Chantage migratoire: l'Europe à la fois victime et fautive

  • l’année dernière
C'est « une arme » dont disposent certains pays comme la Turquie ou le Maroc pour faire pression. Si le chantage migratoire a pris une autre dimension depuis la crise de 2015, l'Union européenne a contribué à créer les conditions de sa propre fragilité.

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Transcription
00:00 Il est hors de question de faire du chantage migratoire.
00:02 On ne peut pas céder au chantage migratoire de M. Loukachenko.
00:05 Des migrants qui sont instrumentalisés comme une arme en réalité.
00:10 C'est une crise migratoire artificielle.
00:12 Ils savent très bien que la migration est notre faible.
00:25 Donc ils utilisent la migration comme un outil.
00:27 Le changement climatique est un moyen d'imposer une situation intérieure à la France et à l'UE.
00:34 Aujourd'hui, la question migratoire est devenue tellement un sujet sensible dans l'Union Européenne particulièrement, y compris en Finlande.
00:42 Que des pays tiers, donc des pays non membres de l'Union Européenne,
00:48 ne peuvent pas se faire de la migration.
00:51 Que des pays tiers, donc des pays non membres de l'Union Européenne,
00:57 utilisent finalement la question migratoire pour nous faire peur.
01:00 De toute évidence, c'est ce que la Russie cherche à faire comme pays.
01:03 Cet usage stratégique de la migration,
01:06 même s'il s'agit de tout petit nombre de personnes,
01:13 est ressenti de manière très forte par les pays de destination.
01:17 Europe, our common home, is threatened.
01:25 At this very moment, a hybrid war is taking place on the Polish-Belarusian border,
01:31 which Alexander Lukashenko, with the backroom support of Vladimir Poutine,
01:36 has declared against the entire European Union.
01:40 Il s'agissait bien pour le pouvoir biélorusse,
01:43 pas seulement de laisser passer quelques demandeurs d'asile et migrants irakiens
01:48 vers la frontière polonaise,
01:49 mais bien d'organiser depuis les pays d'origine des filières des migrations.
01:54 Et en allant travailler moi-même à Erbil, au Kurdistan irakien,
01:58 j'ai pu collecter un certain nombre de données et faire des enquêtes,
02:00 justement sur cette organisation de filières des migrations,
02:05 avec des centres de recrutement,
02:07 des achats qui permettaient de publiciser des filières d'études en Biélorussie
02:12 pour des ressortissants du Kurdistan irakien,
02:14 et qui a ainsi acheminé un certain nombre de candidats à l'immigration vers l'Europe,
02:19 à travers la Biélorussie, jusqu'à la frontière polonaise.
02:22 L'objectif est de déstabiliser la situation en Europe.
02:25 L'Europe a tardé à comprendre que les tragédies au Proche-Orient ou en Afrique
02:38 ne pouvaient pas être sans conséquence.
02:40 L'Europe a tardé à comprendre que les tragédies au Proche-Orient ou en Afrique
02:45 On n'a pas réussi à s'entendre sur la manière dont on traitait les personnes
02:49 en situation de migration internationale,
02:50 particulièrement les demandeurs d'asile et les réfugiés.
02:52 Et donc la manière de régler cette situation a été finalement d'empêcher les arrivées massives.
02:58 Et la solution que l'on a trouvée, c'est de passer des accords avec les pays tiers
03:01 qui entourent l'Union européenne.
03:07 Parce que c'est en Turquie que les réfugiés doivent, autant qu'il est possible,
03:11 être accueillis.
03:12 Mais la contrepartie, c'est que nous puissions aider la Turquie si nous voulons
03:16 qu'elle nous aide nous-mêmes.
03:17 Le gouvernement turc s'est engagé à empêcher les départs de personnes migrants,
03:21 principalement syriennes, de leur côte.
03:23 Nous, en rétribution, on a accordé 6 milliards d'euros pour améliorer les conditions de vie
03:27 des réfugiés syriens en Turquie, et puis des promesses qui n'ont pas été tenues
03:32 de réouverture des négociations d'adhésion à l'Union européenne,
03:34 de libéralisation des visas, qui n'ont pas été tenues à la suite du Côte d'État manqué de 2016.
03:38 Et finalement, en transférant un peu la gestion de l'immigration à des pays tiers,
03:43 on transfère également une partie de notre souveraineté.
03:46 Et donc ces pays, ensuite, vont l'utiliser sur des questions et sur des intérêts
03:50 qui n'ont rien à voir avec l'immigration.
03:52 Nous ouvrons les portes de notre opération actuelle.
03:57 3,6 millions de réfugiés seront envoyés à vous.
04:01 Il y a notamment eu, en février-mars 2020, l'envoi qui a priorité plutôt organisé
