• il y a 10 mois
Dialogue Citoyen est un magazine mensuel qui cherche à recréer du lien entre les citoyens et les élus de la Haute Assemblée. Pendant 1h, 9 citoyens et 6 sénateurs échangent sur un thème fort : Covid, éducation, sécurité, système de santé, agriculture et alimentation... L'occasion pour les Français de faire part de leur expérience, de leurs difficultés au quotidien et de demander des comptes aux élus chargés de faire la loi. Année de Production : 2023

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00:00 [Musique]
00:09 Bonjour, bonjour et bienvenue dans Dialogue Citoyen.
00:13 Aujourd'hui, nous allons nous pencher sur un sujet qui nous concerne tous au quotidien,
00:17 comment relever le niveau des élèves en France.
00:20 Début décembre, le classement PISA a montré une chute historique du score de la France,
00:25 surtout en mathématiques, depuis Gabriel Attal, l'ex-ministre de l'Éducation nationale,
00:31 devenu Premier ministre, a sonné la mobilisation générale.
00:35 Il assure faire de l'école la mère des batailles.
00:38 Alors, est-ce que le niveau baisse vraiment ?
00:40 Dans quelles conditions les élèves français étudient-ils ?
00:44 Quel bilan faire des dernières réformes ?
00:46 Et surtout, quelles pistes de solutions envisager pour sortir du zéro pointé ?
00:50 Pour témoigner de cette réalité, cinq citoyennes et citoyens vont intervenir dans cette émission.
00:57 Ils sont tous connectés, vous les voyez, des quatre coins de la France.
01:03 Dans cette émission, nous allons être avec Amel.
01:06 Amel qui vit à Paris, qui a quatre enfants, la voici,
01:11 et qui a fait pour eux le choix de l'école privée.
01:14 Elle va nous expliquer pourquoi.
01:17 Nous serons également avec Julie, qui enseigne dans une école publique de Lyon,
01:22 où les classes sont dédoublées.
01:23 On va voir avec elle si ça fonctionne, on va faire le bilan.
01:27 Nous serons aussi avec Michel.
01:29 Michel qui est rétraité et bénévole à Toulon, dans une association
01:34 qui s'occupe du soutien scolaire pour 80 enfants.
01:38 Et vous allez voir qu'ils en ont besoin.
01:40 Nous serons aussi avec Mohamedou.
01:43 Mohamedou qui est, lui, professeur de mathématiques.
01:46 Il enseigne au niveau collège à Angers,
01:49 où il fait face à la baisse du niveau des enfants.
01:53 Et enfin, nous aurons Nicolas avec nous.
01:56 Nicolas qui a décroché en première.
01:58 Il va nous expliquer ce qui lui a manqué pour poursuivre ses études.
02:03 Face à eux, trois sénatrices et sénateurs pour échanger
02:06 sur l'état de notre système scolaire.
02:08 Max Brisson, sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques,
02:12 vous êtes vice-président de la Commission de la Culture et de l'Éducation.
02:16 Vous êtes également enseignant de métier.
02:18 À côté de vous, Lorde Arcos, bonjour.
02:21 Vous êtes sénatrice Les Indépendants d'Olesson
02:24 et vous êtes vice-présidente de la Commission de la Culture et de l'Éducation également.
02:28 Et enfin avec nous, Pierre Roussouliat, bonjour.
02:30 Vous êtes sénateur communiste des Hauts-de-Seine, vice-président du Sénat
02:34 et vous êtes à l'origine d'une proposition de loi
02:37 pour qu'il y ait plus de mixité sociale dans l'école privée.
02:40 On va en parler.
02:42 L'école privée d'ailleurs actuellement sous le feu des projecteurs
02:46 et des polémiques politiques avec la récente sortie
02:49 de la ministre de l'Éducation Amélie Houdet à Casterat.
02:53 Eh bien nous, on va s'y intéresser concrètement
02:55 pour comprendre pourquoi certaines familles font le choix du privé.
02:58 Et pour cela, nous allons prendre la direction du 18e arrondissement de Paris
03:03 où vit Amel Leydouni.
03:05 Amel, dont les enfants sont tous passés
03:08 ou sont encore scolarisés en école privée.
03:12 On regarde tout de suite votre représentation Amel
03:15 et on en parle juste après.
03:16 J'ai fait le choix de scolariser mes enfants
03:19 dans des établissements privés catholiques sous contrat.
03:22 C'est un choix qui a été partagé en famille avec mes enfants
03:28 car les établissements publics de notre secteur ne me convenaient pas.
03:33 Mes deux grands, ils ont déjà obtenu leur bac avec mention.
03:36 Je pense que s'ils avaient été dans des établissements publics,
03:41 je ne pense pas qu'ils auraient les mêmes résultats.
03:44 Les deux derniers, donc ils sont encore au collège.
03:47 L'une qui va passer son brevet cette année
03:49 et l'autre, c'est l'année prochaine.
03:51 Avec nous Amel. Bonjour Amel.
03:53 Merci beaucoup d'intervenir dans notre émission.
03:56 Vos enfants ont tous débuté leur scolarité en école publique
04:00 et puis vous avez basculé au collège dans le privé.
04:03 Pourquoi ? Vous aviez peur que les conditions ne soient pas bonnes pour apprendre ?
04:07 Racontez-nous votre première visite du collège,
04:10 la première visite de votre fils qui avait d'abord commencé
04:13 en visitant un collège public, son collège de secteur.
04:16 Suite à la visite de notre aîné qui a maintenant 23 ans.
04:20 Quand il a visité le collège, quand il était en classe de CM2,
04:25 il était revenu vraiment frustré.
04:27 Il nous a raconté comment s'est passée sa visite.
04:30 Des enfants qui criaient, qui tapaient sur les portes,
04:33 aucun encadrement.
04:34 Ça l'a vraiment frustré.
04:36 On a fait le choix pour lui et pour les autres par la suite.
04:40 On a souhaité un meilleur établissement et un environnement sécurisant.
04:46 Sécurisant, mais aussi pour pouvoir apprendre dans de bonnes conditions.
04:50 Vous aviez peur que ça se répercute sur son niveau scolaire ?
04:53 Exactement. Ce qu'on cherchait, c'était le cadre.
04:56 La stabilité des enseignants, de l'équipe pédagogique.
05:01 Moins de grèves, programmes chimiques, pas d'absentéisme.
05:06 Et même si c'est le cas, c'est ce qu'on a constaté au fil des années.
05:10 Les professeurs, quand ils s'absentent dans le privé,
05:13 les cours sont après rattrapés.
05:15 Ce n'est pas le cas dans le public.
05:17 C'est ce qu'on a souhaité.
05:22 C'était aussi la composition des classes.
05:24 Malgré que les classes sont entre 30 et 29 dans le privé,
05:30 l'ambiance du travail est présente.
05:33 Alors que dans le privé, il n'y a pas.
05:36 Ils ont moins de devoirs.
05:39 Je l'ai constaté l'année dernière avec la visite de ma fille
05:42 dans les forums des métiers, parce que c'était l'année terminale.
05:46 On a vu des familles en panique.
05:49 Les trois mois se sont écoulés, septembre, octobre, novembre, décembre.
05:54 Et là, on n'arrive pas à avoir de profs en physique,
05:57 pas de professeurs en mathématiques,
05:58 alors que leurs enfants sont en année de bac.
06:01 Ce n'était pas le cas pour ma fille.
06:02 Je voyais ça comme une chance.
06:04 - Vous avez aussi eu plus d'exigence en termes de niveau scolaire,
06:07 conséquemment, dans l'école privée ?
06:09 - Exactement.
06:10 En fait, il y a plus de rigueur, il y a plus de discipline.
06:14 On va dire que c'est ce qu'on cherchait.
06:18 Alors que dans le public, je ne dénigre pas.
06:22 Au contraire, moi, j'aurais bien aimé mettre mes enfants dans le public,
06:27 mais malheureusement, ce n'était pas le cas.
06:30 - C'est un constat extrêmement sévère pour l'école publique que nous fait Amel.
06:33 Qu'est-ce que vous en pensez ?
06:34 Est-ce que l'école publique est devenue un repoussoir aujourd'hui
06:37 quand vous voyez le témoignage de cette famille ?
06:40 - Plusieurs choses.
06:41 D'abord, je ne jugerai jamais le choix des parents
06:45 qui mettent leur enfant dans le privé.
06:49 Mes enfants, à moi, ont fait toute leur scolarité dans le public,
06:52 mais c'était un public d'excellente qualité.
06:54 Je ne sais pas ce que j'aurais fait si j'avais été dans la situation de cette dame.
06:59 - C'est peut-être un des sujets.
07:00 D'ailleurs, il y a une hétérogénéité des écoles publiques, selon son secteur.
07:04 - Mais bien sûr, tout à fait.
07:06 D'autre part, j'entends ce témoignage que le choix qui a été fait,
07:09 ce n'est pas un choix religieux.
