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Arte diffuse ce mois-ci un documentaire retraçant le long combat de Sophie Rollet. Cette femme a perdu son mari dans un accident de la route dû à l'éclatement des pneus. Le responsable ? La marque Goodyear. Depuis 8 ans, Sophie Rollet réclame justice. Elle est l'invitée de 9H10.

Retrouvez "L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10

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Transcription
00:00 Il est 9h08, Sonia De Villers, votre invitée est femme de routier et elle a perdu son mari dans un accident en 2014.
00:06 Il s'appelait Jean-Paul Rolais et son camion était équipé de pneus Goodyear. Bonjour Sophie Rolais.
00:12 Bonjour. Alors voilà Sophie, nous devions...
00:15 Je vais déjà, je vais me permettre de rectifier une information, c'est que ce n'est pas le camion de mon époux qui était équipé de pneus Goodyear,
00:23 c'est le camion qui circulait en face sur l'autoroute.
00:27 Et vous avez raison, on va reconstituer ce qui s'est passé à ce moment-là et quels étaient les pneus incriminés.
00:35 D'abord je précise que nous devions être l'une en face de l'autre ce matin et puis il y a eu quelques petits aléas qui font que finalement nous sommes à distance.
00:42 Vous, vous êtes dans les studios de France Bleu à Belfort et moi à Paris. Vous êtes bien installée Sophie ?
00:47 Oui, oui, ça a été un petit peu rocambolesque, le timing était un petit peu juste mais voilà, c'était un petit défi du jour.
00:57 Alors ce que je vous propose Sophie, c'est que nous écoutions ensemble Etienne Monteau, il est procureur de la République
01:02 et ça nous permettra de mesurer ensemble l'ampleur de ce que vous avez accompli toute seule.
01:08 Ce travail réalisé par madame Rolais, par cette citoyenne, nous a ouvert les yeux, a ouvert les yeux de la justice.
01:15 C'est très inhabituel de voir une partie civile comme ça se lancer dans un véritable travail d'investigation
01:20 avec des moyens limités du citoyen ordinaire qui n'a pas accès et qui n'a pas de pouvoir de réquisition pour obtenir des copies de procédures
01:29 qui effectivement aujourd'hui forcent le respect parce que c'est un travail considérable que madame Rolais a réalisé pour arriver à collationner l'ensemble de ces éléments.
01:39 Ça s'apparente son travail véritablement, un travail de lanceur d'air.
01:43 Il importe maintenant pour nous, justice, de faire le point sur chacun de ces faits.
01:46 76 faits d'explosion de pneus, c'est des investigations complexes, transnationales qui sont en cours.
01:52 76 cas d'explosion de pneus, 76 cas qui ramènent à la multinationale Goodyear.
02:02 Ce film dont on va parler ce matin, cher Sophie Rolais, retrace 8 ans de combat solitaire.
02:07 Il s'intitule "Sophie Rolais contre Goodyear".
02:09 Il est signé de deux excellents documentaristes, Sylvigilement et Thierry de Lestrade.
02:14 Et il sera diffusé dans deux semaines sur Arte, mais on peut d'ores et déjà le regarder sur arte.tv.
02:21 Sophie Rolais, dans ce film, on comprend que vous êtes une femme de caractère.
02:29 Et en même temps c'est très émouvant parce que vous le dites vous-même, vous êtes assistante maternelle.
02:34 Vous n'étiez pas formée finalement pour enquêter, pour enquêter toute seule.
02:40 - Alors non, maintenant le statut social d'assistante maternelle est plus une vitrine
02:46 puisque j'ai quand même à mon actif une formation de sapeur-pompier professionnelle.
02:50 - C'est vrai. Quand vous étiez jeune.
02:53 - Voilà, qui me donne déjà, je veux dire, un regard autre sur l'accidentologie.
02:59 J'ai par ailleurs été, je veux dire, assistante commerciale au sein de la SANEF à Sanlis,
03:05 au service abonnement transporteur qui me met au plus près finalement de ce métier.
03:11 Et je suis également fille et sœur de routier.
