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Grâce à des vidéos et des audios inédits tirés des #FAFLeaks, StreetPress retrace en image une agression raciste menée par les militants néonazis parisiens de la division Martel.

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00:00 Cette vidéo a été tournée le 20 avril 2022 à Paris.
00:15 Ce jour-là, en fin d'après-midi, une vingtaine de jeunes néo-nazis ont tabassé des collégiens
00:20 et des lycéens.
00:21 Les victimes ont entre 13 et 16 ans.
00:23 Je suis Mathieu Mollard, journaliste à Street Press.
00:26 Je bosse sur l'extrême droite.
00:27 Il y a quelques semaines, avec mon collègue Christophe, nous avons mis la main sur plus
00:31 de 2000 documents inédits.
00:32 On les a baptisés les Faflix.
00:35 Ils viennent tous d'un même téléphone, celui de Pierre.
00:38 C'est lui.
00:39 C'est un militant d'extrême droite, il a tout juste 18 ans et il est l'un de ceux
00:43 qui ont organisé cette ratonnade.
00:45 Comme la plupart des agresseurs, il est membre de la division Martel.
00:49 C'est un groupuscule qui regroupe des jeunes néo-nazis violents d'Ile-de-France.
00:53 On vous a raconté leur histoire dans le premier épisode des Faflix.
00:57 Aujourd'hui, dans ce deuxième épisode, on va revenir en détail sur l'agression
01:01 qu'ils ont menée devant le lycée Victor Hugo dans le 3ème arrondissement de Paris.
01:05 On s'est procuré des vidéos, des audios, on a discuté avec l'une des victimes,
01:10 on a aussi discuté avec des sources policières et le parquet de Paris qui dirige l'enquête.
01:14 Pour comprendre toute cette affaire, revenons au point de départ.
01:22 C'est le Parisien qui en premier parle de ce dossier.
01:24 Le journal évoque une blague entre lycéens qui aurait mal fini.
01:28 La division Martel, le groupe de jeunes néo-nazis, va ensuite se mêler de l'affaire pour venger
01:33 la victime du canular.
01:34 L'un des militants d'extrême droite, celui qu'il surnomme "le Russe", va provoquer
01:38 les lycéens.
01:39 Comme on peut le voir sur cette conversation Instagram, le ton monte entre les deux groupes
01:44 et il se file rencard pour régler l'affaire.
01:46 Tu verras ce soir c'est quoi de s'en prendre à des Russes.
01:48 Tu crois t'es Poutine sale bâtard ? Russe ou pas, je m'en bats les couilles.
01:52 Je vais vous enculer vous allez voir.
01:54 T'insultes les Russes en plus ? Ferme ta race.
01:56 On verra, je parle pas pour rien dire.
01:58 Tu nous fais le mec de la street.
01:59 Plus loin dans la conversation, le lycéen prévient.
02:02 Ils ne seront que deux au rendez-vous.
02:03 Vous serez combien ? Moi je serai pas là.
02:05 Ils seront deux.
02:06 En face, ils seront une vingtaine de militants néo-nazis équipés pour en découdre.
02:10 Le noyau dur est membre de la division Martel.
02:13 Il y a aussi quelques membres du GUD, le principal groupuscule néo-nazi de Paris.
02:18 Et puis ce qu'ils appellent des "indep-tit-oeufs".
02:20 Indep pour indépendant, c'est à dire qu'ils ne sont pas membre d'un groupuscule politique.
02:25 Tit-oeuf en référence aux personnages de BD, parce qu'ils sont très jeunes.
02:29 Le plus jeune n'a que 14 ans et presque tous sont mineurs.
02:32 Ce qui ne les empêche pas d'être très violents.
02:34 Dans les Faflix, nous avons découvert un compte rendu rédigé par les militants d'extrême droite.
02:38 Il nous permet de retracer les minutes qui précèdent l'agression.
02:42 17h35.
02:44 Les fachos se regroupent dans un parc à proximité du lycée.
02:47 Ils sont une vingtaine en tout.
02:49 Les GUDAR en amont nous préviennent d'une présence ennemie aux abords du lycée.
02:53 17h40.
02:55 Tout le monde est regroupé dans une rue très proche du lycée pour ne pas se faire voir.