07:12 - Non.
07:13 - Ce n'est pas pour le confessionnel.
07:14 C'est parce que cette maman a trouvé que c'était sans doute
07:19 dans ces établissements-là que ses enfants auraient le meilleur développement pédagogique.
07:25 Donc, le problème entre le privé et le public,
07:29 ce n'est pas le réamorçage d'une guerre de religion, comme je l'entends.
07:33 Il y a derrière un gros problème de moyens, et cette maman a tout à fait raison.
07:37 Il y a aujourd'hui une faiblesse structurelle du privé
07:41 qui fait qu'il n'arrive pas à satisfaire un grand nombre de parents.
07:46 - Une faiblesse structurelle du public.
07:49 - Une faiblesse structurelle du public, pardon.
07:51 C'est ça qu'il faut changer, bien sûr.
07:53 Et notamment sur le non-remplacement.
07:55 Moi, je suis dans les Hauts-de-Seine, même chose.
07:57 - Donc, la polémique Amélie Oudéa Castera,
08:00 elle n'est pas infondie sur le fond.
08:03 Quand elle dit qu'il y a des problèmes de remplacement dans le public,
08:06 vous le dites tous ?
08:08 - Oui.
08:09 - La manière dont elle a dit était pour le moins maladroite,
08:11 qu'il y ait des problèmes de remplacement.
08:13 - Mais sur le fond ?
08:14 - La manière dont elle a dit, la qualité de la prestituté
08:16 et la manière dont ça a été exprimé était pas maladroite.
08:18 Je voudrais revenir sur la question de Mme Leidoni.
08:20 Moi, je souhaite que les parents aient dans l'avenir
08:23 toujours le choix entre des modèles d'enseignement particuliers
08:27 et même peut-être aussi le choix entre des établissements
08:30 qui auront des projets pédagogiques adaptés aux enfants qu'ils reçoivent.
08:33 L'heure d'Arcos, parlait de mon engagement,
08:36 c'est le sien aussi, pour plus d'autonomie pour les établissements.
08:39 Vous savez, le problème n'est pas le problème de l'école privée,
08:42 le problème était les difficultés aujourd'hui de l'école publique.
08:45 Victor Hugo disait qu'il était pour la liberté d'enseignement
08:48 à partir du moment où l'école publique était belle.
08:51 Ce qu'il faut, c'est restaurer la beauté
08:53 et donc l'attractivité de l'école publique.
08:56 Et pour cela, ça nécessite certainement plus de liberté
09:00 pour les équipes pédagogiques, un peu plus de confiance
09:03 en direction des équipes pédagogiques,
09:05 donc plus d'autonomie pour l'établissement,
09:07 ce qui ne veut pas dire plus de chefs qui caporalisent,
09:09 mais certainement plus de capacité à s'adapter aux réalités des territoires,
09:13 à prendre des initiatives.
09:15 Et ça, il faut peut-être une verticalité du système public
09:19 un peu plus souple, qui fasse davantage confiance.
09:23 Et puis aussi, il y a une question d'ambiance,
09:25 vous l'avez très bien dit, madame,
09:27 vous avez dit que l'ambiance n'était pas au travail,
09:29 donc il faut essayer de rétablir l'enseignement des savoirs fondamentaux
09:33 et considérer que la parole du maître, la parole du professeur,
09:37 celui qui sait, ne vaut pas la parole de l'élève qui est là pour apprendre
09:41 et donc rétablir un peu une estrade virtuelle,
09:44 c'est-à-dire rétablir une estrade dans la classe.
09:47 Je donne un chiffre tout de même sur le rapport
09:50 entre école privée et école publique.
09:53 Il faut savoir qu'aujourd'hui, l'école privée représente 12 500 établissements
09:57 qui reçoivent 2 200 000 élèves sur un total de 12 millions d'élèves.
10:02 C'est un taux d'environ 18 %
10:04 et il est important de dire que c'est un taux relativement stable,
10:07 qu'il n'y a pas quand même un côté pompe aspirante du privé vis-à-vis du public.
10:13 Amèle, un mot sur aussi le coût que ça représente.
10:17 Est-ce que ça représente un budget important pour vous, l'école privée ?
10:21 Est-ce que vous avez même fait des sacrifices pour faire ce choix pour vos enfants ?
10:24 C'est le seul inconvénient qu'on voit, parce que l'école privée, elle est payante,
10:29 mais quand on voit la qualité des apprentissages que nos enfants ont au fil des années,
10:36 ça n'a pas de coût pour moi.
10:38 Certes, quand ils étaient les Croix, parce qu'il y a des certaines années
10:42 où je me suis retrouvée avec les Croix,
10:44 je payais à peu près, entre les iPads et la scolarité,
10:48 et parfois la cantine, à peu près 1 000 €.
10:52 Mais quand je vois le résultat, je pense pas que je me réjouisse.
10:57 Est-ce que les enfants qui étaient avec vos enfants,
11:00 c'était plutôt des enfants privilégiés qui avaient les moyens de se permettre ça ?
11:04 En fait, il y a une vraie mixité sociale, même dans le privé.
11:08 Actuellement, les deux derniers sont dans le collège Saint-Viment-Calme.
11:12 Il y a une vraie mixité, il y a des enfants qui viennent de tout,
11:16 je pense de tous les quartiers, même défavorisés,
11:18 c'est parce que les parents ont bien compris la différence, malheureusement.
11:23 Pierre Bouzoulias, ça vient un petit peu contredire votre proposition de loi.
11:28 C'est un exemple parmi d'autres, mais qui montre aussi
11:31 qu'il peut y avoir de la mixité sociale dans le privé.
11:34 Je rappelle que vous êtes à l'origine d'une proposition de loi
11:37 qui veut conditionner l'attribution de subventions aux écoles privées
11:40 à des critères de mixité sociale.
11:42 Sans doute que ce collège remplirait ces critères.
11:45 Oui, mais ce n'est pas le cas de tous.
11:47 Et c'est pas moi qui dis, c'est la Cour des comptes.
11:50 Il y a depuis une dizaine d'années un mouvement,
11:53 qui est un mouvement profond, qui fait qu'il y a des établissements privés
11:57 sous contrat qui ont tendance aujourd'hui à n'accepter
12:00 que des élèves venant de milieux favorisés, voire très favorisés.
12:04 Le pourcentage des élèves venant de familles très favorisées
12:08 a été multiplié par deux en dix ans, ce qui est considérable.
12:13 Dans le département des Hauts-de-Seine, dont je suis le sénateur,
12:16 il y a une forme de ségrégation sociale qui est en train de s'installer.
12:20 Et ce que je crains, pour l'enseignement et pour la République,
12:24 c'est qu'on finisse par avoir deux systèmes.
12:26 Un système pour riches et un système pour pauvres.
12:29 Ça serait complètement casser le pacte républicain.
12:32 Donc, par rapport aux établissements qui font le choix de la non-mixité,
12:36 il y en a, j'ai fait cette proposition de loi en leur disant
12:39 qu'il n'est pas normal que l'État donne autant de moyens
12:42 à des établissements qui se financent très bien par ailleurs.
12:46 C'est tout.
12:47 – Alors merci, merci beaucoup Hamel pour votre témoignage.
12:50 On va aussi maintenant parler de l'école publique,
12:52 de savoir comment faire mieux dans l'école publique.
12:56 Et il y a des classes où on a droit à des effectifs réduits dans l'école publique.
13:01 C'était l'une des réformes majeures du premier mandat d'Emmanuel Macron,
13:06 le dédoublement des classes de CPCE en réseau d'éducation prioritaire.
13:10 Et nous sommes avec Julie Meunier.
13:13 Julie Meunier, vous êtes professeure des écoles depuis 17 ans.
13:17 Vous enseignez dans une école de Lyon en réseau d'éducation prioritaire.
13:21 Vous avez cette année une classe de CE1
13:23 et cela vous permet des apprentissages différenciés.
13:27 On regarde.
13:28 – La classe est prête pour accueillir les élèves qui vont revenir de récréation.
13:33 Donc après cette récréation, nous allons être sur un temps de lecture
13:37 et je vais travailler avec un groupe d'élèves un peu plus en difficulté
13:41 à cette table en les regroupant.
13:43 Ils ont des supports qui sont adaptés à leur particularité.
13:46 Cet élève par exemple a un texte qui est adapté
13:48 puisque les syllabes sont marquées par des arcs.
13:51 Et puis le passage qu'il peut mieux lire est surligné.
13:55 Alors que les autres vont lire le passage dans la totalité.
13:58 Pendant ce temps-là, les autres enfants vont être à leur place en autonomie
14:01 ou bien sur des supports numériques.
14:03 Chacun avec un travail différent.
14:06 Cet élève-là en particulier n'a pas encore accédé au niveau de lecture
14:10 qui lui permet de lire des textes complets comme les autres élèves de CE1.