03:15 - Absolument. On entend votre frère dans le film dire "je suis née avec un volant dans les mains"
03:23 et c'est l'histoire de toute notre famille, la route.
03:26 - Oui, c'est ça. C'est que, voilà, moi j'ai été baignée avec Max Meunier
03:32 où il y avait ce côté familial de la route et qui fait qu'on a un regard un petit peu différent.
03:41 On a déjà quelques connaissances éparses sur les problématiques de sécurité routière
03:48 et finalement c'est plein de petites choses que j'ai en conscience
03:53 qui à un moment donné vont faire que je vais me poser des questions.
03:57 - C'est ça.
03:58 - Et après c'est l'histoire d'une curiosité intellectuelle
04:03 et puis d'un petit détail plus un petit détail plus un petit détail
04:08 qui augmente finalement mes questionnements.
04:12 Et mes premiers questionnements, puisque je suis assistante maternelle,
04:15 je les renvoie finalement aux personnes qui sont missionnées pour le faire,
04:20 c'est-à-dire la justice, voilà, toutes ces personnes qui ont plus la légitimité de le faire.
04:30 - Voilà, sauf qu'il aura fallu des années en réalité pour que la justice
04:34 se saisisse réellement du dossier et du bon dossier,
04:37 parce qu'on va le raconter ensemble.
04:39 Dans un premier temps, l'enquête a été classée sans suite.
04:42 Sophie Reulet, on va se replonger dans les archives de 2014,
04:46 ce que France 3 à l'époque racontait de l'accident
04:49 dans lequel votre mari a perdu la vie.
04:52 Un amas de tôles noircies méconnaissables,
04:55 c'est tout ce qu'il reste du camion à l'origine de l'accident.
04:58 9h ce matin, un poids lourd qui transportait des voitures neuves
05:01 traverse subitement l'autoroute et vient percuter deux autres camions
05:05 circulant en sens inverse.
05:07 - Il a dévié sur la rambarde, après il est passé par-dessus la rambarde,
05:11 il a tapé direct dans le camion d'en face.
05:15 Pour les enquêteurs, l'origine de l'accident semble déjà établie.
05:19 - A première vue, la cause de cet accident,
05:21 ce serait un pneu qui aurait éclaté, mais ça demande à le confirmer.
05:24 L'autoroute A36 n'avait pas connu de tel drame depuis deux ans.
05:29 - Sophie Reulet, dans un premier temps, je l'ai dit,
05:33 l'affaire a été classée sans suite.
05:36 L'accident date de 2014 et le classement date de septembre 2015.
05:43 - Oui, et c'est finalement la suite logique de ce qu'on constate
05:51 en dossier routier en France, finalement, où on effectue des enquêtes
06:00 et puis qui sont faites pour indemniser les victimes
06:04 dans le cadre des procédures civiles.
06:07 Donc, on ne s'attache pas forcément à pousser plus en avant un accident,
06:12 il en reste un accident.
06:14 Et on va dire qu'on fait ces dossiers pour le suivi,
06:20 généralement, civil de ces dossiers.
06:23 Et en fait, moi, quand je lis le PV, je trouve dans une notion de détail
06:30 qui m'appartient, qui est assez exacerbée, je le reconnais,
06:34 plein de petites erreurs qui, pour mettre courtois,
06:38 sont de l'ordre du normal.
06:40 - Mettre courtois, ce sera votre avocat.
06:42 - Voilà.
06:43 - Qui va vous accompagner durant ces huit années.
06:45 - Qui m'accompagne très rapidement, puisque l'accident a lieu le 25 juillet.
06:49 Et moi, je le contacte, en fait, dès le 4 août,
06:52 parce qu'il y a plein de circonstances autour qui font que,
06:57 voilà, je sens déjà que ça, on va dire, ça part un petit peu en vrille
07:01 et que je ne vais pas pouvoir gérer tout toute seule,
07:03 parce qu'il y a une immensité de choses à gérer dans ce cadre-là.
