Benoît Duquesne interviewe avec Frigide Barjot dans le noir en novembre 2012
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00:03 Alors ce soir Benoît Dukesne vous allez vous intéresser à homosexualité, les croisades anti-gays avec une affaire qui fait beaucoup de bruit sur internet depuis ce matin.
00:09 C'est cet incident qui s'est produit lors du tournage de votre émission dans la mairie du 19e arrondissement de Paris. Qu'est-ce qui s'est passé précisément ?
00:16 - Ce qui s'est passé c'était ce matin. D'abord je suis... Je ne suis qu'un simple journaliste et je respecte tout à fait le sénateur maire du 18e ou du 19e arrondissement
00:26 qui bien sûr est tout à fait légitime, élu et respectable. Il se trouve là qu'on avait choisi pour parler et du mariage gay et de l'homophobie aussi d'ailleurs,
00:35 de s'installer symboliquement dans des mairies de Paris du 19e, du 4e, du 3e, enfin celles qui l'acceptaient pour y faire venir dans la forme de complément d'enquête,
00:45 dans les deux fauteuils rouges, des personnalités qui soient opposées ou favorables au mariage gay pour en débattre entre les reportages.
00:53 Bon, il se trouve que dans la mairie du 19e, on avait prévu... On avait évoqué des noms mais sans en arrêter un seul et qu'hier soir, les plateaux varient.
01:01 Vous le savez très bien. Il y a des gens qui viennent, qui viennent pas, qui se décommandent, enfin etc. On a arrêté les noms et on a fait venir à la mairie du 19e
01:08 Frigide Barjot. Bon. - Qu'on connaît, qu'on a reçu ici, qui est absolument contre le mariage gay, qui a organisé des manifestations.
01:15 - Et qui est créé à l'origine des manifestations. - Tout à fait. - Cependant, qui a eu contre ces mariages à Paris et dans toute la France. Bon.
01:20 Je ne pensais pas sincèrement que ça poserait un problème puisque je pensais qu'on faisait un débat et que dans ce débat, il est normal d'entendre un petit peu toutes les voix.
01:26 Mais alors qu'on était prêts, qu'on s'était installés, que depuis une heure, on réglait les lumières, etc. etc., les éclairages, etc. etc., j'ai eu au moment de faire l'interview
01:34 un coup de fil du maire qui était d'entrée franchement violent à mon égard. - Qu'est-ce qu'il vous a dit ? - Il était violent et très remonté contre moi et contre mon attitude.
01:43 Il me reprochait d'avoir été, on va dire, déloyal pour faire ça. - D'avoir menti. C'est ce qu'il a écrit cet après-midi. - D'avoir menti.
01:48 - A Rémi Fulmelin, le président de France Télévisions. - Absolument. - Il dit que vous avez menti sur le nom de l'invité. - Non, parce qu'on a évoqué différents noms.
01:54 Il en a retenu certains mais pas d'autres. On a évoqué différents noms, mais on n'en avait arrêté aucun encore une fois. Et donc, on a fait venir cette femme
02:01 avec laquelle, d'ailleurs, il a débattu sur d'autres plateaux de télévision. Et je pensais qu'en démocrate, il était normal pour lui que dans le cadre des mairies,
02:08 quelle qu'elle soit, au-delà de la question simple du 19e arrondissement, on puisse débattre de cela. Donc il a été assez violent. Il m'a raccroché au nez.
02:17 Après, il m'a dit qu'il m'interdisait de faire l'émission. À ce stade-là, pour des problèmes de production, il était trop tard pour revenir en arrière.
02:23 Donc j'ai dit qu'on va essayer de le faire quand même. Il y a du personnel de l'Amérique qui a voulu nous faire comprendre qu'il ne fallait pas le faire non plus.
02:29 On a commencé. Et pendant qu'on faisait l'interview, j'ai vu des gens s'agiter derrière. J'ai entendu des bruits. Ils allaient venir, etc.
02:34 Mais petit à petit, les spots sont éteints, les infos. - Alors on a les images, parce que vous nous les avez amenées, de ce qui s'est passé.