14:14 Donc il est sur un texte, des supports de lecture plus adaptés à son niveau.
14:19 – Alors Julie, on voit que vous avez pu mettre en place
14:22 un suivi plus personnalisé des enfants, en particulier des enfants en difficulté.
14:27 Est-ce que les enfants progressent mieux depuis cette réforme ?
14:30 Est-ce que ça marche ?
14:32 – Alors nous, on vit mieux la classe.
14:35 Ça c'est une certitude, on vit mieux la classe.
14:38 On voit des évolutions dans les résultats des élèves mais qui sont plutôt…
14:42 En tout cas, là où on voit des réelles améliorations,
14:46 c'est quand on change vraiment nos pratiques.
14:48 Par exemple, quand on décide de changer de méthode ou de manuel, etc.
14:52 Et là où on a quand même des résultats qui nous semblent assez probants,
14:56 c'est qu'on a quand même l'impression de moins laisser d'élèves au bord de la route.
15:00 C'est vraiment ça.
15:02 C'est des élèves que parfois on n'arrivait pas trop à raccrocher en CP ou en CE1
15:07 et qui donc passaient au bout d'un moment dans les classes supérieures
15:10 en ne sachant toujours pas lire.
15:11 On a l'impression de mieux réussir pour ces élèves-là
15:13 qui sont vraiment en grande difficulté, à les faire entrer dans la lecture.
15:16 Je parle de lecture parce que c'est vraiment ce qui est très visible.
15:20 Ça on le voit tout de suite.
15:22 – Max Brisson, vous avez remis un rapport avec des collègues d'autres groupes
15:25 qui faisaient le bilan de toutes les réformes.
15:28 C'est un rapport qui date de 2022.
15:30 Est-ce que vous êtes d'accord ?
15:31 On entend Julie qui nous dit qu'il y a des améliorations,
15:33 mais ce n'est pas une recette miracle apparemment.
15:35 – Le dédoublement des classes, le fait de pouvoir pratiquer,
15:39 comme le fait Julie, une pédagogie beaucoup plus personnalisée,
15:42 adaptée à la situation de chaque élève, est une bonne chose.
15:45 Dans le travail qu'avait fait Jean-Michel Blanquer,
15:47 ce n'est pas quelque chose que nous avons protesté.
15:50 En revanche, il ne faut pas penser que ce sera l'alpha et l'oméga
15:54 du redressement de notre école.
15:56 Je trouve que ce témoignage est très sincère
15:58 sur l'ambiance qui change, les pratiques qui peuvent évoluer,
16:02 mais une réalité sur les élèves qui reste encore à prévalenter.
16:07 La question est plus large.
16:09 Des écoles où il y a des élèves en difficulté,
16:11 dans lesquelles il y aurait des besoins de pédagogie différenciée,
16:15 d'adaptation des pratiques, il y en a beaucoup.
16:17 Je pense que l'école est trop uniforme,
16:20 qu'elle aurait besoin de beaucoup plus s'adapter au territoire.
16:23 On pense au territoire d'éducation prioritaire.
16:25 Il y a aujourd'hui, dans des territoires de ruralité très éloignés,
16:29 très enclavés, des situations sociales et des situations de retard
16:33 vis-à-vis des apprentissages qui sont aussi importantes.
16:36 Donc il serait grand temps que de permettre un regard
16:39 sur les territoires de l'école beaucoup plus souple,
16:41 de manière à permettre aux équipes pédagogiques et aux professeurs
16:44 de s'adapter à la réalité des élèves.
16:46 Pour ça, il faut dans ces territoires-là des moyens,
16:49 parce qu'il y a des territoires dont les besoins pédagogiques sont spécifiques.
16:52 - C'est intéressant ce que vous dites sur les territoires.
16:54 Julie, est-ce que vous pouvez nous dire un mot du territoire
16:56 sur lequel vous vous situez, qui est en réseau d'éducation prioritaire ?
17:00 C'est dans Lyon, racontez-nous.
17:03 - Je travaille à Mijen, qui est une ville de Lyon.
17:08 Lyon, c'est quand même un territoire relativement rural.
17:11 Mijen, c'est une ville qui a à peu près 7 000 habitants.
17:15 Je travaille dans une école où il y a quand même 17 classes.
17:18 C'est une grosse école, primaire de la toute petite section au CM2.
17:21 On est en éducation prioritaire, on y a toujours été, je crois.
17:26 Toutes les écoles de la ville le sont.
17:30 Mais c'est vrai qu'il y a parfois dans la carte de l'éducation prioritaire
17:35 des écoles qui sont un peu laissées de côté,
17:37 parce que la carte repose sur le collège, la sectorisation du collège.
17:40 À partir du moment où le collège regroupe des élèves de différents milieux sociaux,
17:45 le collège ne va pas être en éducation prioritaire.
17:49 Et donc il y a des écoles qu'on appelle les écoles orphelines
17:53 qui devraient relever de l'éducation prioritaire,
17:55 mais qui n'y sont pas parce que noyées dans la moyenne du collège...
17:59 Oui, et du coup elles n'ont pas les moyens dont elles auraient besoin.
18:03 Oui, vous voulez réagir, Laura D'Arcos ?
18:05 Oui, parce que Max parlait des écoles en milieu rural.
18:12 Moi, je parle aussi en effet beaucoup de ceux qui sont dans la strate suburbaine,
18:16 qui ne sont pas forcément catégorisés en REP,
18:20 mais qui sont en quartier politique de la ville,
18:22 mais qui ne sont pas forcément dans ces quartiers-là.
18:24 Et du coup, c'est très compliqué.
18:26 Moi, je voulais revenir sur le fait que ça a été une réforme...
18:29 Qui ne bénéficie pas du coup de ce type de dispositif,
18:32 du dédoublement des classes...
18:33 Exactement, mais dans l'idéal, il faudrait que ça soit instauré partout.
18:37 Quand Blanquer a annoncé cette réforme,
18:41 je peux vous dire que beaucoup d'anciens ministres
18:43 auraient bien aimé pouvoir l'appliquer aussi, alors qu'à l'époque...
18:47 On ne peut pas se le permettre partout.
18:49 Il y a eu des politiques de rigueur budgétaire qui faisaient que c'était impossible,
18:54 mais en fait, dans l'idéal, ça devrait être ça.
18:56 Mais comme le dit aussi Max, je pense que c'est aussi de pouvoir s'adapter.
19:00 Quand je vous voyais dans votre classe, madame,
19:03 ça me fait penser aux classes que j'ai pu connaître, moi, en province,
19:07 où on avait plusieurs niveaux dans la même classe,
19:11 et du coup, l'instituteur, ou le professeur des écoles,
19:15 finalement, passait d'un groupe classe à l'autre,
19:18 au sein même d'un même lieu.
19:23 C'est plus une gymnastique intellectuelle importante pour vous,
19:26 mais ça permettait et aux élèves de regarder ce qui se passait
19:29 dans le groupe classe d'à côté, et que ça soit une saine émulation,
19:33 et qu'on puisse s'arrêter sur ceux qui sont en difficulté.
19:36 Donc je pense qu'il faut en effet qu'on s'adapte en fonction des territoires.
19:39 – Ce que dit Laure Darko, ça rebondit un peu aussi
19:41 avec la question que vous vouliez poser, Julie, quelle est-elle ?
19:45 – Oui, moi, ce que je voulais demander, c'est justement que ces classes à effectif réduit,
19:48 elles ont des atouts indéniables,
19:52 qui mériteraient d'être développées dans les autres niveaux,
19:54 dans les autres situations.
19:56 Leur efficacité n'est pas non plus complètement mathématique,
19:58 elle repose aussi sur une solide formation des enseignants,
20:02 et un fort engagement des enseignants pour changer leur pratique.
20:05 Et donc voilà, à quoi ont des embauches d'enseignants,
20:07 pour alléger véritablement les effectifs de manière plus générale,
20:11 sans affaiblir les remplacements qui ont été un petit peu les victimes de ce dispositif.
20:16 – On a déshabillé Pierre pour habiller Paul,
20:19 sans doute c'est aussi ça l'un des sujets.
20:21 Puis il y a aussi un autre sujet qui est à bord de Julie,
20:23 qui est très intéressant, c'est celui de la formation.
20:25 Ça ne suffit pas d'avoir 15 élèves dans une classe,
20:28 il faut savoir comment s'adresser à eux, sans doute différemment, Pierre Ousolias.
20:31 – Moi, ce qui me plaît vraiment dans ce témoignage,
20:34 c'est celui d'une enseignante qui a retrouvé le plaisir d'enseigner,
20:39 et le plaisir de pouvoir adapter sa pédagogie à son effectif.
20:44 Ça je trouve ça fondamental,
20:46 parce que les enseignants en France sont très mal payés,
20:49 ils vont continuer à l'être longtemps,
20:51 parce qu'il y a un travail de rattrapage qui est énorme.
