20h France 2 du 20 octobre 2008 _ Sœur Emmanuelle est morte

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00:00 [Musique]
00:06 Dans l'actualité ce soir, un titre principal, la disparition dans son sommeil de sœur Emmanuel
00:11 qui aurait eu 100 ans le mois prochain.
00:14 Sa vitalité, son irrévérence et son combat pour les pauvres en avait fait l'une des figures préférées des Français.
00:19 Les hommages sont innombrables, une messe solennelle aura lieu à Notre-Dame de Paris.
00:24 Nous évoquerons la femme de foi, la femme d'action et la femme de médias
00:28 avec nos invités Jacques Duquesne, Bernard Kouchner et Michel Drucker.
00:32 Bonne soirée, à tout à l'heure.
00:34 L'enquête interne du FMI sur Dominique Strauss-Kahn devrait s'achever à la fin du mois.
00:38 Déstabilisation ou rigueur à l'américaine, le calendrier de ces révélations suscite en tout cas des interrogations.
00:45 Une procédure administrative est ouverte sur des violences policières à Montfermeil.
00:49 Lors d'une interpellation, l'homme a été frappé. Une vidéo met en cause des fonctionnaires.
00:54 Aux Etats-Unis, John McCain évoque pour la première fois l'éventualité de sa propre défaite face à Barack Obama.
01:00 Le facteur racial peut-il jouer au dernier moment ?
01:03 Nous irons dans le Mississippi, ancien bastion de la ségrégation.
01:07 Enfin, le gouvernement présente son plan numérique pour tous.
01:10 Une carte d'identité électronique sécurisée sera notamment lancée pour prouver son identité sur Internet.
01:17 Bonsoir et bienvenue à tous.
01:19 Elle était d'abord une voix et un visage. Écoutez Sœur Emmanuel par elle-même.
01:25 Mais moi, je suis égoïste de tempérament.
01:28 Moi, je suis mauvaise de tempérament.
01:30 Moi, j'ai goûté tous les fruits de la vie, peu importe la morale de mon papa.
01:35 Mais, mais excusez-moi, j'ai pris le Christ comme modèle.
01:40 Il m'empêche pas. Il m'a appris à aimer. Il m'a appris le don. Il m'a appris la joie.
01:48 La joie, le don, des paroles prononcées il y a 20 ans la nuit dernière.
01:52 Madeleine Saint-Quint, alias Sœur Emmanuel, s'est donc éteinte dans le sud de la France.
01:57 On va s'y arrêter longuement, direction d'abord Calian, dans le Var.
02:01 C'est là-bas, dans la maison de retraite de la congrégation qu'elle s'était retirée ces dernières années.
02:07 Elle est morte de vieillesse, de fatigue, sans souffrir dans son sommeil.
02:12 Sur place, Nathalie Jourdan, Raymond Chaplard.
02:15 Depuis ce matin, seuls les pensionnaires et leurs familles peuvent entrer.
02:19 Sœur Emmanuel vivait dans cette maison de retraite depuis 15 ans.
02:22 Elle avait rejoint ici les sœurs de la congrégation de Notre-Dame de Sion.
02:26 Elle croisait aussi d'autres pensionnaires à la messe.
02:29 Elle vous accueillait toujours avec un sourire à moi. Je fondais presque, vous savez.
02:36 A Calian, on avait pris l'habitude de la croiser dans les rues du village.
02:40 Quand elle allait voter, c'est tout près d'ici, à l'école, là, je m'avançais vers elle.
02:45 Elle me prenait par le bras comme si je devais la soutenir.
02:47 Au bout de quelques pas, j'avais l'impression que c'était elle qui me portait.
02:49 C'était assez extraordinaire.
02:51 C'était quand même quelqu'un de très humain.
02:53 Quelqu'un au niveau, je trouve, de la vie, d'une spiritualité très élevée.
03:00 Donc c'est sûr que ça me fait vraiment bizarre.
03:04 Affaiblie, la religieuse ne quittait plus sa chambre depuis 3 ans.
03:08 Mais elle continuait de recevoir de nombreux visiteurs.
03:11 Les gens qui venaient la voir, ils venaient manger ici.
03:13 Puis après, je leur donnais toujours un morceau de gâteau pour les porter, parce qu'elle était gourmande.
03:17 Soeur Emmanuel aimait la vie, mais elle attendait la mort, pleine d'espérance.
03:21 Je me suis éminemment réjoui pour Soeur Emmanuel.
03:25 Parce que, vous le savez, elle vous l'avait suffisamment dit, pour elle, c'est le jour formidable.
03:30 C'est le jour qu'elle attendait, le jour de son face à face avec ce Seigneur auquel elle s'était consacrée il y a maintenant 80 ans.
03:37 Pour ses obsèques, la religieuse avait donné des consignes strictes.
03:40 Seuls ses proches doivent assister à la cérémonie.
03:43 Soeur Emmanuel sera enterrée mercredi à Calien, auprès de ses soeurs.
03:47 Les Français ont découvert et admiré assez tard cette religieuse atypique qui avait dédié son existence aux plus pauvres.
03:54 Soeur Emmanuel a connu plusieurs vies, un parcours de rupture, Laetitia Le Gendre.
04:00 Elle voulait mourir en Egypte, auprès de ses chiffonniers.
04:04 Mais c'est dans sa maison de retraite que Soeur Emmanuel s'est endormie pour son dernier sommeil.
04:09 Soeur Emmanuel, un sourire malicieux, une voix qui résonne, des coups de gueule aussi.
04:15 Presque un siècle au service des plus démunis.
04:20 Ce qui est contraire à l'être, l'être humain, ce qui est contraire, c'est que les uns sont parfaites de richesses incroyables
04:32 et que les autres n'ont rien.
04:35 Ça, c'est pas possible. Il y a là quelque chose en soi-même qui appelle à la révolte.
04:42 Elle naît à Bruxelles, en 1908, d'un père français et d'une mère belge.
04:46 A l'âge de 6 ans, la petite Madeleine V va vivre une épreuve à jamais marquante, la noyade de son père.
04:52 Je crois que cette petite fille, qui allait bientôt avoir 6 ans, puis 7 ans, 9 ans,
04:58 je crois que cette petite fille-là a tout à coup compris quelque chose qui est bien au-dessus de son âge,
05:05 mais pourtant, à quel point le bonheur peut tout à coup s'engloutir dans les eaux.
05:15 Tout à coup, c'est fini. Pour toujours. Pour toujours.
05:21 Cette soif d'absolu ne va plus la quitter.
05:24 Issue de la bonne société belge, amoureuse de belles toilettes, elle trouve pourtant les hommes sans grand intérêt pour elle.
05:30 A 22 ans, elle entre dans la congrégation de Notre-Dame-de-Sion et devient soeur émanuelle.
