y a ces décomptes des points, des touches qui se font,
00:37:15 qui sont...
00:37:17 Oui, après,
00:37:20 comme le disait Madonna,
00:37:24 on a commencé par les compétitions, toutes les compétitions
00:37:30 auxquelles j'ai remporté des médailles, mais il y a même celles où je n'ai pas remporté de médailles.
00:37:34 J'ai une liste tellement longue de faits, de choses qui pourraient rentrer
00:37:38 dans un manga, de scénarios, de matchs rocambolesques, d'anecdotes.
00:37:43 Même dans nos voyages, il se passe des trucs où, je ne sais pas,
00:37:46 on a un vol annulé, on doit courir.
00:37:49 Parfois, ça ressemble vraiment à un film,
00:37:51 nos déplacements en compétition et nos compétitions.
00:37:55 Donc après, on verra comment ça se passe après le tome 3.
00:37:58 Après, c'est vrai qu'il y a, il ne faut pas se mentir,
00:38:00 il y a une réalité économique dans le monde du manga.
00:38:04 Mais en tout cas, avec la mise en édition,
00:38:06 on s'est dit qu'on ne se met pas forcément de limites et que si,
00:38:08 on peut en faire une série qui va au-delà de 10,
00:38:13 qui puisse même survivre à ma carrière,
00:38:18 que ce soit peut-être le protagoniste change,
00:38:20 que ce soit une nouvelle génération d'escrimeurs.
00:38:22 Pourquoi pas ? On a vu ça dans "Captain Tsubasa",
00:38:25 "Olivier Thom", ça change le protagoniste,
00:38:27 "Dragon Ball Z" aussi.
00:38:29 Pourquoi pas ? On n'est pas encore là.
00:38:32 Il y a encore d'autres passages de ma carrière à aborder,
00:38:37 mais on ne s'est pas forcément mis de limites.
00:38:41 -Une chose qui a ses noms sont les Jeux olympiques.
00:38:44 C'est un truc qui est assez exceptionnel.
00:38:46 Est-ce que c'est quelque chose dont...
00:38:50 N'étant pas sportif de haut niveau,
00:38:54 est-ce que c'est possible de faire comprendre à quelqu'un
00:38:56 qui n'a pas pratiqué le sport ce que ça peut représenter
00:38:58 comme couronnement, comme truc...
00:39:02 Couronnement comme élément d'importance dans une carrière,
00:39:07 parce que c'est arrivé au taux du top.
00:39:09 Il y a ce discours du coach qui explique
00:39:12 que vous êtes assez super important.
00:39:15 Et en citant la citation,
00:39:18 la devise des Jeux olympiques,
00:39:20 plus haut, plus loin, plus fort, plus vite, plus fort.
00:39:25 Et je me posais la question, parce que vous avez un podcast
00:39:27 qui s'appelle "Le Rebond",
00:39:29 sur lequel vous discutez notamment avec des anciens champions.
00:39:32 Est-ce que c'est...
00:39:34 Je me posais la question, est-ce que c'est juste
00:39:36 parce qu'eux sont aussi amens de...
00:39:39 Vous partagez ça, vous savez ce que ça représente ?
00:39:43 -Alors, ce podcast que j'ai, c'est un podcast
00:39:46 qui parle du rapport à l'échec des sportifs de haut niveau,
00:39:48 et surtout, cette relation de "je t'aime moins non plus"
00:39:51 qu'on a avec l'échec, parce que, en fait,
00:39:53 tous les jours à l'entraînement, on essaie de dépasser nos limites,
00:39:55 et quand on essaie de dépasser ses limites, on s'y frotte.
00:39:59 Donc on déteste l'échec, mais on en a besoin pour progresser.
00:40:03 Et c'est vrai que nous, les sportifs,
00:40:07 on a ce côté un peu pudique où, quand on subit un échec,
00:40:11 on n'aime pas forcément trop s'appesantir dessus,
00:40:13 on essaie de passer outre le plus rapidement possible.
00:40:15 Et à travers le médium du manga,
00:40:18 c'est vrai qu'on peut arriver à faire passer...
00:40:21 Ouais, parce qu'en fait, quand on voit une performance sportive,
00:40:26 on voit la compétition, la performance sportive à l'instant T,
00:40:31 la célébration, mais on ne se rend pas compte
00:40:33 de toutes les années de sacrifice, de travail qu'il y a avant,
00:40:36 peut-être des choses de l'enfance.
00:40:38 Il y a tous les entraîneurs par lesquels on est passé,
00:40:40 tous les coéquipiers qu'on a passé,
00:40:42 tout le moment difficile par lequel on est passé,
00:40:43 toutes les étapes qui nous ont mené à ce moment.
00:40:46 Et c'est vrai qu'à travers ce manga,
00:40:49 on arrive à faire passer ça,
00:40:51 parce qu'on est à un moment un peu cumulant dans ma carrière,
00:40:54 mais en trame de fond, on a un peu ce début
00:40:57 et tout ce que j'ai pu traverser pour arriver à ce moment-là.
00:41:01 -Est-ce qu'on arrive à faire pause sur ce moment-là ?
00:41:04 Parce qu'on a vu, quand on voit votre palmarès,
00:41:06 on se rend compte qu'il n'y a pas que les Jeux olympiques,
00:41:08 il y a plein d'autres compétitions dans lesquelles vous allez.
00:41:10 Donc quand vous terminez, vous revenez de Tokyo,
00:41:14 vous rentrez, et puis déjà, il y a le prochain rendez-vous,
00:41:16 il y a le prochain truc. Donc est-ce qu'il y a un moyen ?
00:41:18 Est-ce qu'il y a un moment où on peut vraiment savourer
00:41:21 en se disant "ça y est, c'est bon" ?
00:41:22 Est-ce qu'on n'est pas déjà en train de se projeter...
00:41:24 Voilà, je me pose la question de Djokovic,
00:41:27 qui fait en gros un tournoi toutes les semaines
00:41:29 ou toutes les deux semaines, à quel moment il dit
00:41:30 "bon, ben voilà, là, j'ai accompli quelque chose,
00:41:32 c'est bon, je peux souffler",
00:41:33 sans être en train déjà de se projeter dans le suivant ?
00:41:36 -C'est ça, le problème dans le sport de haut niveau.
00:41:38 Et je pense pas forcément dans le sport de haut niveau,
00:41:40 dans d'autres domaines,
00:41:41 on n'a pas forcément le monopole de ça,
00:41:42 mais on ne peut pas se reposer sur ses lauriers
00:41:45 si on se satisfait de sa réussite,
00:41:48 pendant qu'on se satisfait d'autres travails, en fait.
00:41:52 D'autres travails, progrès, et prennent notre place.
00:41:56 Donc c'est ça aussi qui est parfois difficile,
00:41:59 c'est qu'on est tout le temps en train de se projeter,
00:42:01 même quand on gagne une compétition,
00:42:03 il y en a une un mois après, deux mois après, trois mois après,
00:42:07 donc il faut toujours se remettre en question.
00:42:10 Donc parfois, ça peut être un peu frustrant,
00:42:11 mais moi, avec l'expérience, en tout cas,
00:42:14 j'ai appris à plus profiter
00:42:18 du voyage,
00:42:21 enfin, je dis voyage, la métaphore,
00:42:22 c'est-à-dire le chemin qui mène à la compétition,
00:42:25 parce que c'est ça aussi qui est riche
00:42:27 dans une carrière dans le sportif,
00:42:28 c'est pas juste la médaille.
00:42:30 La médaille, elle vient un peu cristalliser les efforts
00:42:32 et le voyage accompli,
00:42:33 mais le voyage accompli, il n'est pas validé que par les médailles,
00:42:37 en fait, il est validé par des rencontres, par des moments,
00:42:41 des choses qui resteront gravées à jamais au sein de moi.
00:42:44 Et c'est encore une fois pour venir au manga,
00:42:46 c'est ce que je peux montrer dans cette oeuvre.
00:42:50 -J'avais choisi ces planches-là,
00:42:54 et là, c'est une question peut-être pour Madonna,
00:42:56 c'est notamment sur la troisième case,
00:42:58 où on voit...
00:43:00 Je crois que c'est vous qui pliez le fleuret comme ça,
00:43:05 c'est quelque chose qu'on voit aussi
00:43:06 dans la séquence avec Laura Flessel.
