Vaincre les barrières imposées par la novlangue par Barkat

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Sources
Féris Barkat : https://www.youtube.com/watch?v=s9Rr86hYjNw
Musique : https://www.youtube.com/watch?v=mc6gm0m_36I

Réponses au quiz de fin :

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Que permet le décret impérial de 1810 dont parle Barkat ?
Permet la compensation financière pour les fermetures dues à la pollution.

Quels exemples utilise-t-il pour illustrer la novlangue ?
Pollution = Externalité négative
Déforestation = Croissance
Perte de capacité physique = Confort

Qu'est-ce qui fait qu'une situation est inacceptable ?
Lorsqu'elle est évitable.

#barkat #écologie #novlangue #pollution #croissance #décroissance #degrowth #confort #air #banlieuesclimat #quartier #féris #conférence #extrait #ethiqueettac
Transcript
00:00 (Musique)
00:08 Donc soit on invisibilise la situation, soit on l'atténue,
00:11 mais jamais on la comprend.
00:13 Et cette nouvelle langue, ce travaississement du langage,
00:18 après réflexion je me suis dit qu'on peut aussi le retrouver,
00:20 à des degrés bien sûr très différents, dans la modernité.
00:24 Dans une tentative de légitimation d'un système hyper productif,
00:27 capitaliste, d'innovation, de progrès, bref, tous ces mots creux
00:31 qui sont justifiés, et qui, je ne vais pas dire qu'ils sont mauvais,
00:36 mais qui en tout cas invisibilisent une partie de la réalité.
00:42 L'irrationnel dans nos vies.
00:44 Alors je vais prendre trois exemples, très simples.
00:48 D'abord, la pollution de l'air.
00:52 La pollution de l'air aujourd'hui c'est une externalité négative.
00:56 D'accord. Donc, ok.
01:00 Si vous revenez en 1810, c'est pas du tout ça.
01:03 En 1810, il faut savoir qu'à l'époque en France,
01:05 l'environnement c'est un vrai sujet.
01:07 Les magistrats de police peuvent faire la fortune ou la misère d'une entreprise
01:11 parce que si tu pollues l'air, hop, t'es fermé.
01:13 Sauf qu'en 1810, il y a un décret impérial qui est adopté
01:15 et qui permet la compensation financière de ces pollutions.
01:20 Et à ce moment-là, c'est incroyable,
01:22 parce que là la compensation financière ça vous paraît normal,
01:25 mais à l'époque, on s'en fout complètement de l'argent.
01:27 Il y a des médecins qui viennent faire des tribunes,
01:29 dont Emmanuel Fauderé, le père de la médecine légale,
01:31 et qui dit "Mais dans quel code de la nation le plus barbare
01:34 peut-on autoriser d'altérer un droit aussi fondamental
01:38 que le droit de respirer un air pur ?"
01:40 Vous êtes complètement fous. Moi je m'en fous de votre argent.
01:43 Vous êtes en train de mettre de la vapeur d'acide chlorhydrique dans l'air.
01:46 Rentre chez toi, quoi. C'est pas possible.
01:49 Et donc, il y a vraiment cette situation où les gens sont très vénères.
01:54 Et on peut constater que la normale, la pollution de l'air,
02:00 aujourd'hui est complètement devenue normale.
02:02 C'est une externalité négative, une petite conséquence dommageable.
02:06 Alors qu'on parle de 48 000 à 100 000 morts en France,
02:08 9 millions dans le monde par an, des PM1,
02:11 un micromètre de diamètre qui rentre dans le cerveau et qui provoque des maladies,
02:14 on est sur quelque chose qui n'est pas du tout une externalité négative
02:17 qu'il ne faudrait pas prendre en compte, qui est inévitable.
02:20 Non. On devrait poser la question.
02:22 C'est devenu complètement banal, normal.
02:24 Deuxième exemple, la croissance.
02:26 Alors la croissance, il y aurait beaucoup de choses à dire.
02:28 Le PIB, la croissance, on n'est pas là pour rentrer là-dedans,
02:30 mais juste le mot croissance est intrinsèquement positif, mélioratif.
02:34 Pourtant, il peut désigner, dans certains cas, la déforestation.
02:39 La déforestation, c'est quand même un processus qui tue du vivant.