05:35 Après 40 ans d'enseignement à l'étranger, à l'âge où l'on part à la retraite,
05:39 elle réalise enfin son rêve, partager la vie d'écheffonier du caire, parmi l'état d'ordure, les rats et les cochons.
05:49 "Sonnez-vous, sonnez-vous, sonnez-vous"
05:56 Elle se bat contre la drogue, l'alcool.
05:59 Elle va jusqu'à écrire personnellement au pape pour lui expliquer toute l'importance de distribuer la pilule en Égypte.
06:05 Tout de même, impossible de croire que Dieu veut que ces femmes aient des gosses tous les 10 mois.
06:12 La solution, c'est une solution intelligente de contraception.
06:17 En 1980, elle crée son association, Asmae, et s'envole vers l'Europe pour lever des fonds.
06:23 La chiffonnière devient médiatique.
06:26 Une religieuse révoltée qui n'hommage pas ses mots devant la société de consommation.
06:31 "Je viens d'apprendre qu'il y a ici, en Europe, du lait, des céréales, des pommes de terre, du beurre, qu'est-ce que je sais moins encore,
06:42 et que cela ne sert à rien."
06:45 Mais sœur Emmanuelle épingle aussi le confort de l'église, s'interroge sur le mariage des prêtres, confie ses doutes et cet amour éprouvé pour un professeur alors qu'elle enseignait.
06:55 "J'étais complètement bouleversée sur moi-même, je ne me comprenais plus.
06:59 Comment ? J'avais fait un vœu d'appartenir seulement au Seigneur, et voilà, je sentais que mon cœur brûlait pour celui qui n'était pas le Seigneur justement.
07:09 Parce qu'il était très bien ce professeur."
07:12 Alors que son association se développe, la retraite, un mot qu'elle déteste, la rattrape.
07:17 A 85 ans, elle doit rentrer en France. Arrive le temps de la reconnaissance.
07:22 En 2002, elle reçoit la Légion d'honneur, devient l'une des personnalités préférées des Français, tutoie les humbles, comme les puissants, écrit des livres, rend visite aux détenus, et interpelle les jeunes en parlant leur langage.
07:35 "Vous nous croyez ? Vous nous connaissez ?"
07:37 "Il n'y a pas de look, tu as du look toi ? Il a du look. Ah il a le look, très bien. C'est celui-ci, continue, continue."
07:48 La mort, elle l'attendait sans la crainte, déjà étonnée d'une vie aussi longue et pleine.
07:54 "La mort, pour celle qui a su aimer, ce sont les retrouvailles. C'est le retrouvail du fiancé avec la fiancée, de l'enfant avec son père, de l'ami avec l'ami et avec les amis."
08:10 "Il suffit d'aimer, disait-elle, et toute sa vie, la petite sœur des Chiffoniers a aimé, avec abnégation."
08:20 On évoquera dans un instant la personnalité hors du commun de Sœur Emmanuel, mais elle est d'abord connue de tous.
08:26 Pour l'action qu'elle a menée dans les bidonvilles des Chiffoniers du Caire, on l'a évoqué il y a un instant, elle leur a consacré 20 ans de sa vie, à l'âge où beaucoup souhaitent se reposer.
08:36 Philippe Rochoux.
08:37 Les femmes et les enfants des Chiffoniers du Caire, c'était la vraie famille de Sœur Emmanuel.
08:43 100 000 personnes vivant des tonnes d'ordures charriées par cette mégapole de 17 millions d'habitants.
08:49 Sœur Emmanuel aura passé plus de 20 ans parmi eux, partageant jour et nuit le fardeau de leur vie quotidienne.
08:55 Puisque eux le supportaient.
08:58 Moi je devais le supporter, je ne suis pas meilleure qu'eux.
09:02 C'est ça que je voulais d'abord faire, leur faire comprendre que j'étais leur sœur.
09:07 Quand Sœur Emmanuel arrive au Caire en 1981, elle est émue par le sort de ces familles chrétiennes qui n'ont pas l'eau et l'électricité.
09:15 Les enfants travaillent à la décharge dès l'âge de 10 ans et ne vont pas à l'école.
09:19 Elle va récolter des fonds pour les aider à bâtir des écoles et des maisons.
09:23 Sœur Emmanuel se souvient du jour où elle a fait venir pour la première fois l'électricité dans le bidonville.
09:29 La nuit, tout à coup l'électricité a éclaté dans le bidonville, c'était fantastique.
09:35 C'était toujours les ténèbres.
09:37 En quelques années, elle transforme la vie des habitants du bidonville.
09:41 La plupart des enfants vont à l'école et pour elles ils sont sauvés.
09:45 Aujourd'hui, l'association Sœur Emmanuel rayonne sur les bidonvilles du Caire.
09:49 Les habitants lui sont reconnaissants.
09:51 Elle a construit des hôpitaux, elle nous a donné tout ce dont on avait besoin.
09:56 Pour les pauvres qui n'avaient rien, elle a fait construire des maisons.
10:00 Elle les a tellement servies.
10:02 Ici, les chrétiens comme les musulmans ont eu droit à l'électricité, l'eau, les égouts grâce à elle.
10:08 Elle a servi tout le monde sans discrimination.
10:12 Sœur Emmanuel a quitté les bidonvilles du Caire en 1993,
10:15 alors qu'elle avait 85 ans, un déchirement pour elle et pour les habitants.
10:20 Bonsoir Jacques Duquesne.
10:22 Bonsoir.
10:23 Merci d'être avec nous. Vous êtes un journaliste, un écrivain bien connu.
10:26 Vous venez de publier avec Annabelle Quérol ce livre "J'ai 100 ans et je voudrais vous dire"
10:31 chez Plon, un livre d'entretien avec Sœur Emmanuel où elle se raconte.
10:34 Que retenez-vous d'elle d'abord ?
10:36 Cette espèce de joie qui est émanée d'elle, enfin cette espèce de bonheur, si vous voulez, quand on lit.
10:43 On a fait ce livre juste avant l'été et alors elle nous dit "bon, tous les gens, quand ils voient cet âge-là,
10:51 ils vous parlent de la mort, mais moi la mort, ça sera mon bonheur,
10:55 parce que j'ai retrouvé l'homme que j'aime, l'être que j'aime, mon grand amour, je vais le retrouver."
11:00 Elle redoutait pas la mort, du coup.
11:02 Mais alors elle avait peur de l'agonie. Là, pour ça, elle a eu de la chance.
11:05 J'étais contemporain ce matin quand j'ai entendu qu'elle était morte dans son sommeil, pratiquement.
11:10 Parce que l'agonie, ça me fait peur, parce que je n'aime pas la souffrance.
11:15 Les gens qui font de la religion une religion de la souffrance, du sacrifice,
11:18 moi je ne serais jamais fait religieuse si le catholicisme avait été une religion de la souffrance et du sacrifice,
11:24 parce que c'est une religion de la joie.
