L'eau potable est une ressource importante et tout le système de canalisation en France doit être entretenu pour éviter les fuites. Pour éviter les pertes d'argent et de temps, il est nécessaire de traiter ces canalisations. Grâce aux nombreuses innovations utilisées et l'investissement du Plan Eau, des économies d'eau sont réalisées tous les jours. La coopération entre syndicats d'eaux et solutions innovantes permet une meilleure résolution du problème, à son origine.
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00:00 On fait le bilan du plan eau et on fait la chasse aussi aux canalisations défaillantes dans ce débat avec Caroline Lucas Leblanc. Bonjour.
00:14 Bonjour.
00:15 Bienvenue, vous êtes responsable du service contrôle technique de la délégation et performances du réseau CEDIF, Syndicat des eaux d'Ile-de-France.
00:22 Olivier Lamari, bonjour et bienvenue à vous aussi.
00:24 Bonjour.
00:25 Cédif de l'Ile-de-France et Benelux de Xylem. Quelques chiffres sur le CEDIF. 150 communes membres, 4,7 millions d'usagers, 8 000 kilomètres de canalisation.
00:35 C'est vrai que c'est impressionnant. Quel type d'installation ? On dit canalisation. Il y a quoi ? Il y a des usines de traitement des eaux, des réservoirs ? C'est quoi le CEDIF ?
00:44 Le CEDIF, c'est en effet... On est là pour produire de l'eau potable. Donc on a trois grosses usines qui produisent de l'eau potable.
00:51 On puise dans les rivières qui sont l'Oise, la Marne et la Seine, autour de Paris. On puise cette eau, on la traite, on la rend potable et ensuite on la transporte sur notre territoire.
01:00 Donc 133 communes avec des réservoirs. Il y a 78 châteaux d'eau qui sont répartis et donc cette goutte d'eau va transiter dans 8 000 kilomètres de réseau pour arriver jusqu'à nos consommateurs.
01:11 Les fuites d'eau, c'est une préoccupation majeure aujourd'hui. Est-ce que c'était moins vrai il y a quelques années ? On avait ce sentiment en France que de toute façon la ressource, elle était là.
01:20 Alors, je dirais que les fuites d'eau sont une préoccupation depuis longtemps, ne serait-ce que pour des raisons économiques, puisque traiter de l'eau, ça coûte de l'énergie, ça coûte de l'argent.
01:33 Donc toute l'eau qu'on peut perdre, c'est de l'argent perdu. Et venue là-dessus, bien sûr, une conscience écologique bien plus importante depuis quelques années, surtout depuis les sécheresses qu'on a connues ces derniers temps,
01:45 où on a vu qu'il fallait économiser cette eau non seulement parce que l'outil industriel doit être efficace, mais aussi parce qu'on le doit à la protection de la ressource.
01:55 Olivier Lamarie, présentez-nous Xylem en quelques mots, ensuite on va rentrer dans le détail de la collaboration avec le CDIF.
02:01 Alors, Xylem, on est un industriel, on est un fabricant qui produit des solutions technologiques qui interviennent tout au long du cycle de l'eau et de partout où il y a de l'eau.
02:10 Donc on travaille sur différents marchés, on travaille avec les collectivités, on travaille avec les industriels, on travaille avec le bâtiment.
02:16 Et donc par rapport à cela, nous aussi, on est en pleine digitalisation de notre métier.
02:21 Donc on est en train d'amorcer un virage digital depuis déjà une grosse dizaine d'années.
02:25 Et par rapport à ça, on a des solutions qui permettent d'identifier les fuites et surtout de faire l'analyse structurelle des canalisations.
02:32 Alors justement, avec le CDIF, vous travaillez sur quel type de canalisation et avec quels outils ?
02:36 Alors, je tiens à dire une chose avant toute chose, c'est vraiment que le CDIF a été le précurseur en France en 2020.
02:42 Ça a été la première collectivité avec laquelle nous avons travaillé pour faire de la recherche de fuite et de l'analyse structurelle de réseau.
02:50 Donc on a travaillé sur des tronçons en tout 5 km, sur des canalisations de gros diamètre, puisque ce sont ces canalisations-là qui sont cruciales pour alimenter ensuite tous les petits réseaux secondaires.
03:00 Et nous avons utilisé deux technologies, une technologie qui s'appelle la Smartball, une petite balle de tennis bourrée de technologies qui permet justement d'aller détecter les fuites jusqu'à quasiment 0,1 litre par minute.
03:11 Donc ce sont des petites fuites jusqu'à des fuites plus importantes.
03:14 Et puis ensuite, il y a le Pipe Diver qui, lui, s'occupe de l'analyse patrimoniale du réseau.
03:18 Donc il est capable de dire l'état du réseau, quelles sont ses faiblesses et aujourd'hui, est capable même de faire du prédictif.
03:26 C'est ce que j'allais dire, d'anticiper la casse.