02:42 Le vivant meurt.
02:44 Bon, si les arbres se foutent en fou, OK.
02:46 Regardons les conséquences que ça peut provoquer.
02:49 On sait très bien que cette déforestation, cette bétonisation, provoque quoi ?
02:53 Des zoonoses, parce que les espaces naturels des animaux, de la biodiversité diminuent.
02:58 Donc on est sur des phénomènes où des maladies sautent de l'animal à l'homme.
03:02 75% des maladies infectieuses aujourd'hui, c'est des zoonoses.
03:05 Et donc on est dans une situation où quelque chose qui est intrinsèquement
03:09 amélioratif invisibilise une conséquence qui nous retombe dessus.
03:12 Et parfois on traite les deux séparément, mais c'est bien la croissance,
03:16 parce que c'est positif de déforester et un arbre mort vaut plus qu'un arbre vivant,
03:19 ce qui est fou.
03:20 Et aujourd'hui, on peut invisibiliser une conséquence qui, comme une pandémie,
03:25 qui n'est pas rien.
03:27 Donc le mot croissance, à nouveau, participe à cette nouvelle langue
03:31 et à gommer, invisibiliser les parties négatives.
03:35 Dernier exemple, le confort. Le confort, j'entends beaucoup.
03:37 On est une société plutôt confortable. En effet, tout est facilité.
03:41 Il faut aller vers plus de confort, plus de digitalisation.
03:44 Le but, ce n'est pas de nier les effets potentiellement positifs.
03:47 Le but, c'est de dire, OK, est-ce que ce confort, au fond,
03:49 ne produit pas aussi de l'inconfort ?
03:53 Au niveau de la santé mentale, les réseaux sociaux, c'est catastrophique
03:55 dans ma génération.
03:57 Au niveau physique, la Fédération française de cardiologie nous explique
04:01 qu'en 40 ans, les adolescents ont perdu 25 % de leur capacité physique.
04:06 Donc ce confort produit en son sein de l'inconfort.
04:10 Et donc quand on dit juste qu'il faut produire plus de confort,
04:13 on peut aussi poser la question, mettre sur la balance,
04:15 OK, est-ce qu'il n'y a pas des limites ?
04:17 C'est parce que c'est faisable que c'est désirable.
04:20 Mais non, parce qu'il y a ce vocabulaire totalement amélioratif,
04:24 ce paradigme-là, on oublie,
04:27 en tout cas, on invisibilise les conséquences négatives.
04:34 L'anormal, l'anormal est donc devenu normal aujourd'hui.
04:40 Et quand je parle d'anormal, ce n'est pas moi, Féris, qui me suis posé,
04:44 qui ai dit écoutez, les arbres c'est cool, la pollution de l'air c'est pas bien,
04:48 voilà, c'est moi qui définis l'anormal et le normal.
04:50 Non, non, non.
04:51 Il y a un référentiel biologique, physique,
04:55 qui permet de définir, en tout cas, les contours d'une normalité.
04:59 Vous parlez avec un climatologue, il va vous dire que la normale de saison n'existe plus,
05:03 ou en tout cas, elle ne se déplace.
05:04 Vous parlez avec un expert du vivant, il va vous dire que les espèces
05:07 passent 100 à 1000 fois supérieur,
05:11 un rythme 100 à 1000 fois supérieur au taux normal, ou en tout cas au taux naturel.
05:17 Donc on est dans une situation qui est proprement anormale.
05:22 Et je me suis demandé donc, quelle est l'ambition de cette nouvelle langue,
05:27 de ce vocabulaire, et j'ai l'impression qu'au début,
05:30 on est dans une situation où l'objectif était de dire que tout allait bien.
05:34 La croissance, c'est super, tout va bien, tout va bien, tout va bien,
05:36 mais aujourd'hui, ce n'est plus possible.
05:37 On voit bien avec les rapports sur le climat, il y a des scientifiques
05:39 qui commencent à manifester, là, ça devient plus tenable.
05:41 Donc on est dans une situation où on doit réaliser, tous ici,
05:46 que ce processus de banalisation, de normalisation, n'a pas pour autre objectif
05:52 que de créer une fausse tragédie grecque,
05:56 comme s'il y avait deux légitimités qui s'affrontaient.