20:53 Si au moins on peut leur donner le plaisir d'enseigner,
20:57 peut-être que ça renforcerait l'attractivité du métier d'enseignant,
21:00 qui est un souci majeur.
21:03 Ensuite, ce que nous dit cette professeure est très juste,
21:09 et ça c'est montré parfaitement par les statistiques sur l'enseignement.
21:12 Le système français a un gros désavantage,
21:14 c'est qu'il est dans l'incapacité, très souvent structurelle,
21:17 de pouvoir rattraper la situation des élèves décrocheurs.
21:21 Et ça c'est un souci majeur.
21:23 Des élèves, bon, il y en a, ils sont d'autant qu'ailleurs.
21:25 – On va en parler un peu plus tard.
21:26 – Mais ceux qui décrochent, on a beaucoup de mal à les récupérer,
21:30 ça c'est un problème de fond.
21:31 – Le sujet de fond aussi que posait Julie, c'est à quand des embauches d'enseignants ?
21:35 Parce que si on veut pouvoir rhabiller tout le monde,
21:40 qu'il y ait à la fois les moyens pour faire les remplacements
21:42 et les moyens pour faire les dédoublements, il faut plus d'enseignants.
21:45 – Oui, il y a un problème de crise de vocation.
21:47 À quand les embauches ?
21:49 Regardez le nombre décroissant d'année en année
21:54 de gens qui veulent pouvoir devenir professeur.
21:58 C'est dû en grande partie au manque de respect croissant de ce métier-là.
22:05 Alors que vous étiez des personnes qui étaient les plus respectées
22:11 des villages en fait, et des communes il y a quelques années.
22:15 Et aujourd'hui, que ce soit les élèves eux-mêmes,
22:19 on est en mission d'enquête en ce moment sur ce sujet,
22:22 c'est juste terrible.
22:24 On a bien suivi le mouvement à chaque pas de vague,
22:27 mais qui est absolument épouvantable.
22:30 Des parents qui se plaignent auprès des professeurs de leurs enfants
22:35 quand ils m'ont mis une mauvaise note.
22:37 On a brûlé toutes 65 millions de spécialistes de l'éducation nationale
22:42 parce qu'on a été parents, élèves, etc.
22:44 C'est quand même aux professeurs de rester maîtres dans sa classe.
22:48 Et puis on le voit dernièrement, bien évidemment,
22:50 avec les drames atroces d'exécution des professeurs.
22:54 Et aujourd'hui, eux-mêmes peuvent se retrouver dans des situations
22:58 où ils se disent "je risque ma vie en ayant cette vocation".
23:01 Donc il n'y a pas qu'un problème budgétaire,
23:04 je pense qu'il faut pouvoir redonner envie à toute cette jeune génération
23:09 à devenir professeur, alors que c'est le plus beau métier du monde.
23:12 Mais c'est plus facile à dire qu'à faire,
23:14 et je vous voyais même un peu, quand vous disiez
23:16 que vous aviez du plaisir à être dans votre classe,
23:18 c'est peut-être pas toujours évident, je vous voyais grimacer un peu.
23:21 Oui Julie, un petit mot pour conclure sur votre témoignage.
23:26 Oui, est-ce que vous avez plus de plaisir ?
23:28 Et surtout, quels sont les résultats, par exemple en CE2 ?
23:31 Est-ce que vos élèves, quand même, ils ont progressé ?
23:33 Par exemple en lecture, vous disiez, c'est quand même là-dessus
23:37 qu'on a l'indicateur le plus clair.
23:39 Je suis incapable de vous dire si moi, mes élèves,
23:44 mes 15 élèves que j'ai, progressent plus.
23:46 Je ne peux pas vous dire ça, ça ne voudrait rien dire,
23:48 parce que d'une année à l'autre, on ne peut pas dire.
23:50 D'un point de vue national, ce dispositif,
23:52 il a des résultats qui sont quand même assez mitigés.
23:55 C'est-à-dire que ce n'est pas très significatif, l'évolution des élèves.
24:01 Vous voudriez revenir en arrière, du coup Julie, pour un autre dispositif ?
24:04 Non, bien sûr que non.
24:07 Mais je ne voudrais pas revenir en arrière, je voudrais que ce soit un peu développé.
24:10 Mais je pense que vraiment, ce dispositif, il a besoin,
24:12 comme vous l'avez dit, qu'on soit davantage formé
24:16 et que ça marche également avec la confiance.
24:21 Et comme vous parliez de l'engagement des enseignants,
24:24 il y avait cette idée de réenchanter l'école,
24:27 je pense que vraiment, c'est une des grosses difficultés actuelles
24:30 et pour l'avenir de l'école,
24:33 c'est justement cet état mental des enseignants en ce moment
24:38 qui n'est vraiment pas bon.
24:40 Je faisais plutôt la grimace parce que ça va très bien dans les classes.
24:44 Les gens vont bien dans leurs classes, ils vont bien dans leur école.
24:47 Il y a encore une enquête sur le bien-être des enseignants
24:50 qui vient juste de sortir par la DEV,
24:52 qui est un organisme de l'éducation nationale du ministère.
24:55 Les gens vont bien dans leurs classes et dans leur école,
24:57 ils vont bien avec leurs élèves, ils vont même bien avec leurs parents d'élèves.
25:00 Ce qui ne va pas, c'est la relation avec la société
25:03 et la relation avec l'institution,
25:05 c'est-à-dire un sentiment de mépris, de considération
25:08 qui ne s'attache pas qu'au salaire.
25:10 Le salaire fait partie de cette problématique,
25:12 ce n'est pas la seule chose.
25:13 Il y a vraiment un mal-être qui, je pense, nuit beaucoup à l'engagement.
25:18 Il faut effectivement que les enseignants aient envie d'être moteurs
25:23 et de faire avancer les choses pour que ça avance.
25:26 Merci Julie.
25:27 Merci aussi pour votre message d'alerte.
25:29 Pas question de dédoubler les classes au collège.
25:33 Pour l'instant, le gouvernement mise plutôt sur les groupes de niveau
25:36 qui doivent être mis en place en septembre prochain
25:39 pour les élèves de collège dont s'occupe Michel Arnaud,
25:43 qui est ingénieur retraité,
25:45 qui supervise l'action de l'association Entraide scolaire amicale à Toulon.
25:50 Votre association, Michel, suit des enfants du CP à la Terminale,
25:53 à domicile, en médiathèque, à l'école.
25:56 Vous faites du soutien scolaire, de l'aide aux devoirs,
25:59 des ateliers pour les enfants.
26:00 Et voici votre diagnostic.
26:02 J'ai pu accompagner plus d'une centaine de familles et leurs enfants
26:06 dans leur scolarité jusqu'à leur autonomie d'apprentissage.
26:11 Ce que je peux dire, c'est que les enfants se sont sentis dépassés
26:16 par le rythme scolaire et la quantité de savoir à acquérir,
26:21 notamment sur les matières essentielles que sont le français et les maths.
26:26 Ils auraient aimé pouvoir avoir plus de temps
26:30 pour assimiler les bases de la lecture, de l'écriture et du calcul.
26:35 Pour vous, Michel, le point noir que vous observez,
26:39 c'est le collège. Qu'est-ce que vous y observez ?
26:42 Le problème du collège, c'est que la production des élèves du primaire
26:51 fait que les élèves du collège ne savent plus réfléchir.
26:59 Ils ont appris des recettes, mal, souvent dues au par-coeur
27:06 et à défaut de compréhension.
27:09 Donc le gros point noir, c'est la capacité des élèves
27:14 déjà à comprendre les énoncés, à comprendre les consignes
27:18 et surtout la pauvreté de leur réflexion.
27:24 Nous, on s'occupe de la deuxième moitié des tranches d'âge
27:29 et particulièrement du dernier tiers.
27:33 Ce sont des enfants qui sont dans des environnements
27:38 qui ne sont pas favorables à leur développement.
27:42 Qu'est-ce que c'est leur développement qui n'est pas favorable à leur développement ?
27:46 C'est leur famille ? C'est les écrans ? C'est la concentration ?
27:50 C'est un peu tout. Ce sont des familles qui n'ont pas les moyens financiers
27:58 d'aider leurs enfants, qui n'ont pas les niveaux.
28:04 Bien souvent, ils ont des difficultés même dans le français
28:07 et la plupart du temps, c'est les enfants qui sont des interprètes.
28:10 Le gros problème, c'est surtout dans ces matières essentielles,
28:14 à commencer par le français et évidemment les maths,
28:18 car la plupart du temps, on est obligé de mettre au moins deux bénévoles
28:24 qui suivent des enfants, un l'un pour aider l'enfant à mieux comprendre
28:30 à la fois l'oral et l'écrit en français, pour pouvoir comprendre les énoncés,
28:36 les questions qui leur sont posées, et bien sûr en maths,
28:40 pour les aider à réfléchir et à trouver par eux-mêmes les solutions.