03:30 Et donc d'enclencher des travaux qui seront moins coûteux que si on a attendu que la fuite soit là et que ça casse.
03:36 Vous êtes venue avec là aussi un outil technologique, c'est quoi et ça sert à quoi ?
03:40 Alors je suis venue avec ce qu'on appelle un capteur ResEcho.
03:43 Montrez-le assez haut qu'on le voit.
03:45 Voilà, avec un capteur ResEcho, c'est ce qu'on appelle un prélocalisateur de fuite.
03:48 C'est doté d'une partie aimantée. Donc on vient l'aimanter en fait sur les canalisations et il a une antenne qui nous permet de récupérer un certain nombre de données.
03:58 Ce petit appareil écoute 30 minutes par nuit sur les canalisations.
04:04 Donc on a 1 700.
04:05 Ecoute, donc c'est à l'oreille.
04:06 C'est une oreille.
04:07 C'est vraiment un bruit qui va être différent s'il y a une fuite.
04:10 Exactement. En fait, le bruit est différent s'il y a la fuite.
04:13 Ce sont donc des oreilles. On en a 1 700 sur notre réseau.
04:16 Ça nous permet d'écouter et de localiser des fuites pour aller les réparer assez vite.
04:22 Et celle-ci, surtout les fuites invisibles, puisque chacun d'entre nous est déjà passé dans la rue en voyant quelque chose qui fuit, un écoulement d'eau.
04:30 Mais des fois, ça se passe sous terre. On ne les voit pas et celle-ci, il faut aller les chercher.
04:35 Le plan eau qui a été annoncé par le président de la République lui-même, c'était en mars dernier, mars 2023.
04:40 Quand vous l'avez entendu, vous avez dit que c'était un défi à relever pour le secteur.
04:44 Enfin, on s'en préoccupe. Comment vous avez réagi ?
04:47 On a réagi plutôt en disant "Enfin, on s'en préoccupe".
04:51 Et évidemment, c'est un défi pour le secteur.
04:53 En fait, les deux sont liés.
04:55 Pendant très très longtemps, on a pensé que l'eau ne coûtait pas grand-chose.
05:00 L'eau potable, ou la robinette.
05:02 On ouvre la robinette, tout se passe bien.
05:04 Et quand tout se passe bien, en général, c'est invisible.
05:07 Donc il était en effet grand temps de s'en préoccuper.
05:10 Les canalisations d'eau potable sont posées en France depuis très longtemps.
05:14 Maintenant, on arrive avec des canalisations qui ont parfois une centaine d'années pour certaines.
05:20 Je disais, j'ai trouvé ça sur le Cédoctylem, qu'il y a plus de la moitié des canalisations en France
05:25 qui ont été installées avant les années 70.
05:27 Oui, tout à fait.
05:28 Ça donne quand même un état de la vétusté, ou en tout cas des fuites potentielles existantes.
05:35 Et un litre sur cinq perdu à cause des fuites, ce qui est quand même aussi important.
05:39 Il y a je crois 180 millions qui ont été mis sur la table avec ce plan haut, Olivier Lamarie.
05:45 Ça va servir à quoi d'abord ? Aux urgences ?
05:48 Ce dont vous parliez, c'est-à-dire les grosses canalisations qui perdent le plus ?
05:51 Alors en réalité, déjà je voudrais dire qu'il y a eu déjà 40 milliards qui ont été mis lors des assises de l'eau,
05:56 justement parce que le gouvernement avait déjà compris qu'il y avait un problème.
05:59 Et qui a amené aussi, on va dire, des évolutions législatives, notamment la loi NOTRe, qui ont redonné du pouvoir.
06:04 Ces 180 millions d'euros, ils vont aller vers les collectivités qui ont des rendements inférieurs à 50%.
06:12 Donc juste pour vous donner trois chiffres, le rendement moyen en France, on est à 79,6%.
06:18 On perd chaque année un milliard de mètres cubes d'eau à cause des fuites.
06:23 Et vous avez un département dans lequel je suis né, qui s'appelle l'Isère, où le rendement est à moins de 50%.
06:29 Donc ces 180 millions là vont aider ces collectivités, qui sont souvent des collectivités qui sont plus petites,
06:34 des petites et moyennes collectivités, pour leur donner les outils et les moyens financiers d'aller rechercher ces fuites,
06:40 notamment déjà sur ce qu'on appelle les canalisations qui acheminent l'eau pour, on va dire, la collectivité,
06:46 et rechercher les fuites et faire des analyses de patrimoine.
06:48 Mais est-ce que, je reste avec vous Olivier Lamarie, on en est là parce qu'il n'y a pas eu suffisamment d'investissement pendant des décennies ?
06:56 Il y a eu des investissements, il y a eu beaucoup d'investissements qui ont été faits.