06:01 D'un côté, ok, les arbres, ce n'est pas cool, les déforestations, ce n'est pas bien,
06:04 mais la croissance, les points de PIB, quand même, etc.
06:07 Alors que l'économie, étymologiquement, c'est la gestion de la maison et que la maison brûle.
06:11 Mais on n'arrive pas à la réaliser, et on se dit, écoutez,
06:14 il y a deux légitimités qui s'affrontent, alors qu'en réalité,
06:16 l'économie devrait être là pour nous servir, pour notre bien-être.
06:19 Et donc, on organise une tragédie grecque comme si deux légitimités s'affrontaient,
06:24 alors qu'il y en a une qui est clairement une folie.
06:27 Aujourd'hui, l'irrationnel a triomphé.
06:31 Et on devrait être intransigeant avec ça.
06:34 Une fois qu'on a dit ça, j'ai bien conscience qu'on est beaucoup à l'avoir réalisé.
06:43 On est beaucoup à avoir réalisé ces situations,
06:46 et que face à la mort, face à ces conditions de vie qui périclident,
06:50 six limites planétaires sur neuf ont été franchies,
06:53 on est nombreux à se demander comment, en tout cas, moi je vous pose la question,
06:56 comment lutter contre cette normalisation.
06:59 Et donc là, on va finir sur deux étapes.
07:02 Étape numéro un, identifier où est-ce que l'essentiel a été détruit dans nos vies,
07:07 et de manière totalement normale.
07:09 Étape numéro deux, comment se mettre en mouvement, comment agir.
07:11 On commence par la première étape.
07:13 Alors d'abord, il faut identifier où la normale est devenue normale dans vos vies.
07:19 Où l'essentiel a été détruit.
07:21 Où, de manière totalement normale, on est sur quelque chose qui ne colle pas.
07:26 Et là, les sophistes vont vous dire, oui, mais l'essentiel c'est relatif à chaque individu.
07:30 Non, il suffit de voir les pulsions de vie, les pulsions de mort.
07:33 Les pulsions de vie, ou les pulsions de mort.
07:36 Moi, là, personnellement, j'ai cofondé une association qui s'appelle "Bon le Climat".
07:39 Pourquoi ? Parce que j'ai constaté des pulsions de mort partout.
07:43 L'irrationnel dans les quartiers, là où moi et les cofondateurs,
07:47 les cofondatrices de "Bon le Climat" on a grandi,
07:50 l'irrationnel est partout, et a été banalisé.
07:52 Sinka Fleury a écrit un livre, "Ce qu'on ne peut pas nous voler", Manuel Duferstollen,
07:56 elle liste l'horizon, le temps long, le silence, plein de choses qui nous ont été volées.
08:01 Et qui, de manière totalement banale, totalement normale, plus personne ne se pose la question.
08:07 De la qualité de l'alimentation, de la santé, etc.
08:10 Alors qu'il y a en plus un déficit structurel au niveau de l'éducation sur les enjeux écologiques,
08:13 alors qu'en plus, alors qu'en plus, on est les plus vulnérables.
08:17 C'est un paradoxe incroyable.
08:19 Canicule 2003, 19 000 morts, c'est le sein de Nival de Marne, c'est là où il y a le plus de morts.
08:23 Vous prenez la pollution, la qualité de l'air, bref.
08:25 Donc on est dans une situation qui était proprement anormale,
08:29 qui tendait vers des pulsions de mort, et donc on les a identifiées.
08:33 Et là pour les pulsions de mort dans les quartiers, c'est carrément dans le thème,
08:36 parce que vous prenez l'écomorbidité pendant le Covid, dans les quartiers populaires.
08:40 Donc on a identifié ces pulsions de mort, et le but c'est de dire,
08:43 nous on va refuser l'anormal dans notre environnement.
08:48 Et donc ça décide de prendre du recul pour voir, ok,
08:52 c'est peut-être la facilité de ne pas voir ça en face,
08:55 mais au fond, au fond l'anormal est là, et on doit se battre contre lui.
09:00 On doit en tout cas essayer de lutter.
09:02 Et pour lutter, une fois qu'on a identifié,
09:04 une fois que vous avez identifié autour de vous les moments où c'est un peu problématique,
09:08 et que l'anormal a triomphé, vous devez, je pense, vous mettre en mouvement.
