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00:00 - Présidération, indignation et colère et peur également. Voilà les sentiments qui règnent ce matin dans les établissements scolaires partout en France.
00:06 Trois jours après l'assassinat d'un enseignant à Arras et trois ans jour pour jour après l'assassinat de Samuel Paty.
00:12 Comment cette rentrée va se passer dans les établissements alsaciens ? On en parle ce matin avec votre invitée Alice.
00:17 - Bonjour Véronique Roset.
00:18 - Bonjour.
00:19 - Vous êtes proviseure au lycée des Pontonniers à Strasbourg, vous représentez aussi le syndicat des proviseurs.
00:24 Comment on vit un tel événement quand on a sous sa responsabilité des professeurs et des élèves ?
00:29 - On le vit avec beaucoup de responsabilité.
00:32 Effectivement, vous l'avez dit, il y a un effet de sidération parce que chaque fois qu'un tel drame se produit, on se demande comment c'est possible et c'est le drame de trop.
00:42 Et chaque fois il y a une prise de conscience et on se dit "plus jamais ça" et finalement ça se reproduit.
00:47 Donc là nous sommes extrêmement vigilants, nous nous sentons responsables de la sécurité des biens et des personnes dans nos établissements et donc nous prenons nos responsabilités face à ça.
00:57 - Les professeurs de votre établissement, j'imagine que vous avez beaucoup échangé avec eux ce week-end, ils sont dans quel état d'esprit ?
01:03 - Oui, effectivement, nous avons commencé à échanger à partir de vendredi et tout ce week-end nous avons aussi attendu finalement d'une part la parole ministérielle, la parole de monsieur le recteur.
01:16 Et nous avons échangé, alors les enseignants sont dans des états d'esprit très différents, certains ont peur, d'autres prennent un peu plus de distance, mais on sent quand même un sentiment de peur et on sent aussi que pour certains finalement le drame de Samuel Paty n'a pas été digéré encore.
01:37 Et donc là c'est un choc pour eux de voir que finalement il est possible que ça se reproduise.
01:43 - Ce matin, les professeurs et vous allez vous retrouver pour discuter de comment est-ce qu'on fait pour en parler aux élèves de ces drames ?
01:50 Si effectivement les professeurs eux-mêmes ont peur, comment ils vont faire pour s'adresser aux élèves ?
01:55 - Alors justement, aujourd'hui la journée commence par un temps d'échange avec les professeurs de 8h à 10h, nous n'accueillons pas les élèves et les professeurs sont invités pour ceux qui le souhaitent et qui sont là, invités à venir dialoguer entre eux.
02:12 Pour peut-être aussi mettre des mots sur les ressentis et peut-être aussi essayer de prendre un petit peu de distance et de voir ce qu'il est possible de faire pour faire en sorte que, même si on ne peut pas toujours l'éviter, que nous puissions être le plus en sécurité possible.
02:28 - Vous, vous savez ce que vous allez leur dire pour les rassurer ?
02:31 - Oui, bien sûr, nous allons déjà reprendre finalement notre... Alors vous savez que les établissements scolaires ont des PPMS.
02:40 - Il y a déjà des dispositifs.
02:41 - Et donc, alors c'est le hasard du calendrier, mais nous avions un exercice PPMS jeudi dernier.
02:47 - C'est l'exercice d'intrusion-évacuation, c'est ça ?
02:50 - C'est ça, c'est ça. Et nous avions fait un exercice anti-intrusion jeudi matin. Mais à aucun moment nous n'imaginions finalement que nous allions en avoir besoin aussi rapidement.
03:00 Et donc, on va rappeler aux enseignants les mesures de sécurité qui sont en place et appeler à la vigilance de chacun.
03:08 - Ils ont tout mon soutien, les enseignants, et toute ma confiance. Ensemble, ils sauront trouver les mots pour répondre aux questions des élèves.
03:14 C'est ce que disait hier soir Gabriel Attal, le ministre de l'Éducation nationale.
03:18 Catherine, bonjour.
03:19 - Oui, bonjour.
03:20 - Depuis Ergersheim dans le Barin. Catherine, soyez la bienvenue. Vous souhaitez échanger avec nous, vous faire part de votre point de vue, sentiment.
03:28 Dites-nous, on vous écoute ce matin, Catherine.
03:30 - Bonjour. Ma situation est complètement différente. Je suis à SEM en école maternelle.
03:34 Donc ce matin, la responsable FNSU a démarré son discours en disant « on ne peut pas parler de la même façon des lycéens qu'à des enfants de maternelle ».
03:43 Alors moi, je voudrais juste réagir pour dire qu'en maternelle et en élémentaire, il n'y a pas de concertation avec les enseignants ce matin de 8 à 10.
