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Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT est l'invitée de Questions politiques ce dimanche. Elle réagit à l'attaque du Hamas contre Israël et à la guerre qui a suivi, évoque la future conférence sociale et donne son avis sur cette gauche qui peine à parler d'une seule voix. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/questions-politiques/questions-politiques-du-dimanche-08-octobre-2023-6088070

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00:00 [Musique]
00:08 Bonjour, ravie de vous retrouver dans "Questions politiques", l'émission politique de France Inter, diffusée également sur France Info, la télé, Canal 27, et en partenariat avec le journal "Le Monde".
00:19 Notre invitée ce dimanche est la première femme à diriger la CGT. Elle doit rencontrer demain, lundi, la première ministre, Elisabeth Borne, pour préparer la grande conférence sociale annoncée sur les bas salaires.
00:31 Comment convaincre les patrons de les augmenter, ces salaires, quelles sont ces lignes rouges, faut-il les sanctionner ? Nous lui demanderons, évidemment, au tout début de cette émission.
00:40 Et puis, nous évoquerons, bien sûr, aussi la situation au Proche-Orient. Après cette attaque du Hamas, hier, une attaque surprise, une attaque terroriste contre Israël. On en parlera avec notre second invité, Bruno Tertrais, le directeur adjoint de la Fondation pour la Recherche Stratégique.
00:55 Il vient de sortir un livre impitoyablement intulé, "La guerre des mondes". Mais pour l'instant, c'est Sophie Binet, la patronne de la CGT, qui est donc ce dimanche notre invitée dans "Questions politiques", en direct, et jusqu'à 13h.
01:06 "Questions politiques". Karine Beccard sur France Inter.
01:14 — Bonjour Sophie Binet. — Bonjour. — Merci d'avoir accepté notre invitation. Pour vous interviewer, j'ai deux complices, comme toujours, à mes côtés. Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions. Bonjour, Nathalie.
01:22 — Bonjour à tous et à toutes et à tous. — Et Françoise Fresseaus. Bonjour, Françoise, du journal "Le Monde". T'as un petit sourire en coin. Je ne sais pas pourquoi.
01:29 — Bonjour à tous et à toutes. — Ça change. Comme chaque dimanche, on commence "Questions politiques" avec vos images de la semaine. Et je me tourne vers vous, Nathalie, votre image de la semaine.
01:40 Dites-nous laquelle c'est. Je crois qu'elle est très en lien avec l'actualité brûlante de ces toutes dernières heures.
01:44 — C'est une image qui illustre... Qui était dans le journal de France 2 hier soir et qui illustre l'attaque des terroristes du Hamas. C'est une image qui est...
01:53 C'est vrai, j'ai pas montré les otages. Et pourtant, ils s'en sont pris aux femmes, aux enfants, aux hommes aussi. C'est-à-dire qu'ils n'ont pas été regardants.
02:00 — Là, on voit un combattant. — Là, on voit un combattant qui est créé à l'Akbar, en plus, donc avec un certain nombre de... Une volonté très précise de s'en prendre aux civils.
02:08 Alors les autorités iraniennes ont applaudi, ce qui donne une certaine idée des axes qui peuvent se trouver dans la région. On a parlé tout à l'heure d'une attaque d'un bus aussi en Égypte avec des touristes israéliens.
02:20 Tout le monde a condamné. Ça a été condamné par les Européens. Ça a été condamné par la France, bien sûr. Ça a été condamné par les États-Unis.
02:28 Alors ça pose deux questions, effectivement. L'efficacité du Shin Bet, des services de sécurité. Et comment tous les pays comme Israël et les pays arabes autour
02:36 ont pu ne pas voir des attaques par 3 voix, terre-mer-air. Et puis ça pose aussi un problème. Alors là, on n'est plus franco-centré de la réaction qu'on peut avoir vis-à-vis de ça.
02:46 Et manifestement, je fais référence à Elisabeth Bornin qui prenait la parole tout à l'heure à Bordeaux dans le cadre des universités d'été, qui dénonce les ambiguïtés révoltantes,
02:54 je la cite, d'une partie de la gauche sur le conflit en Israël, en traitant clairement El-Fi, qui est quand même le seul groupe, puisque côté nu, du côté des socialistes, des écologistes,
03:05 tout le monde condamne, en considérant en gros qu'il faut renvoyer dos à dos le Hamas et Israël. Qu'est-ce que vous en pensez ?
03:13 Déjà une réaction globale peut-être sur ce qui s'est passé ces 24 dernières heures, effectivement, au Proche-Orient. On ne vous a pas encore entendue, Sophie Binet, sur ce sujet.
03:20 Oui. D'abord, je tiens à apporter le soutien de toute la CGT aux millions de civils qui se trouvent pris en otage dans cette spirale de violence, à condamner évidemment l'attaque
03:30 et à dire qu'au lieu de générer des polémiques assez décalées avec la gravité du moment, la Première ministre devrait surtout mettre toute son énergie à demander à ce que l'ONU,
03:40 le Conseil de sécurité de l'ONU, demande un cessez-le-feu immédiat, à ce que le Conseil de sécurité de l'ONU demande à ce que les organisations humanitaires
03:48 puissent accéder immédiatement à toutes les populations. Et puis ensuite, ce qu'il faut, c'est réouvrir un processus de paix, parce que le problème,
03:55 c'est que le processus de paix est dans l'impasse depuis des années, que la colonisation atteint des niveaux inégalés. Et donc il faut ouvrir des perspectives de paix
04:05 permettant à avoir deux États stables et vials. – Oui, mais vous dites que c'est la Première ministre qui ouvre une polémique ?
04:11 – Oui. – Jean-Luc Mélenchon a été un des premiers à réagir tout de suite, et les gens de la France Insoumise en disant en gros,
04:18 "ils l'ont bien cherché, les Israéliens". Est-ce que le Hamas, considéré comme mouvement terroriste, est mis sur le même pied qu'Israël ?
04:26 Quel que soit ce qu'on pense de la politique. – Non mais bien sûr.
04:28 – Et notamment le fait des otages, c'est-à-dire de prendre des civils.
04:31 – Alors attendez, je voudrais juste rappeler ce qu'a dit Jean-Luc Mélenchon. Il dit, voilà, tout cela s'expliquerait par l'intensification de la politique d'occupation d'Israël.
04:39 Vous êtes d'accord avec ça ou pas ? – Oui, je condamne sans ambiguïté l'attaque qui a eu lieu, c'est l'évidence.
04:44 Mais par contre, il faut aussi dire qu'il y a un problème sur le processus de paix qui est au point mort depuis des années,
04:49 avec une colonisation qui continue et qui est en train de démanteler les quelques territoires palestiniens qui restent.
04:55 Et pourquoi est-ce que je dis que la Première ministre devrait faire autre chose que de la politique politicienne avec des polémiques stériles ?
05:01 C'est que là, on est sur une situation qui est gravissime, avec des millions de civils qui risquent de basculer dans la guerre,
05:08 avec une situation qui va s'amplifier sur tout le territoire palestinien, puisqu'on voit bien qu'il y a maintenant des violences aussi en Cisjordanie,
05:15 qui va toucher aussi le Proche-Orient, puisqu'il y a des violences en Égypte, et qui peut aussi embraser le monde entier et recréer des tensions
05:21 dans à peu près tous les pays du monde. On sait que cette question palestinienne, c'est une question mondiale.
05:27 Et en plus, le Hamas terrorise aussi un certain nombre d'organisations palestiniennes qui, elles, voudraient négocier.
05:33 C'est-à-dire que ce n'est pas simplement le Hamas qui correspond aux Palestiniens et qui se venge d'Israël.
05:38 Le Hamas est donc, pour vous aussi, une organisation terroriste.
05:41 C'est en tout cas la façon dont elle est reconnue par l'ensemble des nations. Ce n'est pas la CGT qui est terroriste ou pas.
05:47 Mais en tout cas, nous, on ne remet pas ça en cause. Mais ce qui est sûr, c'est que pour avoir une paix durable,
05:53 il faut qu'il y ait une justice au Moyen-Orient et qu'il y ait deux États durables qui puissent être mis en place.
06:00 Et là, l'inquiétude que nous portons depuis des années, c'est que cette solution à deux États, elle recule de jour en jour.
06:08 Et c'est ça qui est très inquiétant et sur lequel doivent travailler les Nations unies, où on voit que les décisions des Nations unies,
06:14 elles s'amoncèlent et il n'y en a pas une seule qui est respectée. C'est ça le problème.
06:17 Et le conseiller de sécurité serait venu aujourd'hui.
06:19 François de Cresceau.
06:20 Gérard Darmanin, le ministre de l'Intérieur, annonce un renforcement au fond de la vigilance de sécurité en France
06:26 parce qu'il craint des répercussions internes.
06:28 Est-ce que vous pensez qu'il peut y avoir un risque d'échauffement en France à propos de ce conflit ?
06:32 Est-ce que vous le redoutez et qu'est-ce qu'on peut faire ?
06:35 C'est possible. C'est pour ça qu'il faut que les autorités aient un discours rassembleur et justement ne fassent pas de la politique politicienne.
06:41 À l'époque, on avait été très fiers d'avoir un président qui s'appelait Jacques Chirac
06:45 et qui avait porté très fort la nécessité d'une paix en Israël et en Palestine avec deux États
06:52 et qui avait joué un rôle de moteur dans le processus de paix.
06:56 Mais là, je pense que la position de la France, elle est nette là-dessus.
06:59 Elisabeth Borne, elle réagissait à une réaction de Jean-Luc Mélenchon.
07:02 Elle ne réagissait pas à "qu'est-ce qu'il faut faire ou pas ?"
07:04 Tout le monde souhaite la paix et le retour au calme.
07:07 La paix sur quelles conditions ? C'est la question.
07:09 C'est que la situation actuelle...
07:11 - Donc vous, vous condamnez...
07:13 Vous êtes entre les deux.
07:15 - Ah non, je ne cherchais pas à créer de l'ambiguïté là où il n'y en a pas.
07:17 Je condamne clairement les attaques tout simplement parce que ce sont les civils qui vont en être les premiers pénalisés,
07:22 notamment les civils palestiniens.
07:24 La situation était déjà catastrophique pour eux, elle va l'être encore plus dans les heures et les jours à venir.
07:29 Mais ce qu'il faut pour qu'il y ait une paix durable, c'est qu'il faut qu'il y ait un processus de paix
07:33 qui reprenne sous l'égide de l'ONU et sur la base des décisions de l'ONU avec deux États viables et indépendants.
07:40 Ce qui n'est pas du tout le cas aujourd'hui.