11:26 Et ça, c'est vrai, elle avait ça vraiment profondément.
11:29 Donc elle avait peur de l'agonie.
11:32 Et quand elle parlait du cimetière où reposaient ses sœurs religieuses,
11:36 elle disait "je vais là", je me dis "bon, qu'est-ce qui restera là de moi ?
11:40 Des os, hein ? Il restera des dents, et c'est même pas les miennes."
11:44 Vous savez, parce qu'elle avait cette espèce d'humour qu'elle cultivait à plaisir.
11:48 Alors c'était une femme de foi, vous êtes vous aussi un homme de foi, pas dans le même registre,
11:53 mais en même temps, elle a souvent pris l'église à rebrousse-poil.
11:56 On l'a entendu sur la pilule, c'était le cas aussi sur le mariage des prêtres.
11:59 Ça ne lui a jamais valu de condamnation, d'ennui ?
12:02 Ben non, apparemment, puisqu'on peut raconter l'histoire de la contraception,
12:06 puisqu'elle a écrit au pape Jean-Paul II,
12:09 elle a fait porter la lettre, pour être sûr que ça ne se perde pas dans les couloirs du Vatican, quelque part,
12:13 elle a fait porter la lettre par quelqu'un qu'elle connaissait bien,
12:16 qu'il a remis au pape, une lettre à laquelle elle disait "écoutez les filles, ici, au bidonville,
12:22 à 11 ans, 12 ans, elles sont pratiquement vendues à un monsieur,
12:25 elles font un gosse par an, et ce gosse, un sur deux, meurt dans les années qui suivent.
12:31 Donc, on distribue, chez moi, les médecins distribuent des pilules contraceptives."
12:35 Et elle a pas reçu de réponse.
12:37 Alors, je lui dis, ben, il était pas content, peut-être, le pape ?
12:40 Elle dit "ben non".
12:41 Si il ne répondait pas, c'est qu'il fermait les yeux,
12:45 il voulait pas répondre non,
12:48 et d'un autre côté, il avait pas envie de répondre oui,
12:51 parce que ça serait répandu à travers toute la Terre,
12:53 aussitôt qu'il prenait à contre-pied le pape Paul VI avec une anémité.
12:58 Vous savez, les papes, ils aiment pas se contredire,
13:00 ils vous disent une chose différente des uns des autres, parfois,
13:03 mais toujours en disant qu'ils disent tous la même chose depuis le début.
13:06 Donc, finalement, elle arrivait à affirmer sa voix.
13:08 Et donc, elle a réussi, oui.
13:10 Vous restez avec nous, Jacques Duquesne.
13:11 Sœur Emmanuelle était une femme de foi, une femme d'action aussi, on l'a vu,
13:14 et son œuvre humanitaire concerne aujourd'hui plus de 70 000 enfants,
13:18 dans une dizaine de pays.
13:19 Alors, question, a-t-elle des héritiers ?
13:22 La réponse en image avec Karine Comazzi.
13:24 Manille, Philippines.
13:27 Face au gratte-ciel du quartier d'affaires,
13:29 des montagnes d'immondie.
13:31 C'est là que les 5000 enfants du bidonville trouvent de quoi vivre.
13:35 Ils prient les ordures, ils voient ce qu'ils peuvent revendre,
13:38 ce qu'ils peuvent utiliser pour confectionner des objets.
13:40 Je pense qu'ils récupèrent même une partie de leur nourriture là-dedans.
13:44 Et c'est affreux, parce que là, ils se battent pour des ordures, quoi.
13:48 Juliette est jeune diplômée en développement durable.
13:51 Son premier emploi, elle a choisi de l'exercer pour 700 euros par mois,
13:55 au service des plus pauvres,
13:57 dans l'association fondée par cette autre femme, de 75 ans, son aînée.
14:01 La relève existe.
14:04 C'est pas qu'elle est dans les nuages, la relève.
14:07 C'est pas une question d'imagination.
14:09 Elle existe, et de quelle manière ?
14:12 Près de 300 personnes, des jeunes femmes surtout,
14:15 aident à scolariser 70 000 enfants dans les pays les plus pauvres du monde,
14:19 comme le fait Juliette à Manille.
14:21 On arrive dans la maison de Mélissa, qui nous prévient qu'il n'y a pas d'électricité chez elle.
14:27 Elle nous montre où vivent les petits écoliers parrainés par l'association Asmaï.
14:36 C'est le seul moyen pour la famille de s'en sortir.
14:43 Si le gamin prône un boulot dans un bureau, dans une administration,
14:47 toute la vie de la famille va changer.
14:49 On ne peut plus avoir une association simplement avec des bénévoles et qui ont du cœur.
14:54 Il faut avoir des gens compétents,
14:56 qui savent ce dont ils parlent,
15:00 et qui aient les moyens de répondre.
15:02 Juliette est compétente, mais face à la drogue et la prostitution,
15:06 elle connaît les limites de son action.
15:08 C'est la philosophie de soeur Emmanuelle.
15:10 Dédié d'une personne, c'est énorme.
15:12 J'ai la vie que je voulais.
15:14 Je fais le travail que je voulais.
15:16 Je me sens en harmonie avec mes valeurs, avec ce que je veux être.
15:18 Et ça, c'est une grande chance.
15:20 Bonsoir Bernard Kouchner, vous êtes en direct avec nous du ministère des Affaires étrangères.
15:25 Une femme d'action engagée dans l'humanitaire, comme vous.
15:28 Vous étiez proche. Y a-t-il un souvenir en particulier qui est associé à elle pour vous ?
15:33 Oui, il y a un souvenir. C'est quand j'ai dansé le tango avec elle
15:40 pour un anniversaire, sans doute ses 90 ans.
15:44 Et puis, beaucoup d'autres souvenirs.
15:47 Vous avez parlé de Mani.
15:49 Elle a aussi essayé de créer, et réussi à créer, des écoles au Soudan
15:56 avec ses réfugiés du Sud qui arrivaient dans des cloaques autour de Khartoum.
16:00 Et puis, ses colères étaient un souvenir personnel
16:04 parce qu'elle arrivait toujours à nous enrouler autour de son petit doigt.
16:09 Et elle avait aussi cette formidable capacité de mettre ensemble les humanitaires et les politiques
16:15 pour de bonnes raisons, et pour de mauvaises raisons aussi, je n'en sais rien.
16:19 Mais les mettre ensemble, ce qui était une gageure.
16:22 Elle avait... C'était une femme magnifique.
16:25 Elle avait les yeux d'un bleu de la mer du Nord.
16:31 Et elle racontait sa jeunesse avec des étoiles dedans, avec ce petit chalc.
16:37 Elle avait coquettement... C'est difficile d'être coquette dans un camp fondé sur des ordures,
16:44 avec des sacs et avec des caisses de bois.