03:51 Nous allons accueillir les enfants à partir de 8h05, sans avoir pu échanger avant entre collègues.
03:57 Et nous, les ADSEM, nous allons être au portail. Nous allons faire la sécurité en demandant aux parents de nous montrer leur sac à main,
04:04 en filtrant les individus qu'on ne connaît pas. Et voilà, je m'interroge, je suis en colère.
04:11 - Vous ne comprenez pas, Catherine, que vous n'ayez pas, vous, ce temps d'échange de 8h à 10h et qu'il soit finalement consacré aux plus âgés des élèves, si je puis dire, c'est ça ?
04:22 - Si vous prenez un élève de 7ème de qui a 10 ans et demi et un élève de 6ème qui a 10 ans et demi également, voilà, le discours est le même.
04:29 Après, nous, on ne sait pas ce que les parents auront dit aux enfants. Nous, on a des enfants de 3 à 6 ans.
04:34 Donc il y en a qui auront entendu la radio, il y en a qui auront vu la télé, il y en a qui auront vu leurs parents tristes.
04:39 Voilà, et on ne sait pas du tout ce qu'on va leur dire ce matin. Et on va avoir des questionnements.
04:43 Après, on a des parents qui vont venir à midi, qui vont venir dire « mais pourquoi vous avez dit ça à nos enfants ? ».
04:48 Voilà, enfin, on est complètement démunis. Et en plus, on est les amis dans la sécurité. En tant qu'adsem, c'est un petit peu, on est le bouclier devant l'école.
04:59 - On entend votre mécontentement et vos interrogations ce matin. Catherine, merci d'avoir échangé avec nous depuis Air Garça.
05:05 Et on continue d'échanger sur ce sujet jusqu'à 8h. Vous avez la parole, 0388 25 15 15h.
05:09 - Véronique Rosé, alors il y a effectivement ces enseignants en maternelle, en élémentaire qui n'ont pas ce temps-là.
05:16 Il y a aussi des enseignants au collège et au lycée qui disent que deux heures d'échange avant de se remettre dans le bain, de retrouver les élèves devant une classe, c'est trop court.
05:25 - Oui, alors c'est toujours trop court. Parce que nous sommes toujours encore dans l'accélération.
05:32 Le week-end n'a pas suffi finalement pour amortir ou faire passer le choc. Donc c'est toujours trop court.
05:38 Disons qu'il va bien falloir à un moment donné accueillir les élèves. Alors est-ce qu'il aurait fallu prendre la journée entière ?
05:47 Deux heures c'est bien déjà. Alors je suis désolée pour les enseignants du premier degré effectivement, qui n'ont pas ce temps pour échanger, pour finalement se poser.
06:00 Et pour se poser, c'est vrai. Mais deux heures c'est déjà bien.
06:06 - Catherine nous parlait aussi d'éventuels reproches des parents. C'est important de s'adresser aussi aux parents ?
06:12 - Nous sommes obligés de nous adresser aux parents. Si nous nous adressons aux enfants, bien évidemment que les parents vont décortiquer la parole qui a été portée à leurs enfants.
06:22 Mais nous allons devoir tout simplement reprendre finalement ce qu'est l'école, ce que représente l'école.
06:29 L'école est un lieu qui devrait être sanctuarisé. Les appartenances religieuses et politiques n'ont pas leur place à l'école. L'école doit être un lieu apaisé.
06:40 Et cette parole-là est importante. Et il faut aussi rassurer les parents en leur disant que les personnels des établissements scolaires feront leur possible,
06:49 exerceront la plus grande vigilance pour que finalement leurs enfants soient en sécurité.
06:53 - L'école comme sanctuaire, ce sont les mots qu'utilisait le ministre Gabriel Attal pour parler de la sécurité dans les établissements.
06:59 - Christiane, bonjour ! - Oui, bonjour Hubert !
07:02 - Dans le sud de la région, depuis Kemps ce matin, qu'est-ce que vous souhaitez nous dire au sujet de cette affaire ?
07:08 - Je donne toujours mon soutien à tous ces professeurs qui ont une profession vraiment très difficile.
07:16 Moi je suis au bord de la déprime parce que j'ai encore des petits-enfants et je ne pensais pas revivre ça.
07:22 Moi je suis ce qu'on appelle une enfant de la guerre. Donc j'ai vécu une vraie guerre, la guerre de 40.
07:28 Mais ce qu'on vit aujourd'hui c'est tout à fait autre chose. C'est une question d'un problème de civilisation.
07:36 C'est autre chose que nous sommes en train de vivre et c'est vraiment triste.
