Près de 60.000 femmes sont sur liste d'attente pour une reconstruction mammaire après un cancer du sein faute de chirurgiens plasticiens. Pour en parler, Isabelle Sarfati, chirurgienne plasticienne et cofondatrice de l'Institut du Sein.
Regardez L'invité de RTL du 04 octobre 2023 avec Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 04 octobre 2023 avec Amandine Bégot.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin
00:06 RTL il est 7h44, excellente journée à vous tous qui nous écoutez, à mon digne légo vous recevez donc ce matin le docteur Isabelle Sarfati
00:13 chirurgien plasticien, cofondatrice de l'institut du sein. Bonjour docteur et bienvenue sur RTL, le cancer du sein il faut le rappeler reste le cancer le
00:22 plus fréquent aujourd'hui chez les femmes, un peu plus de 60 000 nouveaux cas chaque année en France, on a tous ou presque dans notre entourage
00:28 une femme qui a connu un cancer du sein et parmi les victimes
00:32 20 000 subissent chaque année une ablation du sein, une mastectomie
00:37 mais trop peu ont accès à une reconstruction ma mère et d'après vos estimations il y aurait donc
00:42 70 000 femmes aujourd'hui sur liste d'attente c'est ça c'est énorme
00:45 alors il s'agit pas de réellement de liste d'attente il s'agit de
00:50 il y a uniquement 20% des femmes qui ont eu une mastectomie qui ont une reconstruction
00:57 on peut penser que dans les
00:59 80% autres tout le monde ne veut pas une reconstruction ça n'a rien d'une obligation c'est vraiment uniquement un choix un désir
01:07 mais il y en a au moins la moitié qui aimerait avoir une reconstruction
01:11 et qui n'y ont pas accès pour des tas de raisons. Pourquoi justement problème de moyens ?
01:16 Parce que le service public est débordé a été déstabilisé
01:21 par le covid, le manque de soignants et que la reconstruction ça passe après le cancer
01:28 Parce que des spécialistes en reconstruction ma mère il n'y en a pas partout et
01:34 il y a plein de gens qui sont très loin de
01:37 d'un centre expert
01:40 et parce que en privé compte tenu du fait que la sécurité sociale paye environ 200 euros pour une reconstruction ma mère
01:47 et ça comprend l'intervention et les trois semaines qui suivent
01:50 il y a des dépassements d'honoraires et ces dépassements d'honoraires ne sont pas à la portée de tout le monde et le plus souvent les mutuelles
01:57 ne remboursent pas les dépassements d'honoraires.
01:59 C'est un manque de moyens, une nouvelle illustration du manque de personnel soignant qu'on connaît d'ailleurs dans plein de
02:05 spécialités à l'hôpital
02:08 c'est profondément injuste puisque effectivement si elles ont les moyens elles peuvent aller en clinique privée
02:14 c'est 1500-2000 euros vous me disiez pour la reconstruction d'un sein ? Oui à peu près.
02:19 Et c'est aussi
02:21 dramatique sur le plan humain
02:26 c'est un peu je disais la double peine j'y vais pas trop fort quand je dis ça.
02:29 Non c'est effectivement la double peine c'est à dire que
02:32 au moment de la mastectomie il est souvent dit aux femmes mais vous inquiétez pas vous aurez une reconstruction derrière et les cancérologues
02:40 c'est important pour eux ils annoncent quelque chose qui est quand même triste et ils essayent de donner
02:45 de l'espoir à la personne en lui disant on va faire une mastectomie mais vous pourrez être reconstruite. D'abord
02:51 notre chiffre de reconstruction immédiate en France est très faible c'est à dire on est à peu près à 20% de reconstruction immédiate.
02:58 C'est à dire on enlève le sein et on reconstruit immédiatement dans la même opération. Ça pourrait être la solution la plus
03:03 simple la plus pratique. C'est aussi la solution la plus économique.
03:07 Ça n'est pas toujours possible en fonction des traitements qui suivent mais c'est le plus souvent possible et c'est pas très souvent fait. Mais pourquoi ?
03:15 Manque de formation des chirurgiens qui font les mastectomies
03:22 Manque de temps
03:24 De volonté aussi ?
03:26 Je crois pas qu'il y ait un manque de volonté de la part du
03:29 personnel médicaux. Je pense que pour quelqu'un qui annonce un retrait de sein le fait
03:34 d'annoncer qu'il en remet un autre en même temps c'est mieux pour lui aussi.
03:39 Mais il faut une formation de plasticien pour faire une reconstruction mammaire et toutes les personnes qui font des mastectomies
03:45 n'ont pas une double formation chirurgie plastique et
03:50 cancéreux. Je pense aux auditeurs qui nous écoutent et qui n'ont pas forcément été confrontés à ce problème. Ils doivent se dire "oui mais
03:56 l'essentiel c'est de guérir en fait". C'est vrai. On est d'accord. C'est indéniable et le cancer du sein est un cancer
04:02 dont je souligne l'importance du dépistage.
04:05 Parce que si on dépiste ce cancer d'abord on sauve des vies et on sauve des seins parce que 70% des cancers du sein
04:13 actuellement conservent leur sein quand ils sont dépistés tôt.
04:17 Et ensuite
04:20 l'essentiel c'est quand même de sauver la vie des gens et ensuite on sauve les apparences.
04:26 Sauf que c'est important les apparences aussi.
04:28 C'est très important en tout cas pour certaines.
04:32 C'est très important il y a quelque chose de l'identité féminine, il y a quelque chose de
04:39 l'incapacité. Je veux dire les femmes qui ont eu une mastectomie et qui le supportent mal, ce qui n'est pas vrai de tout le monde,
04:46 elles zappent leur image dans le miroir. C'est à dire que dans la salle de bain elles se débrouillent pour ne pas croiser
04:52 l'image de leur corps. Donc elles s'autocensurent,
04:57 elles ont du mal à se promener nue. - C'est un petit bout d'aile qui est mort.
