• l’année dernière
Chaque année, 10 millions de poulets sont consommés dans notre pays.
Le poulet est partout (cantines scolaires, restaurants, supermarchés…) et sous toutes les formes. Mais la star c’est le nugget, un petit morceau de poulet pané popularisé par les fast-foods.
Moins chère que le bœuf, plus saine et moins grasse que le porc, la viande de poulet a traversé sans dommage les crises sanitaires ou les scandales alimentaires de ces dernières années.

Mais comment sont fabriqués les nuggets ? Sont-ils inoffensifs pour la santé de nos enfants ? Quelle est la face cachée du poulet que nous consommons ?

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Transcription
00:00 Dans la petite école primaire d'Orbigny, ce midi, on se lèche d'avance les babines.
00:10 Au menu de la cantine, un plat dont les enfants raffolent.
00:15 - Les enfants, vous êtes contents de manger des nougats ?
00:17 - Oui.
00:17 - Oui ?
00:17 - Oui.
00:17 - Oui.
00:17 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:17 Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:17 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:17 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:17 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:17 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:17 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:17 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:33 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:33 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:33 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:33 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:33 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:33 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:33 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:33 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:33 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:33 - C'est le côté croustillant que j'aime bien.
00:33 - Et puis le poulet qui est tendre, j'aime bien.
00:33 - C'est fait avec de la chape lure et du poulet. Du poulet et du truc doré.
00:47 - Tu le coupes, tu le mets en forme et après tu mets un truc et après tu mets les miettes.
00:47 - A la cantine, au restaurant, à la maison, ce petit beignet à base de poulet a envahi nos assiettes depuis qu'il a débarqué des Etats-Unis au début des années 80.
00:59 Mais comment sont fabriquées les nuggets ? Quelle est la recette ?
01:09 Pour le savoir, nous avons contacté un par un les fabricants de ce produit en France.
01:15 Et apparemment, c'est aussi compliqué que d'obtenir un secret défense.
01:21 - On aimerait bien pouvoir tourner une séquence sur les nuggets. Est-ce que vous pensez que ce serait possible ?
01:26 - Encore moins sur les nuggets.
01:28 - De toute façon, en ce moment, Duke, c'est la case totale sur tout ce qui est médias télévisés.
01:36 - Ah ouais, parce que...
01:37 - C'est un peu compliqué, c'est même très compliqué. Donc voilà pourquoi je ne vous ai pas recontacté, mais je ne pense pas que ça puisse se faire en l'état.
01:47 - Vous ouvrez jamais vos portes ?
01:49 - Ah non, jamais. Jamais. C'est ce qu'on me demande d'appliquer en termes de politique de communication là-dessus. Voilà.
01:55 - Il n'y a même pas moyen d'avoir juste une interview de quelqu'un ?
01:58 - Non. Non.
02:01 - Désolée, j'espère que vous arriverez à trouver une porte qui s'ouvrira.
02:06 Une seule usine a fini par nous ouvrir ses portes après 3 mois de négociations.
02:14 Celle du plus gros fabricant de nuggets en France, l'américain Cargill, fournisseur de McDonald's.
02:24 C'est dans cette forteresse hautement sécurisée, à quelques kilomètres d'Orléans, que nous sommes reçus.
02:32 Une visite sous bonne escorte. 3 conseillers en communication nous accompagnent.
02:39 A la moindre question au directeur de l'usine, ils ne sont jamais à moins d'un mètre. Très attentifs.
02:48 - McDonald's a été effectivement le premier à introduire le nugget sur le...
02:54 Et nous allons découvrir ce qui fait la fierté du fabricant derrière cette porte.
02:59 - Nous avons ici... Vous voyez, c'est des filets de poulet. Nous travaillons avec de la viande fraîche.
03:05 Vraiment des blancs de poulet de top qualité qui rentrent uniquement dans la recette du nugget.
03:10 Donc ici, l'opérateur qui est là contrôle l'absence de corps étrangers.
03:15 Donc par exemple, s'il y a un petit os, il va le voir. - Il va vérifier tout le bac ?
03:21 - Non, c'est un échantillonnage que l'on effectue sur chacun des lots qui arrivent chez nous.
03:25 La viande est ensuite hachée et marinée avec de l'eau, du sel et des épices.
03:34 - Dans les épices qui sont utilisées, vous retrouverez du poivre, vous retrouverez un peu de céleri aussi également.
03:41 Et d'autres végétaux, je vais pas rentrer dans les détails, mais qui font partie de la recette du nugget de Zeemeldonat.
03:48 Une recette secrète et apparemment 100% naturelle.
03:55 Mais quand on regarde de plus près les cartons d'envalage, on remarque aussi ces agents levant, des levures chimiques.
04:08 Dans les rayons des supermarchés, il suffirait donc de lire les étiquettes des emballages pour savoir ce que contiennent nos nuggets.
04:16 Mais difficile de s'y retrouver.
04:19 Viande traitée en salaison, saumurée ou encore séparée mécaniquement.
04:26 Pour y voir plus clair, nous allons faire analyser plusieurs boîtes choisies dans différentes gammes de prix.
04:37 A Montpellier, ce laboratoire est spécialisé dans l'étude des produits alimentaires.
04:44 Le directeur s'occupe de nos échantillons.
04:50 Il commence par analyser le contenu d'un nugget McDonald.
04:57 L'échantillon numéro 9, quand je vois ce produit tel qu'il est là, et que je me mets sous ma casquette de consommateur, je me dis qu'on va se régaler.
05:14 Parce qu'on voit effectivement de belles grappes de fibres musculaires et ces ensembles de marquants de viande comme ça, c'est typiquement ça qui va être source de moelleux, de jutosité et de texture agréable en bouche.