07:09 Et donc, je me rapproche de lui pour avoir du conseil
07:14 par rapport à certains questionnements que j'ai à l'époque.
07:18 - Très rapidement, Sophie Rollet, très rapidement,
07:21 vous vous mettez toute seule sur la piste de deux autres accidents.
07:26 Un qui a lieu à Loupian, en Ero, dans l'Ero, en 2011.
07:31 Un autre qui a eu lieu à Vinet, dans l'Isère, en 2014.
07:35 Très rapidement, vous constatez que dans ces deux accidents,
07:39 il y a eu également éclatement de pneus,
07:41 et ce sont également des pneus goudieurs.
07:44 - Alors, en fait, ce qui se passe, c'est qu'à un moment donné,
07:48 de par cette curiosité intellectuelle,
07:50 je vais chercher des notions sur les éclatements de pneumatiques
07:53 où je n'arrive pas à saisir des termes techniques.
07:56 Et par hasard, je tombe sur un document qui m'interpelle,
07:59 mais qui reste somme toute mesurée.
08:03 Dans un deuxième temps, et en fait, on est sur un délai de 24 heures,
08:06 un deux différents, je trouve un deuxième document
08:09 qui, là, m'interpelle beaucoup plus,
08:10 et c'est effectivement le rapport du BEATT.
08:15 Et à travers ce rapport, on trouve des pneus qui sont incriminés
08:21 et qui sont strictement similaires.
08:24 En fait, quand on connaît le domaine des pneumatiques,
08:29 on sait que les références vont être différentes,
08:32 les dimensions vont être différentes.
08:34 Donc, il y a tellement de possibilités
08:37 qu'un élément soit différent, qu'on ne tombe pas sur les mêmes pneus,
08:42 alors que là, ils sont strictement similaires.
08:45 Et là, je commence à lire.
08:48 Et parallèlement, je commence à chercher dans les faits divers
08:53 s'il y a d'autres accidents.
08:58 Et c'est un peu plus tard, effectivement,
09:01 que je trouve ce troisième accident, qui est celui d'Albert Vinet.
09:05 - Voilà, alors un troisième accident, puis un quatrième, puis un cinquième.
09:09 On va écouter la voix de Maître Philippe Courtois,
09:11 cet avocat qui vous accompagne.
09:14 - Mon père est médecin, chirurgien, mon grand-père, pharmacien,
09:16 mon oncle, pharmacien, enfin toute la branche paternelle
09:19 et le domaine médical.
09:20 Et moi, je faisais médecine.
09:22 Et j'ai arrêté en 96,
09:23 lorsque on a perdu mon frère dans un accident de voiture.
09:26 Et c'est pour ça que j'ai changé.
09:27 Et mon frère faisait droit.
09:29 Il allait passer son concours pour rentrer à l'école d'avocat.
09:31 Et donc j'ai arrêté pour faire droit,
09:33 mais dès le départ dans ce domaine-là.
09:36 Parce que j'ai vu mes parents,
09:37 à l'époque, en 96, il n'y avait pas d'expertise en exergentologie.
09:41 Donc c'est vrai que ce manque d'information et de vérité,
09:43 moi je l'ai vécu au travers de mes parents.
09:45 Et c'est pour ça que je fais ce métier.
09:47 - Voilà un avocat qui a lui aussi une histoire de famille,
09:51 qui lui aussi a perdu un frère dans un accident de la route.
09:55 Et peut-être que ce profil bien particulier
09:58 de professionnel de la justice qui vous a soutenu, Sophie Rollet,
10:02 y est pour beaucoup, parce qu'il y a quelque chose de très émouvant dans le film.
10:06 C'est que vous, vous vous êtes acharnée pendant 8 ans,
10:08 et que tout le monde, comment dire, a tenté de vous décourager.
10:13 On vous a pointé du doigt,
10:15 on ne vous a pas comprise, on vous a jugé,
10:18 on vous a pensé obsessionnel, on vous a pensé acharnée.
10:22 On a tenté de vous dissuader.