03:00 Ils se préparent.
03:02 Ils enfilent leurs cagoules et grands coquets, prêts pour le choc.
03:04 A peine 30 secondes après, ils chargent ensemble en criant "Pari ou Ligan"
03:10 La scène est magnifique.
03:12 Les sarrasins restent figés, car surpris de la scène.
03:15 La suite de l'agression, on l'a en image dans des vidéos tournées par les jeunes néonazis.
03:20 On a une seconde vidéo qu'on va regarder plus en détail.
03:30 La bande marche sur le bord de la rue des Francs-Bourgeois.
03:35 L'un d'eux porte une pancarte en carton.
03:37 Si on s'arrête sur l'image, on devine une croix celtique,
03:40 l'un des symboles favoris des néonazis.
03:43 Ils tournent ensuite dans la rue de Sévigné et chargent.
03:46 On entend leur slogan "Tendez l'oreille".
03:49 On voit qu'ils sont équipés.
03:54 Deux d'entre eux au moins ont une béquille qui va servir d'arme.
03:57 Ici, on voit aussi une gazeuse dont ils feront largement usage.
04:12 L'agression est très brève, moins de deux minutes, mais violente.
04:16 Tous les coups n'apparaissent pas dans le champ de la caméra, loin de là.
04:19 Street Press a pu s'entretenir avec l'une des victimes.
04:27 Il n'a dit-il rien à voir avec cette affaire, il n'est même pas scolarisé au lycée Victor Hugo.
04:32 Il avait ce jour-là simplement rendez-vous avec des potes sur le parvis de l'établissement.
04:36 Il était venu avec son petit frère.
04:38 Cette victime n'a que 15 ans et souhaite garder l'anonymat.
04:41 C'est pourquoi nous ne l'avons pas filmé, nous allons simplement lire des extraits de son témoignage.
04:46 Il y a quelqu'un qui arrive vers moi et me met un chassé sur le torse.
04:49 Je vole car je suis un peu léger.
04:51 Il y a plusieurs personnes qui arrivent et me mettent dans un coin et commencent à me frapper.
04:54 Moi je me protège la tête.
04:56 Ils m'ont collé à la porte du lycée, au mur.
04:59 Ils commencent à me frapper, j'ai pris un coup de spatule aussi.
05:02 Ils me disent "cours sale bougnoule".
05:04 Quand ils m'ont dit ça, j'ai pas couru car c'est un sentiment, j'ai de la fierté.
05:08 Et du coup j'ai pas couru.
05:09 Ils se sont rapprochés, je cogne, 1, 2, et je cours quand même.
05:14 On court, on court, et j'ai aucune nouvelle de mon frère.
05:17 Finalement, on s'est retrouvé au KFC de Bastille.
05:19 Moi j'avais du poivre partout sur les mains, dans les yeux.
05:22 J'avais un copain qui saignait énormément, il a eu des points de suture.
05:26 Il y a un autre gars qui s'est fait tabasser, écrasement de tête, etc.
05:30 Ils ont tapé les gens qui étaient sur le trottoir.
05:33 Ils ont frappé un noir, une fille d'origine asiatique, des filles sur le trottoir d'à côté.
05:37 Le tabassage ne dure même pas deux minutes.
05:39 Et sur place, personne n'a le temps de réagir.
05:42 Une dizaine de lycéens ont pris des coups.
05:44 Une fois la ratonnade terminée, les agresseurs se dispersent,
05:47 avant de se retrouver un peu plus loin pour faire une petite photo de groupe.
05:51 C'est une tradition dans le milieu, après chaque action coup de poing.
05:54 Ces photos servent ensuite, en général, à revendiquer l'action.
05:57 Pierre, à qui appartient le téléphone dont sont tirés les faflix,
06:00 va d'ailleurs insister pour que sa bande revendique la ratonnade.
06:04 Il en discute avec Tristan, un autre membre de la division Martel,
06:07 écouter l'échange.
06:08 Pourquoi on sort pas l'action des arabes qu'on a fait il y a trois semaines ?
06:11 Parce que des actions comme ça, des français qui niquent des maghrébins,
06:14 c'est pas tous les jours qu'il y en a.