05:01 - Oui et puis surtout ça rappelle la maladie, c'est la morsure de
05:06 la morsure de la mort. C'est à dire que
05:09 exposer quelque chose qui
05:13 a des stigmates de cancer, c'est rappeler à tout le monde cette histoire. - Et c'est pour ça que vous proposez donc au sein de l'Institut
05:20 du sein des
05:22 visioconsultations qui sont donc accessibles à toutes les patientes qui se trouveraient dans toutes les régions, même celles où des consultations sont compliquées, justement pour les informer
05:30 sur les possibilités qui s'offrent à elles et essayer de trouver des solutions. C'est mis en place pendant tout le mois d'octobre rose ?
05:37 - Oui on propose une visioconsultation à 65 euros, ça veut dire qu'il y a 10 euros de reste à charge.
05:43 Le reste est payé par la Sécurité Sociale et
05:47 ce qu'on pense c'est que pas mal de gens n'arrivent pas à penser leur reconstruction.
05:52 Parce que c'est compliqué, il y a plein de techniques différentes et ça dépend
05:56 de l'anatomie, ça dépend de l'état local et je pense qu'une fois que quelqu'un a eu une consultation qui lui explique
06:03 exactement, dans son cas précisément,
06:07 quelles sont les techniques possibles ? Est-ce que ça nécessiterait une ou deux interventions ? En quoi ça consiste ?
06:13 Ensuite elle peut y penser et ensuite elle peut trouver un spécialiste qui est près de chez elle ou
06:19 voilà.
06:20 - Docteur Safati, le cancer du sein, je le disais, reste aujourd'hui
06:23 le cancer le plus fréquent chez les femmes. Première cause de décès aussi par cancer chez les femmes dans notre pays, c'est 12 000 décès chaque année.
06:29 Je voulais juste vous poser deux trois petites questions avec, ultra pratique, on en guérit plus, on est d'accord aujourd'hui ?
06:37 Qu'il y a 10, 15, 20 ans ?
06:39 - Oui, c'est à dire qu'actuellement c'est un cancer qu'on dépiste parce que c'est un cancer qu'on sait guérir à environ
06:45 80, 85 %. Ça c'est pas intéressant de dépister un cancer qu'on sait pas guérir.
06:50 Donc là le dépistage est très important parce que on va sauver des vies. - Justement à quel âge on commence le dépistage ?
06:56 - Alors les chiffres, les
07:00 synchronisations nationales, ça commence à 50 ans et ça s'arrête à 60 ans. - Sauf qu'on entend plein de femmes qui ont 30 ans et
07:07 à qui on découvre des cancers du sein ? - Bien sûr.
07:10 En fait le dépistage, il doit être et il va être de plus en plus adapté au risque individuel.
07:18 En tenant en compte des antécédents
07:21 génétiques des gens, c'est à dire des cancers dans la famille, etc. Mais aussi avec des analyses
07:28 sanguines de génotypes, on peut dire à quelqu'un "voilà, vous, vous avez un risque important pour ce cancer et ce cancer,
07:36 par contre vous avez un risque très peu important pour un autre et donc votre dépistage,
07:40 il va être plus resserré et commencer plus tôt". - La mammographie, donc la règle c'est à partir de 50 ans,
07:47 mais une consultation chez un professionnel tous les ans, ça ça vaut
07:51 dès l'âge de 20 ans pour se faire palper les seins ? - C'est pas le mode de dépistage le plus efficace.
07:58 La palpation du sein ou l'autopalpation du sein, d'abord c'est assez stressant
08:03 pour les gens d'essayer de trouver des petites boules parce que le sein c'est granuleux donc on trouve toujours des petites boules.
08:08 C'est quand même l'échographie et la mammographie qui dépiste au mieux. Quand on trouve une petite boule,
08:14 effectivement il faut faire des examens, mais le dépistage réellement,
08:19 c'est mammographie, échographie. - Et un cancer du sein, ça fait forcément mal ou pas forcément ? - Pas du tout.
08:24 C'est une petite boule, si elle est au centre du sein on la sent même pas, c'est une maladie virtuelle. En fait ces femmes ne sont
08:32 jamais malades de leur cancer, elles sont assez malades de nos traitements. J'en suis désolée mais ça sauve
08:38 in fine. Donc elles arrivent, elles rentrent pour faire une mammographie,
08:42 elles ont rien du tout, on leur annonce qu'elles ont une maladie qui pourrait
08:48 être létale et à cause de cette annonce, il va falloir les traiter,
08:53 mais on va le plus souvent les guérir. - Un grand merci docteur, vous vouliez nous parler aussi de l'opération
08:57 solidarité perruque, il y a un site internet que vous avez mis en place, solidaritéperruque.fr, où les femmes peuvent donner leur perruque une fois qu'elles sont
09:05 guéries à d'autres femmes qui elles en souhaiteraient. C'est 100% gratuit
09:10 et c'est un geste de solidarité entre femmes. On mettra le site internet. - Alors c'est un sujet qui me tient beaucoup à coeur.
09:18 C'est un site où les femmes qui ont eu un cancer et qui ont une chimiothérapie,
09:22 qui n'ont plus besoin de leur perruque, peuvent donner leur perruque à quelqu'un qui en a besoin,
09:27 parce qu'en fait on en a besoin six mois et ça coûte relativement cher une belle perruque. C'est un beau geste. - 2000 euros en moyenne.
09:33 Merci beaucoup docteur. - Merci à vous docteur Sarfati.
09:36 vous reste.
09:36 Merci à tous !