07:41 - Vous condamnez les attaques du Hamas ?
07:43 - Oui, bien sûr.
07:44 - Alors, on continue et on va découvrir votre image de la semaine.
07:47 Sophie Binet, dites-nous ce qu'on voit sur l'image que vous avez choisie,
07:52 qu'on va voir apparaître effectivement sur nos écrans.
07:53 Il faut la décrire évidemment pour également les auditeurs de France Inter.
07:57 Alors, qu'est-ce que vous avez choisi ?
07:58 - Eh bien, il s'agit d'une image extraite d'une vidéo qui a été tournée par la CGT des pompiers à Perpignan,
08:04 qui a été prise le 1er octobre dernier et qui montre des dizaines de brancards
08:08 qui font la queue devant les urgences de Perpignan.
08:11 Et en fait, cette vidéo, elle est symbolique de la situation qui concerne quasiment tous les hôpitaux en France
08:19 avec une grave crise dans le secteur de la santé,
08:22 où on a des soignantes et des soignants qui, après avoir tiré la sonnette d'alarme pendant des années,
08:27 maintenant en arrivent au point dur et disent qu'ils sont obligés de trier les malades
08:31 et qu'ils ne veulent plus travailler dans ces conditions
08:33 parce que leur déontologie, elle est heurtée, qu'ils ne veulent plus, qu'elles ne veulent plus trier des malades.
08:38 Le problème, c'est que le gouvernement a présenté cette semaine son projet de loi de financement de la sécurité sociale.
08:42 C'est crucial pour justement l'avenir et l'équilibre budgétaire des hôpitaux.
08:46 Et ce projet de loi, en fait, il ne répond pas du tout à la situation.
08:48 Au contraire, il va encore l'amplifier puisqu'il y a une baisse des dotations réelles,
08:53 notamment en direction des hôpitaux, du fait de l'inflation et de l'augmentation des besoins de la population.
08:59 Donc la CGT demande un plan d'urgence pour les hôpitaux publics parce que la situation ne peut plus durer.
09:05 C'est gravissime.
09:06 Merci beaucoup. Et même question que j'adresse à Françoise Fresseau. Votre image de la semaine, Françoise.
09:12 Alors moi, j'ai retenu le discours d'Emmanuel Macron jeudi à l'occasion de la 60e anniversaire de la constitution de la Vème République.
09:21 Et je trouvais que c'était un élément important dans la mesure où on parle sans arrêt de la crise démocratique.
09:26 On a depuis six ans une très forte demande de revendications sur l'usage du référendum.
09:32 Donc il y a une proposition du chef de l'État qui dit pourquoi ne pas réfléchir à l'élargissement du chemin de l'article 11,
09:38 c'est-à-dire permettre de convoquer davantage les électeurs sur des sujets, par exemple des sujets de société.
09:44 Alors la droite demande l'immigration, mais on peut imaginer que ce soit des sujets plus compliqués.
09:48 Et puis le chef de l'État dit aussi qu'il y a une procédure qui s'appelle le référendum d'initiative partagée,
09:53 où on a des parlementaires qui, appuyés sur une partie de l'opinion, peuvent convoquer un référendum.
09:59 Ça n'a jamais eu lieu parce que la procédure est trop dure.
10:02 Et moi je m'attendais à ce qu'après ces annonces, il y ait des réactions, des débats,
10:07 c'est-à-dire ça y est on va pouvoir discuter du fond et tout.
10:09 Et en fait, non, on a parlé cette semaine des punaises de lits.
10:13 Là je me suis dit, il y a un problème dans la structuration de la vie démocratique française,
10:19 c'est-à-dire que vous avez des sujets qui montent très très fort, très très haut, et puis après qui s'en vont.
10:24 Or celui-ci est un sujet extrêmement important, et je ne comprends pas pourquoi les représentants de la représentation nationale
10:30 ne s'emparent pas de ça, beaucoup plus sérieusement que ce qui a été fait.
10:34 J'ai l'impression que vous avez envie de réagir.
10:36 Oui, parce que je suis tout à fait d'accord en fait.
10:38 La question centrale c'est la question de la démocratie, ou la séquence des retraites avec les six mois de mobilisation.
10:43 Il y a eu une colère sociale, il y a eu une colère démocratique face au passage en force du gouvernement.
10:48 Donc des annonces sur les référendums, il était temps.
10:51 Mais le problème en fait c'est que la ficelle est un peu grosse.
10:54 Organiser un référendum sur les retraites, Emmanuel Macron peut le faire immédiatement sans révision constitutionnelle.
10:59 Et là, pourquoi est-ce qu'il annonce une révision constitutionnelle ?
11:02 Pour encore une fois tendre une perche à la droite et à l'extrême droite,
11:05 et permettre de faire un référendum sur les questions d'immigration, alors que la première demande des Françaises et des Français c'est un référendum sur les retraites.
11:12 Oui, mais il y a en même temps l'élargissement du RIP, où vous pouviez mettre aussi les sujets.
11:15 Du référendum initiatif partagé.
11:16 Donc on sent qu'il y a quand même toujours, dans le débat démocratique de la mauvaise foi,
11:20 sur des sujets qui concernent tout le monde.
11:22 Et je me demande si à un moment, les Français ne sont pas lassés aussi de ça,
11:26 et dire pourquoi est-ce qu'on ne va pas directement dans le vif du sujet qu'on en débat très sérieusement.
11:30 Et organiser un référendum sur les retraites directement, c'est ce que j'ai demandé au chef de l'État.
11:34 Et ce qu'il a refusé malheureusement, ça permettrait de rassembler le pays.
11:37 De rassembler, c'est-à-dire la question ça serait quoi ?
11:39 Ça serait "êtes-vous pour ou contre la retraite à 64 ans ?"
11:41 À 64 ans, oui.
11:42 Et vous comprenez déjà le résultat ?
11:44 Moi je pense qu'il ne faut jamais dire aux Françaises et aux Français qu'on connaît le résultat avant qu'ils et elles votent.
11:49 C'est quand même très méprisant.
11:50 Donc il faut les laisser voter, et se dire que c'est ça l'issue du grand conflit qu'on a traversé.
11:54 Quand à un moment on est bloqué entre la rue et le Parlement,
11:57 et encore le Parlement aurait bien voulu voter, et il aurait voté contre également,
12:00 donc entre la rue et l'Elysée, on s'en remet à la population et on laisse la population tranchée.
12:04 Et le problème c'est qu'on refuse la démocratie, et la démocratie à l'Assemblée, et la démocratie dans le pays.
12:09 Allez, il faut qu'on avance maintenant et on aborde les questions sociales.
12:12 Je l'ai annoncé, on va largement parler de cette rencontre que vous avez demain avec la Première Ministre Elisabeth Borne.
12:19 Mais d'abord un mot sur cet autre dossier, cet accord qui a été trouvé cette semaine entre le patronat et les syndicats.
12:25 Accord trouvé sur les 13 millions de retraites complémentaires à Girardot,
12:30 elles vont augmenter de 4,9% à partir du 1er novembre, c'est-à-dire à partir de demain.
12:35 Je voudrais qu'on écoute tout de suite votre homologue à la CFDT, Marie-Lise Léon, qui se réjouit de cet accord trouvé.
12:41 Dans le cadre des... à la fin de la négociation, il y a une proposition qui est à 4,9% de revalorisation de ces retraites complémentaires.
12:49 À partir de quand ?
12:50 À partir du 1er novembre, et ça concerne 13 millions de salariés.
12:55 Donc l'accord est ouvert à signature en ce qui concerne la CFDT.
12:58 On se prononcera après un débat avec notre bureau national lundi.
13:02 Mais vous, vous êtes favorable de cet accord, vous trouvez que c'est un bon accord ?
13:04 Absolument, la délégation a beaucoup porté et poussé pour qu'il y ait une revalorisation maximum à 4,9%.
13:10 Aujourd'hui, on a une inflation de 4,8%, donc c'est une bonne avancée.
13:15 Pour bien comprendre, tous ceux qui ont négocié cet accord vont aller chacun dans leur chapelle pour dire qu'on est OK.
13:19 A priori, tout le monde va être d'accord ?
13:21 Ça, ça dépend de chaque organisation.
13:23 Alors, est-ce que tout le monde va être d'accord ? Pas sûr. La CGT, Sophie Binet, elle va signer ou pas ?
13:28 La CGT s'est battue pied à pied dans cette négociation, et donc elle a obtenu la revalorisation à 4,9%,
13:34 la fin du malus pour les futurs retraités, mais aussi pour celles et ceux qui sont actuellement pénalisés.
13:39 Par contre, tout n'est pas réglé dans cet accord, notamment le fait que les cotisations ouvrent de moins en moins de droits à retraite
13:47 et que le montant des pensions complémentaires s'éloigne du montant du dernier salaire.
13:53 Et donc ça, c'est quelque chose, une dynamique qui pénalise beaucoup les actifs d'aujourd'hui.
13:57 Et donc suffisamment pour ne pas signer, c'est ça que vous êtes en train de nous dire ?
13:59 En fait, on va en débattre lundi.
14:01 Mercredi ? Lundi ?
14:02 On en débat lundi en bureau confédéral, et ensuite, à la CGT, on consulte très largement avant de décider de signer ou pas.
14:08 On va consulter toutes nos fédérations et toutes nos unions départementales, ça va prendre 15 jours,
14:12 et on va décider de signer ou pas cet accord.
14:15 Vous avez une idée quand même de comment ça peut pencher ou pas ?
14:18 Et bien non, le suspense est entier, parce qu'il y a des avancées qu'on a arrachées,
14:23 mais tout n'est pas réglé avec des problématiques qui demeurent,
14:27 notamment le fait que le montant des pensions des futurs retraités va continuer à s'éloigner du montant de leur dernier salaire.
14:34 Et donc ça, c'est un problème dont on n'a pas pu discuter dans cette négociation,
14:38 et dont nous souhaitons pouvoir parler au plus vite.
14:40 C'est pour ça que nous demandons une clause de revoyure pour parler de ce point au plus vite,
14:44 et pouvoir ainsi signer cet accord.
14:46 Alors il y a un autre problème, c'est que l'Etat veut ponctionner 3 milliards d'euros, on en parle avec Françoise Fressoz.
14:50 Oui, parce que le gouvernement dit en fait qu'il y a des excédents dans le régime des retraites complémentaires,
14:56 et il dit aussi que la réforme qui a été votée va améliorer la situation.
15:00 Et il demandait au fond, au régime, de verser 1 à 3 milliards d'euros par an,
15:05 pour peut-être aussi venir en aide aux petites pensions.