28:45 Et c'est là où on peut noter qu'ils ont un niveau d'acquisition de données,
28:52 d'acquisition d'informations, surtout sur la base qui est faible.
28:58 Votre réaction, Pierre Rousselier, à ce constat qui est quand même très sévère
29:02 sur le collège de Michel Arnault, qui s'occupe d'élèves au quotidien
29:07 dans son association ?
29:09 Je trouve que l'analyse de M. Arnault est vraiment très intéressante,
29:13 tout à fait passionnante. Il met deux choses en évidence.
29:17 D'abord, quelque chose qu'on oublie trop souvent, c'est que derrière la crise
29:21 de l'école, il y a une crise sociale. Et que bien évidemment, les élèves,
29:25 ils appartiennent à un milieu social qui joue beaucoup dans leur apprentissage.
29:31 D'où la réflexion sur la mixité sociale. Quand vous concentrez tous les élèves
29:35 qui ont des problèmes sociaux dans les mêmes classes,
29:38 bien évidemment vous augmentez les problèmes.
29:41 Et puis après, la réflexion sur la capacité de réfléchir par soi-même.
29:45 Je pense que c'est quelque chose de fondamental, notamment par rapport
29:50 au tsunami d'informations que subissent les élèves avec les réseaux sociaux, etc.
29:56 Si on ne donne pas à ces élèves la capacité de se forger eux-mêmes
30:02 leur esprit critique, je pense qu'on va vraiment vers des grosses difficultés.
30:06 - L'or d'Arcos. Qu'est-ce qu'il faut faire ? Limiter les écrans ?
30:11 Faire des efforts dans la pédagogie pour que les jeunes s'y retrouvent,
30:15 sachent penser par eux-mêmes ?
30:17 - Oui, mais comme le dit M. Arnaud, c'est déjà de revenir à l'essentiel.
30:22 On passe son temps à parler des fondamentaux.
30:25 Mais c'est vrai que du coup, on laisse partir au collège des jeunes
30:29 qui en primaire n'ont pas acquis cette maturité de pouvoir comprendre un énoncé,
30:37 avoir l'esprit critique, être un peu autonome.
30:42 Ça me touche ce que vous faites, parce que j'avais fait aussi du soutien scolaire.
30:47 Les petits jeunes que j'avais au début collège, c'était terrible,
30:52 parce qu'ils me disaient "Vite, vite, vite, maîtresse,
30:54 il faut qu'on finisse absolument mes devoirs, parce que quand je vais rentrer à la maison,
30:58 on n'a qu'une pièce commune, le seul endroit où je vais pouvoir apprendre encore ma leçon,
31:04 c'est dans les toilettes, sur la cuvette des toilettes, parce que je serai isolée".
31:08 Et je regrette qu'on ait arrêté les heures sup défiscalisées,
31:13 comme à l'époque de Nicolas Sarkozy, parce qu'il y avait beaucoup de professeurs.
31:17 Merci, monsieur, pour votre engagement.
31:19 Mais des professeurs aussi qui connaissaient leurs élèves,
31:22 qui pouvaient, du coup, en étant mieux rémunérés,
31:25 avoir la possibilité de les prendre en dehors des cours.
31:30 Max Brisson, mais ce que nous dit Michel Arnault, c'est aussi qu'au niveau pédagogie,
31:34 il faut sans doute faire évoluer les choses.
31:36 Monsieur Arnault regrette aussi le trop de par-cœur,
31:39 et une pédagogie qui n'apprend pas à réfléchir par soi-même parfois.
31:43 Il y a aussi sans doute les enseignants qui doivent aussi revoir leur façon d'enseigner.
31:48 D'abord, un coup de chapeau pour les associations de soutien scolaire,
31:51 et pour le travail que fait Michel Arnault.
31:53 Moi, j'ai souhaité, dans une proposition de loi,
31:56 que l'on crée une réserve éducative, un véritable service national du soutien scolaire,
32:01 et qu'il y ait un véritable appui,
32:03 parce que des associations comme celle où milite monsieur Arnault,
32:07 il y en a partout sur le territoire,
32:09 font un travail remarquable, mais ne sont pas suffisamment appuyés.
32:11 Ensuite, cela pose la question que nous avons évoquée tout à l'heure avec la professeure des écoles.
32:17 C'est aussi la question...
32:18 Les retards enregistrés, les difficultés enregistrées,
32:22 sont dues bien sûr au milieu social,
32:24 mais elles sont dues aussi à une école primaire qui n'a pas fait son travail.
32:27 Ce qui repose la question de la formation des professeurs,
32:31 sur laquelle tout à l'heure on ne s'est peut-être pas assez arrêtés.
32:34 Moi, je crois qu'apprendre le métier de professeur des écoles,
32:38 c'est une formation particulière,
32:40 qu'on ne peut pas comparer avec la formation des professeurs certifiés et accrégés,
32:45 qui enseigneront ensuite en lycée ou dans l'enseignement supérieur.
32:47 Les écoles normales du XXIe siècle, pour parler comme Gabriel Attal,
32:51 seraient peut-être une piste à nouveau à explorer.
32:54 - Au niveau pédagogique.
32:55 - Ensuite, les programmes sont d'une ambition démesurée.
32:59 On y met beaucoup trop de choses.
33:01 Aujourd'hui, on a des programmes de collège qui ressemblent aux programmes de lycée d'autrefois,
33:04 et des programmes de lycée qui ressemblent aux programmes de l'université.
33:07 Il faut revenir à des choses simples,
33:09 mais en revanche, véritablement être capacité de les enseigner.
33:12 Moins de choses à apprendre,
33:14 et plus donc, en effet, de capacité à développer l'analyse critique de nos élèves.
33:19 - Michel Arnaud, Max Brisson a commencé à en parler,
33:22 mais vous vouliez poser une question, justement, sur vos associations.
33:27 - Nous, on fait ce que l'on peut, puisqu'on agit également en famille,
33:31 on agit sur l'enfant, on le connaît,
33:34 et il y a un besoin de synergie entre les familles d'une part et l'école,
33:41 et également l'école et les bénévoles, les aidants.
33:45 Alors, bien sûr, suivant les critères de l'école, on ne peut pas faire n'importe quoi,
33:51 mais ce que je trouve dommage, c'est que maintenant,
33:54 j'ai accompagné personnellement plus d'une centaine de familles,
33:57 et l'ESA, sur la France, c'est 5000 enfants aidés,
34:02 ce qui paraît beaucoup, mais qui est faible, en fait, par rapport à la demande,
34:07 c'est qu'on puisse agir aussi au sein des écoles,
34:13 pour, en fait, pendant les heures d'études,
34:17 ou le mercredi, en dehors des heures de classe,
34:21 pour, en fait, aider à un meilleur enseignement.
34:28 - Oui, Laure D'Arcos, il y a peut-être quelque chose à imaginer,
34:31 dans ces heures d'études, dans le dispositif devoir-fait, par exemple, au collège,
34:35 que les bénévoles trouvent davantage leur place, qu'est-ce que vous en pensez ?
34:38 - Oui, oui, ce que dit M. Arnaud est tout à fait juste,
34:41 je pense qu'il faut beaucoup plus de synergie,
34:43 ce qui permettrait d'ouvrir, entre guillemets, un peu aussi l'établissement à ces associations,
34:48 et que vous puissiez vous-même avoir peut-être un dialogue
34:53 avec les professeurs des jeunes que vous soutenez,
34:58 pour qu'il y ait une synergie importante entre eux,
35:01 et des passerelles, enfin, entre éducation nationale et associations et bénévolat.
35:06 - Ça dépend beaucoup aussi du chef d'établissement, M. Roussoulias.
35:08 - Et des parents. - Et de la commune.
35:11 Mais il y a beaucoup de communes qui s'investissent dans des dispositifs de ce type-là,
35:17 plus ou moins aidés par l'État, voire parfois pas du tout reconnus par l'État.
35:22 Et bien évidemment, c'est des choses qui sont fondamentales,
35:25 parce que ça apporte un complément à l'enseignement, ça ne le remplace pas.
35:29 - C'est pas un peu un aveu de faiblesse quand on voit quand même
35:32 l'importance que représentent ces associations ?
35:34 Pour ces enfants dont parlait Michel Arnault,
35:37 c'est quand même des endroits où ces associations sont venues pallier aussi
35:40 les insuffisances de l'école, non ?
35:42 - Souvent ça s'arrête en collège, parce que les communes ne soutiennent
35:44 que les enfants scolarisés à l'école primaire.
35:47 Deuxièmement, il n'y a pas cette intégration dans le système éducatif.
35:50 C'est pour ça que je prône, moi, une véritable réserve éducative
35:53 qui soit intégrée au système éducatif.
35:55 Et puis il faut aussi l'engagement des parents.
35:57 Tout à l'heure, on est parti dans notre émission
35:59 des écoles privées sous contrat d'association.