16:48 Eh bien, elle avait l'air élégante et elle avait une allure formidable.
16:53 Ça, c'est ce souvenir de force.
16:56 Est-ce que vous diriez que, d'une certaine manière, c'était une femme politique ?
17:01 C'était tout à fait une politique.
17:04 Elle voulait changer les choses, mais elle n'avait pas la religion du tout.
17:10 Comme on dirait, je dirais, de l'abnégation, du salut.
17:13 Elle était capable de vous expliquer pourquoi il fallait sauver un homme,
17:18 même si on ne pouvait pas les sauver tous.
17:21 Qu'il fallait s'attacher à quelqu'un et tâcher de le rendre heureux,
17:26 pour aussi les bonheurs qu'on en concevait soi-même,
17:30 pour le plaisir qu'on avait de le faire, même si on n'avait pas de solution pour tous.
17:34 Alors, cette solution pour tous, elle la cherchait, et évidemment, elle, elle l'avait trouvée dans Dieu.
17:39 Merci Bernard Kouchner.
17:41 Et puis, on ne peut pas évoquer Sir Emmanuel sans s'arrêter sur sa malice,
17:44 sa liberté de ton, son excentricité parfois,
17:47 qui en avait fait une personnalité très présente dans les médias,
17:50 une personnalité très populaire aussi.
17:52 Avant de vous retrouver, Michel Drucker,
17:55 voici quelques-unes de ses apparitions qui prêtaient à sourire et souvent aussi à réfléchir.
18:00 Périne Bonnet.
18:02 Est-ce que vous êtes heureuse d'être là ?
18:05 Je ne sais pas encore.
18:07 Je verrai d'après les questions qui trop souvent sont des questions tellement superficielles
18:14 que quand je m'en vais, je dis pourquoi suis-je venue ?
18:18 Et toc !
18:19 Excusez-moi les messieurs, un homme c'est petit.
18:23 Un homme c'est petit.
18:26 Et une femme ?
18:27 C'est petit.
18:28 Une femme c'est toute chose.
18:30 L'ordure, c'est le cœur de l'homme qui justement est devenu dur.
18:38 C'est le cœur de l'homme qui se ferme, qui ne sait pas aimer.
18:43 C'est le cœur d'un homme qui écrase les autres pour lui.
18:47 Ça c'est la vraie ordure.
18:49 Mais moi, je suis égoïste de tempérament.
18:52 Moi je suis mauvaise de tempérament.
18:55 Moi j'ai goûté tous les fruits de la vie, peu importe la morale de mon papa.
19:00 Mais, excusez-moi, j'ai pris le Christ comme modèle.
19:05 Il m'empêche, je ne peux pas.
19:07 Il m'a appris à aimer.
19:09 Il m'a appris le don.
19:11 Il m'a appris la joie.
19:13 Alors tu parles arabe ?
19:14 Ah bien bien sûr.
19:15 L'arabe littéral en fait, l'arabe d'Egypte.
19:17 Je ne sais pas si vous pouvez vous comprendre.
19:19 Tu parles arabe ?
19:20 Oui, oui, je suis arabe.
19:22 Oui, oui, je suis arabe.
19:24 Je suis arabe.
19:26 Vous êtes qui ?
19:27 Elle parle mieux l'arabe que vous.
19:29 Je ne l'ai pas très bien compris.
19:30 Non, parce que l'arabe, je crois, c'est l'arabe du Chiffonier.
19:33 C'est un arabe, excusez-moi, un peu vulgaire.
19:36 Il y a des similitudes.
19:37 Ah oui, il y a des similitudes.
19:38 Elhamdoulilah.
19:40 Naturellement, ma chœur est bien.
19:42 Au revoir.
19:44 Alors, Emmanuel, tu déchires.
19:49 Je sais très bien que ce que je fais, moi, pour la misère du monde,
19:55 c'est une goutte d'eau dans l'océan.
19:57 Mais jusqu'à ma mort, je verserai cette goutte d'eau.
20:00 Alors, je désire paraître, oui, et pour dire, n'oubliez pas,
20:06 quand je meurs, je continue à vivre dans mon association.
20:10 Et si vous avez vu la Sœur Emmanuel,
20:12 vous avez aimé l'association de Sœur Emmanuel.
20:15 Et sauvé le 70e et l'enfant.
20:18 Marketing d'enfer, là, je trouve.
20:20 Michel Drucker, on vous a vu.
20:24 Vous étiez un ami de Sœur Emmanuel.
20:26 Vous étiez...
20:27 On se connaissait bien, oui.
20:28 Oui, vous étiez très proches.
20:29 Elle aimait ça, les médias.
20:30 Elle aimait la télévision.
20:31 Comment ça ?
20:32 Mais elle était devenue une pro des médias, comme l'avait Pierre, d'ailleurs.
20:35 Elle a découvert les médias sur le tard.
20:37 Mais elle avait un réseau, elle avait quelques copains,
20:39 comme c'était avec Patrick Parente d'abord.
20:40 Il y avait Philippe Gildas, qui lui avait consacré un reportage
20:42 qui lui avait été très bien.
20:43 Il y avait Philippe Gildas qui lui avait consacré un reportage
20:45 qui l'avait fait connaître.
20:46 A l'époque, elle était encore avec les chiffres uniques du Caire.
20:49 Elle avait l'œil, elle avait la voix, elle avait la gouaille.
20:52 Et surtout, elle avait plus de 40 ans d'enseignement, dernière elle.
20:55 Elle savait capter les foules, elle savait capter un auditoire.
20:58 Elle était très maligne.
20:59 Et quand elle voulait quelque chose...
21:01 D'abord, tu te voyais, tout le monde souffle pas.
21:03 Un jour, elle débarque chez Jean-Pierre Raffarin,
21:05 qui était à Matignon, Premier ministre.
21:07 Elle s'assoit et lui dit "Combien tu gagnes, Jean-Pierre ?"
21:09 Alors, il lui répondait "Bah, je sais pas."
21:11 "Va me chercher ta feuille de paie."
21:13 "Tu donnes combien au pauvre ?"
21:15 Elle tapait à la porte de Boutros-Boutros-Gali,
21:17 de M. Chirac, de Bernard Kouchner, comme ça.
21:20 Elle obtenait ce qu'elle voulait.
21:22 Est-ce qu'elle aimait la notoriété ?
21:23 Alors oui, elle aimait ça, mais elle se méfiait.
21:25 Elle disait "J'ai peur de céder à l'attraction de mon égo."
21:30 Mais elle adorait ça.
21:31 Mais attention, elle nous engueulait beaucoup aussi.
21:33 Il n'y a pas d'autre mot.
21:34 Pour moi, à chaque fois...
21:35 Parce qu'elle disait "Vous, à la télé, vous restez en surface."
21:38 Il faut direr vers le haut.
21:40 D'abord, les nouveaux riches, souvent, n'ont pas de goût.