05:31 Sur l'échantillon de la marque Père Dodu, il attire notre attention sur l'emballage.
05:37 Les nuggets y sont vendus comme étant au filet de poulet.
05:42 Mais entre la photo et la réalité, il y a une différence.
05:46 Dès à présent, il y a quelque chose qui peut attirer notre attention sur cet emballage.
05:52 C'est que quand on voit le visuel produit ici avec une coupe à cœur du nugget, on voit très clairement des strates avec les fibres musculaires comme si on était dans un filet entier.
06:09 Or, si on prend l'intérieur du nugget, si on prend la coupe à cœur, on se rend compte qu'on a un produit qui n'est pas du tout du même niveau de structure à l'intérieur.
06:24 Et le résultat des analyses de ce produit va confirmer cette première impression.
06:31 Ici, il y a un morceau de viande à proprement parler, mais on voit bien que de manière attenante, il y a quelque chose qui relève beaucoup plus d'une émulsion.
06:41 Puisque ces trous là correspondent à des bulles d'air ou d'eau ou de gras.
06:47 Et en tout cas, certainement pas à la structure naturelle d'un filet.
06:52 Donc c'est clairement une viande qui est reconstituée.
06:58 Dans la gamme bon marché, nous avons choisi ces nuggets de la marque Auchan.
07:02 L'étiquette annonce qu'ils sont constitués de viande de poulet séparée mécaniquement.
07:09 Or, l'examen révèle ici en bleu une matière qui n'est pas de la viande.
07:15 Là, on a l'apparition de fragments d'os et de fragments de tissus cartilagineux.
07:22 Donc on a un fragment d'os qui est là, donc c'est un fragment même s'il est en plusieurs morceaux.
07:27 On a aussi un autre fragment d'os ici, là.
07:31 Ici, on a un très gros fragment de cartilage qui doit bien faire presque un millimètre de long.
07:42 On le sent sous la dent à cette taille là, ici, là.
07:46 Donc il y en a quand même beaucoup et un petit peu partout.
07:51 C'est quand même assez caractéristique d'un produit de viande séparée mécaniquement.
07:57 Des os, du cartilage dans les nuggets, comment est-ce possible ?
08:04 Nous avons voulu en savoir plus sur le procédé de séparation mécanique de la viande.
08:12 Mais aucun professionnel n'a accepté de nous le montrer, ni en France, ni dans le reste de l'Europe.
08:21 Visiblement, c'est une pratique dont les acteurs ne souhaitent pas faire la promotion.
08:27 En revanche, en Belgique, un industriel a accepté de nous recevoir.
08:38 L'entreprise Tecker.
08:41 Sa spécialité n'est pas de séparer la viande mécaniquement, mais il en fournit la matière première.
08:50 Depuis 15 ans, Houssein Tecker découpe de la volaille.
08:54 Ses ouvriers prélèvent les filets, les cuisses et les ailes, toutes les parties nobles du poulet.
09:02 Et tout ce qui reste n'est pas perdu.
09:08 Les carcasses et les os sont destinés à fabriquer la fameuse VSM, la viande séparée mécaniquement.
09:17 - Voilà.
09:19 Donc ce sont tous les carcasses qui vont partir pour la VSM, ça.
09:24 Le camion est chargé et ça part chez le client qui utilise ça.
09:28 Et là, il y a encore beaucoup de viande à récupérer.
09:31 Mais c'est l'os qui va être broyé et tout.
09:34 Et à partir de cette viande-là, de la VSM, ils produisent tout ce qui est dans les snacks, les hamburgers, les fricadelles, et tout ce qui est ce produit-là.
09:45 De nougat et entre autres.
09:49 Tout ces restes, l'industriel va donc les revendre à d'autres usines.
09:55 Pour 50 centimes le kilo, c'est 8 fois moins cher que ses filets.
10:00 - Il n'y a pas de déchets dans le poulet. Rien n'est jeté.
10:05 Tout a une valeur dans le poulet. C'est pour ça que ça a du succès.
10:10 Cette viande séparée mécaniquement, nous en avons retrouvé une trace sur Internet.
10:20 Sur le site d'un fabricant de machines à désausser.
10:24 Les carcasses sont broyées pour en extraire ce qu'il reste de viande.
10:31 Cette pâte liquide va finir en blocs destinés à des usines de transformation.
10:39 Comme ici en Allemagne.
10:46 Cette entreprise utilise ces blocs rose bonbons surgelés pour toutes sortes de produits panés.
10:54 Escalope, cordon bleu et aussi des nuggets.
11:03 - Ça c'est la zone de préparation. La viande congelée est livrée ici.
11:13 Il y a différentes qualités. Elle peut être claire ou foncée avec plus ou moins de calcium.
11:22 Pour celle-ci la qualité est bonne. Il y a peu de calcium.
11:29 - Le calcium, ça veut dire qu'il y a peu d'os.
11:36 Ruven Weber est le responsable des opérations.
11:42 Il va nous montrer comment retransformer ces blocs en viande de poulet.
11:48 Cette machine les réduit d'abord en miettes.
11:55 Une fois hachée, la viande tombe ici dans cette sorte d'escargot.
12:00 Puis elle remonte là-haut et tombe dans ce mixeur.
12:05 Une pluie de confettis se déverse dans ce grand mélangeur.
12:10 Une pâte ramollie qui a perdu beaucoup de goût.
12:16 Pour retrouver l'aspect et la saveur du poulet,
12:21 l'industrielle doit ajouter du sel et d'autres additifs.
12:26 - Ces trois bidons sont des arômes.
12:31 Il y a de l'arôme de poulet, du bouillon déshydraté.
12:36 C'est aussi pour donner du goût, mais on l'utilise moins souvent.
12:42 Et ça, c'est du calcium. C'est pour blanchir le produit.