06:59 La seule chose c'est qu'on faisait des investissements parfois en remplaçant des canalisations qui n'avaient pas besoin d'être remplacées.
07:05 Pourquoi ? Parce qu'il y avait des problèmes de connaissances, on n'était pas sûr.
07:09 Il faut considérer que tout est enfoui, on n'est pas dans la pétrochimie où on peut inspecter.
07:14 Donc tout est enfoui sous terre, on trouve différents types de matériaux, de la fonte, du béton, du bonnat, de l'acier.
07:21 Et donc tout cela vit sous la terre sans qu'on le voit.
07:24 Donc aujourd'hui il y a des technologies qui permettent réellement, à commencer par cet instrument,
07:29 mais il y a aussi d'autres technologies qui permettent vraiment de pouvoir, déjà à la fois, ne pas interrompre le service à l'usager.
07:34 Parce que ça voudrait dire que faire une inspection c'est couper l'eau et rentrer.
07:38 Donc aujourd'hui il y a des technologies qui permettent de ne pas couper l'eau à l'usager.
07:42 Et en même temps de pouvoir savoir de manière quasiment chirurgicale,
07:45 parce qu'avec des technologies d'auxilème on est à 40 cm de précision sur les trois axes,
07:51 donc en hauteur, en largeur et en profondeur, pour dire voilà, ici il y a une fuite à ce niveau-là,
07:56 donc s'il y a un tronçon à changer, c'est celui-ci.
07:59 Laissez tomber les autres tronçons.
08:01 - Est-ce que on connaît... Vous allez sûrement pouvoir répondre pour vous, pour les sédifs,
08:05 mais ma question elle est presque plus générale.
08:06 Est-ce qu'on sait forcément où sont toutes les canalisations ?
08:08 C'est peut-être une question idiote, mais je l'assume, question de Béossien.
08:12 - Non, ce n'est pas une question idiote, c'est une vraie question.
08:15 On ne sait pas aujourd'hui en France où sont toutes les canalisations.
08:19 Alors on va savoir qu'il y en a une dans telle rue, à peu près,
08:24 mais on ne va pas savoir si elle est à droite de la chaussée, au milieu, à gauche.
08:28 Donc ça peut arriver qu'on ouvre pour chercher une fuite
08:31 et qu'on doit ouvrir un petit trou à un endroit et un autre.
08:35 - Un premier tronçon, un deuxième, etc.
08:36 - Et on perd beaucoup de temps, on perd beaucoup d'argent.
08:39 - Ça c'est lié à l'ancienneté, notamment ?
08:41 - Alors c'est lié à l'ancienneté, c'est lié au fait que quand on a posé les canalisations,
08:45 on n'a pas forcément pris soin de les relever,
08:47 mais c'est lié aussi au fait que les rues ont changé.
08:50 C'est-à-dire que quand vous avez posé une canalisation il y a 50 ans,
08:53 dans une rue vous étiez au milieu, et bien depuis il y a un tramway qui est passé,
08:58 on a fait un espace vert, et donc vous n'êtes plus au milieu, vous êtes à droite.
09:01 Et si ça, ça n'a pas été marqué sur des plans, vous ne le savez pas.
09:05 - Sur ces investissements, puisque je rebondis sur ce que vous disiez tout à l'heure,
09:09 vous, vous avez prévu combien d'investissements dans les prochaines années,
09:12 justement pour traquer les fuites ?
09:14 - Alors, pour traquer les fuites, on a un investissement de plusieurs millions d'euros sur les prochaines années,
09:21 et de toute façon chaque année en fait on renouvelle,
09:25 déjà juste en termes de renouvellement, on renouvelle une soixantaine de kilomètres de canalisation.
09:30 Donc déjà ça, c'est assez coûteux.
09:33 Ce qu'il faut savoir c'est que globalement c'est 1000 euros à un mètre, à peu près.
09:42 Donc autant vous dire que c'est un gros investissement.
09:46 - Mais je me souviens que vous nous avez dit que vous aviez 8000 kilomètres de canalisation,
09:50 donc 60 par an, il y a du boulot.
09:53 - Il y a du boulot.
09:55 Une des difficultés en France, c'est l'eau paye l'eau.
09:57 C'est-à-dire qu'un service d'eau n'est financé que par la facture d'eau émise, et donc par ses usagers.
10:04 C'est ce qui explique aussi le sous-investissement.
10:06 C'est-à-dire que quand vous êtes dans des petits syndicats où vous avez 200, 300, 600 abonnés,
10:12 la rentrée financière n'est pas forcément suffisante pour aller renouveler vos canalisations.
10:18 Et comme on a toujours été en France dans une philosophie où l'eau n'est pas chère, c'est un produit pas cher.
10:25 - Merci beaucoup, c'était passionnant.
10:27 Merci à tous les deux d'avoir participé à ce débat.
10:30 On passe à notre rubrique "Start-up", la mode circulaire au programme.