21:44 Et il faut que les pauvres aient droit au beau.
21:47 Et après 40 ans d'enseignement,
21:50 elle avait 70 ans quand elle dit "Ma vraie vie commence."
21:53 Et là, une vie qui a duré 40 ans.
21:55 Elle a eu plusieurs vies.
21:56 C'est incroyable.
21:57 La dernière fois qu'elle me dînait à la maison,
21:59 j'étais plus fatigué qu'elle.
22:00 Elle avait déjà 92 ans.
22:01 Elle me dit "Tu me fais des moules et tu me fais des frites."
22:03 Vers 11h du soir, je dis "Il faut que vous vous couchez."
22:06 "Comment ça, je suis pas fatigué."
22:07 Elle était pas fatiguée.
22:08 C'était une nature incroyable, une force physique.
22:11 C'était quelqu'un qui a vécu 10 vies.
22:15 - Vous et vos équipes, vous avez réalisé, Michel,
22:18 l'une des dernières, sans doute la dernière interview.
22:20 - Oui, alors je devais la voir cet été.
22:22 Et puis alors, elle m'a traité de petite nature.
22:24 J'avais le dos bloqué.
22:25 Je dis "Je peux pas venir sur ma...
22:26 Alors il y a une consœur, Hélène Lacord-Kaam,
22:29 qui la connaît bien, qui avait fait un reportage sur elle,
22:31 qui est allée la voir.
22:32 C'est sa dernière interview.
22:33 En voici un petit extrait.
22:34 Vous verrez la totalité dimanche entre 19h et 21h.
22:37 - C'est un regard triste.
22:40 Il y a trop de violence.
22:44 Il y a trop de pauvres.
22:47 Il y a trop d'enfants victimes.
22:50 Je sens mon impuissance.
22:52 Je ne peux faire qu'une chose, qui est de prier pour eux.
22:57 Mais il faut que l'homme fasse des efforts.
23:00 C'est ça, le problème.
23:02 C'est un problème qui est terrible
23:04 quand on voit tout ce qui se passe dans le monde.
23:06 - Qu'est-ce que vous avez envie de dire, justement,
23:09 à ceux qui font ce monde ?
23:11 - J'ai envie de leur dire d'aimer un peu les autres.
23:15 De ne pas tellement penser à leur propre intérêt.
23:19 Et de savoir que les autres aussi ont un intérêt.
23:22 C'est ça qui serait passionnant pour eux.
23:25 Mais ils le font pas.
23:27 - Elle livrait son regard sur la société.
23:29 Qu'est-ce que vous savez, Michel, de Sœur Emmanuel,
23:33 dans le privé, dans la vie de tous les jours,
23:35 que nous ne savons pas,
23:36 tous ceux qui ne la connaissaient pas personnellement ?
23:38 - C'était quelqu'un de passionné.
23:40 Mais c'est quelqu'un qui a eu, je suppose,
23:42 jusqu'à la fin de sa vie, l'image de son père
23:46 qui s'est noyé sur la plage de Blankenberg,
23:49 près d'Austan, d'Altébetch.
23:51 Elle avait 6 ans.
23:52 Cette image l'a hanté toute sa vie.
23:54 Elle n'en parlait pas.
23:55 Et puis elle en a parlé.
23:56 Et c'est vrai que...
23:57 Vous imaginez ce que c'est qu'une petite fille
23:59 qui, à 6 ans, voit son père disparaître dans les flots
24:02 et ne jamais revenir.
24:03 Ça, c'est une image. Je ne sais pas si vous êtes d'accord.
24:05 - Oui, elle était emportée par les vagues.
24:07 - Et sinon, c'était quelqu'un qui ne se décourageait pas,
24:11 qui trouvait que le monde n'avançait pas assez vite,
24:15 qu'il y avait trop de pauvres,
24:17 qui n'aimait pas beaucoup les hommes,
24:18 qui aimait les femmes.
24:19 Elle était féministe.
24:20 Elle le disait.
24:21 Vous verrez dans l'interview.
24:22 Féministe, hein.
24:23 Elle a eu des positions très, très engagées.
24:25 Elle adorait les enfants.
24:26 Elle n'aimait pas les hommes.
24:27 Elle les trouvait violents.
24:28 Elle les trouvait sexistes.
24:29 Elle trouvait qu'ils s'étaient mal conduits
24:31 avec les femmes, avec les enfants.
24:33 Dans toutes les époques, c'était pas tout à fait faux.
24:34 - Et puis, vous avez connu une expérience particulière
24:36 avec elle, Michel.
24:37 Vous allez nous le raconter.
24:38 - Quand je suis allé à Cayenne la voir,
24:39 c'est pas si vieux.
24:40 Elle avait 92 ans.
24:41 Je suis venu dans l'hélicoptère.
24:42 C'est une de mes passions.
24:43 Elle me dit, "Allez, on s'en va en l'air.
24:46 "Montre-moi Cayenne, ma maison de retraite."
24:49 Elle s'était teinte il y a quelques heures,
24:50 vu d'hélico.
24:51 Eh bien, elle avait 92 ans.
24:52 Elle était ravie.
24:53 On s'est baladés pendant un quart d'heure.
24:55 - La thème d'hélicoptère, peut-être.
24:56 - Oui, c'est ma thème.
24:57 La thème de l'air, la première fin qu'elle survolait.
24:58 Voilà où elle s'est éteinte, où ont lieu ses obsèques demain.
25:01 Et elle était folle de joie.
25:03 Elle avait pas peur.
25:04 Elle voulait que ça continue.
25:05 Voilà.
25:06 Bon, elle a accepté que je la prenne dans mes bras.
25:08 Mais voilà, pas trop autant.
25:10 Elle a dit, "Tu enlèves ça quand tu me prends dans les bras,
25:13 "si je peux bien marcher toute seule."
25:14 Voilà, c'était une jeune fille avec un regard bleu.
25:18 On a beaucoup à apprendre d'elle.
25:20 Mais tout, beaucoup, beaucoup.
25:22 - Un dernier mot, je vais le dire.
25:24 - Oui, quand elle dit, "Il faut aimer les pauvres", etc.,
25:30 elle avait quelque chose qui me semblait très intéressant, moi.
25:33 C'est qu'elle disait, "Tu comprends, tu donnes un euro à un mendiant.
25:36 "Il reste mendiant."
25:38 Alors, ce qu'il faut, c'est faire quelque chose avec lui.
25:40 Parce que comme ça, il va s'en sortir.
25:42 - David, vous imaginez ce qu'elle dirait ce soir
25:44 de la crise financière dans le monde.
25:46 - Absolument.
25:47 - Elle aurait pas sa langue dans sa poche.
25:48 - Et c'est pour ça qu'elle s'intéressait beaucoup aux enfants.
25:50 Parce qu'elle disait,
25:51 "C'est avec les enfants qu'on pourra changer le monde.