15:08 Et là, il y a un refus net et précis, une sorte de bras de fer avec le gouvernement.
15:12 Est-ce que tout le monde est, au fond, pas logé à la même enseigne ?
15:15 Est-ce qu'il y a un moment, quand on est un peu en tension budgétaire globale,
15:19 il n'y a pas des aides entre régime complémentaire et régime général à faire ?
15:25 Pourquoi ce bras de fer ?
15:27 Et bien pourquoi ce bras de fer ? Parce qu'en fait, si on accepte le prélèvement que veut faire le gouvernement
15:31 dans les caisses des retraites complémentaires,
15:33 ça va se faire au sacrifice des salariés du privé,
15:35 puisqu'on ne pourra pas revaloriser leurs retraites comme nous l'avons fait là.
15:39 Évidemment, nous, on a une bonne gestion, donc on ne va pas mettre en déficit...
15:42 Mais le montant est un peu petit par rapport à la cagnotte.
15:45 La cagnotte est de 68 milliards d'euros, la ponction est de 3 milliards.
15:49 Je vous dis juste qu'il y a quand même un nombre de grandeurs.
15:52 On ne peut pas dire tout et son contraire.
15:53 On a un gouvernement qui, matin, midi et soir, nous dit qu'il faut avoir des règles prudentielles, sérieuses, etc.
15:58 Et donc, le montant de ses réserves, ça équivaut à des réserves qu'il faut conserver
16:02 pour garantir la stabilité du régime.
16:05 Nous considérons qu'au TCGT, que ces réserves, elles devraient servir à améliorer la pension des salariés du privé,
16:11 qui a beaucoup baissé ces dernières années,
16:13 et qui va continuer à baisser les prochaines années du fait du mécanisme dont je vous parlais tout à l'heure.
16:18 Et que sur le financement du minimum contributif, l'État a d'autres leviers à sa disposition.
16:22 Notamment, il y a quasiment 90 milliards d'exonérations de cotisations sociales pour les entreprises chaque année.
16:28 Il suffirait de les réduire un petit peu pour augmenter les cotisations retraites.
16:32 On va en parler de ça.
16:35 L'AGR Carco, c'est les retraites complémentaires.
16:38 Ce que sert l'État et ce que sert le régime général, ce sont des pensions de base.
16:43 Et là, il y a le problème des petites retraites.
16:46 Vous ne pensez pas qu'il y a un geste de solidarité pour essayer de revaloriser un peu les petites retraites ?
16:50 D'essayer de prendre un peu dans les excédents de l'AGR Carco ?
16:53 C'est complètement caricatural en fait.
16:55 Parce que l'AGR Carco, tous les salariés du privé ont un petit bout de leur pension qui est avec l'AGR Carco.
17:00 Donc dire qu'on va financer le minimum retraite en baissant les droits à l'AGR Carco,
17:06 c'est les mêmes qui vont être perdants en fait.
17:08 Donc c'est déshabiller Pierre pour habiller Paul et souvent ça va être le même.
17:11 C'est prendre d'un côté pour aller alimenter l'autre.
17:14 Donc c'est pour ça que nous pensons qu'il faut avoir des ressources supplémentaires pour notre système de retraite.
17:19 J'ai parlé de la fin des exonérations de cotisations.
17:21 Je ne pourrais pas aussi parler de l'égalité femmes-hommes.
17:23 Si enfin on mettait fin aux 25% des écarts de salaire, ça augmenterait les cotisations.
17:27 - On en parle après, mais si le gouvernement fonctionne malgré tout,
17:30 on est reparti dans une guerre sociale entre l'Etat et les partenaires sociaux.
17:34 - Ah là oui, vraiment, j'alerte vraiment le gouvernement.
17:37 Pas question que le gouvernement remette en cause cet accord et aille se servir dans les caisses.
17:41 - Sinon il se passe quoi ?
17:42 - Ah bah sinon on en décidera collectivement.
17:44 - Mais est-ce que ça peut par exemple rompre ce qui est en train de se renouer autour de la conférence salariale ou pas ?
17:51 - C'est possible, tout est possible.
17:52 Franchement, ça serait gravissime.
17:54 En fait, on a un gouvernement, un président de la République,
17:57 qui n'a toujours pas compris ce que c'était que la démocratie sociale,
17:59 qui n'a toujours pas compris ce que c'était que le paritarisme,
18:01 et qui pense qu'il peut aller se servir dans les caisses des salariés,
18:04 que ça soit côté assurance chômage ou côté...
18:06 - Ah c'est pas de se servir de l'IRE ?
18:08 - C'est-à-dire un problème global de gros déficits.
18:11 - Oui, mais quand même, il y a un débat qui a été tronqué.
18:13 Pendant six mois, on a parlé retraite, pendant six mois, on a parlé du minimum contributif
18:17 avec pas mal de mensonges du gouvernement.
18:18 Et à ce moment-là, le gouvernement a oublié de nous dire
18:20 qu'il voulait financer l'augmentation du minimum contributif
18:23 en allant chercher dans les retraites complémentaires.
18:25 Il aurait pu le dire quand même.
18:26 Et là, il se réveille au dernier moment en disant
18:28 "Tiens, on va prendre dans les retraites complémentaires et on va..."
18:30 - En résumé, pour vous, c'est une ligne rouge ou jaune, je ne sais pas.
18:32 - Non, archi-rouge, là.
18:33 Rouge-vif, oui.
18:34 C'est une ligne rouge, pourquoi ?
18:36 Parce que si on prend dans les caisses des retraites complémentaires,
18:38 ça va dégrader les droits des salariés du privé,
18:41 et donc qui ont déjà des pensions qui ont fortement baissé.
18:44 - Et là, il faut dire que syndicats et patronats, vous êtes d'accord sur le sujet, je crois.
18:47 - Oui, ça n'a pas été facile, d'ailleurs.
18:49 Parce qu'au début, le patronat était d'accord pour partie, donner l'argent, etc.
18:55 Et donc on a réussi, par la bataille que nous avons menée dans cette négociation,
18:58 à avoir une ligne très ferme sur ce point,
19:00 de façon à ne pas dévaloriser la situation des salariés dans le privé.
19:02 - Alors ce qui est intéressant, c'est que Marine Le Pen est d'accord avec vous aussi.
19:05 Elle a signé une tribune jeudi sur le sujet dans le Figaro.
19:07 Elle dit la même chose que vous.
19:08 Elle a les mêmes arguments.
19:09 Est-ce que vous comptez sur le soutien du Rassemblement national
19:12 pour faire entendre cette voix-là aussi ?
19:14 - Non, jamais. En fait, on a un Rassemblement national qui est très opportuniste,
19:18 qui d'ailleurs disait qu'il était d'accord avec nous sur la retraite à 60 ans
19:21 et sur l'opposition à la réforme des retraites.
19:23 Alors que quand on regarde ses propositions,
19:25 il n'y a rien pour permettre de financer la retraite à 60 ans,
19:28 puisque à chaque fois qu'il faut voter des propositions de loi
19:31 pour augmenter les salaires, par exemple, dans l'Assemblée,
19:34 le Rassemblement national vote contre.
19:36 À chaque fois qu'il y a des débats sur les augmentations d'exonération de cotisations sociales,
19:40 le Rassemblement national vote pour.
19:42 - Mais là, elle parle de pillage illégitime.
19:45 C'est un peu ce que vous dites, que l'État vient là pour piller.
19:47 Vous dites la même chose.
19:48 - Oui, tout à fait. Mais ça s'appelle de l'opportunisme.
19:50 C'est rien de neuf sous le soleil.
19:51 C'est le fonctionnement du Rassemblement national
19:53 qui fait croire qu'il défend les travailleuses et travailleurs,
19:55 alors qu'il n'y a pas de pire ennemi dans le monde du travail.
19:57 - Ça commence à prendre. Parce que quand on regarde les sondages,
19:59 on voit qu'il y a une partie des gens qui peuvent à la fois ou être à la CGT,
20:02 ou être à la France Insoumise,
20:04 et en même temps considérer que Marine Le Pen...
20:07 On a l'impression qu'il y a une espèce de mixage des deux côtés,
20:11 qui est la recherche du vote populaire,
20:13 et que ça peut payer, comme on dit.
20:15 - Nous, on est très inquiets par la montée du Rassemblement national dans le pays,
20:19 très en colère contre le gouvernement et Emmanuel Macron,
20:22 qui a été élu pour y faire barrage,
20:24 et qui finalement est le président qui aura monté le plus haut le Rassemblement national.
20:28 Pourquoi ? Parce qu'il ne cesse de mettre dos à dos l'extrême droite
20:31 avec une prétendue extrême gauche, qui va jusqu'au PS.
20:33 C'est assez drôle d'ailleurs la définition de l'extrême gauche.
20:36 - Bon, l'article public va pas jusqu'au PS.
20:38 - Pour nous, on ne met dos à dos l'extrême droite avec quiconque.
20:44 Et donc la CGT, elle a toujours pris ses responsabilités,
20:47 en 2002, en 2017, en 2022.
20:49 - Et en même temps, vous avez de plus en plus de militants CGT qui votent Rassemblement national.
20:53 - Oui, tout à fait.
20:54 - 22% en 2022, c'est 7% de plus qu'en 2017.
20:57 - Bien sûr, nos sympathisants, c'est les travailleuses et les travailleurs,
21:00 c'est les Français et les Français.
21:01 - Vous les acceptez ou pas, malgré tout ?
21:02 - Si le Rassemblement national est très élevé, forcément ça a des conséquences sur nous.
21:05 - Ils ont leur place quand même à la CGT ou pas ?
21:07 - Non, nous avons une position très claire,
21:09 on ne peut pas être militant ou militante de la CGT,
21:11 tout en étant militant ou militante au Rassemblement national.
21:14 Et donc, dès que la situation se pose, on a toujours des décisions extrêmement claires,
21:18 parce que c'est comme la gangrène, si on la laisse rentrer,
21:20 après ça atteint le bras et le corps tout entier.
21:23 Donc ça c'est très clair, par contre le problème c'est la progression du vote Rassemblement national,
21:28 qui se fait sur les ruines laissées derrière elle par les politiques néolibérales.
21:31 Quand on ferme des services publics, quand on ferme des usines,
21:34 ça fait progresser le Rassemblement national.
21:36 Il faut arrêter et le problème c'est qu'Emmanuel Macron continue cette politique délétère.
21:40 - Sophie Binet, la patronne de la CGT sur France Inter et France Info,
21:44 jusqu'à 13h et en direct évidemment.