12:49 Un vrai petit laboratoire d'apprentis chimistes.
12:53 Et ce n'est pas fini.
12:57 - C'est quoi, ça ?
13:00 - Ça, c'est du phosphate et du sel.
13:04 Le phosphate, c'est pour que le produit puisse garder plus d'eau.
13:08 Et ça donne du liant.
13:11 Et dans cette machine, il y a un tuyau qui verse l'eau pour la mélanger avec le reste.
13:17 Beaucoup d'eau est ajoutée à la mixture.
13:20 C'est l'autre astuce de cette fabrication industrielle.
13:24 - Par exemple, pour 1 500 kg de viande, il y a maximum un quart d'eau.
13:32 - Incorporée de l'eau et des additifs,
13:36 c'est ainsi que sont fabriquées la plupart des produits transformés à base de poulet,
13:40 vendus dans les étalages.
13:44 C'est la même chose que les industriels appellent une saumure ou encore une salaison.
13:49 Ils sont tenus de l'indiquer sur les boîtes,
13:53 avec tous les ingrédients qui la composent.
13:56 Un vrai cocktail d'additifs.
14:00 - Donc là, voilà, on va mettre le sel.
14:04 Ces mixtures, Luc Lescaux les connaît bien.
14:09 Il travaille comme conseiller culinaire auprès des industriels pour élaborer leurs recettes.
14:14 - On va mettre le glucose pour la viande.
14:19 Ça va supprimer quelquefois un tout petit peu d'accreté
14:22 qu'il pourrait y avoir au niveau de certains ingrédients périphériques.
14:25 Chaque additif a une fonction bien précise.
14:29 - On va rajouter les polyphosphates qui vont nous permettre de faire de la rétention d'eau
14:35 et donc, après cuisson, un volume de viande qui a peu perdu,
14:39 voire pas perdu de poids lors de sa phase de cuisson
14:42 et qui va nous permettre d'avoir beaucoup plus de moelleux.
14:45 Et pour donner de la tenue au produit, ajoutez un peu de caragénane,
14:49 issu d'algues rouges, de xanthane, un additif chimique et de la gélatine.
14:55 Versez la saumure sur les filets, puis malaxez.
14:59 - Et on va regarder ce que ça donne.
15:04 20 minutes plus tard, la viande a absorbé tout le liquide.
15:08 - Il n'y a plus de liquide.
15:10 En 20 minutes, la viande a absorbé les différents ingrédients et additifs qu'on lui a donnés.
15:15 Et donc, cette opération que nous avons faite avec un appareil, on va dire artisanal,
15:21 entre guillemets, est encore plus optimisée avec un outil industriel.
15:26 Cette préparation a donc permis de ramollir la viande,
15:32 de donner du goût, mais surtout de lui rajouter du poids.
15:35 D'après notre cuisinier, c'est ce que demandent les enseignes de la grande distribution,
15:40 qui sont les donneurs d'ordre.
15:42 - Les donneurs d'ordre aux industriels peuvent être amenés à leur dire
15:46 "On souhaiterait avoir un produit plus économique, qu'est-ce que vous pouvez nous apporter en plus ?"
15:52 Et c'est effectivement sur le taux d'humidité qu'on va pouvoir jouer pour avoir un produit plus économique.
15:57 - Et le taux d'humidité, t'as eu jusqu'à combien ?
16:01 - Le taux d'humidité, moi, ce qui me paraît acceptable, c'est 20, mais voilà,
16:05 vous avez des industriels qui sont peut-être capables d'arriver à 30.
16:10 30% de liquide ajouté dans la viande, c'est autant de bénéfice en plus.
16:18 Dans cette course au moindre coût, les industriels ne sont jamais à court d'idées.
16:23 Luc Lescaux nous révèle un autre artifice, remplacer la viande par de la farine.
16:31 - Voilà nos protéines, protéines de soja, flocons de pois cassés,
16:36 finement hachés pour réaliser, par exemple, des nuggets en premier prix.
16:40 La farine est mixée avec de l'eau, des additifs et la viande.
16:46 Le tout passe au four.
16:49 Et une fois cuit, l'illusion est parfaite.
16:55 - C'est que le produit n'a rendu ni eau, ni graisse.
17:00 On a, regardez, une texture de chair qui est blanche.
17:04 On retrouve la texture du poulet.
17:07 Donc ça veut dire que cette base-là, une fois travaillée et enrobée, est parfaitement stable.
17:12 - Alors qu'il n'y a que 50% de viande.
17:15 - Alors qu'on n'a que 50% de viande, absolument.
17:24 A Montpellier, dans notre laboratoire, des traces de farine ont été décelées.
17:29 Et même en bonne quantité sur l'un des échantillons.
17:33 - On en voit, par exemple, ici, là, où on voit très bien les structures végétales avec à l'intérieur les grains d'amidon.
17:41 Mais on voit qu'il y a vraiment une proportion significative qui pourrait facilement être supérieure à 10%.
17:51 Donc on n'est pas sur une petite contamination, on est dans une quantité significative dans le produit.
17:56 Beaucoup de farine, mais sur le paquet, rien n'est indiqué.
18:03 Le scientifique rappelle qu'il s'agit d'une fraude.
18:07 - C'est trompeur pour le consommateur.
18:09 Donc c'est un non-respect de la réglementation sur les tic-tacs.
18:13 Et donc c'est une non-conformité.
18:17 L'eau mélangée à des additifs, de la farine, mais aussi des os, du cartilage.
18:23 Cette course à la rentabilité ne s'arrête pas là.
18:27 Elle touche aussi le poulet, qui vient parfois de très loin pour être moins cher.
18:34 Sur les paquets que nous avons achetés, difficile de connaître l'origine géographique de la viande.
18:45 Très peu portent la mention volaille française.