00:43:08 Je trouve que ça fait partie de ces gestes-là iconiques,
00:43:11 comment est-ce qu'on y arrive ?
00:43:14 Est-ce qu'on les repère en se disant,
00:43:15 tiens, c'est marrant, ils font tous ça,
00:43:17 c'est inhabituel, à quoi ça correspond ?
00:43:18 Ou est-ce que c'est juste...
00:43:21 A quel moment on remarque ça ?
00:43:23 A quel moment on décide de les intégrer ?
00:43:26 -Après, il y a eu les échanges avec Enzo aussi.
00:43:28 Nous, on...
00:43:30 Tony, moi, on peut remarquer des choses dans nos recherches.
00:43:33 Et il y a quand même...
00:43:34 C'est là que d'être en contact direct avec le sportif,
00:43:39 sans ça, les screams, c'est vraiment pas facile.
00:43:44 C'est tellement plein de petites nuances,
00:43:46 de petites choses à savoir.
00:43:48 Moi, il n'y a pas longtemps, j'étais sur une compète,
00:43:51 on m'a expliqué la règle des points.
00:43:53 Je suis incapable de vous expliquer.
00:43:55 C'est vraiment pas simple, en fait.
00:43:57 Donc là, pour ce genre de petites choses,
00:44:00 nous, on peut remarquer des choses,
00:44:01 tiens, c'est marrant, ils font ça,
00:44:03 pourquoi ils tordent leur épée ?
00:44:05 Et là, d'avoir le sportif, ça va être nécessaire,
00:44:10 pour pouvoir avoir ce genre de petites gestuelles
00:44:12 qui ne sont pas, finalement, nécessaires au combat qui va suivre.
00:44:16 -Pourquoi on tord le fleuret, comme ça ?
00:44:20 -Parfois, ce sont des tiques.
00:44:22 Et bien souvent, c'est juste que la lame, elle est faite d'acier,
00:44:28 donc elle est rigide, mais elle est aussi déformable.
00:44:30 Donc parfois, ce sont des touches, mais de tel impact qu'elle se déforme.
00:44:32 Donc il faut lui redonner sa forme originale.
00:44:35 -Et ça se casse, parfois ?
00:44:37 -Oui, ça se casse. Ils ont une durée de vie...
00:44:39 Surtout nous, on s'entraîne énormément,
00:44:40 donc ils ont une durée de vie assez limitée.
00:44:43 Moi, honnêtement, je change de lame tous les 3 mois.
00:44:45 Donc ça fait pas mal de lames en une saison.
00:44:49 S'il y a des escrimeurs dans l'audience,
00:44:51 ils savent quel budget ça peut représenter.
00:44:54 Mais moi, je voulais rebondir sur ce que dit Madonna,
00:44:58 mais en fait, c'est vrai que c'est là où ça prend tout son sens
00:45:01 de travailler avec Tony et Madonna,
00:45:03 qui ne sont pas ici, au milieu de l'escrime,
00:45:04 parce qu'ils me posent des questions hyper pertinentes,
00:45:08 dans le sens où, moi, l'escrime, c'est toute ma vie,
00:45:10 et il y a des choses qui me paraissent hyper naturelles
00:45:13 sur lesquelles je ne serais pas forcément...
00:45:16 Enfin, sur lesquelles je n'aurais pas forcément tilté,
00:45:19 et qui sont importantes de mettre,
00:45:21 comme par exemple le fait de redresser le fleuret.
00:45:23 Ils ont un peu abuté sur ça,
00:45:25 mais c'est quelque chose qui les a un peu interloqués.
00:45:27 Et moi, je n'aurais pas forcément,
00:45:31 de mon propre chef, mis ça dans l'œuvre.
00:45:35 Donc je pense qu'on forme un beau trio,
00:45:38 et on se complète assez.
00:45:40 Et là, sur ce 2e tome, on a trouvé un mode de fonctionnement
00:45:42 qui est assez fluide.
00:45:47 - On va revenir sur la manière dont est construite l'histoire.
00:45:51 J'ai fait un truc que j'aime bien faire parfois,
00:45:53 c'est regarder l'histoire par chapitre, par séquence narrative.
00:45:57 Le récit est divisé en chapitres.
00:46:00 Donc là, vous avez l'intégralité,
00:46:02 si vous avez très bon jeu, vous pouvez le lire,
00:46:05 il faut être très rapide aussi, si vous n'avez pas investi des heures.
00:46:07 Vous avez l'intégralité des 190 pages de ce premier volume,
00:46:10 par chapitre, et vous voyez que globalement,
00:46:12 on a des chapitres qui font à peu près 13 pages.
00:46:15 J'ai mis la ligne.
00:46:17 Donc on a quelque chose qui est assez proche
00:46:19 d'un chapitre de manga japonais,
00:46:21 puisque généralement c'est du 16-17 pages.
00:46:23 Donc on est sur des narrations comme ça.
00:46:25 On a le dernier chapitre, qui est le chapitre de l'affrontement,
00:46:30 qui est un chapitre double.
00:46:32 Et puis, il y a ce très long chapitre,
00:46:35 qui, j'ai noté, fait 42 planches.
00:46:39 Donc c'est la séquence la plus longue,
00:46:42 qui est justement cette séquence de l'apprentissage,
00:46:46 de la découverte, puis de l'apprentissage de l'escrime
00:46:54 par le jeune Enzo, qui en revient fatigué, mais heureux.
00:47:00 C'était, vous l'avez dit, c'est important de reparler de ça.
00:47:07 Dans le choix, quand on fait une biographie,
00:47:13 quand on écrit sa propre histoire,
00:47:16 on fait le choix des moments qui sont des moments importants.
00:47:18 Donc là, cette découverte-là,
00:47:20 ça reste plus important que le chemin ensuite.
00:47:25 C'est vraiment ce début-là.
00:47:27 Ou est-ce que c'est aussi les conventions du manga
00:47:30 qui veulent avoir une sorte d'origine story,
00:47:32 un petit peu comme les super-héros ?
00:47:34 Pour écrire ce manga, j'ai dû faire une sacrée introspection.
00:47:40 Je suis allé plus dans des souvenirs assez anciens.
00:47:44 Et c'est quelque chose que je n'avais jamais encore fait.
00:47:50 Et ça fait remonter, au-delà de souvenirs,
00:47:53 ça fait remonter des sensations.
00:47:55 Et franchement, j'ai adoré cet exercice.
00:47:57 Mais même encore un peu en parlant de métaphores,
00:48:03 pour faire du sport,
00:48:05 la base est très importante.
00:48:08 Donc si on a une base solide,
00:48:10 après, par la suite, le reste coule de source.
00:48:12 Et je pense que c'est un peu pareil dans le manga.
00:48:14 Si on prend le temps de décortiquer cette base,
00:48:22 de bien montrer un peu la jeunesse de l'histoire,
00:48:25 après, on peut comprendre l'évolution.
00:48:29 Et je pense que la narration fait encore plus sens.
00:48:33 Donc je pense que c'était important de développer cet arc narratif,
00:48:36 ce chapitre, où on voit comment j'ai découvert l'escrime,
00:48:39 dans quel contexte.
00:48:41 Et puis moi, j'ai pris énormément de plaisir.
00:48:43 Tout ça, c'était un peu...
00:48:45 Il y a des choses un peu...
00:48:49 Bien sûr, il y a des choses un peu romancées,
00:48:52 mais dedans, j'ai pu parler d'un de mes meilleurs amis d'enfant.
00:48:57 On a commencé l'escrime en même temps.
00:48:59 J'ai pu lui faire des petites blagues.
00:49:02 Donc quand il a vu le manga, il était surpris.
00:49:07 Mon maître d'armes, aussi, il était vraiment...
00:49:10 C'était un personnage très charismatique.
00:49:14 Donc pour moi, c'était important.
00:49:16 Et puis au-delà du fait de s'attaquer aux bases et à la jeunesse,
00:49:21 pour moi, c'était aussi une façon un peu de rendre hommage
00:49:25 à toutes les personnes que j'ai croisées au cours de ma carrière
00:49:28 et qui font de moi l'escrimeur que je suis,
00:49:30 à mon maître d'armes, les personnes avec qui j'ai commencé l'escrime,
00:49:33 les personnes qui étaient plus âgées dans mon cours
00:49:36 qu'au début, représentant un peu des héros pour moi.