25:53 "En donnant un sou à quelqu'un, etc.
25:55 "Il faut que les enfants, et surtout les filles..."
25:58 Alors, elle était heureuse, je crois,
26:00 la plus belle journée de sa vie, d'après ce qu'elle m'a raconté.
26:03 C'est quand un lycée de filles qu'elle avait créé,
26:06 Alexandrie, avec une autre religieuse, comme ça,
26:09 elles étaient en uniforme, parce que dans ces pays-là,
26:11 les écolières sont en uniforme.
26:13 Elle s'est dit, "Ces filles-là, plus tard, elles se laisseront pas faire."
26:16 - Vous allez voir. - Merci.
26:17 - Demain, nous rediffusons "Le son vivement", dimanche.
26:19 - Voilà, demain soir, à 22h40.
26:21 - À 22h45. Regardez bien demain l'image
26:23 de Sœur Emmanuel, main dans la main, avec l'abbé Pierre.
26:26 C'est une image magnifique.
26:27 - Merci à vous deux.
26:28 Avant de refermer ce chapitre, quelques réactions.
26:30 Celle du Vatican, qui rend hommage à une grande figure de la charité chrétienne,
26:33 celle de Nicolas Sarkozy, elle était notre sœur à tous,
26:37 et s'avait nous interpellé.
26:38 On écoute également le cardinal Philippe Barbarin,
26:40 Martin Hirsch et Ségolène Royal.
26:42 - Je crois que c'est la même chose qu'avec l'abbé Pierre.
26:45 C'est-à-dire que l'amour gagne contre tout.
26:48 Voyez, l'amour est plus fort que tout.
26:50 Ça lui vient de sa foi, de son attachement au Christ,
26:52 de sa consécration au Christ, et elle brûle de cet amour.
26:54 Et vous voyez bien que ça dépasse les frontières du catholicisme,
26:57 du christianisme, des religions, et finalement ça touche tout le monde.
27:00 - Elle a renoncé à une vie favorisée, à une vie plan-plan,
27:04 à une vie facile, pour aller donner d'elle-même,
27:06 et puis a engueulé comme il se doit, quoi.
27:09 Les gouvernements, ceux qui donnaient pas assez,
27:11 ceux qui se bougeaient pas suffisamment.
27:13 Oui, c'était... Mais c'est une révolte positive,
27:15 une révolte sympathique.
27:16 Elle se révoltait avec le sourire.
27:19 Elle cherchait pas à culpabiliser.
27:21 Elle disait "Mais si vous donnez 10, vous pouvez donner 1000".
27:23 - Un moment où l'argent est devenu fou,
27:26 et gère aujourd'hui le monde,
27:28 plus que jamais sans message et d'actualité,
27:31 parce qu'elle s'est mise au service des plus pauvres,
27:33 des plus déshérités,
27:35 et sans jamais se départir de sa joie et de sa gaieté.
27:38 - Voilà, sachez que France 2 bouleverse ses programmes pour l'occasion,
27:43 demain soir, donc à 22h40, la chaîne rediffuse vivement dimanche,
27:47 avec Michel Drucker consacré à Sir Emmanuel,
27:50 et puis mercredi, la rédaction sera mobilisée pour l'hommage
27:53 rendu à la religieuse lors d'une messe célébrée en la cathédrale Notre-Dame à Paris,
27:57 édition spéciale à suivre à partir de 14h,
27:59 autour d'Élise-Lucey.
28:02 Les autres titres de l'actualité,
28:05 et d'abord cette nouvelle mesure du gouvernement français,
28:08 après la crise financière.
28:11 François Fillon annonce une enveloppe de 5 milliards d'euros
28:14 destinée au financement des collectivités territoriales,
28:17 régions, départements et surtout municipalités.
28:19 Elle vise à répondre à l'assèchement du crédit, comme pour les PME.
28:23 Il s'agit de près de la caisse des dépôts et consignations et des banques.
28:27 Sachez que la bourse de Paris a terminé en hausse de près de 4%.
28:30 Aujourd'hui, en marge de cette crise financière,
28:33 nous revenons maintenant sur l'enquête interne du FMI sur Dominique Strauss-Kahn.
28:38 Elle devrait s'achever à la fin du mois,
28:40 et elle suscite, je vous le disais, des interrogations,
28:43 des déstabilisations ou rigueur à l'américaine.
28:46 Nos correspondants à Washington ont rencontré le journaliste du Wall Street Journal
28:50 qui a révélé les faits. Reportage Alain Chalvron, Aaron Diamond.
28:54 De l'extérieur, rien n'indique que le FMI est dans la tourmente.
28:58 Pas de télévision, pas d'agitation.
29:01 Les employés n'ont rien à dire.
29:04 Ou si peu.
29:06 Je n'ai rien à dire. Je ne connais pas les détails.
29:11 Le directeur général Dominique Strauss-Kahn est pourtant l'objet d'une enquête
29:14 suite à une relation inappropriée, comme on dit joliment ici aux Etats-Unis,
29:18 avec une employée du FMI, Pirolskan Aji,
29:22 une affaire révélée par le Wall Street Journal.
29:25 Si l'on trouve qu'il a obligé cet employé à avoir une relation sexuelle,
29:29 alors c'est très sérieux.
29:31 S'il apparaît que la relation était consensuelle,
29:34 le conseil d'administration aura une décision difficile à prendre.
29:39 Il y a un an et demi, Paul Wolfowitz, le président de la Banque Mondiale,
29:42 la maison-sœur du FMI, avait été contraint à la démission,
29:45 non pas en raison de la relation qu'il avait avec une subordonnée,
29:48 mais parce qu'il lui avait donné une augmentation anormale.
29:52 Rien de tel apparemment aujourd'hui.
29:54 Quand elle a quitté le FMI, l'a-t-elle fait de son plein gré, ou a-t-elle été forcée ?
29:59 A-t-elle reçu des indemnités excessives ?
30:03 Mon impression est que ce qu'elle a touché était dans la norme
30:06 correspondant à son rang.
30:09 Le cabinet d'avocats chargé de l'enquête par le conseil d'administration du FMI
30:14 pourrait rendre ses conclusions dans les jours qui viennent.
30:17 Dominique Strzokan a en tout cas présenté ses excuses ce matin,
30:20 et sa femme, Anne Sinclair, l'a déjà absou,
30:23 "Nous nous aimons comme au premier jour", écrit-elle dans son blog.
30:26 Cette affaire tombe au pire moment, en pleine crise financière,
30:30 dans laquelle le Fonds Monétaire pourrait avoir un rôle important à jouer.
30:33 Il ne serait de l'intérêt de personne qu'il se retrouve ainsi déstabilisé.
30:38 Il y a noté cette réaction au gouvernement d'Éric Besson,
30:42 "Cette affaire est absolument dérisoire", dit-il.
