Elisabeth Lévy : "Sur les réseaux sociaux, il ne faut pas croire tout ce qu’on voit"

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Transcript

00:00 8h14, Lévis sans interdit, bonjour Elisabeth Lévy.

00:03 Bonjour Patrick.

00:04 Les images d'Israël ont créé un choc planétaire.

00:06 Est-ce qu'il faut tout montrer ?

00:08 Alors c'est une question douloureuse car évidemment il semble sacrilège de montrer des cadavres

00:12 ou des corps torturés.

00:14 Cependant, qui aurait cru à Auschwitz ou qui aurait cru au Rwanda, au génocide de Rwanda,

00:18 plus près de nous, sans images ?

00:20 Alors évidemment, aujourd'hui la question se pose en des termes assez différents

00:25 parce que les nazis voulaient cacher leurs crimes.

00:27 Or Mohamed Merah, le Hamas ou Daesh, c'est la génération GoPro.

00:31 Les images font partie du plan.

00:33 Ils se filment pendant leurs exactions parce qu'ils pensent galvaniser les foules arabo-musulmanes

00:38 et terrifier l'Occident fatigué.

00:40 Et par exemple, après avoir tué Jessica Schneider et Jean-Baptiste Salvin,

00:46 je voulais les citer ce matin,

00:47 Larossi Abala fait un Facebook Live,

00:50 ce qui a d'ailleurs permis aux forces de l'ordre de sauver leur enfant.

00:54 Alors le problème, ce n'est pas de savoir si les images sont insoutenables.

00:58 Moi, je crois qu'il faut affronter l'insoutenable.

01:00 C'est de savoir si elles sont vraies.

01:02 Or, à l'âge de l'intelligence artificielle et du bidouillage numérique,

01:06 il est très facile, surtout pour les moins de 20 ans, de fabriquer un beau bar.

01:10 Alors résultat, le faux ne cesse de se mêler au vrai.

01:13 Il est souvent fabriqué, ce faux, au départ par des partisans

01:17 qui sont autoproclamés soldats dans la guerre de l'information.

01:20 Il est ensuite relayé, en toute bonne foi, par des milliers d'autres.

01:23 Alors je voudrais parler de deux exemples dans l'actualité israélienne.

01:27 Au début, il y a les vidéos des terroristes, c'est eux qui les mettent en ligne,

01:31 qui montent des civils emmenés, qu'on sort de coffre de Jeep,

01:34 on voit aussi le corps d'une femme suppliciée.

01:36 Et puis il y a cette image d'enfant en cage, l'info a été reprise partout,

01:41 même l'image d'ailleurs.

01:42 Or, on découvre aujourd'hui, grâce au très bon travail de Check News,

01:47 d'ailleurs de l'Ibé, on découvre que la vidéo datait du 4 octobre,

01:51 donc elle n'a rien à voir avec l'attaque du Hamas.

01:54 Ensuite, il y a le kiboutz, là on a assez peu d'images,

01:57 il y en a, mais plutôt des récits de journalistes qui sont tous très bouleversés.

02:02 Et puis dans ces témoignages, j'ai vu quelques photos,

02:05 il y a l'histoire des 40 bébés décapités.

02:08 Et en fait, comment ça se passe ?

02:09 Eh bien, vous avez tout un tas de témoignages,

02:12 qui ne se sont pas mensongés ouvertement,

02:15 mais ils sont repris, ils sont déformés, sans malveillance.

02:19 D'ailleurs, c'est un officier maïs,

02:21 et puis les enfants deviennent les nourrissons,

02:24 des éventrements deviennent des décapitations.

02:26 Donc, on ne sait pas s'il y a 50 bébés décapités,

02:29 mais Joe Biden, lui, a dit cette nuit

02:32 qu'il avait vu des photos et des vidéos authentifiées d'enfants décapités.

02:37 Voilà, on ne sait pas pour le chiffre, on ne sait pas pour leur âge.

02:40 Et toutes ces imprécisions et parfois ces mensonges,

02:43 il y a les deux, profitent au camp du déni,

02:45 car jettent le doute sur tout.

02:47 Mouzena Chaiby, qui est l'épouse très virulente

02:50 du correspondant Moyen-Orient du monde,

02:52 a tweeté hier "Ne croyez pas à leurs mensonges".

02:55 Or, bien sûr, il y a des mensonges,

02:57 mais ça ne change rien au fait qu'il y a des atrocités bien réelles.

03:01 - Elisabeth Lévy, est-ce que c'est au réseau social,

03:04 aux plateformes, de faire le ménage ?

03:06 Thierry Breton, par exemple, a menacé Elon Musk,

03:09 au nom de l'Europe, de sanction à cause des fake news sur Twitter, sur X.

03:15 - Oui, alors à mon avis, peut-être que Philippe ne sera pas d'accord,

03:19 c'est aussi malin qu'accuser Orange ou Apple

03:22 parce que le ramas utilise des téléphones portables.

03:24 Ça me semble surtout, si vous voulez, être beaucoup de bruit.

03:27 Même les médias sérieux se font avoir par des fausses nouvelles parfois,

03:31 surtout avec des images qui sont souvent bien faites.

03:34 Donc il est impossible, à mon avis, pour les réseaux sociaux

03:37 de vérifier les informations qu'ils publient.

03:39 Je vous rappelle qu'en trois jours, il y a eu sur X,

03:41 50 millions de messages sur Gaza.

03:45 Et alors, évidemment, il y a de l'information et il y a de la propagande.

03:48 Et face à cette propagande qui est artisanale,

03:51 je crois, Patrick, que la meilleure arme, c'est la vigilance individuelle.

03:54 Il faut regarder les sources, il faut attendre qu'il y en ait plusieurs.

03:57 Et ça n'est pas, évidemment, absolument fiable.

03:59 Mais je crois que le plus important, le plus important,

04:02 c'est de penser contre soi-même, de se défier de son biais cognitif,

04:07 de cette propension que nous avons à croire ce que nous croyons déjà.

04:12 Si vous voulez, nous croyons des images vraies

04:13 parce qu'elles confirment ce que nous pensons.

04:16 En somme, pour résumer, il ne faut pas croire tout ce qu'on voit,

04:19 car les images peuvent mentir,

04:20 mais surtout, il ne faut pas voir ce qu'on croit.

04:23 [Musique]

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