18:48 Et pour cause, près de la moitié de la volaille consommée en France est importée.
18:56 Pour remonter cette filière, nous nous rendons chez ce grossiste.
19:02 Cet entrepôt fournit plusieurs dizaines de restaurateurs en région parisienne.
19:07 Ici, tous les produits à base de poulet viennent de l'étranger.
19:13 - Ca, c'est de la viande de poulet.
19:15 C'est du kebab. Ca vient d'Allemagne.
19:20 Donc ici, on a des nougats.
19:24 Ca, nous, on passe par une société française, mais production en Pologne.
19:29 Donc ça, c'est une société qui est en Belgique.
19:35 Un fabricant basé à Bruxelles.
19:40 Sur ce paquet, son adresse et son numéro de téléphone.
19:44 Nous prenons rendez-vous avec le directeur de l'entreprise.
19:48 - Allez tout droit, puis restez sur le fil de droite.
19:55 Commence un voyage qui va nous conduire dans plusieurs pays d'Europe.
20:01 L'entreprise n'est pas installée dans une zone industrielle,
20:09 mais dans ce joli quartier résidentiel en périphérie de la capitale belge.
20:13 Ce n'est pas une usine, mais un siège social.
20:18 Une société sans salariés, juste 2 associés.
20:22 L'un d'eux, Mafouda Saïni, nous présente sa gamme de produits, dont les fameux nougats.
20:28 - Donc le crispy strip stander, crispy filet.
20:32 Et bien après, le nougats et le chicken burger.
20:35 Ca, c'est les produits numéro 1 en vente sur ces 2 produits-là.
20:39 Sa société vend 10 tonnes de nougats par semaine, principalement sur le marché français.
20:44 Il a fait le choix de n'utiliser que du filet.
20:48 Et pour réduire les coûts, il sous-traite toute sa fabrication.
20:52 - Donc ces documents-là, ce sont des dossiers en cours avec des fournisseurs, des abattoirs, des fabricants,
21:02 avec qui on est en pourparlers, je dirais.
21:07 Les fournisseurs de ces produits ne sont ni en France, ni en Belgique, mais aux 4 coins de l'Europe.
21:14 Pour les nougats, il faut quitter Bruxelles.
21:18 Et parcourir avec lui 500 km, direction l'est de l'Allemagne.
21:27 Cette entreprise fabrique des poulets panés pour une cinquantaine de marques en Europe.
21:37 - Bonjour, ma food. - Comment ça va ?
21:40 - Bien. - Tu as fait bon voyage ?
21:42 Le succès de la société ne tient pas uniquement au caractère jovial de son directeur.
21:47 Ralph est capable de réaliser toutes sortes de produits, comme ces nougats en forme de donuts.
21:57 Et il s'adapte à toutes les demandes de ses clients.
22:04 - J'aurais besoin de boîtes plus petites. - Ouais, c'est sympa.
22:09 - On veut le même ingrédient que du filet. - Que du filet ?
22:15 - Pas de VSM. - Pas de problème.
22:18 Mais la grande force de l'entreprise de l'Allemand, c'est sa chaîne de production, totalement automatisée.
22:26 Elle permet d'obtenir des coûts 20 à 30 % plus bas qu'en France.
22:33 Et de fabriquer très vite les commandes des clients.
22:36 - Jusqu'à aujourd'hui, je n'ai pas rencontré de site, que ce soit en France ou en Belgique,
22:42 capable de fournir des quantités telles quelles,
22:45 puisqu'aujourd'hui, sur une production qui nous est propre,
22:50 sur 20 tonnes de matière première, on a une production sur à peine une journée.
22:57 Une productivité record.
23:01 Mais ce chef d'entreprise réduit encore ses coûts grâce à la provenance de sa viande.
23:07 - Grosso modo, on a toute cette pile-là, filet, filet, filet.
23:14 Donc tous ces produits-là, ce sont panoudes.
23:16 Donc là, on a du filet qui est prêt pour faire les nuggets.
23:21 - Et la viande, où est la viande ?
23:23 - Donc la viande vient des abattoirs, nos abattoirs partenaires en Roumanie.
23:29 Ces filets, achetés en Roumanie, coûtent 2,60 euros le kilo,
23:35 1 euro de moins qu'en France.
23:37 Mais ceux qui consommeront les nuggets de Mafoud n'auront jamais cette information.
23:43 Sur les factures, le tampon signale bien "RO pour la Roumanie".
23:49 Mais sur le paquet, l'origine du produit n'indique que "DE pour l'Allemagne".
23:55 La traçabilité s'arrête à l'usine de transformation.
23:59 - Les consommateurs ne veulent pas savoir d'où vient la viande ?
24:04 - Alors voilà, il n'y a pas de moyen, il n'y a pas moyen de le savoir aujourd'hui
24:09 parce que je pense que la législation n'impose pas aujourd'hui.
24:13 Demain, si la législation impose d'avoir le détail au niveau de cette traçabilité-là,
24:18 tous les industriels seraient obligés de le faire.
24:20 Aujourd'hui, notre fabricant ne le met pas parce que forcément, il n'a pas l'obligation.
24:24 Mais encore une fois, nous, on ne s'en cache pas.
24:28 On ne s'en cache pas et nos distributeurs sont tout à fait libres de venir sur place,
24:34 même en Roumanie, s'ils veulent auditer ou voir un petit peu comment est fabriquée la matière première.
24:40 On n'a aucun souci avec ça.
24:42 Alors, nous lui avons demandé de nous rendre en Roumanie.
24:46 Mais l'abattoir n'a jamais donné l'autorisation.
24:51 De la viande achetée en Roumanie, transformée en Allemagne,
24:57 stockée en Belgique, avant d'arriver chez le grossiste en France,
25:02 le poulet aura parcouru 2300 km au minimum
25:06 avant d'arriver dans notre assiette au restaurant.
