Le ministre délégué aux Transports Patrice Vergriete ne veut pas de période "sans droit de grève" dans les transports : "Je préfère en appeler à la responsabilité des acteurs". Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-mercredi-28-fevrier-2024-8376537
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00:00 - Il est 7h48, Sonia De Villers, votre invitée ce matin, et le nouveau ministre délégué
00:09 chargé des transports.
00:10 - Voilà, ancien ministre du logement, et lors du dernier remaniement, il se voit confier
00:14 les transports à la place de Clément Beaune.
00:16 Bonjour Patrice Vergritte.
00:18 - Bonjour.
00:19 - La question des transports, vous l'avez abordée en tant que maire de Dunkerque, et
00:23 vous avez été maire de Dunkerque jusqu'en 2023, de 2014 à 2023, vous avez mis en place
00:28 la gratuité des transports.
00:30 Une opération qui a porté ses fruits, faisant revenir les Dunkerquois en centre-ville.
00:34 Alors la gratuité des transports, est-ce que vous allez inciter d'autres villes, d'autres
00:38 grandes métropoles, en tant que ministre, à s'y mettre ?
00:42 - Ce qui est important c'est de pouvoir réussir le report modal vers le transport collectif.
00:47 Parce que si on doit développer la voiture électrique, ça ne suffira pas dans le cadre
00:50 de la transition écologique, donc il faut aussi développer d'autres modes de transports,
00:53 et notamment le transport collectif.
00:54 Les situations de chacun des territoires sont différentes.
00:57 Il n'y a pas deux territoires qui se ressemblent en la matière.
00:59 A Dunkerque, le problème c'était un problème de demande.
01:01 Finalement, quand on avait une voiture, on ne pensait même pas qu'il y avait un bus.
01:05 Et donc l'outil de la gratuité était le plus efficace à Dunkerque.
01:08 La preuve c'est qu'il a marché.
01:09 Plus de 125% de fréquentation en 5 ans, et ça continue de monter.
01:12 On développe une culture du transport collectif, on change les comportements.
01:16 Moins 65% d'incivilité, 50% de report modal de la voiture, enfin que des chiffres ultra
01:21 positifs sur la gratuité des transports.
01:23 C'est ça qu'il fallait faire à Dunkerque.
01:25 Dans d'autres territoires, il faut trouver la recette.
01:27 Montpellier vous a suivi.
01:28 Montpellier a suivi, Calais a suivi.
01:30 Mais d'autres territoires, si vous prenez par exemple Paris, l'agglomération parisienne,
01:34 si vous faites de la gratuité, vous aggravez le problème.
01:35 Parce que vous augmentez la demande, mais vous n'avez pas l'offre.
01:38 Donc ce qui est très important, c'est toujours trouver le bon outil qui correspond à la
01:41 situation d'un territoire.
01:42 A Dunkerque, c'était la gratuité.
01:43 Les sujets qui fâchent maintenant, à peine arrivés au ministère du transport, vous
01:46 affrontez déjà une grève des contrôleurs, SNCF, en pleine vacances scolaires.
01:51 Et voilà que ressurgit le débat sur le droit de grève.
01:54 Il lit qu'aux Républicains réclament des mesures qui permettent de le suspendre.
01:58 Le président du groupe centriste au Sénat dépose même une proposition de loi en ce
02:02 sens.
02:03 Quand dites-vous, vous, ministre des Transports, il faut des périodes sans droit de grève
02:08 dans les transports ?
02:09 S'il y avait des périodes, il faudrait les choisir.
02:11 Et qu'est-ce qu'on privilégie ? Les vacances ou alors le quotidien des Français ?
02:14 Moi, je préfère en appeler à la responsabilité des acteurs.
02:17 Vous savez, la SNCF fait partie de notre patrimoine national.
02:20 C'est un joyau, je le dis très souvent.
02:21 Et donc ça appelle la responsabilité.
02:24 Responsabilité de la direction, pour animer un dialogue social sérieux, faire des propositions
02:29 sérieuses, écouter les salariés.