07:40 Et je ne sais pas comment préparer nos enfants à ça. Il faut essayer de ne pas leur transmettre notre angoisse à nous déjà.
07:49 Et leur rassurer en leur disant "bon, maintenant on va mettre effectivement la sécurité".
07:56 Il faut des surveillants armés dans l'école, devant les écoles et dans l'école et puis des barrières.
08:04 Mais je ne crois qu'on ne peut pas tout éviter parce que ces gens-là viennent avec des...
08:08 On ne peut pas empêcher un gars avec un couteau de rentrer dans une cour d'école ou devant la cour.
08:13 D'ailleurs ils avaient annoncé il y a quelques temps, je me souviens, il y en a un qui est un de ces connards de djihadistes
08:21 qui avait annoncé "on n'a plus besoin d'armes maintenant".
08:25 - Mais Christiane, vous imaginez vos petits-enfants aller dans une école avec des gardes armés ?
08:31 - Ils n'ont pas besoin de montrer leur arme à la limite. Ils peuvent avoir leur arme dans la poche.
08:39 - En tout cas ce que vous nous dites, Christiane, c'est qu'il faut considérablement renforcer la sécurité.
08:43 Ça c'est le message que l'on entend ce matin.
08:45 Je vous coupe parce qu'il y a Cédric aussi qui veut très rapidement réagir, lui aussi, depuis Botsheim ce matin.
08:50 Et puis après on reprendra le fil de notre conversation évidemment. Cédric, bonjour.
08:53 - Bonjour Hubert, comment allez-vous ?
08:54 - Écoutez, ça va. On a connu des lundis plus agréables, ça c'est sûr.
08:59 Cédric, il faut renforcer la sécurité aussi ou pas ?
09:01 - Alors moi je pense que déjà c'est triste ce qui arrive.
09:05 Ensuite renforcer la sécurité, oui, mais je ne pense pas forcément mettre des gens que ça se voit.
09:10 Il faut peut-être créer une brigade spéciale en civil qui soit aux abords des établissements.
09:18 Et puis je pense qu'on va arriver comme aux États-Unis à mettre des portiques de sécurité.
09:22 Il faut hébergader les établissements, c'est triste à dire, mais il faut faire quelque chose.
09:26 L'école, que ce soit un lycée, un collège, c'est un endroit où les jeunes y vont avec plaisir
09:33 pour apprendre la vie, pour apprendre des choses.
09:35 Je pense qu'à ce stage-là, on pense être une fashion victim, on pense être la musique,
09:41 on pense apprendre, on pense les copains, les copines, les premiers amours.
09:44 On ne pense pas avoir des meurtres, du sang, c'est horrible.
09:48 - C'est évident. Bon, Cédric, vous aussi vous partagez le point de vue de Christiane.
09:51 À l'instant, plus de sécurité, on l'entend. Merci de votre témoignage ce matin sur France Bleu, Alsace.
09:55 - Véronique Crozet, on vous a vu réagir quand on a parlé de garde.
09:59 Le ministre dit qu'il n'y a aucun tabou sur ces questions de sécurité. Qu'est-ce que vous en pensez ?
10:03 - Il faut bien évidemment que nous avancions.
10:05 Il y a des choses qui ont été faites depuis le drame de Samuel Paty, des choses ont été faites.
10:09 Mais comme souvent, lorsqu'un nouveau drame arrive, nous nous rendons compte que finalement,
10:13 les choses n'ont pas avancé assez vite. Nous dépendons pour cela des collectivités territoriales.
10:17 Il est évident que les collectivités territoriales doivent avancer sur ce sujet, sur ce dossier.
10:22 - Mais ça veut dire sécuriser davantage. Effectivement, on parlait de portique,
10:26 on parlait d'accès avec des badges pour les collèges et les lycéens.
10:31 Actuellement, celui qui veut entrer dans un établissement peut entrer.
10:36 On ne pourra jamais empêcher un acte de folie.
10:39 Mais par contre, on peut sécuriser davantage les établissements en mettant en place des portiques un peu plus sécurisés.
10:46 Ça, c'est possible. Simplement, tous les établissements ne sont pas au même niveau à ce niveau-là.
10:51 Et en fonction de la sensibilité des établissements, certains ont avancé et d'autres sont encore en attente.
10:56 Et je pense que c'est à ce niveau-là que les collectivités territoriales, avec nous, doivent avancer pour qu'on avance plus vite.
11:02 - Et les collectivités locales seront reçues d'ailleurs cette semaine par le ministre Gabriel Attal pour faire le point sur ces sujets.
11:08 Merci beaucoup Véronique Crozet d'avoir été notre invitée ce matin. Bonne journée à vous.