25:09 Si Mafouda Saïni dit contrôler l'ensemble de sa filière,
25:15 tel n'est pas toujours le cas.
25:17 Pour tous les acteurs du marché.
25:20 Dans ce secteur, une partie de l'activité se passe sur Internet,
25:25 sur ces plateformes de vente en ligne où s'échangent les marchandises.
25:29 On peut y acheter des filets de poulet, des cuisses ou encore des pâtes
25:35 via des traders installés aux quatre coins de la planète.
25:43 Nous avons contacté près de 80 sociétés de trading en Europe.
25:48 Une seule a bien voulu nous recevoir.
25:51 Elle est installée en Pologne, à 300 km de Varsovie,
26:09 en pleine campagne.
26:13 Depuis ce pavillon familial, Michelina Erreter et son mari Ousgour
26:24 sont en contact avec toute l'Europe.
26:27 Abattoirs, importateurs, usines de transformation,
26:31 ils achètent et vendent en fonction de l'offre et de la demande,
26:35 comme sur les marchés financiers.
26:39 Tout se fait par Internet ou par téléphone.
26:43 - Je t'appelle parce que j'ai des cuisses de poulet.
26:50 Livraison demain, fraîche.
26:53 - Fraîche ? - Oui, livrable demain.
26:56 Si tu as un client intéressé, fais-le-moi savoir.
27:00 - À quel prix ? C'est du Hongrois ?
27:05 - Oui, et le prix, c'est 1,06 ou 1,07.
27:10 Cette marchandise que lui propose une importatrice,
27:16 le trader va tenter de l'écouler au plus vite.
27:20 En quelques mails et coups de téléphone,
27:24 il trouve un client aux Pays-Bas.
27:27 - Peut-être. Pourquoi pas ?
27:30 Si je peux en prendre 3 tonnes, j'achète.
27:33 - Je te confirme ça. - Merci.
27:36 - Je vais vendre, mais que 3 tonnes.
27:40 - Toutes les transactions se font sans jamais voir la marchandise.
27:45 Seul contrôle, parfois, la photo du produit, comme ces filets.
27:51 - Je demande au fournisseur de faire une photo.
27:57 Il me l'envoie et je la transmets à mes clients.
28:00 - Elle a l'air bien, celle-là ?
28:03 - Oui, ça me semble bien. Selon moi, c'est bien.
28:07 - Mais parfois, le trader tombe sur des produits
28:11 dont il ne connaît pas vraiment l'origine.
28:14 - Ça, ça vient d'un fournisseur aux Pays-Bas.
28:17 Mais j'ai l'impression que c'est de la marchandise brésilienne.
28:21 - Comment vous savez que c'est brésilien ?
28:24 - Parce que cette société, je sais qu'elle en importe.
28:27 Je pense que c'est du brésilien.
28:30 Le poulet brésilien, sur les marchés européens,
28:36 c'est un peu la star du moment,
28:38 car aujourd'hui, il est l'un des moins chers au monde.
28:41 Le Brésil. En 10 ans, le pays est devenu le nouvel Eldorado du poulet.
28:50 3e producteur mondial, 13 millions de tonnes de volaille chaque année.
28:56 Il faut quitter Rio, pénétrer une centaine de kilomètres dans les terres
29:01 pour découvrir un élevage comme il n'en existe pas en Europe.
29:05 40 hangars sous lesquels picorent 2 millions de poulets.
29:11 Ici, toutes les conditions sont réunies pour élever des bêtes bien en chair.
29:22 A la plus grande satisfaction du vétérinaire, responsable de l'exploitation,
29:27 et de son employé.
29:30 - Il pèse combien, celui-là ?
29:36 - Celui-là pèse 3 kg.
29:38 - Et il a quel âge ?
29:40 - Il a 39 jours.
29:42 - Il est bien potelé ?
29:44 - Oui, il est bien potelé.
29:46 - Et comment font-ils pour grossir aussi vite ?
29:49 - Ce qui leur permet de grossir, c'est qu'ils ont un environnement optimal.
29:54 Ils sont surveillés tous les jours, on fait tout pour éviter le stress.
29:59 Avec tout ça, vous avez des résultats fantastiques.
30:03 Mais le vrai secret de ce poulet de compétition réside dans l'alimentation.
30:11 A 20 km de là, dans cette usine qui fabrique la nourriture des volailles,
30:18 des camions arrivent des 4 coins du pays pour déverser leur cargaison.
30:23 - Salut, Carlos, ça va ? C'est du maïs ou du soja ?
30:33 - Du soja.
30:35 Des tonnes de maïs et de soja OGM qui poussent au Brésil
30:41 et qui coûtent bien moins cher que la céréale européenne.
30:46 Mais les Brésiliens utilisent un autre ingrédient
30:50 qu'ils mélangent au céréale pour nourrir leur poulet.
30:54 Dans ces gros sacs, des kilos de farines animales.
30:58 - Les farines que nous utilisons sont des farines de viande et d'os,
31:05 qui sont les résidus des abattoirs de bovins.
31:09 Il y a aussi des farines qui viennent des restes de volaille
31:13 et qui sont autorisées au Brésil.
31:16 Elles sont riches en phosphore et en calcium,
31:19 qui sont des minéraux importants dans l'alimentation.
31:23 Elles apportent aussi des protéines et des lipides.
31:26 En plus, elles ne coûtent pas cher.
31:29 Des farines de bœuf et surtout de volaille qui servent à nourrir des poulets.
31:36 La pratique est autorisée au Brésil, mais pas en Europe.
31:41 Enfin, pour compléter la potion magique,
31:44 les Brésiliens ajoutent un autre produit,
31:47 également interdit en Europe, des antibiotiques de croissance.