00:49:39 Il y a aussi mes parents.
00:49:42 Mes parents, on ne se rend pas compte,
00:49:45 on se rend compte en grandissant,
00:49:47 mais quand on est petit, nos parents,
00:49:49 qui nous amènent à des activités extrasportives le soir,
00:49:51 le week-end, qui nous amènent aux compétitions,
00:49:54 qui nous amènent au travail.
00:49:56 Et en fait, on prend ça pour acquis quand on est gamin,
00:49:59 mais moi-même en grandissant, en ayant une fille maintenant,
00:50:01 que j'amène à la danse tous les samedis matins,
00:50:03 c'est comme ça que je me rends compte de la chance que j'ai eue
00:50:07 d'avoir des parents qui m'ont donné les moyens de mes ambitions,
00:50:10 qui m'ont toujours permis de pratiquer mon sport.
00:50:14 Et c'est une façon aussi de rendre hommage à toutes les personnes
00:50:17 qui ont fait que j'ai pu glaner toutes ces médailles
00:50:20 et que je sois assis devant vous aujourd'hui.
00:50:24 - Vous avez grandi en Guadeloupe aussi.
00:50:26 Donc c'est aussi un élément qui me semble très important pour vous
00:50:29 parce que vous vous êtes associé avec votre sœur
00:50:31 pour faire une association, c'est le Rebond à nouveau.
00:50:34 - Le premier Rebond.
00:50:36 - Qui cherche à aider justement les jeunes athlètes
00:50:40 qui ne sont pas en métropole.
00:50:42 Donc c'est quelque chose qui est important aussi,
00:50:44 cette représentation, le fait de porter la couleur de votre peau
00:50:49 par rapport à... Même s'il y a le masque,
00:50:53 c'est quelque chose d'important pour vous aussi par rapport à ça ?
00:50:55 - Oui, bien sûr. C'est sûr que quand on grandit
00:50:58 dans un territoire d'outre-mer, il y a des problématiques,
00:51:01 il y a des problématiques de continuité territoriale.
00:51:03 C'est-à-dire que moi, quand je partais faire des compétitions nationales,
00:51:07 à partir de 12 ans, je partais 6 ou 7 fois
00:51:13 en région parisienne, en province, en Europe, pour faire des compétitions.
00:51:18 Et quand on est en France hexagonale,
00:51:20 ça ne prête pas conséquence sur la scolarité
00:51:22 et les compétitions sont le week-end, donc on parle de samedi.
00:51:24 On fait la compétition le dimanche, on revient tard le soir
00:51:27 et on va à l'école. Moi, en grandissant au Guadeloupe,
00:51:29 je prenais l'avion, je loupais déjà le jeudi, le vendredi à l'école,
00:51:32 je loupais le lundi, et le mardi, il fallait que je rentre à l'école
00:51:35 et que tous mes devoirs soient faits, avec le décalage horaire,
00:51:38 le coût financier que ça représentait pour mes parents.
00:51:41 Donc ce sont des problématiques qui m'ont fait prendre la décision
00:51:44 d'arrêter les scrims quand j'ai eu 16 ans,
00:51:46 parce que j'étais dans le top 10 français, mais je voyais très bien
00:51:48 avoir le potentiel d'être dans l'équipe de France
00:51:50 pour ensuite faire les Championnats du monde,
00:51:53 Championnats d'Europe. Donc pendant 3 semaines,
00:51:55 j'ai pris la décision d'arrêter, et par la force des choses,
00:51:57 par heureux hasard, l'entraîneur national, à ce moment-là,
00:51:59 sans rien savoir de ma décision, il contacte mes parents
00:52:01 pour leur dire qu'il aimerait bien que je vienne en région parisienne
00:52:05 à l'internat pour faire sport et études.
00:52:07 Et en fait, tout aurait pu basculer à ce moment-là,
00:52:11 et moi, j'ai la chance d'avoir des parents qui ne roulaient pas sur l'or,
00:52:14 mais qui sont professeurs des écoles,
00:52:17 et qui ont pu me permettre de partir.
00:52:19 Mais j'ai fréquenté d'autres enfants qui n'avaient pas des parents
00:52:23 qui pouvaient leur permettre de payer des billets d'avion,
00:52:25 qui ne pouvaient pas se permettre de leur payer des billets d'avion
00:52:27 pour faire des compétitions, et qui avaient énormément de potentiel,
00:52:29 et qui n'ont pas pu voir jusqu'où ils pouvaient aller.
00:52:32 Donc j'ai décidé de créer cette association avec ma petite sœur
00:52:35 pour justement aider cette nouvelle génération de sportifs ultramarins
00:52:39 et leur permettre de voir jusqu'où leur potentiel pourrait leur mener.
00:52:43 Et même s'ils n'y arrivent pas, le fait qu'ils aient essayé
00:52:47 ne mette pas leur foyer en précarité financière.
00:52:50 Donc pour moi, c'est quelque chose qui est très important.
00:52:52 Et je sens que je suis à un moment de ma vie, de ma carrière,
00:52:54 où je suis en mesure de redonner en tout cas tout ce que j'ai reçu.
00:53:00 Donc oui, c'est quelque chose qui est très important à mes yeux.
00:53:04 -Alors, en préparant tout ça, il y a une phrase qui m'est revenue,
00:53:09 enfin, ces trois mots qui sont "amitié", "effort", "victoire".
00:53:12 Alors, pourquoi je les ai pris ?
00:53:14 Parce que c'est la devise du Jump, qui est la revue de publication,
00:53:20 celle-là, que sont parues Dragon Ball, Naruto, One Piece,
00:53:23 dans laquelle paraît encore One Piece aujourd'hui.
00:53:25 Donc c'est l'une des revues qui, à un moment,
00:53:28 était la revue la plus vendue au monde,
00:53:31 qui vendait 6 millions d'exemplaires par semaine.
00:53:34 C'est assez monstrueux.
00:53:36 Et en fait, les trois mots, c'est une revue qui se lance en 1969,
00:53:42 et il demande à un moment, l'équipe éditoriale demande à ses lecteurs
00:53:48 quels sont les trois mots qui correspondent le plus
00:53:50 à l'esprit de la revue telle qu'il la voit.
00:53:52 Et ce sont ces trois mots qui viennent là.
00:53:54 Et en fait, ça décrit bien, si vous lisez du manga, du shonen manga,
00:53:58 ça décrit bien la manière dont ça fonctionne.
00:54:01 Souvent, vous avez un jeune qui arrive à la Son Goku
00:54:03 en disant "je suis plus fort que tout le monde,
00:54:05 je vais être meilleur que tout le monde",
00:54:07 qui va se rendre compte qu'en fait, il n'est pas plus fort que tout le monde,
00:54:10 il y a d'autres personnes qui vont se rendre compte
00:54:12 que quand on est ensemble, on est plus fort,
00:54:14 et on va être capable d'aller comme ça, de s'entraîner tous ensemble,
00:54:17 de se créer une nouvelle famille aussi,
00:54:19 parce qu'il y a souvent des gens qui sont en extérieur,
00:54:21 des outsiders, et d'arriver à la victoire.
00:54:24 Donc bon, par rapport à la société japonaise,
00:54:26 il y a aussi des indications, mais c'est quelque chose
00:54:28 qu'on retrouve bien dans les schémas narratifs.
00:54:30 Et il y a une séquence qui me fait penser dans le premier volume,
00:54:35 qui est la séquence des trois cartons rouges,
00:54:38 dans laquelle on sent qu'il y a une forme d'adversité
00:54:40 qui se met en place et qui mène à la scène finale,
00:54:43 mais dans laquelle on sent qu'il y a quelque chose qui vient,
00:54:46 puis qui rajoute, qui rajoute.
00:54:48 Alors c'est comme ça que ça s'est passé,
00:54:51 mais je trouve que... J'espère que c'est comme ça,
00:54:54 moi je crois que c'est ça.
00:54:56 Et je trouve qu'il y a vraiment une dramaturgie là,
00:54:58 qui est très forte, c'est comme si la vie mettait le manga.
00:55:02 Il y a cette séquence qui est forte, et qui est en plus...
00:55:05 Là, j'ai mis les trois pages côte à côte,
00:55:07 parce qu'on voit aussi comment Madana a mis ça en page,
00:55:10 avec les deux images de l'arbitre qui se répondent.