36:02 Elles pratiquent ce qu'on appelle le contrat d'engagement des parents.
36:05 Dès qu'un moment, les parents ont des droits,
36:08 mais ils ont aussi des devoirs vis-à-vis de l'école qui reçoit leurs enfants.
36:12 Et donc, par exemple, les cours de soutien pourraient faire partie
36:15 d'un contrat d'engagement lorsque le professeur estime
36:18 que l'élève a besoin d'un accompagnement particulier.
36:21 - Quel devoir vous voulez parler exactement ?
36:24 - Des devoirs de dialogue entre l'école et les parents.
36:29 Ce qui existe dans l'enseignement privé, lorsqu'on fait les différentiels,
36:32 c'est que l'engagement des parents est beaucoup plus fort,
36:35 mais il est contractualisé.
36:36 Bien sûr, on peut avoir des parents plus engagés
36:38 dans la scolarisation de leurs enfants,
36:40 mais c'est aussi l'école qui demande un engagement aux parents
36:43 qui est contractualisé.
36:44 Un projet pédagogique, ça doit s'appuyer sur les ressources du territoire
36:49 et ça doit être contractualisé à l'épreuve.
36:51 Dans le cadre de l'école publique...
36:53 - C'est parce que parfois les parents sont aussi un peu démissionnaires...
36:55 - Mais parce qu'il n'y a pas de dialogue.
36:57 Parce que le dialogue est souvent un dialogue extrêmement impératif,
37:01 c'est-à-dire que les parents disent "ça ne fonctionne pas,
37:03 je ne suis pas content".
37:04 Il faut aujourd'hui qu'on apaise ce dialogue, qu'on le contractualise
37:07 et qu'on y intègre en effet ceux qui peuvent, à côté de l'école,
37:10 apporter par leur expertise, beaucoup de choses
37:13 qui permettront de mieux accompagner les élèves.
37:15 C'est ce partenariat, je crois, et cette synergie dont parlait M. Arnaud.
37:20 - Merci beaucoup Michel pour votre témoignage.
37:23 On va continuer à parler du Collège notamment des mathématiques.
37:27 J'en parlais au début de l'émission.
37:29 Et cela alors que le rapport PISA de décembre dernier
37:31 pointe une baisse de niveau alarmante des élèves français.
37:34 Mohamedou Koulibaly, bonjour.
37:36 Vous êtes professeur de mathématiques au Collège Georges Sand, à Angers.
37:40 Vous avez constaté une baisse de niveau de vos élèves.
37:43 Je précise que vous enseignez depuis 2009,
37:46 vous avez quand même un recul d'une quinzaine d'années.
37:48 Qu'est-ce qui a changé pour vous fondamentalement
37:51 chez les élèves sur cette période ?
37:53 - Aujourd'hui, on constate, d'ailleurs que je constate,
37:57 je parle plus de moi, je pense aussi que les collègues partagent ce constat.
38:02 Aujourd'hui, les élèves en classe arrivent fatigués.
38:08 Fatigués, manque de sommeil,
38:11 manque de rigueur dans les raisonnements mathématiques.
38:14 Ils ont du mal, comme ça a été signalé par Arnaud,
38:18 à déporter les consignes mathématiques,
38:20 les fondamentaux ne sont pas maîtrisés depuis l'école élémentaire.
38:25 Donc quand on voit aussi les résultats de PISA qui viennent confirmer,
38:30 donc confirmer ces résultats, ça...
38:33 - C'est une bêtise de l'écart du score français.
38:36 Racontez-nous, Mohamedou, comment vous faites justement
38:39 avec ces élèves dont vous décrivez les grandes difficultés,
38:43 comment vous essayez, vous, de prendre des initiatives
38:46 pour qu'ils s'intéressent aux mathématiques
38:48 et pour leur enseigner le raisonnement mathématique ?
38:50 - On a mis en place des clubs mathématiques,
38:53 c'est une heure par semaine.
38:56 C'est une heure par semaine, donc les élèves sont libres à eux de venir.
39:00 Mais si c'est bien, ils font au minimum 15 minutes de présence
39:08 et il n'y a pas de sanction.
39:10 C'est à eux de décider de venir ou de ne pas venir.
39:13 Un élève qui est présent doit faire 15 minutes.
39:15 Qu'est-ce qu'on y trouve dans ce club mathématique ?
39:18 Eh bien, ce sont des cartes, des cartes question-réponse
39:22 qui ont été conçues par nous-mêmes.
39:24 Les questions-réponse qui sont en rapport avec les séquences
39:29 déjà vues en classe, les termes de Pythagore, de Thalès,
39:33 les termes de multiplication, etc.
39:35 Donc eux, ils viennent par eux-mêmes, les cartes, ils tirent, ils jouent.
39:39 Oui, on va faire réagir nos sénateurs sur le fait que, lors d'Archos,
39:43 on entend ce témoignage d'enseignant qui dit, bon, souvent les élèves
39:48 vont déjà un peu baisser les bras sur les mathématiques.
39:51 Il nous parle aussi des écrans, du manque de concentration.
39:53 Et puis du coup, il faut trouver un autre moyen d'attirer leur attention.
39:56 Alors, ça c'est sûr, mais en plus, j'avais été une des premières
39:59 à alerter il y a un an et demi l'opinion, mais aussi Elisabeth Born,
40:04 qui était quand même une ancienne polytechnicienne,
40:08 sur la réforme du bac annoncé...
40:11 - De Jean-Michel Blanquer.
40:13 - De Jean-Michel Blanquer, organisé par lui et ses services,
40:16 où on a fait un constat absolument terrible,
40:19 qui était la suppression des mathématiques dans le tronc commun
40:22 en première et terminale.
40:24 Elle-même en est restée abasourdie, je pense qu'elle n'aurait pas pu l'imaginer.
40:29 Je ne suis pas particulièrement fervente des maths,
40:32 mais je pense qu'il fallait d'une certaine manière,
40:35 plutôt, comme le dit ce professeur,
40:38 essayer de trouver un moyen peut-être plus ludique,
40:41 autre pour pouvoir continuer ses apprentissages,
40:44 mais ne pas vouloir en effet dire "Ah ben, vous n'aimez pas les maths,
40:47 vous avez la chance de ne pas avoir à les prendre dans le tronc commun".
40:50 Ils ont fait les choses à moitié, puisque l'année suivante,
40:53 ils n'ont remis les maths qu'en première dans le tronc commun,
40:56 mais pas en terminale, où du coup, les élèves baissent à nouveau les bras,
40:59 puisque vous êtes en un semi-contrôle continu,
41:02 et que du coup, vous n'avez pas intérêt à prendre des mathématiques,
41:05 alors que vous serez en concurrence avec ceux qui l'ont en mathématiques spécialisées.
41:08 Mais ça a un risque majeur supplémentaire,
41:11 c'est que des professeurs vont manquer aussi,
41:15 parce qu'ils n'ont pas eux-mêmes pris,
41:17 enfin, acquis assez de connaissances en mathématiques dans leurs études,
41:22 ne vont pas choisir en études supérieures,
41:24 et quand ils vont avoir des professeurs des écoles qui vont être formés,
41:28 ils n'auront plus, dans quelques années, cette formation des mathématiques.
41:32 C'est un cercle vicieux, et qui, à mon avis, n'a pas fini d'en avoir des conséquences énormes dans les années à venir.
41:39 - On a sacrifié les mathématiques. Max Brisson ?
41:41 - Moi, je vais revenir en amont par rapport à ce que dit Laure d'Arcos.
41:44 Les professeurs du premier degré sont essentiellement des littéraires,
41:48 aujourd'hui, en matière de recrutement.
41:50 Donc il faudrait qu'ils aient une formation très particulière
41:53 pour les apprentissages du calcul et des mathématiques,
41:56 parce que ce n'est pas leur formation académique de base.
41:59 Donc ça renvoie à la formation des professeurs.
42:01 Deuxièmement, on vante en collège, aujourd'hui, des élèves avec des niveaux très, très hétérogènes.
42:06 Et on a dévoyé une très belle idée, qui était l'idée du collège unique,
42:11 c'est-à-dire que tous les enfants français allaient en classe jusqu'en troisième,
42:16 et bénéficiaient de ce que un ministre de l'Éducation nationale, il y a quelques années,
42:22 avait appelé et mis en place le socle des compétences et des connaissances communs à tous les Français.
42:28 Deux très belles idées, l'école du socle et le collège unique.
42:31 Cela, on les a transformés en collèges totalement uniformes.
42:35 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, il y a des élèves qui ont acquis les fondamentaux de l'école primaire
42:39 et d'autres qui ne les ont pas acquis. Ils se retrouvent dans les mêmes classes.
42:42 Moi, un professeur, sa grandeur d'âme, c'est de savoir enseigner à des élèves
42:46 qui ont des compétences et des connaissances pour avancer,
42:50 et d'enseigner aussi à des élèves en difficulté.