10:25 - Oui, alors c'est là où, quand finalement on arrive à ce regard populaire,
10:31 où quand on ne connaît pas les éléments d'un dossier,
10:35 voilà, on a des jugements, je veux dire, très grossiers qui arrivent.
10:43 Et dans un premier temps, même Maître Courtois,
10:46 avant que je lui ai soumis finalement les documents que j'avais trouvés,
10:52 et avant qu'il se penche avec une rigueur dessus,
10:57 il m'a dit "attention Madame Rollet".
10:59 Et c'est des paroles que j'entendais,
11:01 c'est ce que la gendarmerie m'a aussi donné comme parole.
11:06 Parce qu'ils ont ce regard-là, il y a eu beaucoup de bienveillance pour me protéger.
11:11 Et à un moment donné, c'est un regard aussi qui est issu de leur propre expérience.
11:19 Donc sachant que dans ce genre d'affaires, aujourd'hui, on n'a pas de précédent judiciaire.
11:24 Ça a été aussi une difficulté.
11:27 Quand je me rapproche des forces de l'ordre de Belgique,
11:31 par l'intermédiaire d'une personne qui est en Belgique,
11:35 la réponse a été "mets un programme d'échange commercial ou des pneus défectueux".
11:40 On n'a jamais vu ça. Donc en fait c'est inconcevable.
11:43 En 2015, cette problématique, ces hypothèses de travail étaient inaudibles.
11:48 - Inaudibles. Et puis ils avaient tous peur que vous vous perdiez en réalité dans ce combat.
11:53 - Oui, en fait, il y a énormément de protection de bienveillance que je reconnais, que j'ai toujours reconnu.
12:00 Maintenant, il y avait quelque chose en plus.
12:04 Alors ça, ça tient effectivement à mon caractère.
12:07 Je dis "mais il y a un truc, il y a un truc, il y a un truc".
12:10 Alors on a l'impression à travers ce reportage que ça ne me lâche pas.
12:14 Maintenant, ça me tient, on va dire, une partie de ma journée où je suis "tranquille"
12:20 parce que les enfants ne sont pas encore levés,
12:23 parce que parallèlement, effectivement, j'ai ma vie de maman, j'ai ma vie d'assistante maternelle.
12:28 Et puis il faut se remettre dans le contexte de l'époque où Internet passe bien uniquement la nuit.
12:37 Puisque si mon fils, qui a à l'époque 14 ans, fait des recherches dans le cadre du collège
12:43 sur "il y a un partage de communication qu'il faut faire, il y a un partage de réseau qu'il faut faire".
12:48 - Et c'était votre seul outil, Sophie, c'était votre seul outil.
12:51 C'était Internet la nuit.
12:53 Pour investiguer, pour enquêter, c'était votre seul outil.
12:59 - Oui, parce que ça m'a permis aussi, parce que je suis assez, on va dire, timide.
13:05 J'ai une maxime qui fait que pour vivre heureux, vivons cachés.
13:09 Donc me mettre...
13:11 - Vous avez deux maximes, Sophie.
13:13 Vous avez "pour vivre heureux, vivons cachés".
13:15 Et il y a aussi ce que vous a appris votre grand-mère, c'était "on n'est jamais si bien servi que par soi-même".
13:21 - Alors ma grand-mère m'a aussi donné d'autres préceptes qui est "quand on est petit, il faut être malin".
13:29 Et je crois qu'en fait, j'ai vraiment bien adapté cet adage où, voilà,
13:36 je ne vais pas faire le bélier sur le pont-levis du Châteaufort,
13:45 mais je préfère trouver la petite porte des Oubliettes qui n'a pas été verrouillée, en fait.
13:51 - Alors Sophie, ces investigations, ça a été retrouver des articles de presse,
13:56 ça a été rentrer en contact avec des gendarmeries un peu partout en France,
14:00 ça a été partir en Europe, en République tchèque, en Allemagne, en Belgique.
14:05 Ça a été aussi, et ça a été des moments douloureux, rencontrer d'autres routiers
14:10 qui ont eu, eux aussi, qui ont subi des accidents, qui ont survécu.