02:30 Mais aussi responsabilité au niveau des syndicats.
02:32 Effectivement, la grève à la SNCF, parce qu'on tient le pouvoir de circuler des Français,
02:39 la capacité à pouvoir se déplacer librement en France, qui est aussi un droit.
02:43 Quand on détient ça, la grève c'est l'ultime recours.
02:47 Et ça, il faut que les syndicats aussi fassent preuve de responsabilité.
02:50 Moi, aujourd'hui, en tant que ministre des Transports, je rappelle surtout à la responsabilité
02:54 des deux partis.
02:55 Voilà, la grève ne doit pas être le début de la négociation.
02:57 Et s'il y a négociation, on ne fait pas grève.
02:59 C'est l'ultime recours.
03:00 La question du droit de grève, Patrice Vergrid, c'est aussi une question profondément politique.
03:05 Vous avez vu, il y a eu des réactions plutôt favorables dans votre gouvernement.
03:08 De la nouvelle ministre déléguée des Outre-mer, de la ministre des Relations avec le Parlement,
03:12 qui a dit « oui, c'est vrai, on peut s'interroger sur ce fameux recours au droit de grève quand
03:16 on a une mission de service public ». Le président des sénateurs macronistes dit vouloir réfléchir
03:21 à toutes les évolutions qui permettraient d'encadrer ces grèves intempestives.
03:26 Je rappelle, Patrice Vergrid, que vous êtes fils d'ouvrier, que vous arrivez de Dunkerque,
03:31 que vous arrivez du Parti Socialiste.
03:33 L'aile gauche de la Macronie, c'est vous.
03:35 Comment vous réagissez ?
03:36 Eh bien, moi, j'en appelle à la responsabilité des acteurs.
03:39 C'est ma position aujourd'hui.
03:40 Je ne pense pas qu'il y ait besoin de réformer le droit de grève aujourd'hui.
03:43 J'ai envie de faire confiance aux acteurs aujourd'hui.
03:46 J'ai envie de leur faire confiance.
03:47 Je rencontrerai d'ailleurs très prochainement les syndicats, y compris les syndicats du
03:50 rail et on évoquera ces situations.
03:52 Donc, pas de réforme du droit de grève pour l'instant.
03:56 Mais une inflexion droitière du gouvernement.
04:00 L'aile gauche de la Macronie, elle a été, comment dire, plutôt décapitée depuis le
04:05 vote de la loi Immigration.
04:06 Vous vous remplacez d'ailleurs dans votre ministère Clément Beaune, qui incarnait
04:10 aussi l'aile gauche de la Macronie et qui a dit son désaccord avec la loi Immigration
04:14 et qui n'est plus au gouvernement aujourd'hui.
04:15 Est-ce que ça vous pose un problème moral ? Est-ce que ça vous pose un problème politique
04:19 ?
04:20 - Je pense toujours à la capacité de débassement du président de la République et du Premier
04:23 ministre.
04:24 Vous savez, je viens d'un territoire, vous l'avez dit tout à l'heure, Dunkerque, dans
04:27 lequel le président de la République a réussi à développer l'industrie, à réindustrialiser
04:31 ce territoire.
04:32 Il nous a rendu de l'espoir.
04:33 20 000 emplois qui arrivent à Dunkerque, un territoire qui perdait des habitants depuis
04:37 presque 30 ans, un territoire où on voyait l'emploi industriel partir, diminuer.
04:42 Ça, je suis désolé.
04:43 Si on ne dit pas que c'est de gauche, je ne sais pas ce que c'est.
04:45 Donc, effectivement, redonner l'espoir à un territoire industriel comme le Dunkerquois,
04:48 il y a aussi cette sensibilité.
04:49 La capacité du débassement, moi, je l'ai vécu sur mon territoire et j'y crois.
04:52 - Dernière question sur la grève à la RATP comme à la SNCF.
04:55 Il y a des inquiétudes sur des potentielles grèves pendant les Jeux Olympiques.
