• l’année dernière
Transcription
00:00 président de la République de Guinea et chef d'Etat,
00:03 et je vous invite à se diriger à cette Assemblée générale.
00:07 Monsieur le Président,
00:16 Excellences, Mesdames et Messieurs les chefs de délégation,
00:22 Monsieur le Secrétaire général,
00:25 Je voudrais, avant de commencer, Monsieur le Président,
00:31 vous adresser les salueuses félicitations
00:35 de la délégation guinéenne pour votre brillante élection
00:42 à la présidence de la 78ème Assemblée générale des Nations Unies.
00:50 Je voudrais également, devant cette auguste Assemblée,
00:56 vous assurer du soutien de mon pays.
01:00 Je souhaite par la même occasion rendre un hommage mérité
01:06 à votre prédécesseur, monsieur Sabah Korozy, de la Hongrie.
01:13 Je vous remercie de votre présence ici,
01:17 Sabah Korozy, de la Hongrie.
01:21 A Monsieur le Secrétaire général,
01:24 Monsieur Antonio Guterres,
01:27 je le remercie pour le dévouement
01:31 avec lequel il dirige notre organisation.
01:35 Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
01:39 en venant prendre part aux travaux
01:43 de la 78ème section ordinaire,
01:47 je voudrais m'acquitter d'un devoir,
01:52 celui de vous transmettre les salueuses salutations
01:58 du peuple souverain de Guinée.
02:02 Mon pays qui continue de fonder un espoir
02:06 en l'organisation des Nations Unies
02:10 pour trouver des solutions idoines
02:14 aux questions auxquelles notre monde continue
02:17 d'être confronté.
02:20 Dans ce cadre, Monsieur le Président,
02:24 nous pensons que les fondamentaux qui ont soutenu
02:29 à la création de notre organisation
02:34 doivent s'adapter
02:38 aux mutations profondes de notre société.
02:42 L'objectif du thème de la présente session,
02:46 paix, prospérité,
02:50 progrès, durabilité
02:55 et d'actualité,
02:58 évoque et mérite une attention particulière
03:02 de notre part.
03:05 L'épidémie des coups d'Etat en Afrique.
03:09 Après celle de la Covid-19,
03:14 le continent est frappé par celle des poutres militaires,
03:20 notamment dans les pays francophones
03:24 du sud du Sahara.
03:28 C'est tout le monde qui les condamne,
03:33 qui les sanctionne, qui se meut de la réapparition brusque
03:37 de cette pratique que l'on croyait révolue,
03:41 à juste titre.
03:45 Mais j'ai envie de dire que la communauté internationale
03:49 doit avoir l'honnêteté et la correction
03:53 de ne pas se contenter de dénoncer
03:58 les seules conséquences, mais de s'intéresser
04:02 et de traiter les causes.
04:06 Les coups d'Etat, s'ils se sont multipliés
04:10 ces dernières années en Afrique,
04:14 c'est bien parce qu'il y a des raisons très profondes.
04:19 Et pour traiter le mal, mesdames et messieurs,
04:23 il faut s'intéresser aux causes racines.
04:27 Le poutsiste n'est pas seulement
04:31 celui qui prend les armes, qui renverse un régime.
04:35 Je souhaite que l'on retienne
04:40 que les vrais poutsistes, les plus nombreux,
04:44 qui ne font l'objet d'aucune condamnation,
04:48 c'est aussi ceux qui manigancent,
04:52 qui utilisent la fourberie, qui tricent
04:56 pour manipuler les textes de la Constitution
05:01 afin de se maintenir éternellement au pouvoir.
05:05 C'est ceux en col blanc
05:09 qui modifient les règles du jeu pendant la partie
05:13 pour conserver les règles du pouvoir.
05:17 Voilà les poutsistes les plus nombreux.
05:22 Monsieur le Président, mesdames et messieurs,
05:26 je fais partie de ceux qui, un matin,
05:30 ont décidé de prendre nos responsabilités
05:34 pour éviter à notre pays un chaos complet,
05:38 une situation insurrectionnelle.
05:43 Aucune force politique,
05:47 toute complètement neutralisée à l'époque,
05:51 n'avait ni le courage ni le moyen de mettre fin
05:55 à l'imposture que nous vivions.
06:00 La rectification institutionnelle
06:04 à laquelle mes frères d'armes et moi
06:07 avons pris nos responsabilités le 5 septembre 2021
06:11 n'était qu'une conséquence de cette situation de chaos
06:15 qui avait fini par fissuer le tissu social
06:19 et mettre à mal le vivre ensemble.
06:24 Sans être exhaustif,
06:28 nous pensons que les transitions
06:32 qui sont en cours en Afrique sont dues
06:36 à plusieurs facteurs parmi lesquels on peut citer
06:40 les promesses non tenues,
06:45 l'endormissement du peuple, le tripatouillage
06:49 des constitutions par des dirigeants qui ont
06:53 pour seul souci de se maintenir au pouvoir
06:57 au détriment du bien-être collectif.