00:55:15 Alors ce ne sont pas trois pages séquentielles,
00:55:17 il y a des choses entre, et puis le carton qui est en milieu.
00:55:19 C'est aussi pour ça que vous avez choisi les Jeux olympiques de Tokyo,
00:55:24 parce que je trouve qu'en termes de dramaturgie,
00:55:27 il y a quelque chose qui marche bien,
00:55:28 surtout quand on sait comment se passe la suite.
00:55:30 - Et vous savez comment se passe la suite ?
00:55:33 - Alors, j'ai regardé, je sais le résultat.
00:55:39 On a vu au début, on a vu que les médailles...
00:55:42 - Non, mais bien sûr.
00:55:43 - On a une idée de ce qui se passe après.
00:55:44 - Oui, après, tout le monde sait ce qui se passe par la suite,
00:55:46 mais dans le tome 2, et c'est ça qui est intéressant,
00:55:50 c'est qu'au-delà du résultat,
00:55:53 il y a vraiment des choses qui se sont passées
00:55:57 au sein de notre équipe que personne ne sait.
00:56:01 Il y a eu des choses qui relèvent un peu de la mythologie du sport
00:56:06 qui se sont passées, et honnêtement,
00:56:08 on peut refaire cette compétition 10 fois,
00:56:10 on n'est pas champion olympique.
00:56:11 Il y a vraiment un enchaînement de choses qui se sont passées,
00:56:14 des choses très fortes qui se sont passées
00:56:16 entre mes coéquipiers et moi,
00:56:18 qui font que cette aventure ne restera jamais gravée
00:56:21 dans notre mémoire, parce que c'est une espèce de mémoire collective.
00:56:25 Voilà, je ne peux pas en dire plus.
00:56:30 Je vous laisserai le découvrir dans le tome 2,
00:56:32 mais si vous me dites que là, en termes de dramaturgie,
00:56:36 ça vous a intrigué, attendez de voir le tome 2.
00:56:40 - Et on parlait avec Madonna juste avant,
00:56:43 du fait, Madonna disait qu'il y avait certains lecteurs,
00:56:46 des jeunes lecteurs, qui étaient très déçus ou très surpris
00:56:49 de la fin du premier tome.
00:56:51 - Oui, il ne faut pas finir sans un cliffhanger.
00:56:54 - Voilà, et là, oui, enfin bon, ça se termine.
00:57:00 Je vais vous laisser les lire.
00:57:04 Dans les choses aussi, toujours dans la dramaturgie,
00:57:07 j'aimais beaucoup cette page avec notamment la case du milieu
00:57:11 qui a un joli mouvement.
00:57:14 Enfin, il y a quand même un côté, même si au premier abord,
00:57:18 il y a des choses qui se passent très vite,
00:57:20 il y a aussi des choses qui sont extrêmement graphiques aussi
00:57:24 et qui sont extrêmement belles dans l'esprit.
00:57:27 Même si j'imagine que c'est un enfer à dessiner
00:57:30 des combinaisons et des masques,
00:57:33 il y a aussi quelque chose de très élégant qui en ressort.
00:57:37 Ou c'est juste des problèmes techniques et des...
00:57:41 - Non, d'ailleurs, je triche un petit peu sur les combis, j'avoue.
00:57:45 Ils sont peut-être un peu moins ajustés dans la réalité.
00:57:48 - Non, en fait, c'est plutôt moi qui la porte un peu plus large
00:57:51 que les autres escrimeurs, mais...
00:57:54 - Juste plus, du coup, sur Enzo,
00:57:56 c'est vraiment pour avoir aussi tout le mouvement, le côté...
00:57:59 Enzo, il est grand, il est fin, il est long.
00:58:03 Il y a quelque chose de très reconnaissable,
00:58:07 même avec le masque, même avec ma jambe.
00:58:10 - Les cheveux aussi.
00:58:12 - Les cheveux, oui. Les cheveux, ça, c'est évident.
00:58:17 Mais globalement, moi, quand je décide de tricher régulièrement,
00:58:22 des fois, je vais, on va dire, je vais gonfler un peu la combi
00:58:26 parce que je veux que ce soit une partie où on va dire que le combat,
00:58:30 il est lourd.
00:58:31 Des fois, j'ai envie que ça ait l'air difficile
00:58:34 parce que parfois, on peut arriver à la fin du combat,
00:58:37 on commence à être fatigué.
00:58:38 Donc, on va tricher un petit peu sur le visuel.
00:58:42 C'est vraiment histoire de faire passer un sentiment d'action
00:58:47 plus que d'être ultra fidèle à la réalité.
00:58:50 Donc là, on est encore...
00:58:52 On est bien, là, on est dans la fraîcheur, à peu près.
00:58:55 - J'en remarque, il n'y a pas le...
00:58:57 Alors, je ne sais pas comment ça s'appelle,
00:58:59 mais c'est le câble qui...
00:59:00 - Le fil électrique, oui.
00:59:01 Parce qu'aux Jeux olympiques, on était en sans fil.
00:59:05 Ça existe sur les grosses compétitions.
00:59:08 - Bon, on s'explique cela.
00:59:11 Je ne sais plus pourquoi j'avais mis ça,
00:59:16 mais je trouvais la photo belle.
00:59:17 Voilà.
00:59:18 Et c'était aussi par rapport...
00:59:20 Oui, vous parliez du rapport à l'échec
00:59:22 et donc cette fin de volume
00:59:28 avec en plus, vous qui tournez le dos,
00:59:32 avec "Tournez vers un avenir", radio, etc.
00:59:35 Enfin, il y a aussi...
00:59:37 Je trouve dans le parcours, il y a quelque chose qui est intéressant.
00:59:41 Le fait de terminer là-dessus et d'articuler,
00:59:43 ça semblait normal, naturel de faire une partie sur l'individuel,
00:59:47 une partie probablement sur l'équipe ensuite.
00:59:50 Oui ?
00:59:51 - Oui, bien sûr, parce qu'il y a cette spécificité dans mon sport.
00:59:55 C'est qu'on a d'abord l'épreuve individuelle
00:59:57 et ensuite, peu importe le résultat, réussite ou défaite,
01:00:02 il faut se remobiliser pour fondre son individualité
01:00:06 au sein d'un groupe et d'un collectif.
01:00:08 Et ça, c'est une particularité assez importante dans mon sport.
01:00:12 Et encore une fois, grâce au manga,
01:00:16 on peut donner des pistes de compréhension
01:00:20 pour comprendre l'intensité, ce qui se passe
01:00:23 et pourquoi on crie comme des fous lorsqu'on met des points.
01:00:27 - Mais pour la compétition par équipe,
01:00:30 il y a un degré de complexité supplémentaire
01:00:32 sur la manière dont ça fonctionne ?
01:00:34 - Oui, dans le sens où chaque adversaire,
01:00:36 chaque membre de l'équipe rencontre un membre de l'équipe,
01:00:39 va rencontrer chacun des membres de l'équipe adverse.
01:00:42 Et il ne suffit pas juste de remporter son point, en fait,
01:00:44 c'est en relais, donc on peut avoir des touches d'avance,
01:00:46 des touches de retard,
01:00:48 qui ajoutent un côté un peu dramatique aux rencontres par équipe
01:00:52 et qui auront aussi l'intensité un peu plus forte
01:00:55 parce qu'il y a beaucoup d'échanges.
01:00:57 Généralement, le format est un peu plus rapide aussi,
01:01:00 enfin, pas plus rapide, mais plus intensif dans l'équipe
01:01:02 vu que ce sont des matchs plus courts.
01:01:04 Généralement, les spectateurs, les téléspectateurs,
01:01:07 je ne sais pas s'ils préfèrent le format par équipe,
01:01:10 mais ils l'apprécient parce qu'il y a vraiment
01:01:12 quelque chose de très dramatique.
01:01:14 - Oui, il y a la dramaturgie du fait de "Ah là là, c'est le relais,
01:01:17 quelqu'un s'effondre". - Oui, il peut y avoir des remontées,
01:01:19 il peut y avoir quelqu'un qui s'effondre,
01:01:21 et puis après il y a cette célébration entre les équipiers,
01:01:23 enfin, il y a vraiment quelque chose de...
01:01:25 - Et puis il y a quelqu'un qui peut être sur un nuage
01:01:27 et tenir plus longtemps. - Oui, voilà, c'est ça.