31:52 - Ca améliore la flore intestinale,
31:59 parce que les poulets ont des micro-organismes dans leurs intestins.
32:03 Ce sont des bactéries, et certaines sont nocives pour les volailles.
32:07 Donc l'objectif de ces antibiotiques est de réduire l'impact de ces bactéries.
32:12 Ca améliore aussi la prise de poids des poulets.
32:15 Et en plus, avec la même ration, vous produisez plus de viande,
32:19 parce que l'intestin est sain.
32:22 - Des antibiotiques, non pas pour soigner les poulets,
32:26 mais pour les faire grossir plus vite, à moindre coût.
32:29 Une pratique que justifie le vétérinaire de l'exploitation.
32:35 - Grâce à ces ingrédients, on peut produire un poulet à 1 dollar le kilo.
32:41 Et sans ça, le poulet passerait à 1,7 dollar.
32:45 Et s'il était totalement bio,
32:48 alors on arriverait à 2 dollars, 2,3 dollars par kilo.
32:52 Ce serait donc le double.
32:55 - Un poulet destiné au marché local,
33:01 qui ne peut pas être exporté en Europe.
33:04 En France, ces antibiotiques de croissance
33:13 ont également été utilisés massivement à partir des années 70,
33:17 quand les élevages industriels se sont développés à grande échelle.
33:21 Intéressant d'un point de vue économique,
33:24 mais inquiétant sur le plan sanitaire.
33:29 Les bactéries sont naturellement présentes dans le tube digestif du poulet.
33:34 Quand l'animal est traité par un antibiotique,
33:37 le médicament détruit les bactéries.
33:40 Mais à force d'être soumises à des traitements,
33:46 certaines d'entre elles vont lutter et survivre à l'attaque de l'antibiotique.
33:51 Elles deviennent alors résistantes.
33:54 Et plus on essaye de les traiter,
33:57 plus elles renforcent leur résistance.
34:00 En plus, ces bactéries mutantes se multiplient à l'infini.
34:06 Ça s'appelle l'antibiorésistance.
34:10 Voilà pourquoi, en 2006,
34:15 l'Union européenne interdit les antibiotiques à usage de croissance.
34:19 Seuls sont autorisés ceux destinés à soigner les animaux.
34:26 Mais l'usage de ces antibiotiques représente toujours un danger.
34:30 A l'hôpital, pour les médecins, c'est une certitude.
34:34 Le professeur Andremont est bactériologiste,
34:38 spécialiste de l'antibiorésistance.
34:41 Il estime que le poulet est une véritable bombe à retardement pour l'homme.
34:47 - Chaque unité, chaque poulet qui reçoit des antibiotiques,
34:51 est une espèce d'usine à fabriquer des bactéries résistantes.
34:56 Et quand ces volailles vont être abattues,
35:01 ces bactéries de leur tube digestif vont contaminer les viandes.
35:05 On ne peut pas faire un abattage parfaitement propre,
35:09 en dépit de tous les efforts qui peuvent être faits dans les abattoirs.
35:13 Quand vous allez acheter un poulet,
35:16 il va y avoir une partie de votre système,
35:19 et quand vous allez acheter un poulet,
35:22 il va y avoir des bactéries résistantes sur le poulet.
35:25 - Les bactéries résistantes se retrouvent donc ensuite dans les rayons,
35:30 et en grande quantité.
35:32 C'est ce que révèle une association de consommateurs.
35:36 Son test est édifiant.
35:39 Elle a sélectionné un large panel de filets de volaille...
35:43 - Résistant, résistant...
35:46 - Pour mesurer le taux de bactéries résistantes.
35:50 - Nous considérons que les résultats obtenus à travers notre test comparatif
35:54 sont vraiment inquiétants.
35:56 On voit que sur la centaine d'échantillons testés,
35:59 nous avons trouvé des bactéries, des chérichacolis,
36:02 sur un gros quart du test, ce qui est quand même beaucoup.
36:06 Et sur ces échantillons contaminés, il y en a 61 %
36:10 qui sont contaminés par des bactéries résistantes
36:13 et qui ont des majeurs antibiotiques, ce qui est assez considérable.
36:17 - Et voici comment ces bactéries antibioresistantes
36:21 passent de la viande à l'homme.
36:25 - Merci.
36:26 Sous-titrage Société Radio-Canada
36:28 ...
36:34 ...
36:40 ...
36:46 ...
36:52 ...
36:58 ...
37:04 ...
37:10 - Mais aussi sur nos mains et sur le réfrigérateur.
37:30 Elles ont surtout colonisé les tomates crues que nous allons manger.
37:34 Voilà comment les bactéries antibioresistantes
37:38 peuvent se retrouver dans notre estomac.
37:42 Ces bactéries antibioresistantes,
37:48 le professeur Andremont en voit de plus en plus dans son service à l'hôpital.
37:52 Tous les jours, il reçoit les prélèvements de patients infectés.
37:56 Le bactériologiste réalise des antibiogrammes
38:00 afin de déterminer quelle antibiotique sera le plus efficace
38:04 pour lutter contre la bactérie.
38:08 Dans la coupelle, la partie granuleuse jaune
38:12 qui couvre presque toute la surface, ce sont les bactéries.
38:16 - Vous avez cette bactérie qu'on a fait pousser sur un milieu de culture.
38:22 Et les petits points blancs que vous voyez, les petites pastilles,
38:26 correspondent chacune à un antibiotique différent.
38:30 Donc on voit bien qu'autour des pastilles, la bactérie ne pousse pas.
38:34 Vous voyez la zone éclaire. Donc les antibiotiques sont efficaces,
38:38 ils tuent les bactéries.
38:40 - Mais l'arsenal du professeur Andremont se réduit de plus en plus.