21:47 Parlons à présent de cette fameuse conférence sociale sur les bas salaires,
21:50 depuis le temps qu'on l'annonce.
21:52 Elle est prévue pour le 16 octobre prochain, c'est dans une semaine,
21:55 et dès demain, donc dès demain midi, Sophie Binet,
21:58 vous êtes la première patronne d'un syndicat à être reçue à Matignon,
22:03 pour discuter avec la chef du gouvernement.
22:06 Vous allez lui dire quoi exactement ?
22:08 Le premier message que vous voulez lui faire passer c'est quoi ?
22:10 - D'abord c'est que nous souhaitons une conférence sur les salaires,
22:13 pas seulement sur les bas salaires.
22:14 Il y a un problème de bas salaires en France.
22:16 Le problème c'est que maintenant on peut travailler sans réussir à remplir son frigo,
22:21 on peut travailler en étant payée bien loin du SMIC mensuel,
22:24 notamment quand on est une femme et qu'on est à temps partiel,
22:27 puisque on ne travaille pas à temps plein et donc on a des salaires très très faibles.
22:30 Mais la problématique des salaires, elle dépasse la simple question des bas salaires,
22:35 puisque celles et ceux qui ont le plus perdu en pouvoir d'achat,
22:38 ce sont les cadres avec un tassement salarial inédit très inquiétant.
22:42 - Mais ça vous avez un peu entendu, parce qu'il va être question aussi des déroulés de carrière,
22:46 tous ces sujets-là pour être à bon sens.
22:48 - C'est pour ça qu'il faut que la conférence s'intitule sur les salaires,
22:51 et pas sur les bas salaires.
22:53 Il y a une ambiguïté on va dire sur le titre,
22:56 donc il faut que ça soit clarifié, qu'on parle salaires.
22:58 Le deuxième point c'est que nous allons demander des mesures contraignantes,
23:02 pas question qu'on sorte de cette conférence avec encore des grands effets d'annonce économique.
23:06 - Alors concrètement, je reviendrai sur quatre.
23:09 La première c'est évidemment l'indexation des salaires sur les prix,
23:13 c'est le seul mécanisme efficace pour maintenir le pouvoir d'achat.
23:16 - Vous savez ce qu'on vous répond, ça a l'air de la spirale,
23:19 parce qu'après, non, et pour vous non ?
23:22 - Tout à fait, c'est de la science-fiction totale.
23:24 Il suffit d'aller en Belgique ou au Luxembourg, dans lequel ces dispositifs existent,
23:28 pour constater que l'inflation n'est pas galopante,
23:30 et que par contre la croissance est plus forte qu'en France,
23:32 et le taux de chômage plus faible.
23:34 - Juste pour qu'on soit clair, l'inflation c'est quoi ?
23:36 C'est le chiffre légal dont on entend parler,
23:39 et qui est donné par l'Etat ?
23:41 C'est sur les produits de première nécessité ?
23:44 - Alors, bonne question.
23:45 A ce stade, nous c'est effectivement,
23:47 déjà si c'était sur l'inflation le chiffre existant, ça serait bien,
23:50 parce qu'aujourd'hui il y a un décrochage par rapport au chiffre légal,
23:53 mais c'est vrai qu'au-delà, il y aurait un débat légitime à ouvrir
23:56 sur la façon dont est construit ce chiffre d'inflation,
23:59 puisqu'on sait que dans le panier INSEE,
24:02 c'est un panier large,
24:03 et que le poids des produits de première nécessité
24:05 est un peu noyé avec l'électronique, l'électroménager, etc.
24:08 Les produits de première nécessité,
24:10 ce n'est pas de 5% qu'ils ont augmenté,
24:11 c'est de 20% que les produits alimentaires ont augmenté en deux ans, par exemple.
24:15 Et là, on voit que les salaires s'effondrent par rapport à ça.
24:17 - Vous seriez prête à...
24:18 - Vous êtes sûre d'avoir une réponse négative du gouvernement ?
24:22 - C'est catégorique. 20% c'est énorme.
24:24 - Oui, oui, tout à fait.
24:25 - Donc vous voulez l'indexer sur quels chiffres ?
24:27 - Les salaires indexés sur l'inflation, déjà, le chiffre actuel,
24:31 et puis après dans un deuxième temps,
24:32 on discutera de la façon dont ce chiffre est construit.
24:34 Mais déjà, si on indexait les salaires sur l'inflation
24:37 telle que construite par l'INSEE, déjà, ça serait un progrès.
24:39 - D'accord. Donc, première proposition, deuxième.
24:41 - La deuxième proposition que nous allons porter,
24:43 c'est la conditionnalité des aides publiques aux entreprises,
24:45 puisque chaque année, les entreprises bénéficient de 200 milliards d'euros
24:50 d'exonération fiscale et d'exonération de cotisation sociale,
24:53 quasiment sans contrepartie.
24:54 C'est un tiers du budget de l'État, c'est énorme.
24:56 Et c'est un levier majeur pour forcer des augmentations de salaires,
24:59 parce que dans 40% des branches,
25:02 il y a des minimas conventionnels qui sont inférieurs au SMIC.
25:05 - Alors, et vous considérez...
25:06 Attends, je ne te laisse pas trop avoir besoin.
25:08 Vous considérez que ces exonérations, pour l'instant,
25:10 n'ont pas servi, notamment, à faire baisser le taux de chômage
25:13 et que c'est juste des choses...
25:14 Est-ce que c'est, en gros, comme on sait caricaturer parfois,
25:16 des cadeaux au patron, et non pas quelque chose
25:19 qui a quand même débouché, dès François Hollande,
25:22 dès la fin du quinquennat de Hollande,
25:23 à celui d'Emmanuel Macron, à faire baisser les...
25:25 - Ce qui permet d'être à 7% aujourd'hui de chômage,
25:27 ou un tout petit peu plus.
25:28 - Non, parce que la baisse du taux de chômage, en fait,
25:31 elle est liée à une situation européenne,
25:33 où le chômage a baissé dans tous les autres pays européens,
25:35 et d'ailleurs en France, plutôt moins qu'ailleurs,
25:37 parce qu'on a un taux de chômage qui reste plus élevé
25:39 que la moyenne européenne, donc ce n'est pas lié à ça.
25:41 En plus, il y a un certain nombre d'études.
25:43 Les quelques études économiques qui ont été faites sur,
25:45 par exemple, le CICE, ont montré que les créations d'emplois
25:48 étaient très hypothétiques, puisque c'étaient des emplois
25:50 qui coûtaient très très très cher.
25:52 Et donc, la première chose, déjà, ça serait d'avoir
25:54 un vrai observatoire des aides publiques,
25:56 pour regarder qui en bénéficie, comment,
25:58 quels sont les résultats.
25:59 Nous, ce que nous savons, c'est que ce sont d'abord
26:01 les grandes entreprises qui en bénéficient.
26:03 - Mais il y a des rapports parlementaires,
26:04 sur l'effet, l'impact des aides qui ont été faites.
26:07 Ce n'est pas juste quelque chose qu'on distribue comme ça pour...
26:09 - Justement, les rapports parlementaires n'ont pas du tout été entendus.
26:11 Par exemple, sur le crédit impôt recherche,
26:13 il y a eu une série de rapports parlementaires très critiques.
26:15 Je pourrais parler de Sanofi, en disant qu'il a bénéficié
26:18 de quasiment 1 milliard de crédits impôts recherche,
26:20 et qu'il a divisé son nombre de chercheurs par 2.
26:22 On voit bien qu'il y a un problème, et là, l'État refuse
26:25 de mettre des critères beaucoup plus rigoureux
26:27 de suivi de ces aides.
26:28 Je pourrais prendre un autre exemple,
26:29 dans la grande distribution, Carrefour bénéficie
26:31 chaque année de 300 millions d'euros d'aides de l'État,
26:35 alors que Carrefour n'est pas du tout exposé à la concurrence,
26:37 Carrefour n'est pas du tout en difficulté,
26:39 et que ces millions d'aides vont alimenter
26:41 les dividendes versés aux actionnaires,
26:43 puisque Carrefour verse chaque année 320 millions d'euros
26:45 de dividendes à ses actionnaires.
26:47 Donc il y a un parallélisme qui est assez troublant.
26:49 - Ça c'est votre deuxième proposition.
26:50 À partir du moment où une entreprise verse des salaires
26:52 en dessous du SMIC, elle ne touche plus ces subventions ?
26:54 - À partir du moment où une branche a des minimums conventionnels
26:57 inférieurs au SMIC, les entreprises ne peuvent plus toucher
27:00 - L'intégralité ?
27:02 - À discuter, mais en tout cas, qui est la conditionnalité
27:05 d'au moins une partie des aides publiques.
27:07 La troisième proposition, c'est la question de l'égalité salariale
27:10 entre les femmes et les hommes.
27:11 D'ailleurs, le gouvernement pour l'instant refuse
27:13 qu'il y ait un temps spécifique dans cette conférence sociale
27:16 - Il dit que c'est un sujet transversal en fait ?
27:18 - Oui, c'est ça.
27:19 - Vous avez peur que ça noie le poisson ?
27:21 - C'est toujours ça, comme militante féministe,
27:23 je sais que quand on nous dit que les femmes sont un sujet transversal,
27:25 c'est pour mieux nous enterrer.
27:27 - Marie-Lise, Léon dit la même chose.
27:29 - On est d'accord, bien sûr.
27:30 Il faut qu'il y ait un sujet ciblé sur l'égalité femmes-hommes
27:34 pour parler des sanctions pour les entreprises
27:37 qui ne respectent pas l'égalité femmes-hommes.
27:39 Il y a 25% d'écart de salaire quand même, toujours,
27:41 et que cet écart ne régresse pas.
27:43 - Et ça c'est un casus belli ?
27:44 Si jamais ce n'est pas fait, vous sortez de la discussion ?
27:47 - Non, si jamais ce n'est pas fait, on portera dans tous les ateliers,
27:51 il y aura une CGT extrêmement offensive
27:53 qui reposera toujours la même question sur l'égalité femmes-hommes.
27:55 On sait contourner les blocages,
27:58 et puis on se coordonnera avec les autres syndicats
28:00 pour faire entendre cette question-là.
28:01 Mais ce serait quand même très problématique
28:03 que le gouvernement qui nous explique que l'égalité femmes-hommes
28:06 est sa grande cause nationale,
28:07 refuse d'en parler de façon spécifique.
28:08 - Et vous êtes pour des sanctions si ça n'est pas effectif ?