09:13 Et pour ça, comment faire ?
09:16 Je vais finir là-dessus.
09:18 Comment se sentir légitime ? Comment se mettre en mouvement ?
09:20 Moi, personnellement, c'était assez simple.
09:22 Ma mère est donc très malade, et j'ai vécu comme une grosse injustice,
09:28 et donc je me devais de...
09:31 Cette injustice était inévitable.
09:34 Alors qu'à contrario, il y a des injustices qui sont évitables,
09:37 et qui sont inacceptables précisément parce qu'elles sont évitables.
09:41 C'est pas écrit dans le marbre que dans les HLM,
09:43 on doit crever beaucoup plus parce qu'il y a des canicules.
09:45 C'est écrit nulle part.
09:47 Donc, à ce niveau-là, ces injustices évitables m'ont mis en mouvement.
09:52 Cette impuissance que je pouvais ressentir d'un côté,
09:54 je voulais retrouver ma capacité d'agir de l'autre.
09:57 Je voulais aussi la rendre fière, me dire que ce qu'elle m'avait apporté,
09:59 je pouvais aussi aider les autres avec.
10:01 Et donc j'avais ce truc assez personnel où j'avais besoin de me mettre en mouvement.
10:05 Mais si, vous, ça vous touche pas, qu'est-ce qui pourrait vous toucher ?
10:09 Et là, on revient à Eichmann et à Nahrendt.
10:11 Eichmann, quand on lui parle de ses grandes décisions qui ont changé la face du monde,
10:16 qu'est-ce qu'il répond ?
10:18 Il a absolument aucune conscience,
10:20 aucune conscience de ses grandes décisions qui ont changé le monde.
10:24 A chaque fois, il est concentré sur sa petite histoire,
10:26 sur sa petite vie, sur sa carrière.
10:28 "Ah oui, j'ai fait telle ou telle décision et ça a changé ma carrière.
10:31 Ah oui, mais à un moment, on m'a volé un dossier."
10:33 Jamais il fait le parallèle avec la grande histoire.
10:36 Jamais.
10:38 Et donc, il est dans une situation où la banalité du mal
10:41 le fait qu'il se concentre sur sa vie,
10:43 et parce qu'il se concentre sur sa vie, il est aveuglé
10:45 et il est incapable de réaliser la folie qui est autour de lui,
10:49 et qu'il est en train de perpétrer.
10:50 Parce que ce mec, le matin, il embrasse ses enfants,
10:53 et l'après-midi, il organise un génocide.
10:55 Sans pression.
10:58 Donc, il faut se poser la question de comment il fait.
11:02 Et pour ça, il faut avoir cette conscience que la grande histoire s'écrit aujourd'hui.
11:06 Parce qu'au niveau de la biodiversité, au niveau du climat,
11:09 69% des vertébrés qui disparaissent en 50 ans, c'est historique.
11:12 1,2 degré, c'est historique.
11:14 Les spermatozoïdes, 50% de la concentration de spermatozoïdes en moins en 50 ans,
11:17 tout ça est historique.
11:19 Donc l'histoire s'écrit de fait.
11:21 La question, c'est quand on le réalise, ça nous permet de se décentrer.
11:24 On se décentre.
11:25 On prend conscience que l'histoire s'écrit.
11:27 Et donc, ça ne veut pas dire se sacrifier.
11:29 Au contraire.
11:31 Ça veut simplement dire s'aligner, aligner sa vie avec la grande histoire.
11:37 Refuser la banalisation du mal.
11:40 Se dire que les normes sont si ridicules par rapport à tout ce qui est essentiel à toi.
11:45 C'est pour ça que moi, personnellement, j'ai décidé d'arrêter mes études.
11:48 À la London School of Economics, j'ai décidé de tout arrêter.
11:51 Parce que mon rapport au risque a changé.
11:53 Pour moi, le risque, c'était plus de ne pas avoir de diplôme,
11:56 de ne pas être légitime,
11:58 de ne pas être reconnu par telle ou telle entreprise.
12:01 Le risque, c'était de ne pas m'aligner ma petite vie
12:05 à la grande histoire qui est en train de s'écrire.
12:07 Merci.
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