38:44 - Là, vous avez la même espèce bactérienne
38:48 dans laquelle la sensibilité aux antibiotiques est devenue extrêmement réduite.
38:52 Les bactéries poussent jusqu'au contact des petites pastilles blanches.
38:56 Les antibiotiques ne sont plus efficaces pour tuer les bactéries.
39:00 Sur les 16 antibiotiques qu'il y a sur cette boîte,
39:04 il y en a un seul qu'on peut utiliser pour traiter les patients.
39:14 Dans le service de réanimation de l'hôpital,
39:18 faute de trouver des antibiotiques efficaces,
39:22 l'équipe du Dr Michel Wolf a de plus en plus de mal
39:26 à traiter les patients aux pathologies les plus graves.
39:30 - C'est ce patient qui est là.
39:36 Un patient qui a fait une infection pulmonaire assez sévère
39:40 après une intervention chirurgicale
39:44 et qui est liée à une bactérie résistante à beaucoup d'antibiotiques.
39:48 Et des cas comme celui-ci, difficiles à soigner.
39:56 Le médecin en est en permanence 3 ou 4 sur 20 malades.
40:00 - C'est vraiment un problème pratiquement de tous les jours.
40:06 Chose que l'on ne voyait pas il y a une quinzaine d'années.
40:10 On sait qu'à l'échelle nationale,
40:14 c'est un phénomène qui est en train d'augmenter progressivement.
40:18 Il est à craindre que dans les années qui viennent,
40:22 on soit confronté à plus de malades porteurs de bactéries
40:26 pour lesquelles on est dans une véritable impasse thérapeutique.
40:30 - Aujourd'hui déjà, il y a 25 000 morts personnels
40:34 par an en Europe à cause des bactéries devenues intraitables.
40:38 Et d'après une étude publiée par des chercheurs européens,
40:42 1518 décès seraient directement imputables au poulet.
40:46 Pour tenter d'enrayer le développement de l'antibio-résistance,
40:50 les autorités ont lancé un plan baptisé "Eco-Antibio"
40:54 avec une promesse, réduire l'usage des antibiotiques
40:58 pour les bactéries et les antibiotiques pour les bactéries.
41:02 Réduire l'usage des antibiotiques de 25% dans les élevages d'ici 2017.
41:08 Cette campagne de sensibilisation a-t-elle modifié les pratiques
41:14 chez les vétérinaires ?
41:18 L'un d'eux a accepté de nous recevoir en Bretagne.
41:24 Pour éviter le recours systématique aux antibiotiques,
41:28 Philippe Castanier affirme suivre un protocole bien précis.
41:32 Quand un élevage est malade, il autopsie les 1ers animaux décédés
41:36 pour être sûr que c'est une bactérie qui a causé la mort.
41:40 - Là, par exemple, on voit que cet animal-là a des lésions.
41:50 Comparé à celui-là, là, vous avez un coeur normal.
41:54 Un coeur qui présente une pellicule blanche autour.
41:58 C'est ce qu'on appelle une péricardite.
42:00 Là, ce type de symptôme, oui, c'est une bactérie.
42:04 Donc on va prélever ces lésions-là.
42:06 Une bactérie, il faut traiter aux antibiotiques.
42:10 Et pour choisir le plus efficace, le vétérinaire fait toute une série d'analyses.
42:16 - Ca fait partie intrinsèque de la démarche de responsabilité
42:22 de l'ensemble de la filière, quoi.
42:24 On utilise les antibiotiques à bon escient.
42:26 On ne met pas à l'aveugle un antibiotique.
42:29 Bon, il faut d'abord savoir ce contre quoi on se bat.
42:32 Mais cette prudence thérapeutique a ses limites.
42:37 Une fois l'antibiotique choisi,
42:39 le vétérinaire ne traite pas que les bêtes malades,
42:42 mais l'élevage en entier.
42:44 - Le fait de concentrer des animaux au même endroit
42:51 favorise forcément l'émergence ou facilite la diffusion des maladies.
42:57 Et le vétérinaire dispose d'un stock bien fourni.
43:03 - Ca, c'est un antibiotique, ça, c'est un antibiotique,
43:05 ça s'en est un autre, ça s'en est un autre, ça s'en est un autre.
43:08 Mais Philippe Castanier affirme que ses prescriptions d'antibiotiques
43:13 ont diminué ces dernières années.
43:15 - Un poulet reçoit au minimum un antibiotique dans sa vie ?
43:18 - Non, c'est absolument pas obligatoire.
43:20 Je peux vous dire que maintenant, je pense qu'il y en a une majorité
43:23 qui n'en reçoit plus d'antibiotiques ou pas d'antibiotiques.
43:26 En tout cas, nous, on voit bien qu'à notre niveau,
43:29 la consommation d'antibiotiques,
43:31 elle diminue de façon drastique, quoi.
43:34 Une affirmation qui n'engage que ce vétérinaire.
43:38 Qu'en est-il chez les éleveurs ?
43:43 Dans les exploitations, l'utilisation des antibiotiques
43:46 est un sujet dont on ne veut pas parler.
43:50 Mais un couple d'exploitants dont nous préservons l'identité
43:54 nous affirme qu'en réalité, il n'y a pas moyen d'y échapper.
44:18 Et les fiches de suivi le confirment.
44:21 Ce sont des documents sur lesquels l'éleveur consigne
44:24 les traitements médicaux donnés à ses bêtes.
44:27 Sur 8 mois, il y a eu régulièrement de l'amoxycyline,
44:31 du colivet et de l'OTC,
44:34 des antibiotiques fréquemment utilisés pour les volailles.
44:38 Des médicaments prescrits, mais aussi vendus par les vétérinaires.
44:47 Un mélange des genres que dénoncent les pharmaciens.