07:01 Aujourd'hui, le peuple africain
07:06 sent plus que jamais éveiller
07:10 et décider à prendre leur destin en main.
07:14 La mauvaise répartition des recherches
07:18 crée des inégalités sans fin.
07:22 La famine, la misère qui rend le quotidien
07:27 de nos populations de plus en plus difficile.
07:31 Ces inégalités font partie des causes
07:35 des événements qui mettent en péril
07:39 surtout le vivre ensemble.
07:43 Quand les recherches
07:48 d'un pays sont dans les mains d'une élite
07:52 alors que le nouveau-né meurt dans les hôpitaux
07:56 par manque de couveuse,
08:00 il n'est pas surprenant que dans de telles conditions
08:04 nous assistons à des transitions pour répondre
08:09 aux aspirations profondes du peuple.
08:13 L'Afrique souffre, mesdames et messieurs,
08:17 d'un modèle de gouvernance qui lui a été imposé.
08:21 Un modèle certes bon et efficace
08:26 pour l'Occident, qui l'a conçu au fil de son histoire,
08:30 mais qui a du mal à passer
08:34 et à s'adapter à notre réalité,
08:38 à nos coutumes, à notre environnement.
08:42 Hélas, j'aimerais dire que
08:46 la greffe n'a pas pris.
08:51 Je sais que lorsque je dis cela, tout de suite,
08:55 je veux assédir encore un bidasse
08:59 qui veut tordre le cou à la démocratie,
09:03 encore un soldat qui veut imposer sa dictature.
09:07 Cependant, de façon très claire,
09:12 sans hypocrisie, sans faux-semblant,
09:16 les jeux dans les jeux.
09:20 Nous sommes tous conscients que ce modèle de démocratie
09:24 que vous nous avez si insidieusement
09:28 et savamment imposé
09:33 après le sommet de la boule en France,
09:37 presque de façon religieuse,
09:41 il ne marche pas.
09:45 Les différents indices économiques et sociaux sont là pour démontrer
09:49 que ce n'est pas un jugement de valeur
09:54 mais une démocratie en elle-même.
09:58 Croyez-moi, bien entendu, c'est un constat,
10:02 c'est un bilan sur plusieurs décennies
10:06 d'expérimentation chaotique de ce modèle
10:10 dans notre environnement,
10:15 une période où il n'a été question que de zout politique
10:19 au détriment, bien sûr,
10:23 de l'essentiel qui est l'économie,
10:27 la transformation de nos matières premières sur place.
10:31 Permettez-moi de pousser l'exercice de vérité un peu plus loin.
10:36 Avec ma courte mais intense expérience
10:40 à la gestion d'un Etat laguné,
10:44 j'ai mieux mesuré à quel point
10:48 ce modèle a surtout contribué
10:53 à entretenir un système d'exploitation
10:57 et de pillage de nos ressources par les autres
11:01 et une corruption très active
11:05 de nos élites, des leaders nationaux
11:09 à qui on a souvent accordé
11:13 des certificats de démocrate.
11:18 Et en fonction de leur docilité,
11:22 ou de leur aptitude
11:26 à brader les ressources et les biens de leur peuple,
11:30 ou encore de leur facilité
11:34 à céder aux pseudo-récommandations
11:39 et injonctions de grandes puissances.
11:43 Je dois d'ailleurs, dans ce sens,
11:47 confesser que tous ces accords
11:51 qui poussent à quoi je fais face
11:55 dépasse l'imagination,
12:00 ce sont eux qui confessent la démocratie,
12:04 la transparence, qui dénoncent la mauvaise gouvernance
12:08 et la corruption, qui dictent les règles.
12:12 C'est eux qui en offrent très discrètement
12:16 et surnoisement
12:21 le rôle de pression pour nous faire céder notre patrimoine
12:25 dans des contrats lyonnais.
12:29 Je comprends certains dirigeants,
12:33 quelques-uns de mes prédécesseurs,
12:37 qui, parce qu'ils avaient des fragilités,
12:42 parce qu'ils étaient sous pression,
12:46 ou parce qu'ils traînaient des casseroles,
12:50 ont cédé à ce qu'on leur demandait.
12:54 Je les comprends sans les approuver.
12:58 Certains m'ont même rappelé
13:03 que si j'avais un agenda politique,
13:07 je serais moins à l'aise pour mener à bien
13:11 les réformes auxquelles mon gouvernement et moi nous nous sommes attaqués.
13:15 Une chose est certaine,
13:20 il n'y a aucune seule préoccupation.
13:24 Le bien-être du peuple et le vivre ensemble.
13:28 C'est cela notre priorité.
13:32 C'est pourquoi la transition que je dirige
13:36 a choisi de se consacrer avec méthode,
13:40 en fixant les objectifs clairs dans un ordre précis.
13:45 Le social, l'économie,
13:49 et le politique.