04:07 par les pouvoirs publics turcs de 10 000 personnes migrantes à la frontière terrestre avec la Grèce,
04:12 qui était un moment où les Turcs avaient lancé une intervention militaire terrestre
04:16 dans le nord de la Syrie et sur laquelle les Européens étaient plutôt réservés.
04:20 L'usage par la Turquie des migrants comme moyen de pression et de chantage sur l'Europe
04:24 est absolument inacceptable.
04:25 Donc c'est vraiment là où, finalement, des pays qui nous entourent,
04:28 qui ne sont pas toujours très bien intentionnés et qui ne sont pas les plus respectueux des droits
04:32 des personnes migrantes et des droits humains de manière générale,
04:35 ont commencé à comprendre que, finalement, ils avaient un pouvoir sur nous.
04:38 L'Espagne héberge un leader politique du front polisario de la région indépendantiste au sud du Maroc.
04:49 En réponse indirecte, le Maroc laisse passer un certain nombre de migrants,
04:55 notamment en provenance d'Afrique subsaharienne, vers l'Espagne.
04:59 Donc on voit aujourd'hui que c'est devenu quelque chose de plus ordinaire, malheureusement,
05:03 d'utiliser des personnes en situation de migration internationale,
05:05 dont beaucoup sont en situation aussi de refuge, de déplacement forcé,
05:09 pour obtenir des concessions de la part des Européens.
05:11 On n'apprend pas de nos erreurs, y compris dans ses relations avec les pays tiers.
05:22 L'Union européenne et les pays européens sont leurs propres ennemis, en quelque sorte,
05:27 et se fragilisent en politique internationale en se rendant sensibles à des menaces qui,
05:34 si on les prend vraiment de manière très pragmatique,
05:37 sont en fait des menaces qui n'existent que dans des représentations collectives
05:42 et des imaginaires très biaisés.
05:45 Il ne faut pas oublier quand même que, que ce soit en Finlande ou en Pologne en 2021,
05:50 ou même en Espagne en mai 2021,
05:53 on parle à chaque fois de quelques centaines, au maximum quelques milliers de personnes.
05:57 Donc absolument pas de quoi, en termes vraiment pragmatiques et politiques,
06:02 déstabiliser ni un pays destination européen, ni l'Europe en général.
06:07 C'est ces imaginaires de crise que ces pays peuvent instrumentaliser
06:10 pour faire croire à l'Europe qu'elle est en danger.
06:12 L'Union européenne est très vulnérable parce que les États membres de l'Union européenne
06:16 n'arrivent pas à s'entendre sur notre politique immigration.
06:18 [Musique]
06:27 Il y a une grande crainte de la part des institutions européennes,
06:30 des gouvernements plus largement, des résultats des élections européennes de l'année prochaine.
06:34 Et donc il y a un peu une sorte de course contre la montre pour adopter ce pacte.
06:38 Et on est dans une sorte de chute en avant parce qu'électoralement,
06:42 il faut montrer aux Européens qu'on gère l'immigration,
06:45 voire qu'on la limite ou voire qu'on l'arrête.
06:47 Mais ça n'arrivera jamais.
06:48 Il y a toujours une immigration dans l'histoire de l'humanité, il y en aura toujours.
06:51 Et il y en aura certainement de plus en plus,
06:53 notamment parce qu'il y a de plus en plus de populations sur cette planète.
06:56 [Musique]
07:01 Les gouvernements européens sont dans une sorte de déni de réalité
07:04 qui alimente finalement aussi des partis populistes de droite ou d'extrême droite
07:09 qui vont encore plus utiliser cette question-là à des fins politiques,
07:13 à des fins électorales.
07:14 Et on le voit actuellement en France, mais c'est vrai au Royaume-Uni,
07:18 c'est vrai partout, ça a été vrai en Italie.
07:20 C'est un exemple intéressant puisque cette extrême droite est arrivée au pouvoir
07:23 et finalement, on n'a pas plus de solutions.
07:25 "Lavorions aujourd'hui pour maintenir les impégnes que nous avons souscrits avec vous
07:28 dans tous les domaines, y compris le repristinement de la légalité
07:32 et le contraste à l'immigration illégale."
07:34 Je pense que si on peut parler d'instrumentalisation de l'immigration,
07:36 on peut parler aussi de l'instrumentalisation des questions migratoires
07:39 par les gouvernements européens pour des enjeux électoraux.
07:42 J'aurais tendance à dire qu'il y a un peu une instrumentalisation de la migration,
07:47 pas seulement par les pays tiers,
07:48 mais aussi par nos acteurs et actrices politiques en Europe.
07:52 [Musique]

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