28:10 Vous n'êtes pas dans une logique d'incitation ou de proposition,
28:14 mais dans une logique de sanctions si les entreprises n'appliquent pas ?
28:17 - Oui, c'est la moindre des choses en fait.
28:18 L'égalité femmes-hommes, c'est le seul sujet sur lequel
28:20 il n'y a pas de sanctions quand on ne l'applique pas.
28:22 C'est à croire que les femmes ne méritent pas ça,
28:24 et que nous, c'est seulement des bonnes paroles.
28:25 Évidemment qu'il faut des sanctions quand il n'y a pas d'égalité salariale,
28:28 des sanctions financières élevées, dissuasives,
28:30 notamment pour les grandes entreprises.
28:32 Et la troisième proposition,
28:33 - Quatrième !
28:34 - Pardon, la quatrième, merci, c'était pour voir si vous suiviez.
28:37 La quatrième proposition, c'est la question des temps partiels.
28:40 Parce que les temps partiels, ils sont invisibles du débat public.
28:43 C'est 30% des salariés qui sont enfermés dans les temps partiels,
28:46 et ces salariés sont quasiment exclusivement des femmes.
28:49 Quand on est en temps partiel, ça veut dire qu'on n'a pas le SMIC mensuel à la fin du mois,
28:53 et donc que souvent on a des salaires bien loin du seuil de pauvreté,
28:56 qu'on ne peut pas être indépendant économiquement.
28:58 Pour une femme, c'est un problème.
28:59 Et quand on est à temps partiel, ça veut dire en plus
29:02 qu'on a des amplitudes horaires dignes de 4 sup,
29:04 on commence le matin à 7h, on va finir le soir à 21h,
29:07 mais il va y avoir 7h de pause au milieu de la journée,
29:09 avec une flexibilité maximum et des horaires qui changent du jour pour le lendemain.
29:13 - Et concrètement, qu'est-ce qu'on peut faire là-dessus ?
29:15 - On peut faire plein de choses.
29:16 La première chose qu'on pourrait faire...
29:17 - Sanctionner les entreprises qui recourent au temps partiel ?
29:20 - Plein, plein de choses.
29:22 On pourrait d'abord faire en sorte que les salariés à temps partiel
29:25 soient à égalité avec les salariés à temps plein.
29:27 Aujourd'hui, quand on fait des heures supplémentaires,
29:29 quand on est à temps partiel, elles ne sont pas ou peu majorées,
29:32 et beaucoup moins majorées que quand on est à temps plein.
29:35 La deuxième chose qu'on pourrait faire, c'est faire en sorte
29:37 que tous les employeurs qui abusent du temps partiel
29:40 n'aient plus d'exonération de cotisation sociale.
29:42 Parce que les exonérations de cotisation sociale vont d'abord alimenter
29:45 les bas salaires et ces emplois précaires et à temps partiel.
29:49 Ensuite, on pourrait, par exemple pour les aides à domicile,
29:51 faire en sorte que les temps de trajet entre deux patients
29:54 soient considérés comme du temps de travail.
29:56 Et on pourrait aussi interdire les interruptions trop importantes
30:00 sur une journée, limiter les amplitudes horaires,
30:03 forcer à négocier pour éviter le travail de nuit.
30:06 Par exemple, dans le secteur de la propreté, on se bat pour que
30:09 les salariés qui font le nettoyage des bureaux puissent le faire
30:12 de jour et pas tard le soir ou très tôt le matin.
30:16 Parce qu'en fait, ces temps partiels, c'est ça le paradoxe et le scandale.
30:19 C'est que ce sont des femmes qui les occupent, on les présente comme
30:22 "Regardez, c'est super, c'est pour leur permettre de concilier
30:25 leur vie privée et leur vie familiale avec leur travail".
30:28 Mais en fait, c'est juste impossible. C'est à cause de leur temps partiel
30:31 qu'elles ne peuvent pas nourrir leur famille à la fin du mois.
30:33 Et c'est à cause de leur temps partiel qu'elles ne voient jamais
30:35 leurs enfants, puisqu'elles travaillent quand les enfants sont à la maison
30:38 le matin, le soir et le week-end.
30:39 Alors, est-ce que vous allez arriver à cette conférence sociale le 16 octobre
30:42 avec suffisamment de poids, avec suffisamment de force ?
30:45 Vous avez une mobilisation le 13 octobre.
30:47 Si vous ne faites pas le plein, est-ce que vous serez légitime à demander tout ça ?
30:50 Eh bien, c'est la raison pour laquelle il faut qu'on fasse le plein le 13 octobre.
30:53 C'est la raison pour laquelle j'appelle tous les salariés à faire grève,
30:56 à manifester le 13 octobre prochain.
30:58 Mais ils ont la tête à ça, les Français, en ce moment ?
31:00 Ils sont en colère, les Français, en ce moment ?
31:01 Je pense qu'ils sont très en colère. Je pense qu'ils ont tout à fait la tête
31:04 au fait que les salaires sont totalement insuffisants pour vivre.
31:07 Et donc, la question, c'est de se mobiliser le 13 octobre
31:11 pour gagner ces augmentations de salaire,
31:13 gagner l'égalité femmes-hommes.
31:15 Il y a plus de 200 manifestations sur tout le territoire.
31:17 Vous les retrouverez sur 13octobre.fr.
31:20 Et puis, l'enjeu, c'est de se dire, vendredi 13 octobre,
31:23 pour gagner des augmentations de salaire,
31:25 ce n'est pas à l'euro-million qu'il faut jouer,
31:27 c'est à l'euro-manifestation qu'il faut participer.
31:29 C'est beaucoup plus sûr.
31:31 L'autre chose qui frappe, c'est un rapprochement assez manifeste avec la CFDT,
31:35 puisque dans la tribune dimanche, dont je salue le premier numéro aujourd'hui,
31:40 vous êtes aux côtés de la patronne de la CFDT
31:43 et vous soutenez des revendications communes.
31:46 Est-ce que vous pensez que le climat politique,
31:50 qui était marqué par la montée et la poussée du RN,
31:54 ça oblige les syndicats à être beaucoup plus unis qu'auparavant,
31:58 à essayer de pousser les dossiers et obtenir des victoires ?
32:03 Et comment vous sentez Elisabeth Borne ?
32:05 Est-ce que vous la sentez à l'écoute,
32:07 notamment sur les allégements de charges des entreprises ?
32:09 Est-ce que ça peut bouger ?
32:11 Ou vous sentez que c'est toujours un mur depuis la réforme des retraites ?
32:15 Il y a plein de questions.
32:17 Je pense qu'effectivement, et grâce à la mobilisation contre la réforme des retraites,
32:22 les organisations syndicales ont compris que les salariés attendent l'unité
32:27 et qu'il y avait un besoin d'unité syndicale.
32:29 Ça, ça a toujours été l'orientation de la CGT,
32:31 mais parfois on s'est senti un peu seul.
32:33 Donc ça, c'est très positif.
32:35 Et cette unité, elle est importante pour deux raisons.
32:37 D'abord, pour se faire entendre du gouvernement et du patronat
32:39 avec un gouvernement radicalisé qui passe en force contre la mobilisation,
32:44 contre les parlementaires, contre l'opinion.
32:46 Donc si on n'est pas unis, c'est sûr qu'on va se faire piétiner.
32:48 Et ensuite, cette unité, elle est importante parce que, effectivement,
32:50 nous sommes très inquiets du contexte
32:52 et très inquiets de la montée du Rassemblement National et de l'extrême droite.
32:55 Et que, face à cela, avoir des syndicats unis, rassemblés,
32:59 c'est une boussole pour le monde du travail
33:01 et ça permet d'avoir des perspectives collectives.
33:03 Est-ce que, justement, dans le contexte de la montée du RN,
33:06 vous avez un changement d'attitude, d'attitude d'orientation ?
33:10 C'est-à-dire quelque chose qui serait un peu plus à l'allemande,
33:12 c'est-à-dire plus négociant, plus réformiste,
33:14 ou au contraire, ça vous radicalise ?
33:16 Non, il n'y a pas de changement d'orientation de l'ACG,
33:19 ni d'ailleurs des syndicats,
33:22 puisque, justement, il y a plutôt une orientation plus combative.
33:25 Suite à ce conflit, tous les syndicats sont sortis en disant
33:27 "on n'oubliera pas ce qui s'est passé,
33:29 on n'oubliera pas le passage en force du gouvernement
33:31 et maintenant, c'est Laurent Berger qui emploie ces termes,
33:34 tout coûtera plus cher".
33:36 Donc je pense que si changement d'orientation il y a,
33:38 il est plutôt de ce côté-là à chercher,
33:40 il y a beaucoup plus de combativité de la part des autres organisations syndicales,
33:43 puisqu'on a un gouvernement radicalisé qui refuse de négocier.
33:47 Plus combatif, avec plus d'adhérents, vous en avez enregistré beaucoup,
33:50 et est-ce qu'ils ont changé de profil ?
33:52 Est-ce qu'ils sont plus jeunes ? Est-ce qu'ils sont plus écolos ?
33:55 Alors ça c'est difficile, parce qu'on n'a pas fait de sondage
33:58 auprès des adhérents, puis on respecte aussi les opinions personnelles,
34:03 mais oui, on a plus de 50 000 nouveaux et nouvelles syndiqués
34:07 pour tout le syndicalisme français, donc des jeunes, plus de femmes,
34:11 plus de salariés.
34:12 Écolos un peu ou pas ? Parce que ça pêche quand même chez vous l'écologie, non ?
34:15 Alors non, on y reviendra si vous voulez, mais je ne suis pas du tout d'accord avec vous.
34:18 Mais de toute manière, oui, parce que la question environnementale
34:20 elle monte, notamment chez les jeunes,
34:23 et là, je pense que la première leçon du conflit qu'on a rencontré,
34:26 c'est que si les organisations syndicales avaient eu plus de syndiqués,
34:29 on aurait été en capacité de davantage étendre les grèves.
34:32 Le problème, c'est qu'il y a 40% des entreprises privées
34:34 dans lesquelles il n'y a pas de syndicats.
34:36 J'appelle toutes celles et ceux qui nous écoutent,
34:38 qui sont dans des entreprises sans syndicats,
34:40 rapprochez-vous de la CGT pour créer un syndicat dans votre entreprise.
34:43 Question très précise sur l'écologie de François Sfraissot.
34:45 Oui, parce que ce qui me frappe beaucoup, moi,
34:48 c'est cette espèce de montée du désespoir chez les jeunes à propos de l'écologie.
34:51 Je voulais vous faire réagir à l'appel de Thomas Braille.