30:45 La crise encore, l'événement est symptomatique,
30:48 des têtes sont tombées à la caisse d'épargne,
30:51 48 heures à peine après la révélation d'opérations spéculatives
30:54 qui ont coûté 600 millions d'euros,
30:56 les dirigeants ont démissionné, sans délai, sans indemnité, ni parachute doré.
31:01 Fabien Chadeau, Frédéric Pasquette.
31:03 Le Conseil a accepté la démission de M. Charles Millaud, président du Directoire.
31:07 La sanction est tombée hier soir, brutale et définitive,
31:10 à l'issue d'une réunion de crise.
31:12 Pour sceller le sort des trois principaux dirigeants de la caisse d'épargne,
31:15 les 17 présidents des caisses régionales se sont retrouvés pendant 6 heures,
31:19 jusque tard dans la soirée.
31:21 Le président, Charles Millaud, plus de 40 ans de maison,
31:24 quitte le groupe, sans indemnité.
31:26 Son numéro 2, Nicolas Mérindol, va prendre la direction du Crédit foncier,
31:30 une filiale de l'écureuil.
31:32 Quant au directeur financier, Julien Carmona,
31:34 il devrait retrouver une autre fonction au sein de l'entreprise.
31:38 Vendredi dernier, quelques heures après l'annonce d'une perte de 600 millions d'euros sur les marchés,
31:43 Nicolas Sarkozy, en voyage au Canada,
31:45 réclamait qu'à la tête de la banque, les responsabilités soient assumées.
31:49 Deux jours auront suffi.
31:51 Pour les représentants des salariés, cette sanction était indispensable.
31:55 Il était nécessaire d'envoyer un signal fort à la communauté professionnelle.
32:00 Ce message a été transmis et, de nature, a renoué avec la confiance,
32:06 le capital confiance étant quelque peu érodé.
32:09 Le projet de fusion de l'écureuil avec les banques populaires est toujours à l'ordre du jour.
32:14 Les discussions vont se poursuivre pour donner naissance à la deuxième banque française.
32:19 Des images, maintenant, qui provoquent le trouble sur les méthodes de la police.
32:23 Elles ont été tournées lors d'une intervention à Montfermeil, en Seine-Saint-Denis.
32:27 Un homme a été frappé à plusieurs reprises lors de son interpellation.
32:31 Une enquête interne est ouverte.
32:33 Aurélien Guillemin, Abdel Zouiouech.
32:35 Montfermeil. Il était 22h.
32:39 Des renforts de police viennent d'être appelés, cités des bosquets,
32:42 pour venir en aide à une patrouille, cible de jets de pierres et de mortiers de feux d'artifice.
32:47 À la recherche des fauteurs de troubles, les policiers investissent cet immeuble
32:50 pour y interpeller Abdoulaye F, 20 ans, suspecté d'avoir participé aux échauffourées.
32:55 Sur ces images, on le voit frappé par des policiers.
32:59 J'ai reçu des coups violents devant toute ma famille.
33:09 Des coups, des coups, des coups.
33:13 Matraque, flashball. Voilà, quoi.
33:17 Vous avez essayé de vous défendre ?
33:18 J'ai pas essayé de me défendre. Je pouvais pas, c'est impossible.
33:21 Quand vous avez plusieurs policiers qui viennent sur vous, c'est vraiment impossible de se défendre.
33:25 Les autorités ne mettent pas en cause la fiabilité de ce document filmé par un vidéaste
33:30 qui dit avoir assisté à la scène par hasard, sans plus de précision.
33:34 Le maire de Montfermeil décrit, lui, un climat tendu dans la cité.
33:38 Je voudrais qu'on resitue ça dans la totalité du contexte de cette soirée,
33:42 où à plusieurs reprises, c'est à coups de cailloux et de mortiers
33:45 que les forces de police ont été attaquées.
33:47 Lors de l'interpellation, un policier a d'ailleurs été blessé.
33:51 Tout ça s'est passé dans un climat très tendu, mais encore une fois,
33:55 ce ne saurait être une excuse pour justifier des actes, s'ils ont été commis,
34:00 qui n'ont pas à être commis par des policiers dans l'exercice de leurs fonctions.
34:03 La police des polices a été saisie pour éclaircir les circonstances de l'interpellation.
34:08 À l'étranger, c'est dans 15 jours maintenant qu'aura lieu l'élection présidentielle aux Etats-Unis.
34:14 Distancé dans les sondages, John McCain a évoqué pour la première fois
34:17 l'éventualité de sa propre défaite.
34:19 "J'ai eu une vie merveilleuse, je peux retourner vivre en Arizona
34:22 et représenter mes administrés au Sénat."
34:25 Barack Obama lui accélère encore le rythme de sa campagne
34:28 en multipliant les réunions dans les États décisifs,
34:31 comme ici en Floride, où il sera ce soir aux côtés d'Hillary Clinton.
34:34 Beaucoup aux Etats-Unis s'interrogent pour savoir
34:37 si le facteur racial peut jouer dans les derniers jours.
34:41 Nous entamons ce soir une série de reportages avec une plongée dans le Mississippi,
34:45 bastion de la ségrégation et du Ku Klux Klan,
34:48 envoyé spécial Arnaud Boutet, Olivier Robert.
34:51 Dans le sud profond, les belles Américaines font partie du décor.
34:56 Philadelphia, Mississippi, les rues sont calmes,
35:00 sauf le dimanche où résonne la fièvre religieuse.
35:09 Ici, elle va durer trois heures, au même rythme.
35:13 L'église est à l'image de la population.
35:19 Les Noirs y sont majoritaires.
35:22 Quasiment tous voteront Obama et ils attendent le grand jour.
35:28 "Avant, je n'aurais jamais imaginé que peut-être un jour
35:32 on aurait un président d'origine africaine.
35:38 Après tout ce qu'on a vécu ici."
35:41 Car l'histoire se révèle sanglante.
35:46 En juin 1964, le Ku Klux Klan assassine trois militants antiracistes,
35:50 deux Blancs, un Noir.
35:53 L'affaire devient même un film, Mississippi Burning.
35:58 Le responsable du triple crime n'a été condamné qu'en 2005,
36:02 soit 40 ans après les faits.
36:07 Noirs et Blancs côte à côte sur le terrain, dans les tribunes.
36:11 La ségrégation dans les stades ou dans les écoles appartient à l'histoire.
36:16 "Philadelphia a tourné une page. Elle compte des Noirs dans la police.
36:21 Tout le monde se connaît, on plaisante.
36:24 Ce n'était pas le cas il y a 35 ans."
36:28 "Mes parents avaient tellement peur que si la police avait été là, devant chez eux,
36:34 ils ne seraient jamais sortis pour simplement discuter ou plaisanter avec les policiers."
36:39 Le Mississippi s'est-il totalement libéré de ses vieux démons ?