42:52 Mais enseigner dans la même classe à des élèves en très très grande difficulté
42:56 et des élèves qui sont extrêmement actifs, moi je n'aurais pas su faire.
43:00 On demande aujourd'hui aux professeurs de faire des choses impossibles à faire,
43:04 c'est-à-dire de travailler au même rythme des élèves qui n'ont pas acquis les savoirs fondamentaux
43:09 et des élèves qui les maîtrisent parfaitement.
43:11 Et je crois que ce collège uniforme a dévoyé la belle idée du collège unique.
43:15 Alors, Mohamedou Koulibaly, vous entendez Max Brisson.
43:18 L'une des solutions proposées par le gouvernement, du coup, c'est les groupes de niveau
43:23 qui doivent être mis en place à partir de la rentrée prochaine.
43:26 Est-ce que vous les mettez en place dans votre collège ? Est-ce que vous y êtes, vous, favorable ?
43:30 Les groupes de niveau, oui et non. Oui et non parce que le groupe de niveau, c'est intéressant.
43:35 Là, les élèves qui ont déjà les compétences pour les accompagner, approfondir, pousser leur niveau,
43:42 et que ces élèves ne s'ennuient pas, ne décrochent pas, c'est intéressant.
43:47 Mais de l'autre côté aussi, c'est le risque de faire décrocher les élèves qui sont en difficulté.
43:53 Donc c'est là le problème, ils se trouvent dans le juste milieu.
43:56 Donc il y a des effets pervers possibles que nous pointe du doigt ce professeur.
44:03 Par rapport à ce qu'il vient de dire, plusieurs observations.
44:06 La première, c'est que quand on a parlé de ces classements,
44:09 on a évoqué la méthode de Singapour qui serait une révolution qui permettrait de mieux enseigner les maths.
44:15 Plus concrète, ça passe par les objets, les images, avant l'abstraction.
44:21 C'est ça le principe de la méthode de Singapour. Plus beaucoup de travail, je crois.
44:24 Bien sûr, mais ce qu'on a oublié de dire, c'est que d'ailleurs la méthode de Singapour,
44:27 il y a eu un immense travail de formation des enseignants.
44:29 Parce que bien évidemment, vous ne pouvez pas enseigner les mathématiques aujourd'hui
44:33 dans un univers totalement numérisé comme vous les enseignez à une époque où il n'y avait pas le téléphone portable.
44:38 Et puis par ailleurs, moi je me souviens d'un très bon rapport d'un député, Cédric Villani,
44:44 qui avait expliqué au gouvernement que l'apprentissage des mathématiques était fondamental pour tous et pour toutes.
44:53 Et j'insiste sur le féminin, parce qu'aujourd'hui, malheureusement, c'est...
44:57 Cédric Villani, ancien député, La République en marche des parts,
45:00 ensuite écologiste et mathématicien.
45:02 Parce que nous sommes dans une société qui est extrêmement numérisée.
45:06 Et que pour que chacun trouve sa place dans cette société, il faut maîtriser les mathématiques.
45:11 Donc il faut que les mathématiques soient enseignées à tous, tout le temps.
45:15 Et il faut rattraper ceux qui sont en difficulté.
45:17 Parce que sinon, on crée des citoyens qui vont être complètement décrochés
45:22 du fonctionnement extrêmement numérisé de notre société.
45:25 - Des mathématiques pour tous, tout le temps, oui.
45:28 Mais ne décidons pas, comme mauvaise déjà, quelque chose qui n'a pas encore été initié.
45:32 - Les groupes de niveau, vous voulez dire ?
45:34 - Les groupes de niveau, expérimentons, regardons les choses.
45:37 Ne disons pas à l'avance que ça ne peut pas marcher.
45:39 Je sais que les psychopédagogues le refusent.
45:42 Cela dit, ils pourraient de temps en temps être un peu modestes
45:44 quand on voit les résultats de l'école française d'aujourd'hui.
45:46 - Merci, merci beaucoup, Mohamedou Koulibaly, pour votre témoignage.
45:50 Et pour conclure cette émission, nous allons aussi échanger avec Nicolas Abinet.
45:54 Bonjour. Vous auriez aimé, vous sans doute, avoir un peu les ateliers
45:58 dont nous parlait Mohamedou tout à l'heure.
46:00 Alors, vous avez 30 ans, vous habitez au Havre, vous êtes aujourd'hui éducateur spécialisé.
46:05 Après un parcours scolaire qui a été chaotique, difficile,
46:08 vous avez arrêté les études en première avant de reprendre une formation à 21 ans
46:13 dans une école de la deuxième chance.
46:16 Nicolas, tout simplement, pour quelles raisons est-ce que vous avez arrêté vos études au lycée ?
46:20 - J'ai arrêté mes études au lycée parce que je ne trouvais pas ma place
46:25 dans le fonctionnement scolaire.
46:27 Il y avait beaucoup de matières qui ne m'intéressaient pas forcément.
46:31 Je pense que moi, à cette époque-là, j'étais un jeune qui avait envie de faire quelque chose
46:36 et pas forcément rester derrière un bureau, ça ne me convenait pas.
46:39 Donc, j'ai essayé de faire plein de petits boulots jusqu'à ensuite vouloir vraiment me former,
46:44 tout simplement trouver un métier qui me corresponde.
46:47 Donc, au début, je suis passé par le sport, je suis devenu éducateur sportif.
46:52 Puis là, il y a quelques temps, quand le confinement a eu lieu,
46:56 j'ai compris qu'il fallait que je fasse éducateur et de vraiment,
47:01 pas juste à donner des cours de sport, mais créer du lien avec les jeunes,
47:04 les accompagner dans les démarches professionnelles, aux charges de stage.
47:07 - Nicolas, qu'est-ce qui ne vous convenait pas précisément à l'école,
47:11 dans les apprentissages tels qu'ils étaient enseignés à l'école ?
47:15 - Je ne m'y retrouvais pas, il y avait trop de matières qui ne m'intéressaient pas forcément.
47:18 Tout simplement, quand j'ai décroché en première, j'étais en bac pour comptabilité,
47:23 il y avait beaucoup, beaucoup de matières qui ne me convenaient pas.
47:27 Donc moi, pour le coup, j'étais très doué en maths,
47:30 mais en français, c'était compliqué pour moi.
47:34 Dans l'ESI, je n'étais pas très doué.
47:37 Comme le professeur juste avant était en train de soulever,
47:40 quand on n'a pas forcément le niveau et qu'on ne sait pas forcément comment le dire,
47:44 on est en train de patauger, parce qu'à ce stage-là, on a 16 ans à peu près.
47:47 Et à 16 ans, moi, je n'avais pas forcément très, très confiance en moi.
47:53 Je ne me voyais pas dire qu'en fait, je n'avais pas forcément le niveau en français,
47:57 en anglais ou en espagnol.
47:59 Et je pense que j'ai décroché petit à petit, tout simplement.
48:02 - Au mieux peut-être de classe où les élèves étaient trop nombreux.
48:05 Vous avez aussi parlé, en préparant cette émission, des journées qui étaient très longues.
48:09 Ça aussi, c'était difficile en termes de concentration ?
48:11 - On a 8 heures de matières différentes, avec des matières qui sont relativement compliquées.
48:21 Pour nous, je parle, mais comme il le disait, il y a plusieurs élèves qui sont en difficulté.
48:25 C'est compliqué. C'est comme ça qu'on décroche petit à petit
48:28 et qu'on arrête le cursus scolaire.
48:31 - Votre question, Nicolas ?
48:34 - Ma question, c'était comment pourrions-nous faire pour améliorer le rythme
48:38 et la concentration des élèves ?
48:41 - Pierre Ouzouya, votre réaction ?
48:44 - La question qui est posée, c'est celle de l'enseignement professionnel,
48:47 qui est le parent pauvre de l'éducation nationale depuis beaucoup trop longtemps.
48:52 Je pense que l'un des projets fondamentaux pour redonner à l'enseignement professionnel
48:59 la capacité de prendre en charge tous les élèves,
49:02 et le cas de monsieur le montre bien que c'est nécessité,
49:06 c'est de faire passer la scolarité de 3 ans à 4 ans.
49:09 Vous savez, il y a quelques temps, elle était de 4 ans, pour le lycée.
49:12 Aujourd'hui, elle a été réduite de 3 ans.
49:15 - Donc il faudrait revoir le rythme, allonger le temps ?
49:18 - Ce n'est pas possible, et l'exemple le montre bien,
49:21 de faire en 3 ans ce qui était possible de faire en 4 jadis.
49:25 Donc il faut revenir sur un temps de formation plus long,
49:29 peut-être avec des enseignements allégés, mais sur la durée.
49:32 Ce qui a manqué à ce monsieur, c'est de la durée.
49:35 C'est la capacité de prendre son temps sur des apprentissages.
49:38 Et ça, c'est fondamental.