34:54 Vous savez, c'est un militant qui est engagé contre le projet d'autoroute
34:57 qui doit relier Castre à Toulouse,
34:59 et qui menace d'engager une grève de la soif à partir de lundi.
35:02 Est-ce que vous comprenez, en mettant en avant en même temps
35:05 qu'il perde un enfant de 6 ans,
35:07 et que ça serait dramatique qu'il meure ?
35:09 Mais vous comprenez, vous, cette forme de combat
35:11 et cette forme de désespoir face à la cause écologique ?
35:14 Est-ce que ça ne pourrait pas être quelque chose
35:16 de bien plus mobilisateur positivement
35:18 que ce qui se passe aujourd'hui ?
35:20 Non, moi, je comprends tout à fait cette colère et cette rage.
35:22 Et vous soutenez cette forme d'action ?
35:24 Alors, ce n'est pas une forme d'action à laquelle la CGT appelle.
35:27 Les grèves de la faim et encore plus les grèves de la soif,
35:29 c'est très dangereux.
35:31 Donc, moi, ce à quoi la CGT appelle,
35:33 c'est un moratoire immédiat sur ce projet.
35:36 Parce qu'en fait, on a un projet qui n'a aucun sens,
35:38 qui fait gagner 15 minutes de temps,
35:40 et qui fait perdre 17 euros,
35:42 parce que c'est 17 euros les 54 kilomètres.
35:44 Il y aurait quand même un péage extrêmement payant.
35:46 Et donc, il y a à la fois une aberration sociale
35:48 et une aberration environnementale.
35:50 Aujourd'hui, c'est aberrant qu'on continue
35:52 à développer des projets autoroutiers
35:54 au lieu d'investir dans l'infrastructure ferroviaire
35:56 et dans les transports collectifs.
35:58 Donc, la CGT appelle à un moratoire immédiat sur ce projet,
36:01 de façon à examiner les alternatives.
36:03 Et comme alternative, il faut aussi revitaliser
36:05 tous les territoires pour que les habitants
36:07 de toutes les petites villes ne soient plus obligés
36:09 d'aller chaque jour dans la métropole
36:11 pour travailler, avoir accès aux services publics, etc.
36:14 Il faut qu'on puisse vivre et travailler
36:16 partout sur le territoire,
36:18 et pas seulement dans les grandes métropoles.
36:20 - Sophie Binet, qui est toujours avec nous sur France Inter et France Info,
36:22 la télé, je voudrais qu'on parle un peu de la gauche,
36:24 quand même, pour finir.
36:26 Qu'est-ce que vous dites, Sophie Binet, vous, la patronne de la CGT,
36:28 à propos des dérives managériales
36:31 de la députée Sophia Chikirou ?
36:33 On a découvert cette semaine ses différents agissements,
36:36 j'ai envie de dire sa violence comportementale,
36:38 sa violence verbale, grâce au magazine
36:41 Complément d'Enquête.
36:43 Elle doit être sanctionnée, Sophia Chikirou ?
36:46 Qu'est-ce que dit la patronne de la CGT ?
36:49 - Les faits qui lui sont reprochés
36:51 sont, a priori, graves
36:53 et potentiellement illégaux.
36:55 Donc, je pense que la justice doit faire son travail
36:57 pour permettre aussi de déterminer
36:59 la véracité de ces faits ou pas.
37:01 Je crois que, évidemment, c'est important d'être exemplaire
37:04 quand on est dirigeant ou dirigeante politique.
37:07 Et sur la question managériale,
37:09 ce que je tiens à dire ici, c'est que nous avons
37:11 une CGT des assistants parlementaires
37:13 qui dénonce depuis des années
37:15 des dérives managériales
37:17 chez la majorité des élus politiques.
37:21 Et donc, il y a besoin d'avoir un travail là-dessus,
37:23 notamment sur la question des violences sexistes et sexuelles
37:25 et sur le fait que les assistants parlementaires
37:27 n'ont aucun droit. Enfin, on est en dessous
37:29 de tout le droit qu'il y a dans le droit du travail.
37:31 C'est quand même fort de café que, à l'Assemblée nationale,
37:34 les travailleuses et travailleurs de l'Assemblée nationale
37:36 ne soient pas protégés par le Code du travail
37:38 pour respecter leurs droits fondamentaux en matière de harcèlement
37:40 ou de violences sexuelles.
37:42 - Mais, est-ce qu'il n'y a pas un problème, comme le disait Karine,
37:44 en voyant un grand recours aux bénévoles,
37:46 alors qu'il y a un certain nombre de choses qui sont facturées,
37:48 en voyant la terreur quand on regarde
37:50 complément d'enquête, on a l'impression que c'est quasiment
37:52 une secte et qu'on n'a pas le droit de parler, autrement on est viré.
37:54 - Non, puis les mots qui sont utilisés, c'est impressionnant.
37:56 - Et les termes.
37:58 - Bande de tafiole de merde, par exemple.
38:00 - Bande de tafiole que n'importe qui dirait le quart du dixième de ça.
38:02 Tout le monde hurlerait.
38:04 Et que, finalement, la seule réponse de Mathilde Pannot,
38:06 qui est présidente du groupe, c'est de dire que
38:08 Sofia Chikiro est victime
38:10 d'attaques sexistes
38:12 et arabophones.
38:14 - Oui, arabophones.
38:16 - Ecoutez, moi, je pense...
38:18 - C'est quand même un parti qui se dit de gauche.
38:20 - Non, mais c'est pas à la CGT de rentrer
38:22 et de dire s'il y a un problème dans telle ou telle
38:24 partie, ça c'est vraiment pas à moi de le dire.
38:26 Je pense que, encore une fois, les faits qui sont reprochés
38:28 sont graves, les paroles qui ont été tenues sont graves
38:30 et là, en l'occurrence, sont homophobes.
38:32 - Le traité de Fabien Roussel de Jacques Doriot,
38:34 il y a peut-être un moment où, en tant que
38:36 grande responsable d'une grande...
38:38 Il y a peut-être un moment où il faudrait peut-être inciter les gens à se tenir à peu près...
38:40 - Oui, tout à fait.
38:42 Je pense que c'est pas une bonne façon
38:44 d'élever le niveau du débat public
38:46 que d'avoir ce type de propos
38:48 et que ça n'aide pas le débat public
38:50 dans un moment, justement, où
38:52 le Rassemblement National est très élevé
38:54 et où il y a une polarisation très inquiétante
38:56 du débat public et donc il faut avoir un peu de hauteur.
38:58 - C'est l'enjeu du Mélenchon le problème ou pas ?
39:00 - Ecoutez, c'est pas à moi de dire ça.
39:02 - Bah si, à un moment donné,
39:04 c'est exactement ce que disait Nathalie Sarkozy,
39:06 à un moment donné, il faut siffler la fin de la partie.
39:08 - Oui, mais c'est pas à la CGT de siffler la fin de la partie.
39:10 - Oui, c'est vrai.
39:12 Mais ce que vous dites depuis le début de l'émission,
39:14 c'est quand même qu'il y a un contexte
39:16 très particulier qui est lié
39:18 à la montée du Rassemblement National
39:20 et c'est vrai que
39:22 vous êtes plutôt dans le camp de la gauche.
39:24 Donc quand vous voyez l'état des partis à gauche,
39:26 est-ce que ça participe de votre inquiétude ?
39:28 - Oui. - Et au fond, qu'est-ce que vous leur dites ?
39:30 - Alors c'est la dernière question. - Bah, ce qu'on leur dit,
39:32 c'est qu'il y a une aspiration à l'unité qui s'applique
39:34 au syndicat mais aussi aux formations politiques
39:36 et il y a aussi l'aspiration à avoir
39:38 des perspectives politiques de progrès
39:40 en rupture avec
39:42 les catastrophes du néolibéralisme.
39:44 Donc aujourd'hui, ce qu'on a besoin d'entendre,
39:46 c'est qu'est-ce qu'on fait par exemple pour l'hôpital public,
39:48 qu'est-ce qu'on fait pour les EHPAD publics ?
39:50 - On leur demande d'être sérieux, de faire des propositions.
39:52 - Et bah oui, c'est là-dessus qu'il faut travailler et il faut arrêter
39:54 d'avoir un débat public hystérisé par des petites
39:56 phrases et des multiplications d'attaques
39:58 des uns envers les autres. On a besoin
40:00 d'avoir des perspectives collectives de progrès.
40:02 - Il faut leur supprimer leur portable.
40:04 - Merci Sophie Binet. Alors vous restez bien sûr
40:06 avec nous. C'est le moment d'accueillir notre
40:08 second invité pour le livre de la semaine.
40:10 - France Inter.
40:12 Questions politiques.
40:14 Karine Beccard.
40:16 - Bonjour Bruno Tertrais.
40:18 - Bonjour.
40:20 - Merci d'être sur le plateau de questions politiques
40:22 ce dimanche pour parler de votre dernier livre
40:24 "La guerre des mondes".
40:26 Ça vient de sortir aux éditions de l'Observatoire
40:28 mais d'abord, on va bien sûr parler de ce qui se passe
40:30 en ce moment, de cette situation au Proche-Orient.
40:32 Est-ce qu'on est en guerre ?
40:34 Comme le dit le Premier ministre israélien
40:36 Benjamin Netanyahou. Comment est-ce qu'on est en guerre ?
40:38 - Qui est "on" ?
40:40 La France n'est pas en guerre.
40:42 Israël est évidemment en guerre
40:44 dès lors que vous avez des attaques multiples,
40:46 bien organisées, coordonnées,
40:48 avec des prises d'otages sur différents points du territoire.
40:50 Bien évidemment, n'importe quel Premier ministre
40:52 israélien, que ce soit Netanyahou ou un autre,
40:54 aurait dit "nous sommes en guerre".
40:56 C'est une des situations les plus graves
40:58 que le pays ait connue depuis plus de 50 ans.
41:00 - Mais comment vous observez la situation
41:02 dans laquelle vous êtes ?
41:04 - Je pense que c'est une situation
41:06 qui est très importante. Comment vous observez la situation
41:08 dans laquelle on est aujourd'hui ?
41:10 Et comment est-ce que vous la qualifieriez ?
41:12 - Écoutez, d'abord... - C'est pas la guerre. C'est quoi ?
41:14 - Premièrement, c'est une surprise
41:16 extraordinaire et tragique
41:18 pour les services de renseignement israélien.
41:20 Vous savez très bien, puisqu'on en a déjà parlé ici,
41:22 que nous fêtons, nous commémorons plutôt
41:24 l'anniversaire de la guerre du Kippour.