06:15 Genre, tu vois les patriotes, ils voient ça, ils bondent dessus.
06:18 Ok, bah va falloir m'envoyer l'intégralité de tout,
06:20 genre les screens, les machins, les provocations,
06:23 puis la réponse en vidéo.
06:25 Et je veux bien faire un montage,
06:26 parce qu'en plus mon montage versus Europea est là sauté.
06:28 Mais je pense que là, ce montage, il va être assez radical aussi,
06:31 et je risque de voir mon compte versus Europea Est se faire strike et censurer.
06:35 Mais on peut toujours essayer.
06:37 À ce moment-là, il fanfaronne, mais ça ne va pas durer.
06:40 C'est d'abord le message d'une adulte sur Instagram qui les inquiète.
06:43 Ils comprennent qu'ils ont été identifiés
06:45 et envisagent de retourner menacer les victimes.
06:48 Ils en parlent dans une note vocale. Écoutez.
06:50 C'était pour te dire, tu vois, quand on a fait les dessins contre les nyounes,
06:56 en gros, là, il y a un compte bizarre.
06:59 En gros, il m'a DM, il parle aux féminins,
07:02 et c'est pas genre... c'est un compte...
07:05 On dirait que c'est une daronne, en fait.
07:07 C'est une daronne qui parle, genre avec des points, virgules, etc.
07:11 Et qui me dit qu'elle a vu une vidéo, je sais pas quoi, du coup...
07:15 Pour savoir si il y a une vidéo qui a été partagée de la descente.
07:19 Si ça porte plainte, etc., on est dans la D, en gros.
07:22 Faut... je sais pas, faut essayer de les choper peut-être encore une deuxième fois,
07:25 et vraiment les choper un par un, et leur mettre des coups de presse.
07:28 Ils ne le feront heureusement pas,
07:30 et quelques jours plus tard, c'est dans un commissariat qu'ils vont devoir s'expliquer.
07:34 On a pu échanger avec un fonctionnaire de police.
07:36 Il nous a détaillé comment ils ont pu les identifier grâce aux caméras de surveillance et aux données mobiles.
07:41 Le 13 juin, 12 d'entre eux ont eu leur domicile perquisitionné à 6h30.
07:45 Ils ont ensuite été placés en garde à vue.
07:48 Street Press s'est procuré la liste des suspects.
07:51 Rappelons qu'ils sont présumés innocents par la justice jusqu'à leur procès.
07:55 La première chose qui frappe quand on regarde ce document, c'est le très jeune âge des agresseurs.
08:00 9 d'entre eux ont entre 14 et 17 ans.
08:03 Les 3 autres ont 18, 20 et 24 ans.
08:06 Pour au moins 3 d'entre eux, la procédure a été classée sans suite.
08:09 Le parquet de Paris nous a expliqué que même s'ils étaient à proximité de la pression,
08:14 il n'a pu être prouvé qu'ils y ont participé.
08:16 Mais tous n'échapperont pas à la justice.
08:18 Pierre et Louis, qui ont plus de 18 ans, passeront devant un tribunal le 7 mai 2024.
08:23 Ils sont mis en examen pour participation avec arme à un attroupement,
08:27 et violence commise en raison de la race, l'ethnie, la nation ou la religion.
08:31 En clair, la justice retient bien le caractère raciste de l'agression.
08:35 Les mineurs, eux, ne seront pas jugés en même temps.
08:37 On sait seulement que 4 d'entre eux vont passer devant le tribunal pour enfants.
08:40 Comme ils ont moins de 18 ans, le procès se tiendra à 8 clous,
08:44 c'est-à-dire que personne ne pourra y assister et qu'on ne connaîtra pas le verdict.
08:48 C'est la fin de ce deuxième épisode des Faflix.
08:53 Merci de m'avoir écouté jusqu'au bout.
08:55 Rendez-vous la semaine prochaine pour une nouvelle vidéo,
08:58 consacrée cette fois aux leaders des néo-nazis parisiens.
09:01 Derrière la division Martel, des militants plus aguerris les arment idéologiquement,
09:05 mais ils les entraînent aussi à la baston et les initient aux violences de rue.
09:09 Pour ne rien louper, abonnez-vous, activez la cloche.

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