01:01:29 - Vous vous éliminez au bout d'un certain nombre de touches ?
01:01:31 - Oui, c'est le premier à 45 par équipe.
01:01:33 - Mais le relais se fait à quel moment ?
01:01:36 - En fait, c'est tous les cinq touches,
01:01:38 on va de 5 en 5 en 5, oui. - D'accord.
01:01:41 - Mais on pourrait parler plus longtemps
01:01:44 des spécificités techniques
01:01:46 parce que c'est assez complexe.
01:01:49 - Mais ça, c'est le sujet du deuxième...
01:01:52 du prochain volume.
01:01:54 Il devrait sortir dans pas longtemps d'ailleurs.
01:01:57 - Oui, oui, oui, oui.
01:01:59 Je ne vais pas me risquer à donner une date ici, mais...
01:02:02 - Si, si, ça sort dans pas longtemps.
01:02:04 - OK. Ouais, on est sur début mai ?
01:02:07 - Ouais. - Début mai.
01:02:09 Donc, ouais, dans deux mois. - C'est ça, oui.
01:02:12 - Un mois et demi même, OK.
01:02:15 - Pour revenir sur la question de l'amitié du groupe,
01:02:19 alors ce sont des choses qu'on voit un petit peu
01:02:21 dans le premier volume, même si, bon,
01:02:24 beaucoup de choses tournent autour de votre compétition.
01:02:27 On a quelques personnes autour qui sont là.
01:02:31 Il y a notamment la relation avec Damien Lequinet
01:02:34 qui est là.
01:02:36 Je note aussi, c'était encore une autre décitation
01:02:40 dans le même long post-blog que j'ai déjà cité,
01:02:43 où vous dites "c'est toute la schizophrénie de ce sport
01:02:45 où tu évolues à la fois avec tes potes
01:02:47 et seul contre vents et marées".
01:02:49 C'est aussi comme ça que vous vivez
01:02:51 ou est-ce que vous reniez complètement ce qui est écrit là ?
01:02:53 - Non, non, c'est vrai. En fait, le Scream,
01:02:55 on est un sport individuel où on a besoin
01:02:57 d'un collectif pour progresser.
01:02:59 Donc, oui, c'est totalement ça. On a besoin de ses potes,
01:03:01 mais au final, en tout cas, dans les preuves individuelles,
01:03:03 on est seul sur la piste.
01:03:05 Et au final, dans les preuves par équipe aussi,
01:03:07 c'est-à-dire qu'on est seul sur la piste.
01:03:08 Et quand bien même tout le support que nous offrent
01:03:10 nos coéquipiers, c'est nous qui sommes chargés
01:03:14 de mettre les touches.
01:03:16 Donc oui, il y a quelque chose d'assez schizophrène dans ça.
01:03:19 - Il y a autre chose aussi. A priori, vous connaissez
01:03:21 aussi les autres Screamers,
01:03:23 pas seulement ceux de votre équipe.
01:03:25 Donc il y a aussi...
01:03:27 Et puis pour certains, vous les fréquentez
01:03:29 de manière régulière.
01:03:31 Je trouve qu'il y a aussi la différence qu'on peut avoir
01:03:33 par rapport au manga de sport, dans lequel il y a toujours
01:03:35 l'adversaire qui arrive qu'on ne connaît pas du tout
01:03:37 et qui va surprendre. Donc, vous parliez tout à l'heure
01:03:40 des coups spéciaux de certains.
01:03:42 Donc il y a aussi cet aspect-là qui rajoute,
01:03:44 qui est une dimension un petit peu différente
01:03:46 de ce qu'on peut avoir dans la dramaturgie de manga,
01:03:49 des mangas habituels.
01:03:51 - Oui, par rapport aux adversaires que je rencontre
01:03:53 au fur et à mesure. Oui, c'est vrai que,
01:03:55 comme le disait Madonna, il y a ce côté un peu
01:03:59 kermesse, je dirais plus fraternel.
01:04:01 On se connaît tous, en fait.
01:04:03 Même si on est plus de 200 sur les compétitions,
01:04:06 on se connaît tous.
01:04:08 Après, moi, je commence à me faire vieux.
01:04:10 Les jeunes qui arrivent, je les découvre.
01:04:12 Mais oui, grosso modo, le top 30 mondial,
01:04:16 on se connaît tous.
01:04:18 On est parfois même amenés à partager des moments
01:04:20 en dehors de la piste, à discuter.
01:04:22 Donc, oui, il y a ça aussi. Mais par contre, en revanche,
01:04:24 une fois qu'on a mis le masque, là, on devient
01:04:26 quelqu'un d'autre. Peu importe qui est en face.
01:04:29 Moi, pendant un moment, j'étais en colocation
01:04:31 avec un de mes meilleurs potes qui faisait partie
01:04:34 de mon groupe d'entraînement.
01:04:35 On a été amenés à se rencontrer plusieurs fois
01:04:37 sur des compétitions, même sur des Coupes du monde.
01:04:39 Voilà, une fois que le masque est baissé,
01:04:41 il n'y a plus de colocataire qui tient.
01:04:43 C'est un adversaire et on essaie de gagner son match.
01:04:46 - On devient vraiment un autre derrière le masque.
01:04:48 - Je ne sais pas si on devient un autre,
01:04:49 mais il y a une partie de nous qui s'exprime.
01:04:51 - Alors, moi, je suis quasiment à la fin de mes questions.
01:04:59 Il y a juste une chose.
01:05:00 Donc, la dernière chose, c'est qu'il y a des Jeux olympiques
01:05:04 qui arrivent.
01:05:05 Vous m'avez dit que la sélection tombe le 1er avril.
01:05:09 Vous êtes déjà dans le groupe que j'ai cru voir.
01:05:11 Il y a un groupe qui a été...
01:05:13 Il y a eu la sélection finale des gens qui vont faire le voyage,
01:05:21 le déplacement au métro.
01:05:24 En ce qui vous concerne, ce sera le 1er avril.
01:05:26 - Oui.
01:05:27 On m'a dit récemment que ce sera le 29 mars, dans l'après-midi.
01:05:31 On nous annonce la sélection le matin.
01:05:33 Et l'après-midi, il y aura un communiqué de presse
01:05:38 qui partira et qui annoncera la sélection.
01:05:39 Oui, après, il y a des règles de commission.
01:05:45 En fait, il y a un classement par points qui est fait.
01:05:47 Aujourd'hui, je suis premier au classement par points.
01:05:49 Donc, oui, je vais participer aux Jeux.
01:05:51 Je ne peux pas le crier au effort.
01:05:54 Il faut attendre la décision officielle de la commission de sélection.
01:05:58 Mais selon les règles de la commission,
01:06:00 je suis qualifié pour les Jeux olympiques.
01:06:02 - D'accord.
01:06:03 Vous disiez que vous étiez jugé aujourd'hui
01:06:06 pour un escrimeur, pour un florettiste.
01:06:08 Ça dure combien de temps, une carrière ?
01:06:10 Jusqu'à quel âge on peut continuer à brêter ?
01:06:13 - Mon coéquipier, Arwan Nepechou, qui est dans le manga,
01:06:15 qui a pris sa retraite juste après les Jeux,
01:06:17 il avait 39 ans au moment de Tokyo.
01:06:19 Je ne sais vraiment pas comment il a fait.
01:06:22 Passé 30 ans, ça commence déjà à tirer.
01:06:25 Je vais avoir 33 ans en septembre.
01:06:28 Moi, ça fait 27 ans que je fais de l'escrime.
01:06:30 Ça fait 16 ans que je fais du haut niveau.
01:06:34 Mon corps est fatigué.
01:06:35 J'ai de l'arthrose dans chacune de mes articulations.
01:06:38 Mais après, j'aime encore ce que je fais.
01:06:40 Et c'est ce que j'apprécie avec mon sport.
01:06:43 C'est que c'est un sport qui n'est pas basé que sur le physique.
01:06:45 Donc on peut "palier" ce déclin physique
01:06:49 par l'expérience, par la technique,
01:06:51 par l'intelligence de jeu, le mental,
01:06:53 le fait que je me connaisse aussi en tant qu'escrimeur et individu.
01:06:55 Donc je sais un peu mieux comment me préparer
01:06:57 pour être en forme le jour J.
01:06:59 Donc j'adore mon sport.