14:15 Voilà votre conversation avec l'un d'entre eux.
14:18 - Alors moi, je vais vous dire franchement, j'aurais préféré y passer,
14:23 parce que le défunt, il avait quand même, je crois, une quarantaine d'années.
14:29 Il avait une fille de 7 ans.
14:34 - C'est nul.
14:38 C'est trop dur.
14:40 - Et donc, sur les lieux de l'accident, vous aviez conscience, finalement,
14:43 qu'il y avait d'autres victimes ? Ou vous l'avez appris après ?
14:48 - Non, je l'ai vue, je l'ai vue, parce que même les gendarmes...
14:53 Les gendarmes m'ont dit... "Mais non, mais non, faites pas de souci, il est pas mort, il est pas mort, il est pas mort."
14:58 Pour que, voilà, je...
15:01 Ils étaient prêts à me mettre à l'aimonnette, de peur que je...
15:06 Que je saute de la voiture, que je me suicide.
15:08 - Voilà, extrait du film "Sophie Rollet contre Goudieur",
15:12 qu'on peut déjà voir sur la plateforme arte.tv.
15:16 Vous écoutez France Inter, il est 9h23, et avec vous, Sophie Rollet,
15:19 on retrace ses 8 ans d'enquête solitaire.
15:22 En 2016, vous avez déposé une plainte pour homicide involontaire contre Goudieur.
15:27 Vous avez attendu pendant 4 ans un rapport d'expertise
15:32 qui va vous donner raison, qui va montrer qu'en effet, il y avait des pneus défectueux.
15:36 4 ans, et pendant ces 4 ans,
15:39 vous vous êtes activée, vous avez donc rencontré d'autres routiers.
15:43 Ça a été des moments difficiles pour vous, même humainement ?
15:47 - Alors, je me suis... On va dire que j'ai rencontré très peu de routiers,
15:52 parce que c'est quand même difficile, je veux dire, d'un point de vue émotionnel,
15:56 c'est difficile de les retrouver.
15:58 Il y a peu de routiers, finalement, qui ont eu conscience de cette problématique de pneumatique,
16:06 enfin, je veux dire, cette possibilité d'avoir une défectuosité.
16:09 Et puis...
16:11 Enfin, voilà, donc... Et puis, j'avais toujours ce planning,
16:17 ce temps où je suis maman, et je priorise en fait cette fonction-là,
16:24 je priorise aussi mon travail, donc ça a été très difficile
16:28 de pouvoir aller rencontrer des victimes, et dans un souci de protection pour mon équilibre émotionnel,
16:36 on va dire, j'ai limité ces démarches.
16:39 - Et alors, vous avez une autre idée ? - Et puis, par respect, famille aussi.
16:42 Parce que c'est aussi... Là, on est aujourd'hui quasiment 9 ans après,
16:49 je veux dire, réactiver quelque chose qui peut être un deuil pour toutes ces victimes,
16:57 pas que les routiers, parce qu'on n'oublie pas, effectivement,
17:01 ces voitures qui voient déboucher un camion à contresens sur l'autoroute.
17:08 Donc, il n'y a pas que des chauffeurs, il y a aussi ces usagers de la route,
17:13 ces usagers des autoroutes, qui à un moment T, suite à l'éclatement,
17:17 et c'est ce qui s'est produit pour mon époux qui lui était en camion,
17:20 mais pour toutes ces voitures qui voient en un millième de seconde
17:26 arriver un camion sur leur voie de circulation et qui, eux, ne peuvent rien faire.
17:32 Alors, on a ces morts, mais on a aussi ces blessés qu'on imagine tétraplégiques,
17:39 qu'on imagine brûlés, et ça, en fait, c'est tout aussi ce côté expérience de sapeur-pompier
17:46 qui me ramène à cette conscience-là de toutes ces victimes et de tout ce que ça implique derrière.
17:55 - Alors, ce rapport d'expertise, ça va être une bombe.