13:53 Monsieur le Président,
13:57 Mesdames et Messieurs,
14:01 mon uniforme, je l'ai mis au service de mon peuple.
14:06 Je vous serai reconnaissant de respecter ses serments,
14:10 de nous tenir à distance respectable
14:14 des divisions de toutes sortes
14:18 que beaucoup essaient de nourrir dans nos pays.
14:22 Le Sahel traverse l'une des histoires
14:27 les plus graves de sa très vieille histoire.
14:31 Mais elle a les ressorts nécessaires
14:35 pour y faire face.
14:39 Son sens légendaire de la diplomatie doit être libéré
14:43 en faisant qu'ensemble, nous nous parlions sans interférence.
14:48 C'est pourquoi
14:52 et pour cela que la CEDEAO,
14:56 dont la vocation était économique,
15:00 doit cesser de se mêler de la politique
15:04 et privilégier le dialogue.
15:09 Nous, Africains, nous sommes fatigués,
15:13 épuisés des catégorisations
15:17 dans lesquelles les uns et les autres veulent nous mener
15:21 et surtout veulent nous cantonner.
15:25 La population de l'Afrique est jeune.
15:30 Elle n'a pas connu la guerre froide.
15:34 Elle n'a pas connu la guerre
15:38 et les guerres idéologiques qui ont façonné
15:42 le monde pendant les 70 dernières années.
15:47 C'est pourquoi nous, Africains,
15:51 nous trouvons insultants les cases,
15:55 les classements qui tantôt nous placent
15:59 sous l'influence des Américains,
16:03 tantôt sous celle des Anglais,
16:07 tantôt des Français, tantôt des Chinois, des Russes
16:12 et même des Turcs.
16:16 Nous ne sommes ni pro ni anti-Américain,
16:20 ni pro ni anti-Chinois,
16:24 ni pro ni anti-Français,
16:28 ni pro ni anti-Russe,
16:33 ni pro ni anti-Turc.
16:37 Nous sommes tout simplement pro-Africains. C'est tout.
16:41 (Applaudissements)
16:45 (...)
16:48 Nous mettre sous la coupe
16:51 de telle ou telle puissance est une insulte
16:56 (...)
16:58 du mépris, du racisme vis-à-vis
17:02 d'un continent de plus de 1,3 milliard de personnes.
17:06 (...)
17:09 Il est important, dans cette prestigieuse
17:13 et influente assemblée, que l'on comprenne clairement
17:17 que l'Afrique de papa,
17:21 la vieille Afrique, c'est terminé.
17:25 (Applaudissements)
17:30 Avec une population de plus de 1 milliard d'Africains,
17:34 dont environ 70 %
17:38 de jeunes totalement décomplexés,
17:42 des jeunes ouverts sur le monde
17:44 et décidés à prendre en main leur destin.
17:49 (Applaudissements)
17:51 Il est venu le moment de prendre conscience que les structures,
17:56 les règles issues de la Seconde Guerre mondiale,
18:00 en l'absence de nos Etats,
18:04 qui n'existaient pas encore, sont obsolètes.
18:08 C'est la fin d'une époque déséquilibrée,
18:12 injuste, où nous n'avons pas droit au chapitre.
18:16 C'est le moment de prendre en compte
18:20 nos droits, de nous donner notre place,
18:24 mais aussi et surtout,
18:29 le moment d'arrêter de nous faire de la leçon,
18:33 de nous prendre des hauts, d'arrêter de nous traiter
18:37 comme des enfants.
18:39 (Applaudissements)
18:41 Rassurez-vous, nous sommes suffisamment grands
18:46 pour savoir ce qui est bien et ce qui est bon pour nous.
18:50 (Applaudissements)
18:52 Nous sommes suffisamment matures
18:55 pour définir nos priorités,
18:59 pour concevoir notre modèle,
19:04 qui correspond à notre identité,
19:08 à notre population, à ce que nous sommes, tout simplement.
19:12 Nous vous serions fort reconnaissants
19:16 de nous faire confiance
19:20 et de nous laisser mener notre barque,
19:25 comme vous l'avez permis dans certaines régions du monde.
19:29 (Applaudissements)
19:31 Vous l'avez permis en Asie, en Proche et Moins-Orient,
19:35 pour ne citer que cela.
19:38 Cette infantilisation est du plus mauvais effet
19:42 pour une jeunesse africaine qui sait émanciper.
19:46 (Applaudissements)
19:49 Dans ce contexte, nous sommes tous interpellés
19:53 et appelés à procéder à une meilleure analyse
19:57 de la situation en vue d'initier
20:01 et de poursuivre des nouvelles politiques
20:05 au bénéfice de tous.
20:08 La communauté internationale doit regarder l'Afrique
20:12 avec les yeux neufs.
20:14 Elle doit entreprendre avec elle
20:18 désormais une coopération franche
20:22 dans un esprit de partenariat gagnant-gagnant.
20:27 Je vous remercie de votre attention.
20:30 Merci.
20:31 (Applaudissements)

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