49:39 - Est-ce qu'il faut repenser les rythmes scolaires ?
49:41 On parle de rythmes scolaires finalement,
49:43 même si c'est en lycée pro, etc.
49:45 Mais voilà, à quel rythme on doit travailler ?
49:47 - C'est ces rythmes scolaires, et j'allais dire,
49:49 moi je suis une fervente défenseur de la formation en alternance,
49:54 en apprentissage.
49:55 Je pense que vous auriez peut-être, monsieur,
49:57 trouvé plus d'intérêt si vous aviez alterné entreprise
50:03 et apprentissage didactique.
50:06 J'y vois aussi un gros problème d'orientation.
50:09 Ça m'agace, et j'en suis malade pour vous,
50:12 de me dire que peut-être que vous n'avez pas eu quelqu'un
50:15 qui a été assez à l'écoute à la fin du collège
50:19 pour mieux vous orienter vers justement une formation en alternance
50:24 qui vous aurait sûrement peut-être plus convenu.
50:26 Et on n'écoute pas assez nos jeunes, en fait,
50:29 par rapport à leur caractère, en effet,
50:32 leur niveau d'attention.
50:34 Donc, ces rythmes scolaires, mais c'est aussi,
50:37 et aujourd'hui il faut absolument qu'on pousse
50:39 ces formations en alternance.
50:41 Il y a des CFA exceptionnels partout sur le territoire
50:44 qui permettent en effet d'améliorer, en fait,
50:47 vraiment cet intérêt que les jeunes portent, en fait,
50:51 à leur formation, et à ce moment-là, ne décrochent plus.
50:54 C'est aussi le travail des missions locales,
50:56 qui essayent de récupérer des jeunes.
50:58 Moi, j'en suis une fervente défenseure également
51:02 sur mon territoire.
51:04 Et donc, je pense que, monsieur, vous auriez peut-être été
51:08 peut-être plus attentif, ou en tout cas,
51:10 peut-être plus volontaire si vous aviez eu
51:13 cette formation en alternance.
51:15 Vous êtes d'accord avec ça, Nicolas ?
51:17 C'est un peu ce que vous avez trouvé avec l'école de la deuxième chance,
51:19 d'ailleurs.
51:20 Clairement, clairement.
51:21 Je suis totalement d'accord.
51:24 Moins de cours et plus de pratiques,
51:27 vous les deux, tout simplement,
51:28 fait qu'on assimile peut-être mieux les choses.
51:31 Et comme monsieur le sénateur disait,
51:34 j'aurais eu peut-être plus de temps
51:37 pour me concentrer sur l'apprentissage aussi.
51:40 Et l'école de la deuxième chance,
51:42 je ne savais pas que vous étiez...
51:43 C'est extraordinaire, ces réseaux.
51:45 Ça permet aussi de récupérer.
51:47 Racontez-nous un peu votre école de la deuxième chance.
51:49 C'est intéressant de savoir, pour les auditeurs.
51:51 Voilà, c'est ça qui a marché pour vous.
51:53 Comment ça se passait dans votre école de la deuxième chance ?
51:57 Au début, on faisait une petite remise à niveau.
52:00 Et très rapidement, on essayait de trouver
52:02 les corps de métier qui pouvaient nous intéresser, tout simplement.
52:05 Donc moi, très vite, il est ressorti
52:08 qu'il fallait que je fasse quelque chose en rapport avec le sport.
52:11 Puis j'ai fait plusieurs stages.
52:15 Et au quatrième stage, j'ai signé un contrat d'embauche, tout simplement.
52:18 Je rappelle juste ce que c'est, les écoles de la deuxième chance.
52:22 C'est tout un réseau de formations.
52:25 Vous êtes un petit peu rémunérés.
52:27 Vous vous insérez dans la vie active.
52:29 Et c'est adressé aux décrocheurs scolaires.
52:31 Qu'est-ce que vous inspire ce témoignage, ma question ?
52:33 Ce qui compte, c'est que le service public assure l'insertion
52:36 des jeunes Français dans la vie sociale,
52:39 dans la vie économique et dans la vie du pays.
52:41 L'école, il ne faut pas tout lui demander, tout simplement.
52:44 Il y a des élèves qui, à un moment donné, ont envie de faire autre chose.
52:47 Et l'idée aussi était très généreuse, en effet,
52:50 que tous les enfants iraient le plus longtemps possible à l'école
52:53 dans son caractère classique.
52:55 L'alternance, les écoles de la deuxième chance,
52:58 les écoles, des contrats de professionnalisation
53:01 qui permettent, en effet, de passer de la formation très pratique
53:06 à une formation académique, d'alterner,
53:09 donc des parcours beaucoup plus différenciés.
53:11 C'est simplement ce qu'il faut ouvrir.
53:13 Bien sûr, cette idée était très, très généreuse.
53:16 Tous les enfants iraient le plus longtemps possible à l'école.
53:18 On voit très bien que tous ne sont pas faits pour ça
53:20 et que cela pénalise aussi l'école.
53:22 Cela met en difficulté de jeunes qui ne s'y retrouvent plus,
53:25 qui s'ennuient, qui décrochent,
53:27 mais cela met aussi en difficulté l'école elle-même,
53:30 qui est un petit peu impuissante à apporter des réponses.
53:32 Donc des réponses diversifiées, c'est le témoignage.
53:34 Et oui, les écoles de la deuxième chance
53:36 qui se généralisent en France actuellement
53:38 font un excellent travail.
53:40 Elles ne stigmatisent pas l'école.
53:41 Il ne faut surtout pas dire que c'est obligatoirement l'échec de l'école.
53:44 Elles donnent une chance à des jeunes
53:46 qui ne sont pas particulièrement adaptés au système éducatif.
53:48 Et alors, certains ont parfaitement réussi à leur vie
53:51 sans avoir été adaptés au système éducatif.
53:53 On arrive au terme de cette émission.
53:55 Pierre Rousseau, qu'est-ce que vous retenez, vous,
53:57 de tous ces échanges finalement, au terme de ces cinq témoignages ?
54:00 Moi, je les trouve tous passionnants
54:02 parce qu'ils viennent du terrain
54:04 et envoient une réalité concrète
54:06 qui permet de montrer que, dans notre pays,
54:10 il reste une très forte ambition pour l'école.
54:13 On demande énormément de choses à l'école,
54:15 peut-être trop,
54:17 mais ça, je trouve que c'est vraiment dans la nature française.
54:21 L'école comme un moyen d'émancipation sociale,
54:24 je trouve ça tout à fait fondamental.
54:26 Max Brisson, en un mot ?
54:27 Il fait beaucoup de choses.
54:28 C'est un vrai visage de l'école.
54:30 On l'a souvent stigmatisé, mais sur la réalité, sur le terrain,
54:33 il y a plein d'initiatives que l'on a aperçues
54:35 à travers ces témoignages.
54:37 Donc, c'est plutôt réconfortant.
54:38 Laure D'Arcos, le mot de la fin ?
54:39 Écoutez, je pense que c'est aux mammouths
54:41 de s'adapter au terrain
54:44 et à toutes ces expériences d'élèves, de professeurs,
54:50 de parents différents dans notre pays,
54:54 et non pas l'inverse.
54:56 Donc, si on pouvait arrêter, en effet,
54:59 d'avoir en permanence le mammouth et la rue de Grenelle,
55:03 qui imposent absolument des choses qui ne sont pas adaptables.
55:07 Il faut secouer un petit peu le mammouth.
55:09 On sait que certains ministres s'y sont laissés,
55:11 et ce n'est pas toujours si facile.
55:12 Merci à tous nos citoyens.
55:14 Merci à Amel, merci à Julie, Michel, Mohamedou et Nicolas
55:18 qui m'ont accepté de livrer leur expérience sur ce plateau,
55:21 leurs problèmes, leurs initiatives sur ce sujet
55:23 qui nous concerne tous, celui de l'école, vous l'avez dit.
55:25 Et merci à vous trois.
55:26 Merci, Laure D'Arcos, merci Max Brisson,
55:28 merci Pierre Ouzoulia d'avoir joué le jeu de l'échange direct,
55:32 de l'écoute du Dialogue citoyen, c'est le nom de cette émission.
55:35 Et on se retrouve le mois prochain
55:36 pour un nouveau numéro de Dialogue citoyen.
55:38 Le constat, en fait, il est là, mais en fait,
55:42 le changement n'est pas encore présent.
55:47 Quelque chose qui fait un peu peur pour moi,
55:49 c'est le risque d'une école à deux vitesses,
55:52 on le voit avec l'idée de rendre les écoles plus indépendantes,
55:58 de décentraliser.
55:59 Il est vraiment temps de réduire surtout les effectifs des classes.
56:03 Entre ce qu'ils disent et ce qui va exister éventuellement sur le terrain,
56:10 je crains que ça prenne beaucoup de temps.
56:13 ♪ ♪ ♪

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