17:58 Ce mot "bombe", c'est deux confrères journalistes qui l'utilisent,
18:04 c'est Gérard Davet et Fabrice Lhomme, qui sont deux célèbres journalistes d'investigation
18:08 qui travaillent au Monde, parce que vous avez eu l'idée, vous,
18:12 d'aller chercher de l'aide auprès de journalistes d'investigation ?
18:17 - Alors, effectivement, on parle dans le reportage d'aide, mais en 2016,
18:23 ce que je recherche, c'est le point de vue, le regard d'un professionnel.
18:28 C'est plus ça, c'est que dans la mesure où on me dit "mais, Madame Rolais,
18:32 vous voyez des choses qu'il n'y a pas forcément à voir, vous faites un amalgame",
18:35 enfin, je veux dire, nous, ça ne nous interpelle pas,
18:40 et je me dis "je vais aller chercher l'aide que je vais chercher", c'est le regard de dire,
18:44 et la première question que je pose à Gérard, c'est de mettre sur le...
18:49 - À Gérard Davet du Monde ? - Voilà.
18:51 - Que vous avez contacté par mail, et en fait, vous avez contacté une dizaine de journalistes d'investigation en France,
18:57 personne ne vous a répondu, les seuls qui vous ont répondu, c'est Davet et Lhomme du Monde.
19:01 - Oui, donc j'étais ravie, j'étais contente, et je me suis dit "ça y est, je suis au bout, on est en 2016",
19:06 et je me dis "victoire, quelqu'un va prendre le relais", et je suis...
19:10 et finalement, ça ne se passe pas forcément dans ce que moi j'espère,
19:16 et par contre, il me donne ce... il pose ce regard de dire effectivement "ah oui, il y a peut-être quelque chose", et...
19:24 - Et le "peut-être quelque chose" va être enfin confirmé par ce fameux rapport d'expertise,
19:30 qui dit qu'en effet, il y a eu éclatement de pneus, et qui incrimine des défauts de fabrication du pneu,
19:37 et évidemment, tout ça va ensuite vous conduire chez un juge d'instruction,
19:42 enfin, enfin, la justice va se saisir de ce dossier,
19:48 et la fin du film, elle est belle, elle est émouvante, Sophie Rollet, c'est la vraie question, c'est-à-dire,
19:54 est-ce qu'au fond, vous avez déposé ce fardeau ? Est-ce que c'est à la justice de s'en occuper ?
19:58 Ou est-ce que ça reste encore votre affaire ?
20:02 - Alors, aujourd'hui, ce qui est très satisfaisant, c'est qu'à travers...
20:05 et ça a toujours été l'un de mes objectifs, c'est de faire de la prévention,
20:09 c'est grâce à Arte, grâce à Sylvie Gilman et Thierry Delestrade,
20:16 à travers ce reportage, on a la mise en avant de ce programme d'échange commercial,
20:23 je veux dire, et qui identifie tous les pneus possiblement défectueux qui seraient concernés.
20:32 Et là, en fait, ce reportage, pour moi, c'est vraiment, oui, il atteint l'un de mes objectifs,
20:37 c'est-à-dire que tous les acteurs du transport puissent consulter ce document
20:45 et regarder la montre de leur véhicule, puisqu'en fait, on a quand même une supposition
20:51 sur le fait, une hypothèse de travail, sur le fait que certains de ces pneus
20:55 pourraient encore éventuellement circuler.
20:57 - Voilà, c'est ça. Donc, je récapitule, il y a 76 cas désignés dans le dossier en justice,
21:03 il y a possiblement encore des centaines de pneus en circulation.
21:06 C'est la fin de l'émission, Sophie Rollet.
21:09 Je précise pendant ce temps-là que Goodyear réfute tout lien possible
21:14 entre ces pneus Marathon et la série d'accidents dont vous parlez.
21:19 Et je renvoie nos auditeurs vers ce film passionnant, Sophie Rollet contre Goodyear,
21:23 qui est disponible sur Arte.tv.
21:26 Merci beaucoup Sophie.
21:27 - Merci à vous.
21:28 - Et merci à nos confrères de France Bleu Belfort.
21:31 - Pour le duplex, merci Sonia.

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