01:07:03 Je suis encore ambitieux.
01:07:04 Je pense que lorsque ces différents facteurs n'existeront plus,
01:07:08 je pourrais arrêter.
01:07:10 Mais pour le moment, ce n'est pas encore le cas.
01:07:12 - Et Madonna, vous vous disiez que vous avez essayé de...
01:07:15 Vous vous êtes essayé à l'escrime.
01:07:17 Est-ce que vous avez découvert un plaisir de l'escrime
01:07:20 en travaillant là ou ça reste toujours...
01:07:23 Ou est-ce que le fait d'être très prise sur le deuxième volume
01:07:27 fait que finalement le plaisir passe un peu au deuxième plan ?
01:07:32 - Sur le deuxième volume, on est dans la partie du bouclage,
01:07:36 dans la partie des corrections.
01:07:38 Donc forcément, il n'y a plus de loisirs qui tiennent.
01:07:41 Mais non, j'ai essayé.
01:07:43 Qu'est-ce qu'on peut éprouver quand on essaie de l'escrime ?
01:07:45 On découvre l'humilité.
01:07:47 Parce que j'ai un métier qui est quand même assez passif.
01:07:55 Donc j'ai resté quand même pas mal de temps assise
01:07:58 à faire ce manga.
01:08:00 Et rien que de se mettre dans certaines positions,
01:08:03 notamment celle de garde,
01:08:05 eh bien, ce n'est pas simple.
01:08:08 Mais voilà.
01:08:10 Mais en tout cas, c'est super.
01:08:12 Par contre, c'est top.
01:08:14 Je pense que je vais laisser passer.
01:08:17 Là, maintenant, on va focus sur la sortie,
01:08:20 sur ce qui va se passer un peu après.
01:08:22 Mais c'est clairement quelque chose que je vais garder dans ma routine.
01:08:25 - Est-ce que ça vous a permis de prendre conscience de certaines des choses ?
01:08:28 - Le poids du fleuret, c'est tout bête.
01:08:31 Mais ça, c'est quelque chose qu'on ignore.
01:08:33 Est-ce que c'est difficile à porter ?
01:08:35 L'odeur du gant qu'on prête.
01:08:38 Non, mais vraiment, il y a des choses...
01:08:42 Ne serait-ce que comment on voit à travers un masque.
01:08:46 Alors Enzo, il voit bien.
01:08:48 Moi, au début, bon, ben...
01:08:50 Enfin, il faut s'habituer.
01:08:53 Après, on voit.
01:08:55 - Et puis j'imagine aussi qu'il y a peut-être une espèce d'appréhension.
01:08:58 - Oui, moi, je ne suis pas claustrophobe, mais il y a un côté...
01:09:01 Enfin, je ne sais pas, on est quand même...
01:09:03 Oui, on a la tête dans un masque.
01:09:05 C'est étonnant.
01:09:07 - Est-ce que ça étouffe les sons aussi, dans le rapport ?
01:09:09 Puisqu'on parle de la vision, mais aussi, ces aspects-là ou pas du tout ?
01:09:12 - Moi, ça ne m'a pas...
01:09:14 Ce n'est pas quelque chose qui m'a...
01:09:16 C'est quand même ouvert.
01:09:18 Je veux dire, on respire, il n'y a pas de problème.
01:09:20 - C'est aussi les impacts.
01:09:22 - Ça, du coup, je pense qu'on a été gentils quand même.
01:09:24 Après, la petite, elle avait 12 ans.
01:09:26 Et voilà.
01:09:28 Je n'ai pas touché une seule fois.
01:09:30 Je n'ai pas compris quand elle bougeait.
01:09:32 Ça m'a énervée, mais je pense qu'elle a été gentille.
01:09:36 Maintenant, c'est long à mettre une tenue.
01:09:41 Enfin, moi, je n'ai pas l'habitude, mais même quand je l'ai vue faire...
01:09:44 Enfin, on n'enfile pas un short et des baskets.
01:09:47 Il y a vraiment une préparation.
01:09:50 Ce sont des choses qu'on ne peut pas s'imaginer
01:09:53 et qu'on n'a pas été voir ou demander ou essayer.
01:09:58 Mais le fait d'essayer, honnêtement, c'est aussi parce que
01:10:01 ça fait deux tomes de manga que je dessine des fleurettistes
01:10:04 et qu'à un moment, je me suis dit, bon,
01:10:06 moi, j'ai envie aussi de faire partie de la bande,
01:10:09 de tester le truc.
01:10:11 Mais ce qui est bien, c'est que je pense que c'est un sport
01:10:14 que tout le monde peut tester
01:10:16 sans trop de restrictions, au final.
01:10:19 L'escrime, d'une manière générale.
01:10:21 Après, il y a peut-être des armes qu'on va préférer.
01:10:26 - C'était le fleuret spécifiquement.
01:10:28 Vous n'avez pas décidé de faire un peu la nique à Enzo en disant
01:10:31 "non, mais je vais faire de l'épée plutôt ou du sabre".
01:10:34 - Du sabre, évidemment.
01:10:36 Non, je pense que les trois armes sont intéressantes.
01:10:40 Il y a quand même des similitudes.
01:10:43 Moi, j'ai testé fleuret parce que c'était...
01:10:47 C'est le sujet de mon travail actuel.
01:10:52 Mais il y a un truc sur la rapidité des fleurettistes,
01:10:58 la fluidité, ce côté.
01:11:00 Je pense que, clairement, ce ne sera pas mon truc sur du long terme.
01:11:03 Je ne suis pas assez...
01:11:05 Déjà, je parlais de la vision qu'on a dans le masque.
01:11:08 Mais à un moment, il faut apprendre où est l'autre,
01:11:11 savoir comment il bouge.
01:11:13 Ce n'est pas naturel pour tout le monde
01:11:15 d'avoir ce long truc dans la main
01:11:18 et de devoir aller viser avec.
01:11:21 Vraiment, ce n'est pas si simple que ça.
01:11:24 - Disons que quand on n'a pas commencé à 5 ans,
01:11:27 ce n'est pas si simple que ça.
01:11:29 - C'est ça.
01:11:31 Mais en tant qu'adulte, je pense que c'est intéressant
01:11:33 de faire le test,
01:11:35 de voir où on se place sur une piste.
01:11:39 - Bon.
01:11:41 J'espère que si vous lisez Enzo,
01:11:44 vous aurez aussi envie de vous tester,
01:11:47 de vous découvrir ou d'essayer les scrims.
01:11:51 Enzo, les Jeux olympiques arrivent.
01:11:54 Donc, on va croiser les doigts.
01:11:57 - C'est gentil, merci.
01:11:59 - Est-ce que je pense qu'on a un peu de temps
01:12:02 pour éventuellement des questions dans la salle,
01:12:04 si jamais ça vous tente ?
01:12:06 - Je voulais savoir comment vous avez travaillé
01:12:09 pour les scènes de combat.
01:12:11 Est-ce que du coup, Enzo, vous les avez décrites
01:12:13 de façon détaillée et ensuite, madame a les dessinées ?
01:12:17 Comment vous avez fait ?
01:12:19 Parce que du coup, ça demande beaucoup de détails, j'imagine.
01:12:21 - Du coup, j'ai regardé beaucoup, beaucoup de vidéos.
01:12:24 Oui, c'est intéressant parce que c'était
01:12:27 la grosse angoisse du manga, en fait.
01:12:29 Est-ce qu'on va faire bien ?
01:12:31 Et je pense qu'Enzo, il a décrit
01:12:33 d'une manière, on va dire, assez générale.
01:12:36 Après, nous, on a fait notre travail de recherche
01:12:38 et après, on avait des questions.
01:12:40 Ça se fait plutôt dans ce sens-là parce que,
01:12:42 comme on l'a vu, il ne peut pas penser à ce qu'il connaît par cœur
01:12:46 et à ce que nous, on va...
01:12:48 sur quelles problématiques on va se placer.
01:12:50 Donc il y a eu Tony, entre nous deux, qui...
01:12:53 - C'est intéressant parce que du coup, ça fait...
01:12:56 ça fait quelque chose de...
01:12:59 Je pense que la façon dont on l'a conçu
01:13:02 a contribué au fait qu'on ait réussi à vulgariser un peu les assauts.