41:26 Une autre erreur stratégique majeure
41:28 pour Israël qui n'avait pas pu voir venir
41:30 l'attaque arabe.
41:32 60 ans après,
41:34 50 ans après, on est exactement
41:36 dans la même situation.
41:38 Et ça, il va y avoir après,
41:40 on n'en est pas là, mais il va y avoir un retour
41:42 sur soi-même extrêmement
41:44 important pour Israël qui, en principe...
41:46 Moi je connais cet endroit, je suis allé à Zderodt,
41:48 je suis allé voir la frontière avec Gaza.
41:50 C'est surveillé de partout,
41:52 il y a des moyens électroniques, humains.
41:54 C'est sidérant.
41:56 L'effet de sidération, il n'est pas seulement sur la guerre,
41:58 mais il est aussi sur l'échec tragique
42:00 du renseignement israélien.
42:02 Après, si on met les choses en perspective,
42:04 je vois déjà des gens qui disent,
42:06 il y a l'Iran derrière, peut-être même la Russie.
42:08 Moi je suis extrêmement prudent là-dessus,
42:10 je ne suis pas le dernier à dire, et on en parlera sans doute,
42:12 que la Russie et l'Iran sont des pays expansionnistes
42:14 aujourd'hui. Il ne faut pas toujours
42:16 voir la main de Moscou partout, et même pas forcément
42:18 celle de Tahiran, même si bien sûr
42:20 le Hamas et le Hezbollah surtout sont aidés
42:22 par l'Iran.
42:24 - Comment vous expliquez qu'ils soient devenus aussi efficaces ?
42:26 Parce que le Hamas, on le connaît
42:28 depuis un certain temps, mais ce n'est pas très...
42:30 Quand on voit le bateau,
42:32 le jeudi qui est arrivé par la mer,
42:34 le tank avec lequel ils rentrent,
42:36 on a l'impression que c'est un truc
42:38 extrêmement organisé.
42:40 - Le Hamas est très organisé,
42:42 le Hamas reçoit beaucoup de financements.
42:44 - De qui ? - Alors des fortunes privées du Golfe,
42:46 et l'Iran bien entendu.
42:48 - Qatar ? - Oui, du Golfe,
42:50 le Qatar certainement,
42:52 notamment des fortunes privées, et pas forcément
42:54 une aide d'Etat. Le problème, c'est le détournement
42:56 massif de l'aide internationale
42:58 vers ce pays,
43:00 par les autorités du Hamas,
43:02 qui règne avec une main de fer
43:04 sur la population. Quand on dit que c'est une prison,
43:06 je ne sais pas si le terme est approprié,
43:08 mais je sais que les gardiens principaux de cette prison
43:10 s'appellent le Hamas, et que c'est une véritable
43:12 dictature, on ne peut pas lever le petit doigt.
43:14 Il y a aussi énormément de contrebandes,
43:16 de matériaux de construction et d'armes
43:18 via les tunnels
43:20 depuis l'Egypte, qui sont moins bien
43:22 surveillés que du côté israélien.
43:24 Et puis il y a enfin
43:26 de l'aide militaire qui arrive sans doute par la mer.
43:28 Tout ça fait que le Hamas, qui a pris
43:30 le fouboird quand même en 2007, il faut le rappeler,
43:32 est effectivement une mini-armée,
43:34 un acteur non étatique, mais qui a la puissance
43:36 d'un petit Etat. - Donc si je vous entends bien,
43:38 mon auteur, vous n'êtes pas surpris
43:40 par ce qui s'est passé il y a 24 heures ?
43:42 - J'ai été, comme tout le monde,
43:44 extrêmement surpris. Et l'effet de sidération,
43:46 et là, je ne pensais pas du tout,
43:48 comme beaucoup d'observateurs de la région
43:50 et du reste du monde,
43:52 je pensais que s'il y avait une nouvelle grande
43:54 guerre dans la région, hélas, cela viendrait
43:56 du nord et non pas du sud.
43:58 On regarde le Hezbollah qui est l'ennemi
44:00 numéro un d'Israël, mais les Israéliens,
44:02 encore une fois, étaient les premiers à dire "on regarde
44:04 le nord, au sud ça se tient à peu près
44:06 tranquille". - C'est côté libanais. François Sressos,
44:08 vous vouliez poser une question ici ? - Qu'est-ce que nous, on peut faire ?
44:10 Et qu'est-ce qu'on peut attendre dans les jours à venir ?
44:12 - Alors,
44:14 qu'est-ce qu'on peut attendre dans les jours à venir ? La riposte israélienne
44:16 va être terrible. Traditionnellement,
44:18 les Israéliens
44:20 ne souhaitaient pas décapiter,
44:22 au sens neutre du terme,
44:24 les autorités du Hamas, pensant,
44:26 avec une certaine logique,
44:28 qu'il valait mieux un territoire gouverné par une
44:30 dictature, celle du Hamas, qu'un
44:32 territoire sans gouvernement.
44:34 Là, je crois que des vraies questions
44:36 se posent pour Netanyahou et l'ensemble
44:38 de la classe politique israélienne. Faut-il en finir
44:40 avec le Hamas ? Le problème,
44:42 c'est que du point de vue militaire,
44:44 l'ampleur des prises d'otages
44:46 sur le territoire limite considérablement
44:48 les moyens d'action
44:50 de TSAHAL et des services
44:52 de sécurité israéliens. Donc, ça va être
44:54 long, ça va être difficile,
44:56 ça va être malheureusement sanglant.
44:58 Il y a des acteurs qui peuvent jouer un rôle particulier ?
45:00 On pense évidemment aux Etats-Unis, par exemple ?
45:02 Écoutez, je ne vois pas très bien ce que peuvent faire les Etats-Unis aujourd'hui.
45:04 Non. Qu'est-ce qu'ils peuvent faire ? Je ne vois pas très bien.
45:06 Les Etats-Unis, ce qu'ils vont faire,
45:08 c'est aider,
45:10 notamment si besoin,
45:12 en termes d'assistance militaire d'urgence, même si les Israéliens
45:14 sont une grande puissance militaire,
45:16 aider Israël, le seul pays qui a peut-être
45:18 un petit peu, un petit peu
45:20 de la main politique
45:22 sur le sujet, c'est l'Arabie Saoudite
45:24 qui négocie en même temps, justement,
45:26 un éventuel accord avec les Etats-Unis
45:28 d'un côté, Israël de l'autre.
45:30 La réaction saoudienne a été extrêmement
45:32 mesurée. L'Arabie Saoudite ne veut pas
45:34 perdre la main sur le dossier palestinien,
45:36 mais veut en même temps faire la paix avec Israël.
45:38 L'Arabie Saoudite, peut-être un peu
45:40 le Qatar et l'Iran. Le Qatar, je ne sais pas,
45:42 peut-être une médiation qatarie
45:44 ou saoudienne, mais franchement,
45:46 en temps de guerre, on n'est pas dans la médiation.
45:48 Vous savez, moi j'aime bien faire les liens entre différentes crises,
45:50 différents conflits, c'est ce que je fais dans le livre d'ailleurs.
45:52 Vous savez, il y a un moment pour
45:54 la paix, il y a un moment pour la négociation
45:56 et il y a un moment pour la guerre. Et là, je crois qu'on n'est pas
45:58 du tout, on n'est pas du tout,
46:00 aller appeler à la désescalade ne sert aujourd'hui
46:02 strictement à rien. Est-ce qu'il y a eu un phénomène déclencheur ?
46:04 Alors, on a vu que c'était le 50e
46:06 anniversaire de la guerre du Kipour, mais indépendamment
46:08 de la symbolique, est-ce qu'il y a eu un moment
46:10 un phénomène qui fait que c'est plus
46:12 maintenant qu'il y a un an,
46:14 six mois ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
46:16 C'est très difficile à dire. Alors, il y a une théorie,
46:18 une idée, qui consiste à dire, au fond,
46:20 s'il y a un pays qui veut éviter le rapprochement
46:22 entre l'Arabie Saoudite et Israël,
46:24 c'est bien l'Iran. J'allais dire
46:26 que le Hamas, de toute façon, n'a pas intérêt
46:28 à cette normalisation. Pas plus
46:30 que le Hezbollah au nord,
46:32 au sud de Liban. Mais,
46:34 de là à dire que c'est l'Iran qui a
46:36 poussé et vraiment
46:38 incité le Hamas
46:40 à passer à l'action à ce moment,
46:42 c'est un pas
46:44 que je ne frangis pas encore. On n'a pas
46:46 assez d'éléments pour le dire. Alors, ce qui est
46:48 fascinant, malgré tout, dans tout ça, c'est que
46:50 on n'en entendait plus parler du Proche-Orient.
46:52 Dans vos titres, d'ailleurs, c'est ce qu'on perçoit.
46:54 On parle de la Chine,
46:56 on parle des Etats-Unis. Je parle de l'Iran et de la
46:58 Turquie aussi, quand même. Oui, un petit peu. Non, mais bien sûr,
47:00 effectivement, un petit peu. Mais on ne parle plus de cette situation-là.
47:02 On a l'impression que
47:04 c'était mis de côté. On n'en parlait plus,
47:06 mais il y avait des enjeux plus grands.
47:08 Vous savez, Jake Sullivan, le conseiller de la sécurité de
47:10 Joe Biden, disait pas plus tard que la semaine
47:12 dernière que le Moyen-Orient
47:14 n'a pas été aussi stable que
47:16 depuis plusieurs années.
47:18 Alors, moi, j'ai une formule que j'utilise
47:20 depuis très longtemps, qui consiste à dire que
47:22 chaque président américain, en arrivant en fonction,
47:24 devrait avoir dans son bureau une plaque,
47:26 une pancarte qui dit
47:28 "Si tu ne t'intéresses pas au Moyen-Orient,
47:30 le Moyen-Orient s'intéressera à toi."
47:32 Le Moyen-Orient a cette... Malheureusement,
47:34 je dis ça de manière un peu cynique, cette mauvaise habitude
47:36 de se rappeler à notre mauvais souvenir
47:38 au moment où, parfois,
47:40 on s'y attend le moins. - Sauf qu'on sait très bien qu'aujourd'hui,
47:42 les Etats-Unis sont
47:44 obnubilés par une seule cible, c'est la Chine.
47:46 - Oui, bien sûr. - Et ça, vous en parlez très très bien dans votre livre.
47:48 La guerre des mondes. - Oui, bien sûr, mais
47:50 les Etats-Unis sont... - C'est à commencer.
47:52 - Les Etats-Unis sont obligés, comme on dit là-bas,
47:54 de marcher en mangeant du fulgum. Qu'est-ce que ça veut dire ?