44:51 Dans son officine, Guy Barral fournit des médicaments pour l'homme.
44:56 Mais comme tous ses confrères, il en vend aussi pour les animaux.
45:00 - Je vais vous emmener dans la réserve des produits
45:04 pour les animaux de rente.
45:07 Pour les volailles, par exemple, il existe l'oxytétracycline,
45:11 un antibiotique à 50 % en kilos.
45:14 Il s'utilise également...
45:17 - Mais ses antibiotiques, il n'en vend pratiquement pas.
45:21 - 95 % des médicaments sont vendus par le circuit vétérinaire.
45:25 Donc il reste à la pharmacie 5 % de l'activité vétérinaire.
45:29 Et sur les 5 %, ça ne représente même pas 1 % en matière d'antibiotiques.
45:33 Ça me scandalise parce que tant que le prescripteur vend
45:37 des médicaments, il y a un risque de malheur.
45:41 Et c'est juste parce que tant que le prescripteur vend,
45:45 il y a un lien d'intérêt.
45:47 - Il accuse aussi les laboratoires pharmaceutiques
45:50 de pousser les vétérinaires à la consommation avec des offres.
45:54 - Voilà, donc ce sont des conditions commerciales
46:00 offrant des avantages pour l'achat et le stockage d'antibiotiques.
46:06 Avec des remises, des ristournes,
46:09 où là, dans ce cas-là, il s'agit d'unité gratuite.
46:13 C'est-à-dire que si le vétérinaire a besoin de 63 flacons,
46:17 il en commande 48 à sa centrale.
46:21 La centrale aura les chiffres qui seront transmis aux laboratoires
46:25 qui lui fera suivre 15 flacons.
46:27 C'est un encouragement à acheter des antibiotiques,
46:31 ce qui pour un prescripteur revient à être un encouragement
46:34 à prescrire des antibiotiques.
46:38 Et ce système conduit parfois à des pratiques illégales.
46:42 C'est ce qu'a découvert ce détective privé.
46:48 A la demande du pharmacien,
46:50 il s'est rendu dans une centaine de cabinets vétérinaires
46:53 partout en France.
46:55 Dans 80% des cas, il s'est fait délivrer des antibiotiques
46:59 sans ordonnance ni examen de l'animal.
47:02 C'est ce qu'il va nous montrer en caméra cachée.
47:06 Il prétend avoir des bêtes malades.
47:09 Quelques questions suffisent à la vétérinaire
47:27 pour lui vendre l'antibiotique.
47:29 - On a juste sur les bactéries.
47:31 Et ça, ça sert à éviter les surinfections.
47:33 - D'accord.
47:34 Nous avons fait le test à 4 reprises.
47:43 Et à chaque fois, il y a eu toute une série de fautes commises.
47:48 - Les antibiotiques ont été délivrés sans ordonnance
47:55 et sans présentation de l'animal,
47:57 sans remise d'ordonnance, sans remise de facture
48:02 et parfois même par une assistante vétérinaire
48:07 qui n'a pas normalement la faculté de délivrer de produits de ce type
48:11 à un client qui se présente au comptoir.
48:13 Pour ces délits, la peine encourue est de 30 000 euros d'amende
48:18 et 2 ans de prison.
48:20 De retour à Paris, à l'Ordre national des vétérinaires,
48:26 nous soumettons la séquence tournée en caméra cachée
48:30 au président Michel Baussier.
48:32 - Je sais, mais j'ai pas besoin de voir. Je sais ce que je vais voir.
48:35 Il n'a pas l'air surpris.
48:37 - Chaque fois que je...
48:39 - Oui, voilà, c'est bien.
48:40 - Qu'est-ce que vous aviez dit ?
48:41 Vous aviez dit que vous aviez combien de poules ?
48:43 - 6,7.
48:45 - 6,7 poules ?
48:46 Oui, bon, écoutez, je vous rends votre affaire.
48:49 Je vous rends votre affaire.
48:50 Si vous voulez, ça, c'est...
48:52 C'est un... C'est facile, si vous voulez.
48:54 C'est pratiquement, si vous voulez... Non.
48:56 - Non, mais ça va en compte de ce que vous nous disiez.
48:58 - Non, pas du tout.
48:59 - Vous nous avez dit qu'il fallait forcément un diagnostic.
49:01 - Oui, oui, oui, oui.
49:03 - Il faut voir les animaux et puis ensuite, il fait l'ordonnance.
49:05 - Oui, oui, oui.
49:06 - Mais là, il y a pas de diagnostic.
49:07 - Oui, mais si vous voulez être intelligent.
49:08 Le président de l'Ordre minimise,
49:10 mais finit par condamner ce qu'il vient de voir.
49:13 Et il en appelle au pouvoir public pour que cesse de telles pratiques.
49:17 - Voilà.
49:18 - C'est vrai que c'est...
49:19 Il faut... Il faut...
49:21 Il faut tendre à supprimer ce genre de comportement.
49:24 Mais là, là, je dis qu'il n'y a pas assez de contrôle.
49:27 Oui, je voudrais que la brigade nationale d'enquête vétérinaire
49:30 fasse exactement la même chose que vous, si vous voulez, avec les autres.
49:32 Je l'ignore.
49:33 Finalement, vous me donnez une idée.
49:34 Je vais le leur suggérer.
49:35 Je vais le leur suggérer.
49:37 - En attendant que le président des vétérinaires fasse ses propositions,
49:42 près de 800 tonnes d'antibiotiques circulent encore dans les élevages.
49:47 Et l'exposition des volailles aux médicaments n'a pas baissé depuis 5 ans.
49:53 L'antibioresistance fait peser une menace grave sur la santé humaine.
49:58 ♪ ♪ ♪
50:03 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

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