Pour l’ancien policier Marc La Mola, la guerre face aux trafiquants de drogue à Marseille est déjà perdue «depuis plus de 20 ans». Selon l’auteur du livre «Extrême Onction», la cité phocéenne est «totalement perdue».
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00:00 – Oui évidemment que j'utiliserais les mêmes termes.
00:03 Et puis pour revenir sur les propos de la magistrate
00:06 en disant que nous étions en train de perdre la guerre,
00:08 moi je dirais que nous l'avons perdue déjà depuis plus de 20 ans la guerre.
00:11 Alors j'ai un peu l'impression que ces gens-là découvrent ce matin
00:15 en ouvrant leur volet que Marseille est en proie au narcotrafic,
00:21 au règlement de comptes, à une criminalité, une délinquance
00:24 et une immigration totalement incontrôlée et incontrôlable.
00:28 Il y a 20 ans qu'on est dans cette situation, je connais bien Marseille,
00:31 j'y suis né, j'y ai grandi, j'ai travaillé dans les quartiers Nord,
00:34 j'ai même grandi dans les quartiers Nord, j'ai vu la paupérisation,
00:37 la lente paupérisation des cités
00:40 et la montée exponentielle de la criminalité et de la violence.
00:45 Donc on a tout abandonné, on a tout lâché, on a tout laissé à l'abandon
00:51 et on est aujourd'hui dans cette situation-là.
00:54 Alors c'est un peu, je dirais, je rigeonne d'entendre des magistrats
00:59 qui pendant des années ont été plutôt laxistes,
01:02 aujourd'hui de hurler au secours et en appelant à créer des prisons de sécurité,
01:09 des choses qui à mon sens n'auront jamais lieu dans notre pays,
01:12 parce que c'est inimaginable.
01:15 C'est pas que je sois opposé, mais je pense que c'est pas réalisable.
01:19 – Marc Lamona, pardon je vous interromps,
01:21 mais le constat que vous faites est évidemment très éclairé,
01:25 il n'y a pas de souci là-dessus,
01:27 que Marseille soit en proie à une délinquance exponentielle,
01:31 à des trafics, à des règlements de comptes, etc.,
01:33 tout ça, chacun l'a compris.
01:35 Personnellement, je n'avais jamais entendu des observateurs
01:38 aussi éclairés que ces magistrats marseillais dire, en revanche,
01:42 et on l'a écrit en bas de l'écran, "la guerre est perdue".
01:45 Ça, je ne l'avais jamais entendu de la bouche de personnes
01:48 qui sont en première ligne dans cette lutte contre le trafic de drogue.
01:50 La guerre, elle est perdue, c'est terrible de dire ça.
01:54 – C'est ce que je vous disais au début de mon propos,
01:56 oui, nous l'avons perdue, mais il y a 20 ans.
01:57 Aujourd'hui, on réalise, ces gens-là réalisent,
02:01 alors abondant évidemment que la guerre…
02:03 – Qu'est-ce qui aurait dû être fait il y a 20 ans alors ?
02:05 – Pardon ?
02:06 – Qu'est-ce qui aurait dû être fait il y a 20 ans ?
02:08 – Ah ben, c'est surtout ce qui n'aurait pas dû être fait,
02:10 c'est-à-dire l'abandon de ces cités,
02:12 l'abandon d'une police efficace et républicaine,
02:15 la fonte des effectifs, et puis d'autres stratégies
02:19 et des volontés de sécurité beaucoup plus adaptées,
02:21 beaucoup plus efficaces à celles qui ont été établies.
02:24 Le début de la fin de tout cela,
02:26 c'est l'arrivée de Nicolas Sarkozy à la place Bromeau,
02:31 avec la fin de la police de proximité,
02:34 et tout ce qui en a suivi,
02:35 avec des stratégies de matraquage du consommateur
02:38 plutôt que de privilégier leur enseignement criminel et l'investigation.
02:42 Ce sont les deux seules méthodes pour lutter efficacement contre les trafics,
02:46 matraquer le client, évidemment il faut le faire,
02:49 mais ça n'a aucun intérêt et aucune efficacité réelle sur le trafic.
02:54 On a abandonné cela, on a choisi d'autres stratégies
02:57 qui aujourd'hui nous ont conduit à cette situation qui est, à mon sens…
03:03 moi je dis que Marseille est perdue, je connais très bien cette ville,
03:06 Marseille est totalement perdue.
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