47:56 Ça veut dire qu'ils ne peuvent pas se permettre d'être entièrement
47:58 concentrés sur une seule région du monde.
48:00 Parce qu'ils sont les Etats-Unis.
48:02 C'est aussi vrai pour la France.
48:04 C'est pas parce que nous, on est obnubilés
48:06 à juste titre par l'Ukraine et la Russie aujourd'hui
48:08 qu'on ne s'intéressera pas au Moyen-Orient.
48:10 - Vous posez une question
48:12 cruciale dans cet ouvrage,
48:14 une question que j'ai beaucoup aimée
48:16 et qu'on entend très très régulièrement, c'est
48:18 est-ce qu'on est en train d'assister au déclin
48:20 de l'Occident ? Alors oui ou non ?
48:22 Est-ce qu'on en est là ? Et je ferai réagir Sophie Binet
48:24 sur ça après. - Oui, mais je fais partie des gens
48:26 qui sont plutôt plus optimistes
48:28 que ne le sont nombre de nos concitoyens.
48:30 - Et vous m'avez surpris en fait en cela.
48:32 - Oui, écoutez, je pense qu'en fait,
48:34 on va rentrer dans quelque chose qui est
48:36 autant une épreuve de faiblesse qu'une épreuve de force.
48:38 Je m'explique. Tous les grands acteurs
48:40 ont des points de faiblesse, démographique,
48:42 économique, culturel et autres.
48:44 A tout prendre, il me semble que sur la longue durée,
48:46 les faiblesses de la Russie et de la Chine
48:48 sont encore plus importantes que les
48:50 faiblesses occidentales. Oui,
48:52 nous sommes dans un monde dans lequel de grands acteurs
48:54 émergent. Il faut se féliciter,
48:56 la dictature chinoise est épouvantable, mais elle a tiré
48:58 les centaines de millions de personnes de la pauvreté.
49:00 Et il faut s'en féliciter. Il faut se
49:02 féliciter aussi qu'émergent
49:04 sur la scène des grands pays, des grands acteurs
49:06 qui parfois jouent un rôle positif.
49:08 Je peux même dire ça
49:10 de la Chine qui a réussi, semble-t-il,
49:12 une médiation pour que l'Arabie saoudite
49:14 et l'Iran reprennent
49:16 leurs relations diplomatiques. Mais c'est plus
49:18 le reste du monde qui émerge que l'Occident
49:20 qui décline. Ce n'est pas forcément un jeu à sommes
49:22 nulles et encore une fois, sur la longue durée,
49:24 il me semble que les atouts
49:26 technologiques, culturels, financiers
49:28 et d'influence de l'Occident
49:30 ne le rendent pas
49:32 trop mal placé pour gagner
49:34 cette longue épreuve de force que j'appelle la
49:36 "guerre des mondes". Vous partagez ce...
49:38 Non mais j'ai annoncé... Il y a quand même un aspect de votre fil qui est important
49:40 qui est cette lutte... Un seul ?
49:42 Non, c'est cette lutte
49:44 entre les démocraties, en fait, les régimes
49:46 démocratiques et les empires
49:48 qui essayent de trouver un peu une revanche
49:50 et qui sont tous quand même des régimes autoritaires.
49:52 Oui, je parle de la revanche des quatre
49:54 empires, la Chine, la Russie,
49:56 l'Iran et la Turquie,
49:58 mais attention, il ne faut surtout pas
50:00 penser qu'on est dans une guerre froide
50:02 qui va être un bloc autoritaire contre un bloc
50:04 démocratique. C'est pour ça que je dis que ce sont des
50:06 familles, ce sont des galaxies, mais évidemment
50:08 quand on regarde même chez nous en Europe,
50:10 quand on voit la Hongrie par exemple, on ne peut pas exactement
50:12 dire qu'on est partout des modèles
50:14 de démocratie. De même,
50:16 dans ce qu'on appelle cette nébuleuse
50:18 que j'aime pas trop ce terme de "sud global"
50:20 parce que c'est le mariage de la carpe
50:22 anti-occidentale avec le lapin
50:24 proche de l'Occident, donc ça veut pas dire grand chose.
50:26 Puis avec des niveaux de développement économique
50:28 extrêmement diversifiés.
50:30 Il y a aussi des pays quasi-démocratiques.
50:32 Alors on parle souvent de l'Inde, mais malheureusement
50:34 l'Inde est en train de devenir un petit peu moins
50:36 démocratique. Donc c'est pas
50:38 deux blocs, c'est pas les démocraties
50:40 contre les autoritaires, mais il se trouve que les
50:42 quatre empires sont effectivement des régimes autoritaires.
50:44 Alors je voudrais vous faire réagir, donc Sophie
50:46 Binet, est-ce que c'est des choses que vous
50:48 observez très près ? J'imagine que
50:50 voilà, quand on est à la tête de la CGT, on vit
50:52 en vase clos, on ne s'intéresse pas
50:54 qu'à ce qui se passe en France.
50:56 Cette notion de déclin de l'Occident,
50:58 vous, est-ce que vous partagez effectivement les propos
51:00 aujourd'hui de Bruno Tertret ?
51:02 Ce qui nous inquiète, c'est surtout l'affaiblissement des démocraties
51:04 au plan mondial. Affaiblissement
51:06 d'abord parce qu'elles ne sont pas exemplaires sur leur
51:08 propre sol, et donc quand la France
51:10 par exemple se fait régulièrement rappeler à l'ordre par
51:12 l'ONU pour non-respect des droits humains, bah forcément
51:14 ça abîme notre image à l'international et notre
51:16 crédibilité, et affaiblissement. Enfin, l'ONU
51:18 non-respect des droits humains, vous pouvez voir comment c'est composé,
51:20 de temps en temps il y a des choses qui me semblent
51:22 imparables. Je ne le maîtrise pas parfaitement, mais
51:24 on a un peu envie de rigoler quand même. Oui, d'accord, mais en attendant
51:26 c'était basé sur des éléments très précis,
51:28 enfin l'ONU, elle ne prend pas des décisions quand même
51:30 sans que ça soit basé et étayé sur des
51:32 frais précis, et en attendant
51:34 c'est sur la question des stratégies de
51:36 maintien de l'ordre, de la répression
51:38 en direction des organisations syndicales,
51:40 des organisations des droits humains, etc.
51:42 Et donc le problème c'est que ça casse l'exemplarité
51:44 de la France. Le deuxième problème c'est que
51:46 de plus en plus la politique internationale
51:48 de nos démocraties
51:50 elle est soumise à nos intérêts
51:52 commerciaux et nos intérêts en matière d'affaires,
51:54 et donc ça, ça affaiblit aussi notre crédibilité
51:56 au plan international. Et donc je reviens
51:58 sur ce que vous disiez tout à l'heure, on avait la parole
52:00 de l'observateur, mais qui moi m'a glacée quand
52:02 vous dites sur ce qui se passe
52:04 en Israël, c'est le temps de la guerre,
52:06 c'est pas le temps de la paix. C'est terrifiant
52:08 parce que là, s'il n'y a pas un cessez-le-feu
52:10 immédiat, on va vers un carnage.
52:12 Et donc il faut que nos autorités,
52:14 la France, mettent toute son énergie
52:16 pour obtenir un cessez-le-feu immédiat.
52:18 Ce qui, enfin, voilà,
52:20 il faut faire du volontarisme sur cette question-là.
52:22 - Du coup, on répondit sur ça et je vais vous poser la question à tous les deux.
52:24 - Je suis d'accord avec vous, madame, mais
52:26 malheureusement, je crois que la parole de la France,
52:28 pas plus que celle de la Grande-Bretagne ou de l'Allemagne, n'aura
52:30 le moindre effet sur le conflit.
52:32 Je dirais même celle des Etats-Unis.
52:34 Si les Etats-Unis, si on était sous Barack Obama
52:36 par exemple, et que Barack Obama dit "bon,
52:38 j'appelle à des escalades", je pense qu'elle n'aurait
52:40 strictement aucun impact.
52:42 - Donc ça veut dire qu'un nouveau conflit mondial est tout à fait possible ?
52:44 - Ah non, je ne parle pas de conflit mondial.
52:46 Ça, c'est autre chose.
52:48 Je vous rejoins en revanche sur l'exemplarité de la démocratie.
52:50 Je ne suis pas sûr de
52:52 vous suivre quand on dit "l'ONU condamne le
52:54 dit ceci". Attention, souvent, quand la
52:56 France est condamnée ou stigmatisée,
52:58 ce n'est pas l'ONU, c'est le
53:00 ou la porte-parole d'une institution
53:02 particulière de l'ONU qui n'est pas mandatée
53:04 nécessairement pour représenter... - On a été condamnés par l'ONU,
53:06 formellement. Vous pourrez les retrouver
53:08 en fact-checking. - Nous n'avons jamais été
53:10 condamnés par... - De la commission des droits de l'homme de l'ONU.
53:12 - Oui, alors la commission des droits de l'homme de l'ONU
53:14 est une instance un petit peu particulière...
53:16 - Qui est composée comment ? - Qui est composée
53:18 avec des pays dont le...
53:20 qui ne sont pas exactement les plus
53:22 exemplaires en matière de droits de l'homme. Je pense à
53:24 l'Iran, l'Arabie Saoudite, ce type de pays.
53:26 - On n'en est pas à l'Iran. - Ça n'est pas ce que nous avons.
53:28 - On prête le flanc. Le problème, c'est qu'on prête le flanc.
53:30 Et qu'effectivement, il y a un intérêt tactique
53:32 pour faire ça. - Là où je vous rejoindrais,
53:34 c'est pour dire que si nous voulons
53:36 défendre les démocraties
53:38 et nos sociétés libérales
53:40 sans la défendre par les armes, nous devons
53:42 être exemplaires, et ça c'est vrai.
53:44 Et malheureusement, dans l'action internationale, moi mon constat
53:46 avec plus de 30 ans d'expérience, c'est
53:48 qu'on a quand même des compromis à faire
53:50 si on veut aussi défendre nos intérêts à long terme.
53:52 C'est complexe, mais je vous rejoins sur l'exemplarité.
53:54 - Merci beaucoup Bruno Tertrais.
53:56 Je rappelle le titre de votre livre qui vient de sortir,
53:58 "La guerre des mondes", aux éditions
54:00 de l'Observatoire. Et merci infiniment à vous aussi, Sophie Binet,
54:02 d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui
54:04 dans "Questions politiques". A la semaine prochaine.
54:06 [Musique]

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