04:59 À la SNCF, les syndicats entendent mettre la pression avec des grèves perlées jusqu'aux
05:03 Jeux Olympiques.
05:04 À la RATP, il y a un syndicat, qui est même la CGT-RATP, qui a d'ores et déjà déposé
05:11 un préavis de grève jusqu'à la fin des Jeux Paralympiques.
05:13 Est-ce que vous êtes inquiet sur le déroulement des Jeux en termes de transport ?
05:18 - Absolument pas.
05:19 - Absolument pas parce que, vous le disiez tout à l'heure, je viens d'une culture ouvrière.
05:22 Et je ne crois pas un seul instant que les ouvriers, que les salariés, que les syndicats
05:26 mettront en péril l'image de la France ou l'image de leur entreprise aux yeux du monde
05:29 entier.
05:30 Je n'y crois pas un seul instant.
05:31 Ce n'est pas du tout dans la culture ouvrière.
05:32 - Ça signifie que s'il y a grève, on met les Jeux en péril ?
05:34 - Il n'y aura pas grève.
05:35 - Il n'y aura pas grève ?
05:36 - Il n'y aura pas grève.
05:37 Ce n'est pas du tout dans la culture ouvrière.
05:38 Ou alors je change de pays et je ne comprends plus rien au monde ouvrier.
05:41 Mais très sincèrement, dans la culture ouvrière, on ne donne pas l'image de son pays.
05:45 On est attaché à l'entreprise quand on est un ouvrier.
05:47 On est attaché à son entreprise quand on est un syndicaliste.
05:50 On est attaché aussi à l'image de son pays.
05:52 Et je ne crois pas un seul instant qu'il y aura des grèves au moment des Jeux Olympiques.
05:55 - Patrice Vergrit, vous souhaitez une grande convention citoyenne sur la mobilité et les
06:02 transports.
06:03 Vous nous l'annoncez ce matin.
06:04 Pourquoi une convention citoyenne ?
06:05 - Je trouve que sur les questions de mobilité, il y a beaucoup de questions qui se posent,
06:08 des questions essentielles.
06:09 Comment on va faire évoluer les autoroutes demain ?
06:12 Quand on paiera le péage demain, à quoi ça doit servir ?
06:15 Est-ce qu'une partie doit aller financer le réseau ferroviaire pour développer le
06:18 train ?
06:19 Est-ce que finalement, demain, quand on va payer les péages, est-ce que celui qui va
06:23 travailler doit payer le même prix que celui qui finalement part en vacances ?
06:28 Est-ce qu'on doit continuer à développer les trains à grande vitesse pour relier les
06:32 métropoles ?
06:33 Ou est-ce qu'on doit mettre le paquet sur les villes moyennes, le lien avec les villes
06:36 moyennes et les petites villes ?
06:38 Toutes ces questions sont des débats de société à l'échelle nationale.
06:41 Ce n'est pas du travail fin de terrain au niveau local.
06:44 C'est un grand débat de société et de justice.
06:46 Et je trouve que cette question des mobilités qui a été un peu abordée pendant la convention
06:51 citoyenne sur le climat, mais j'ai envie de dire, de manière très générale, un
06:55 peu yaka-focon.
06:56 Et si on rentrait un peu plus dans le détail sur les mobilités et qu'on allait justement
07:00 poser ces questions et trancher ces questions au débat national ?
07:03 - Alors justement, monsieur le ministre, vous citez la convention citoyenne pour le climat.
07:06 On pourrait citer aussi celle sur la fin de vie.
07:09 Justement, ces deux questions qui précisément ne semblent pas vraiment avancer à grands
07:14 pas, ni pendant le premier quinquennat, ni lors du second, les Français sont peut-être
07:19 un peu échaudés.
07:20 Vous ne pensez pas qu'il y a un effet déceptif de ces conventions citoyennes ?
07:23 - Mais précisément non.
07:25 Justement pour ça.
07:26 Quand vous regardez la convention citoyenne sur le climat, et je reste sur les mobilités,
07:30 quand vous regardez les mesures qui sont proposées, elles ne sont pas financées.