01:13:06 - Donc en gros, il y a Enzo qui expliquait à Tony Laurenceau
01:13:09 le co-scénariste
01:13:11 Tony Laurenceau qui traduisait en langage...
01:13:16 - Voilà, pour que ce soit plus simple pour toi
01:13:19 pour dessiner.
01:13:21 - En gros, moi, j'ai...
01:13:22 Mais j'avais une grosse liberté.
01:13:24 Honnêtement, moi, je n'ai pas été trop contrainte.
01:13:27 C'est que j'avais des tableaux avec...
01:13:29 Il y a tant de cases dans une page.
01:13:31 Telle case...
01:13:33 Ce qu'on me disait, globalement, c'est telle case
01:13:36 Enzo galère dans son combat.
01:13:38 La deuxième case, il se fait toucher.
01:13:40 La troisième case, il n'est pas content.
01:13:42 La quatrième case, il touche.
01:13:44 Et après, sur ça, sur les postures et tout...
01:13:47 - Oui, non, et puis les assauts,
01:13:49 je ne me souviens pas vraiment quelle action j'ai fait.
01:13:52 C'est pour ça que Madonna et Tony ont fait ce travail
01:13:55 de documentation et de recherche en vidéo
01:13:58 qui, je pense, t'a beaucoup inspiré.
01:14:00 - Oui, oui, oui.
01:14:01 Tony Laurenceau a passé réellement des heures et des heures
01:14:04 de visionnage des screams
01:14:06 parce qu'on n'a pas toujours le temps en tant que dessinateur.
01:14:09 Et on a choisi les coups où vraiment les arbitres s'excitent
01:14:17 parce que nous, on n'a pas encore le talent
01:14:20 pour définir ce qui est vraiment reconnaissable.
01:14:23 On a vraiment mis les touches qui étaient vraiment très intéressantes
01:14:27 et pour le reste, on s'est permis des petites libertés quand même.
01:14:32 Voilà.
01:14:34 - Déjà, bravo pour Dimanche.
01:14:36 - Merci.
01:14:37 - Vous êtes sportif, photographe, mannequin, kiné.
01:14:42 Vous n'aviez pas peur de vous disperser ?
01:14:45 Puis vous avez aussi une vie de famille.
01:14:47 - Je pense que de l'extérieur, ça peut donner cette impression.
01:14:53 Je sais très bien que je suis attendu au tournant
01:14:56 dans le sens où si je me foire sur une compétition
01:15:01 ou si je me foire sur les JO,
01:15:03 si cette saison, j'avais fait une mauvaise saison,
01:15:06 mon père m'aurait dit, au lieu de faire tout ce qu'il fait,
01:15:09 il aurait mieux fait de s'entraîner.
01:15:11 Aujourd'hui, j'ai 32 ans.
01:15:12 Comme vous l'avez dit, j'ai une vie de famille.
01:15:14 Le plus important, c'est que je sois heureux.
01:15:16 C'est-à-dire que je suis heureux en faisant tout ce que je fais.
01:15:19 Je sais très bien que le plus important pour moi,
01:15:22 après ma famille, c'est les screams.
01:15:24 Parce que sans les screams, je n'aurais pas eu l'opportunité
01:15:26 d'écrire un manga, de défiler,
01:15:29 de créer ce podcast, de créer cette association.
01:15:35 Je n'ai pas de vue que le plus important, c'est les screams.
01:15:39 Après, je suis très conscient que c'est ça, le sport.
01:15:43 Quand tu gagnes, on te donne raison.
01:15:45 Il est bien sportif, il fait plein de choses.
01:15:47 En plus, il arrive à performer.
01:15:49 Quand tu perds, c'est normal.
01:15:52 S'il ne s'était pas dispersé,
01:15:54 il aurait peut-être été plus performant.
01:15:56 Après, c'est pareil.
01:15:58 Si je ne faisais que de les screams,
01:16:00 si je perdais, on aurait trouvé quelque chose à redire.
01:16:02 Honnêtement, je suis assez détaché
01:16:05 du "quand pense-t-on" de ce que je fais.
01:16:07 Pour moi, le plus important,
01:16:09 c'est que je sois heureux et épanoui.
01:16:11 Et le reste, je m'en fiche un peu.
01:16:14 - J'avais une petite question
01:16:17 sur la manière dont vous aviez transformé l'homme Enzo
01:16:21 en personnage de manga.
01:16:23 Là, on est dans la jeunesse.
01:16:25 J'imagine que le personnage va évoluer.
01:16:28 La première question, c'est comment ça s'est passé ?
01:16:31 Enzo pose, on fait le manga.
01:16:35 On le transforme en personnage de manga.
01:16:39 Il n'y a pas forcément ce réalisme-là.
01:16:42 Et la deuxième question, c'est Enzo,
01:16:44 qu'est-ce que ça fait la première fois
01:16:46 quand on se voit dessiner,
01:16:48 quand on se voit devenir un personnage ?
01:16:51 - Moi, j'ai quand même un truc important.
01:16:54 - C'est vrai que tu étais un peu gênée au début.
01:16:56 Tu te demandais ce que ça allait.
01:16:58 - J'ai rencontré Enzo
01:17:01 pour la première de la sortie du premier dessin.
01:17:04 Je l'ai eu au téléphone.
01:17:06 Il avait l'air très sympa.
01:17:08 Mais on me dit que c'est un champion olympique.
01:17:11 Je n'y suis pas dans ce délire de sportif.
01:17:13 Je me dis "Oh là là".
01:17:15 Après, on me dit qu'il est mannequin.
01:17:17 Après, on me dit qu'il est photographe.
01:17:19 Je me dis "Ce mec va bouffer le monde".
01:17:22 Je viens d'une petite ville de Bretagne.
01:17:25 J'habite au bord de l'océan avec les mouettes.
01:17:28 On est tranquilles chez nous.
01:17:30 On sort en claquettes.
01:17:32 Ce n'est pas un souci.
01:17:34 J'angoissais un peu.
01:17:36 On s'y voit au téléphone.
01:17:38 Je me suis dit "Ça va, il a l'air cool".
01:17:41 Je commence à envoyer des dessins.
01:17:43 Des dessins un peu...
01:17:45 Le héros.
01:17:47 Je sentais que...
01:17:49 Je me suis dit "Le gars est humble".
01:17:52 Finalement, tu n'avais pas l'air à l'aise avec le côté...
01:17:55 Si je faisais un personnage trop spectaculaire,
01:17:59 j'avais l'impression que...
01:18:01 - Je pense aussi que c'est lié.
01:18:04 C'est ce que je disais tout à l'heure.
01:18:06 Quand on...
01:18:07 Dans le sport de haut niveau,
01:18:09 on ne peut pas te permettre de te regarder.
01:18:12 Sortir de toi, de te regarder.
01:18:14 De se dire "Je suis trop beau, je suis trop fort".
01:18:17 Si tu fais ça, tu n'avances pas.
01:18:19 C'est important de se remettre en question.
01:18:22 Honnêtement, je suis très content de comment tu m'as dessiné.
01:18:26 - Après, il a un style...
01:18:29 Qui est reconnaissable.
01:18:30 Pour le manga, de toute manière,
01:18:32 ça ne ressemble pas aux gens.
01:18:34 Il faut régler cette question.
01:18:36 C'est les cheveux.
01:18:38 On a fait la forme des yeux en amande.
01:18:41 Mais globalement, non.
01:18:43 Ça ne ressemblera jamais à une vraie personne.
01:18:46 - Et puis honnêtement...
01:18:48 - C'est le style.
01:18:50 - Je suis très content de comment tu m'as représenté.
01:18:53 Mais je me suis moins attaché...
01:18:57 A la forme qu'au fond.
01:18:58 - Oui, c'est ça.
01:19:00 - Quand je dis le fond,
01:19:02 je parle aussi des dessins et de la représentation.
01:19:05 Mais pour moi, c'était pas...
01:19:07 Comme je le dis...
01:19:09 Limite, ce n'était pas mon choix
01:19:12 d'être en couverture comme ça,
01:19:14 avec mon nom en gros devant.
01:19:16 Encore une fois, il y a des contraintes économiques.
01:19:19 C'est plus vendeur que quelque chose de plus subtil.
01:19:22 - On ne va pas se mentir.
01:19:25 C'est le héros d'un manga.
01:19:26 C'est un homme de couleur.
01:19:28 Je suis une femme qui ne dessine pas du manga pour filles.