36:43 "Philadelphia vit la majorité Noire dans un état Blanc.
36:52 Malgré la mixité, le vote raciste n'a peut-être pas disparu."
36:57 "Je suis certaine que beaucoup voteront sans écouter ce que disent les candidats.
37:02 Ils choisiront par rapport à la couleur de la peau.
37:06 Il y aura toujours du racisme. Mon père me l'a toujours dit.
37:11 C'est comme ça, c'est la vie."
37:15 La couleur de peau, sujet sensible, il n'en parle jamais.
37:20 Avec son chien Rocky, le responsable local des Républicains trouve un autre argument pour contrer Obama.
37:28 "Obama est socialiste. Pour moi, c'est une question de vie ou de mort.
37:32 Si notre pays devient socialiste, alors tout est perdu."
37:36 "Et s'il est élu ?
37:39 Je serai déprimé."
37:42 Son coiffeur l'affirme, il n'a rien contre les Noirs.
37:46 "C'est sa religion qui m'inquiète."
37:48 "Qu'est-ce qu'elle a, sa religion ?"
37:50 "C'est un musulman, enfin, je crois."
37:52 "Vous êtes sûr ?"
37:54 "Non, mais il n'a jamais dit qu'il ne l'était pas."
37:58 "Il a dit qu'il était chrétien."
38:00 "Ouais, tout le monde peut dire qu'il est chrétien, mais l'être vraiment, c'est autre chose."
38:05 "Obama musulman, mauvais chrétien, dans le Sud, la parade peut faire mouche."
38:12 "Les Blancs votent ici en majorité McCain et les Noirs, Obama.
38:15 Et si ce dernier l'emporte, eh bien cette élection provoquera un véritable choc
38:19 dans cet État qui jusqu'à présent est très conservateur."
38:22 Un mot et une image de politique en France avec cette photo de famille aujourd'hui autour de Daniel Cohn-Bendit.
38:27 En vue des européennes en juin 2009, Eva Jolie, José Bové, Antoine Wechtler, Cécile Duflo et les proches de Nicolas Hulot
38:35 étaient présents, un rassemblement de toutes les sensibilités
38:37 qui espèrent donc ainsi mobiliser les électeurs en juin prochain, il m'a signé Bruno Giraudon.
38:43 Le gouvernement a présenté son plan numérique pour tous aujourd'hui.
38:48 Eric Besson en l'occurrence a égrené les mesures.
38:52 En voici les principales.
38:55 Il est question d'un droit opposable à Internet au débit en 2010.
38:59 Une carte d'identité électronique sécurisée sera lancée pour prouver son identité sur Internet.
39:05 Et puis également au programme, l'installation de 400 cyberbases dans les écoles primaires d'ici à 2012.
39:10 Il faut savoir que le taux d'équipement numérique des ménages est en hausse régulière.
39:14 C'est devenu un budget important, 170 euros en moyenne par ménage.
39:19 Julien Beaumont, Romain Boutilli, Frédéric Capron.
39:22 L'appartement de la famille Lucau, c'est un peu l'annexe d'un grand magasin d'électronique.
39:27 Console de jeu, Internet, lecteur DVD, téléviseur, ordinateur, imprimante, lecteur MP3,
39:36 sans oublier bien sûr téléphone portable pour papa, maman et leur fille.
39:40 Il n'a bien que le chat qui ne soit pas encore équipé.
39:44 - Qu'est-ce que je vais dire ? Benoît, il vient manger, tu m'as dit ?
39:46 - Déjà, vis-à-vis des autres, tout le monde a un ordinateur, un portable, tout ça.
39:52 Si j'en avais pas, ça serait un peu la honte.
39:55 Cette famille n'est pas un cas isolé.
39:58 En moyenne, nous dépensons 2270 euros par an pour les nouvelles technologies.
40:03 La facture monte à 2920 si le foyer est composé d'enfants.
40:07 Première dépense est de loin les abonnements, portable ou Internet.
40:12 Viennent ensuite les équipements, puis enfin les dépenses de presse ou de loisirs.
40:16 Au palmarès des équipements, l'écran plat est le plus demandé devant l'ordinateur,
40:21 puis le portable, des achats de plus en plus réfléchis.
40:25 - On s'aperçoit que les gens aussi spécialisent leurs achats.
40:30 S'ils veulent faire de l'Internet, ils achètent un ordinateur qui fait de l'Internet.
40:33 S'ils veulent faire du jeu, ils achètent une console qui fait du jeu.
40:35 De moins en moins des produits qui font tout.
40:37 Et ils achètent plusieurs produits spécialisés chacun dans leur domaine.
40:39 - 85% des français possèdent un téléphone portable.
40:43 Pour l'instant, seuls 1 sur 3 ont un écran plat, un équipement de plus en plus demandé
40:48 et qui du coup sera sans doute l'un des produits phares de Noël.
40:51 - En bref, une image de football en Ligue 1.
40:54 La victoire de l'Olympique de Marseille hier soir à Valenciennes.
40:58 3 à 1.
40:59 But pour Marseille signé Coné, Benarfa et Caboret.
41:03 Marseille qui prend la 2ème place du classement à seulement 1 point de Lyon.
41:08 Avant de refaire mes journales, je vous en rappelle le principal titre.
41:13 La disparition dans son sommeil de sœur Emmanuelle qui aurait eu 100 ans le mois prochain.
41:17 Sa vitalité, son irrévérence, son combat pour les pauvres en avait fait l'une des figures préférées des français.
41:24 Les hommages sont innombrables.
41:25 Une messe solennelle aura lieu mercredi en la cathédrale Notre-Dame à Paris.
41:32 C'est la fin de cette édition.
41:33 Merci de l'avoir suivi.
41:35 Tout de suite la météo.
41:36 Laurent Romesco, 20h50, Cold Case Affaires classée, 23h15.
41:40 Ne manquez pas complément d'enquête avec Benoît Duquesne.
41:43 Voiture propre, le marché de Dupes.
41:45 Point d'interrogation à demain.
41:47 L'info en continue, c'est aussi sur france2.fr.
41:59 Votre soirée sur France 2.
42:04 On a dans l'idée que vous savez comment Maurice Vaud les morts.
42:07 Quelqu'un faisait payer à Maurice le fait d'être différent ?
42:10 Pour dire la vérité, il avait toujours été à part comme garçon.
42:13 En 1984, un jeune danseur était confronté au manque de souplesse de sa famille.
42:18 Lily Rush tente d'élucider les circonstances de sa mort.
42:21 Ensuite, avec Benoît Duquesne...
42:25 Mais si c'était un marché de Dupes, si ces voitures propres, vertes et collos qui fleurissent au salon de l'auto n'étaient en fait que des attrapes migots.
42:32 N'oubliez pas de vous abonner à la chaîne pour ne manquer aucune de mes vidéos. Merci et à bientôt !

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