Pierre Allorant, politologue orléanais et doyen de la faculté de droit d'Orléans
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00:00 Camille Huppenoir avec vous, nous accueillons notre invitée ce matin, c'est Pierre Allorand,
00:04 politologue et doyen de la faculté de droit d'Orléans.
00:06 Le gouvernement Attal a été annoncé hier soir, en tout cas en ce qui concerne les principaux ministres,
00:11 ils sont 14. Bonjour Pierre Allorand. Bonjour Camille.
00:13 Gérald Darmanin à l'intérieur du Pont Moretti à la justice, Bruno Le Maire à l'économie,
00:18 Lecornu aux armées. Finalement est-ce qu'on n'est pas sur un remaniement à la marge ?
00:22 Oui, on a... On reste en poste quasiment, la moitié.
00:24 Tout à fait, en tout cas les poids lourds, avec une masculinité très forte, vous l'avez constaté,
00:29 tous les "postes sérieux" régaliens à l'ancienne sont captés par des hommes,
00:37 plutôt venus de la droite. Donc c'est un peu comme au stade de la source, on scalpe la pelouse,
00:41 mais les équipes sont les mêmes. On n'a pas tellement changé la composition,
00:45 sauf Rachida Letti, l'arbre qui cache la forêt.
00:48 Cet homme, cette femme sur le papier, c'est vrai que c'est la parité,
00:51 mais il n'y avait pas une figure féminine de la majorité du camp présidentiel
00:55 qui aurait pu émerger pour un de ces ministères régaliens ?
00:58 Il aurait pu, effectivement, y en avoir, mais ce n'est pas le choix du Premier ministre
01:02 ni du Président de la République. On va chercher à droite.
01:06 Il y a une sorte de rattrapage, puisqu'on avait beaucoup parlé de Catherine Vautrin
01:10 au moment de la nomination d'Elisabeth Borne à Matignon.
01:13 Donc, elle hérite d'un très grand ministère social.
01:16 Catherine Vautrin, Rachida Letti, Gérald Darmanin,
01:19 c'est l'équipe de campagne de Nicolas Sarkozy lors de la primaire de la droite.
01:23 Avant de passer sur ces super ministères, on va parler de cette entrée de Rachida Letti
01:26 au gouvernement. Rachida Letti figure Sarkozy, ce qui n'a pas manqué ces dernières années
01:31 de lancer des critiques au vitriol sur Emmanuel Macron, sur la Macronie.
01:35 Quel est le message de son entrée au gouvernement ?
01:38 Visiblement, si c'était pour les Républicains, c'est raté puisqu'ils l'ont exclue du parti.
01:41 Oui, c'est toujours l'entreprise d'Emmanuel Macron, de plus en plus visible
01:46 depuis le début de son deuxième quinquennat, de rétrécir la droite,
01:51 de priver d'espace et d'air les LR, avec un risque fort quand même,
01:56 c'est de renforcer encore, d'élargir le boulevard qui s'ouvre au Rassemblement National.
02:02 On avait analysé la nomination de M. Attal comme une sorte d'anti-Bardella
02:08 pour les élections européennes. Là, l'espace de la droite classique,
02:12 disons de la droite de gouvernement, se rétrécit de plus en plus.
02:16 Mais est-ce qu'on ne prend pas un gros risque au gouvernement avec Rachida Letti
02:19 qui est tout de même mise en examen ?
02:20 Alors, elle est deux fois mise en examen, effectivement.
02:23 Il y a l'affaire de ses liens avec l'Azerbaïdjan qui n'est pas vraiment une démocratie.
02:28 Il y a également la corruption passive, une affaire assez lourde
02:32 pour un montant de 900 000 euros avec Renaud Nissan.
02:35 Il y a un risque important, il y a la présomption d'innocence, mais quand même.
02:38 C'est ce qu'a défendu Gabriel Attal d'ailleurs, hier au journal de TF1.
02:42 Les réactions sont assez vives depuis hier dans le monde de la santé et de l'éducation nationale
02:46 parce que ces deux ministères importants qui font partie des préoccupations des Français,
02:51 l'école, l'offre de soins, se retrouvent collés à d'autres ministères,
02:54 l'éducation avec le sport, la santé avec le travail.
02:58 Ils ont raison, les syndicats de ces milieux-là, de s'inquiéter.
03:01 Alors, je pense qu'il faut être prudent parce qu'il va y avoir une liste complémentaire
03:05 de secrétaires d'État, très probablement, qui vont permettre aux ministres de déléguer,
03:10 de se décharger.
03:12 Mais c'est vrai que quand on pense aux responsabilités et puis aux bataillons de fonctionnaires,
03:17 par exemple, du ministère de l'Éducation nationale, c'est une lourde charge.
03:21 On a l'explication, M. Attal a déjà dit qu'il emmenait avec lui à Matignon, en fait, les directives
03:27 et Mme Oudéa Castera aura simplement à appliquer les réformes que M. Attal a lancées.
03:33 – Mais une année de Jeux Olympiques, Amélie Oudéa Castera au sport et à l'éducation nationale,
03:39 ça ressemble quand même à un travail de titan.
03:41 – Alors, c'est un travail de titan, c'est un beau défi.
03:44 Bon, si on est très positif ce matin, on peut se dire finalement, l'éducation nationale et le sport,
03:50 l'activité physique à l'école, on sait qu'on a beaucoup de problèmes aujourd'hui de santé
03:54 chez les jeunes, d'obésité, de diabète et puis c'était l'idée de Jean Zay,
03:58 on est à Orléans, de mettre beaucoup de sport à l'école, soyons positifs.
04:04 – On le sait, vous l'avez déjà légèrement abordé, le camp présidentiel a bien sûr dans le viseur
04:08 ses élections européennes de juin prochain.
04:10 Le camp présidentiel qui est en retard dans les sondages, notamment sur le Rassemblement National,
04:15 en quoi ce nouveau gouvernement peut avoir une influence sur ce futur vote ?
04:19 – On sait que la composition des gouvernements et les remaniements ministériels
04:23 ont très peu d'influence en réalité sur le vote,
04:25 c'est surtout la personnalité du Premier ministre qui peut jouer
04:28 et en cela effectivement, il y a un rajeunissement,
04:31 on sait que M. Attal est un très bon communicant,
04:34 ça sera un gouvernement de campagne essentiellement,
04:37 on sait comment fonctionne M. Attal, c'est surtout de la communication
04:41 plus que de l'action, même s'il a beaucoup parlé d'action hier.
04:44 – Il a répété Barthelé même.
04:45 – Voilà, tout à fait, d'ici le mois de juin,
04:47 il n'y aura peu de temps de lancer des actions majeures.
04:51 – Mais dans la couleur politique du gouvernement, il y a tout de même un virage à droite.
04:55 – Oui tout à fait, c'est un gouvernement, on n'est plus du tout en même temps,
04:58 vous avez raison, le tournant est vraiment assumé
05:02 et c'est fondamental pour le Président de la République,
05:04 parce que si ces élections européennes, comme on l'annonce,
05:08 sont relativement mauvaises et que la liste de la majorité
05:11 est très largement distancée par celle du Rassemblement National,
05:14 ce sera déjà la fin de son deuxième quinquennat
05:18 et le début de l'impuissance politique.
05:20 – Merci beaucoup Pierre Allorand d'avoir décrypté avec nous ce matin
05:23 ce nouveau gouvernement qui sera bien sûr complété au fil des prochains jours
05:26 par des secrétaires d'État notamment.
05:28 Bonne journée Pierre.