07:32 Elles sont du « il faut que ».
07:34 Parce qu'on est resté sur un sujet extrêmement large et qu'on n'est pas allé au bout de
07:39 la question.
07:40 Moi justement, je propose d'aller au bout du débat national.
07:42 Les questions que je vous ai posées, ce n'est pas « qu'est-ce qu'on fait pour le climat
07:45 ? », c'est concrètement « est-ce qu'on privilégie le développement des TGV ou
07:50 est-ce qu'on privilégie le développement des villes moyennes et petites villes ? ». Là,
07:52 la réponse est simple, et c'est une question de débat de société.
07:55 Et moi je crois aux conventions citoyennes si on reste sur des questions qui sont des
07:59 questions de société à l'échelle nationale.
08:00 C'est ça qui est intéressant.
08:02 Et j'ai envie de faire cette proposition au président de la République et au Premier
08:04 ministre pour justement qu'on arrive sur des questions qui seront très concrètes
08:07 pour les citoyens.
08:08 - Alors, questions très concrètes mais quid de l'argent et des finances pour, derrière,
08:14 mettre en œuvre les propositions, les envies et les demandes et les requêtes des Français
08:18 que vous allez interroger ? Bruno Le Maire a annoncé 10 milliards d'économies.
08:22 On sait déjà parmi les coupes budgétaires, il va y avoir la mobilité durable.
08:26 Concrètement, ça va donner quoi, Monsieur le Ministre ? Qu'est-ce qu'on va arrêter
08:30 comme projet ? À quoi on va renoncer ?
08:31 - Alors, on a un budget 2024 en hausse.
08:34 Alors, effectivement, aujourd'hui, la situation budgétaire de la France nécessite de faire
08:38 des choix, des arbitrages.
08:39 C'est vrai qu'il aurait pu être plus en hausse mais on est en hausse d'un milliard
08:43 sur le budget des transports aujourd'hui.
08:45 Donc, on voit qu'on garde ces priorités qui sont importantes.
08:48 Donc, je ne peux pas me plaindre d'avoir un budget en hausse d'un milliard.
08:51 Alors, certes, ce n'est pas un milliard trois mais c'est un milliard.
08:53 Et je pense qu'effectivement, les priorités sont quand même clairement affichées.
08:56 C'est-à-dire, la rigueur budgétaire, elle ne l'empêche pas.
08:58 Et puis, le respect des équilibres budgétaires n'empêche pas de pouvoir définir ses priorités.
09:03 Le transport en fait partie.
09:04 - Deux petites questions très concrètes pour l'avis des usagers des transports en
09:07 commun.
09:08 Annonce de la SNCF depuis la mi-février le nombre de bagages et leur taille sont limitées
09:12 dans les TGV, inouï, et le TER.
09:14 Alors, moi, je me dis, vu le prix des billets, quand on est une famille, qu'on a trois enfants,
09:19 que la petite dernière est en poussette, que le grand trimballe sa guitare ou sa planche
09:23 de surf… - La contrebasse !
09:25 - La contrebasse ! Eh ben, on prend la voiture !
09:28 - Oui, la difficulté est un problème de sécurité.
09:31 Et effectivement, au cas où il y a un problème, il faut pouvoir évacuer.
09:35 Et donc, la SNCF est en train d'engager ce dialogue.
09:39 Mon prédécesseur Clément Beaune, d'ailleurs, était intervenu là-dessus, notamment pour
09:42 les contrebassistes.
09:43 Donc, vous voyez, c'est une question essentielle.
09:44 On va continuer à travailler sur cette question pour trouver à la fois une solution sécure
09:48 pour les passagers, et à la fois qui permette d'avoir le plus de flexibilité.
09:51 - Et le malaise des voyageurs où on n'arrête plus les métros ? Ça fait beaucoup causer
09:55 depuis hier.
09:56 - Oui.
09:57 - Oui.
09:58 D'accord.
09:59 Merci Monsieur le Ministre.
10:01 - Et merci Sonia De Villers.
10:02 7h58.
10:03 *musique*