02:40 Regardez, c'est assez incroyable. - C'est un tournant historique dans l'humanité. C'est-à-dire qu'on va instituer une filiation amputée et la remplacer par un éducateur à la place d'un parent biologique.
02:53 - Oui, mais il y a des prédoxychiates qui disent que des enfants peuvent très bien grandir dans des familles comme ça, qu'ils peuvent très bien s'inventer, effectivement.
02:59 - Absolument. Ils disent tous aussi une chose très importante. C'est que... - On a de la lumière qui disparaît au fur et à mesure.
03:05 - Non, tout au plus. On tombe dans le noir. Le noir un peu, que cette loire risque un peu de faire grandir dans notre société.
03:12 - Les homosexuels disent que le mariage, ça serait aussi une façon de revenir dans la normalité et d'en finir avec l'homophobie latente.
03:18 - Je ne crois pas. La normalité, c'est d'être vrai, c'est-à-dire de dire que l'homosexualité n'est pas la même chose que l'amour entre un homme et une femme.
03:27 - Je dis pas que c'est pas un amour aussi beau et pas aussi sincère. C'est pas ce que je dis. Je dis qu'il ne se vit pas de la même façon, notamment parce que l'enfant ne pourra pas venir de cet amour-là directement.
03:37 - Merci, Frédéric Barjot. - Je vous en prie. Merci de m'avoir donné la parole. - Pour les gens qui ne comprenaient pas qu'on est un petit peu dans le noir, je ne sais pas à quoi c'est dû.
03:42 - C'est simplement que la mairie n'est pas tout à fait d'accord pour qu'on filme dans cette salle les mariages. Il y a eu un petit malentendu.
03:46 - Ils pensaient pas qu'on allait vous interviewer ici. Et visiblement, ça ne plaît pas aux maires.
03:50 - Voilà. Et c'est pour ça que la lumière a été éteinte. Vous allez diffuser cette séquence ce soir ? - Oui, bien sûr. Tout va être diffusé parce qu'on est un peu professionnels.
03:58 - Et ils croyaient nous empêcher de filmer en coupant la lumière. Mais les caméras étaient sur batterie. Elles ont continué à tourner. Donc on a pu finir l'interview.
04:05 - Mais moi, d'abord, j'ai péché, je crois, par naïveté en pensant qu'on pouvait débattre de tout et partout, à commencer par les mairies, qui sont des maisons du peuple et de la République.
04:12 Donc je pensais que toutes les opinions pouvaient s'y exprimer. J'ai sans doute... Mais j'ai été choqué par les propos du maire, à mon égard. J'ai été choqué par la méthode,
04:19 qui est quand même d'un autre temps, qui est à la fois violente et archaïque, et puis par les attaques qui ont suivi contre moi et contre le complément d'enquête.
04:26 Voilà. Dans cette émission, on a quand même l'habitude d'essayer d'aborder les choses avec modération pour faire en sorte que le débat existe, puisqu'on se plaint quelquefois
04:34 qu'il n'existe pas suffisamment en France, et que toutes les expressions, les opinions puissent s'exprimer. C'est ce qu'on a encore une fois essayé de faire.
04:42 Vous verrez des reportages assez étonnants. On parlait des États-Unis. On est dans une école cocon protectrice pour les homosexuels qui se font martyriser dans leurs écoles.
04:51 On est aux États-Unis. En Afrique du Sud, là où les femmes se font violer, il y a des viols correcteurs, des viols à l'égard de ces lesbiennes pour leur apprendre
04:58 à se remettre dans le droit chemin. Enfin, il se trouve des choses assez étonnantes dans le monde sur l'homophobie. On voulait parler de tout ça. Et ce monsieur a pensé
05:06 qu'il ne voulait... Il m'a dit « Je ne veux pas de cette femme dans ma mairie. Je ne veux pas d'une opinion contraire à la mienne dans ma mairie ». C'est quand même assez étonnant.
05:13 — Allez, dans un instant... — Voilà l'image qu'on peut avoir de la démocratie et du débat. — C'est clair.