01:19:31 On ne va pas se mentir que c'est quelque chose
01:19:34 que j'avais envie de souligner.
01:19:36 On n'est pas nombreuses à accéder au domaine du sport,
01:19:40 à accéder au domaine masculin.
01:19:43 Enfin...
01:19:45 Il y a un petit pied de nez quand même là-dessous.
01:19:49 Pour les jeunes qui...
01:19:51 - C'est vrai que maintenant que tu me dis ça,
01:19:54 c'était même pas un sujet que tu sois une femme
01:19:57 qui dessine un manga.
01:19:59 Maintenant que tu me le dis, oui, c'est vrai que...
01:20:02 Je pense que je ne connais pas du tout ce milieu.
01:20:06 - On est beaucoup à prendre des pseudos.
01:20:09 Quand c'est fait par une femme,
01:20:12 surtout dans le sport ou dans les choses...
01:20:15 Où il y a beaucoup de combats,
01:20:18 il y a une crainte que ce soit moins bien ou pas assez...
01:20:22 Mais attention, je ne suis pas en train de militer.
01:20:25 Je trouve que c'était quand même important
01:20:28 de faire cette couverture-là.
01:20:30 - Il y a une association des autrices de bandes dessinées
01:20:33 contre le sexisme qui s'est mise en place.
01:20:36 - Qui est fort présente.
01:20:38 - Oui, c'est très présent.
01:20:40 Il y a une vraie...
01:20:42 Même au niveau de l'illustration,
01:20:45 il y a le gap de rémunération entre les hommes et les femmes.
01:20:49 Il y a une monstreuse capacité.
01:20:52 Il y a un bloc énorme à faire.
01:20:55 Et en plus, il y a une forme de misogynie
01:20:58 chez certains acteurs de bandes dessinées qui n'est pas très...
01:21:02 - Et qui n'a eu à aucun moment dans la création de "Monde d'hommes".
01:21:06 J'ai travaillé avec deux hommes, Enzo et Tony Lourenço.
01:21:10 L'éditeur, c'est aussi un homme.
01:21:12 Franchement, j'étais un collègue au même titre que tout le monde.
01:21:16 C'est quand même appréciable.
01:21:18 - C'est ce que je te dis, mais pour moi, ça n'a jamais été un sujet.
01:21:22 - Il n'y a pas de machine à faire des dessins.
01:21:25 Mais c'est vrai que c'est quand même une notion
01:21:29 qu'on peut souligner.
01:21:32 - Une dernière question.
01:21:36 Quand vous avez parlé de la mythologie de ce qui se passe dans une équipe,
01:21:41 je suis fan de rugby.
01:21:43 Il y a eu dernièrement une série qui est passée sur Netflix
01:21:48 sur le mode de "Drive to survive".
01:21:50 On a fixé toute une série de documentaires sur...
01:21:55 Il y a "Full Contact", qui est sur le tournoi Destination l'année dernière.
01:22:00 Il y avait pas mal d'observateurs qui disaient que c'est dommage
01:22:03 parce que les caméras vont dans le vestiaire
01:22:05 et vont casser quelque chose qui est sacré,
01:22:07 qui n'appartient qu'à l'équipe.
01:22:09 Dans le fait qu'il y a des choses qui se disent entre nous
01:22:12 et qui ne doivent pas exister en dehors.
01:22:14 C'est quelque chose qu'il y a aussi.
01:22:16 Vous parlez de mythologie, c'est quelque chose qui parle dans l'équipe.
01:22:19 Est-ce que ça vous embêtera d'avoir quelqu'un qui vient avec une caméra
01:22:25 qui, je pense aux yeux dans les bleus aussi,
01:22:28 ce documentaire connu sur l'équipe de France à la Championne du Monde en 98
01:22:32 où on rentre dans l'intimité du sportif.
01:22:36 Est-ce que vous estimez qu'il y a des choses qui vous appartiennent
01:22:39 rien qu'à vous et qui ne devraient pas être vues ?
01:22:45 Je pense qu'en tant que sportif, il y a déjà énormément de choses
01:22:51 qu'on garde pour nous, qu'on garde dans notre tête.
01:22:54 Parce que quand on fait du sport de haut niveau,
01:22:57 il faut être maître de ses émotions.
01:22:59 Donc il y a déjà énormément de choses qu'on garde pour nous.
01:23:03 Après, maintenant avec la capacité qu'on a à filmer,
01:23:07 on peut filmer, on peut faire des documentaires avec des téléphones,
01:23:10 des choses qui sont beaucoup moins invasives que des grosses équipes de tournage.
01:23:14 On le voit en ce moment, il y a une multiplication des documentaires sportifs.
01:23:19 Je trouve ça intéressant de donner accès à une plus large partie de notre sport,
01:23:30 donc notre intimité.
01:23:32 Je sais qu'au dernier Championnat du Monde à Milan,
01:23:35 et là sur la Coupe du Monde à Paris,
01:23:37 j'avais une caméra avec moi vraiment au plus proche dans le vestiaire.
01:23:41 Mon coach avait un micro, donc ils ne peuvent pas tout passer.
01:23:45 Il y a des moments où c'est pas si bête.
01:23:48 Mais je dis toujours qu'il n'y a pas de ressources humaines dans le sport de haut niveau.
01:23:55 À un moment donné, c'est une question de vie ou de mort,
01:23:58 c'est toucher ou être touché.
01:24:00 Notre entraîneur va utiliser des leviers de communication
01:24:04 propres à chacun pour nous permettre de nous transcender.
01:24:07 Par exemple, moi, ça va être l'ego.
01:24:09 Il y a des choses qui vont révéler mon ego, qui vont me faire me dépasser.
01:24:13 Quelqu'un d'autre, ça sera la confiance.
01:24:15 Il va faire en sorte de donner confiance à un tireur.
01:24:17 Donc il y a des choses qui ne sont pas forcément politiquement correctes.
01:24:21 Mais non, je trouve que c'est peut-être des choses un peu plus puristes.
01:24:26 Cette histoire de vestiaire sacré, bon, OK.
01:24:30 Pour moi, il n'y a rien qui est sacré.
01:24:32 Pour moi, c'est cool de montrer qu'il y a quelque chose de pas tangible dans le sport,
01:24:37 parce qu'on va chercher des choses au fond de nous.
01:24:40 Ce n'est pas pour mettre une distance entre le sportif et les autres personnes,
01:24:44 mais si c'était facile, tout le monde le ferait.
01:24:47 C'est ce qui fait la différence entre les champions et le reste.
01:24:50 J'ai l'habitude de dire que les champions sont fous.
01:24:52 Ils sont capables de subir des choses que la plupart des gens ne sont pas prêts à subir,
01:24:57 ne peuvent pas subir, ne peuvent pas encaisser.
01:24:59 Ils sont prêts à aller chercher des choses au fond d'eux
01:25:01 que la plupart des gens ne peuvent pas extraire.
01:25:04 Je trouve ça intéressant à montrer pour qu'on puisse peut-être comprendre
01:25:08 les ressorts qui font la différence entre les champions et les autres.
01:25:12 Dans le sport de haut niveau, il y a des mecs qui sont hyper talentueux,
01:25:15 qui sont forts techniquement, tactiquement, mentalement,
01:25:17 qui sont hyper forts en entraînement.
01:25:19 Une fois qu'ils arrivent en compétition,
01:25:21 ils n'arrivent pas à reproduire 10% de ce qu'ils reproduisaient en entraînement.
01:25:24 On les appelle les champions du monde de l'entraînement.
01:25:26 Pourquoi ?
01:25:27 Parce que les champions, ils aiment la compétition.
01:25:32 L'adrénaline ne les paralyse pas, au contraire,
01:25:34 ça leur amène à voir le truc un peu plus rapidement,
01:25:36 à faire la chose un peu plus fort, à durer un peu plus longtemps
01:25:38 que le reste du monde.
01:25:40 Je trouve ça intéressant de montrer ça à l'image.
01:25:43 Merci de partager tout ça avec nous.
01:25:46 S'il n'y a pas de questions, encore un immense merci à Enzo et Madonna
01:25:51 de s'être prêté à l'exercice.
01:25:54 Merci à vous d'avoir été là.
01:25:56 Merci beaucoup.
01:25:57 Bonne soirée.
01:25:59 [SILENCE]