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François-Henry Briard, avocat associé auprès du Conseil d’État et de la Cour de cassation, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéresse à l'enjeu de la décision du Conseil d'État concernant le port du hijab durant les compétitions sportives.
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Transcription
00:00 - 12 sur Europe, un très bon début de journée. Dimitri Pavlenko, vous recevez l'avocat François-Henri Briard.
00:05 - Bonjour François-Henri Briard.
00:06 - Bonjour Dimitri.
00:07 - Bienvenue sur Europe, on vous était avocat au Conseil d'État, à la Cour de cassation.
00:11 Faut-il autoriser le port du hijab, le voile islamique, dans les compétitions sportives en France ?
00:16 Le Conseil d'État va rendre sa décision dans la journée, trois jours après des recommandations favorables du rapporteur public.
00:22 Est-ce que vous pouvez, François-Henri Briard, nous aider à évaluer l'enjeu entourant cette décision très attendue du Conseil d'État ? Ça doit tomber en début d'après-midi.
00:32 - Oui, alors il y a un enjeu contentieux qui est celui de la légalité de cet article des statuts de la Fédération française de football.
00:41 Vous savez que la Fédération française de football est chargée d'organiser la pratique du football en France.
00:47 - Ce sont ces statuts qui sont attaqués par le collectif des hijabeuses.
00:50 - Exactement, qui sont attaqués. Donc le Conseil d'État dira si oui ou non, cet article des statuts qui dit "pas de politique, pas de syndicat, pas de signe ostensible d'appartenance religieuse",
01:02 est-ce que cet article doit être annulé ou pas ?
01:06 - Qu'est-ce qui se passe si le Conseil d'État rend un arrêt conforme aux conclusions du rapporteur François-Henri Briard ?
01:13 - Alors c'est une décision de justice, c'est une décision de justice qui doit être respectée.
01:18 Et je dois dire que j'ai entendu le communiqué hier du Conseil d'État qui est très important.
01:25 Moi je fais mon métier, je ne suis pas membre du Conseil d'État, je suis avocat devant cette juridiction.
01:30 Et le Conseil d'État a parfaitement raison de rappeler que ces décisions doivent être respectées.
01:35 Il ne faut pas mettre en cause ni l'indépendance ni l'autorité du Conseil d'État.
01:39 - Oui parce que les conclusions du rapporteur ont d'ores et déjà été attaquées publiquement, politiquement,
01:43 parce que ça... évidemment il y a des enjeux importants autour des questions de laïcité en France,
01:48 et le Conseil d'État s'est senti attaqué dans sa légitimité, François-Henri Briard ?
01:53 - Il y a eu des déclarations qui étaient tout à fait inappropriées, c'est certain.
01:57 Le rapporteur public, je le rappelle, est un membre du Conseil d'État qui donne un point de vue,
02:02 qui est un point de vue tout à fait indépendant.
02:05 Ensuite le Conseil d'État délibère de façon collégiale.
02:08 Alors dans ses recommandations, le rapporteur...
02:12 il faut entrer un peu dans les détails pour saisir, c'est subtil, c'est un peu technique mais c'est important,
02:16 le rapporteur assimile les joueurs et joueuses de football en sélection nationale,
02:20 donc qui portent le maillot de l'équipe de France, à des agents du service public,
02:24 donc astreints à la neutralité religieuse.
02:27 En revanche, le rapporteur estime que quand on joue en club,
02:31 là à ce moment-là on est simple usager du service public,
02:34 et donc on n'est plus astreint à cette obligation de neutralité religieuse.
02:39 Est-ce que ça vous paraît solide cette distinction, François-Henri Bria ?
02:43 - Alors je dirais deux choses.
02:44 D'abord le Conseil d'État connaît bien les questions religieuses depuis très longtemps,
02:47 depuis 1802, je crois qu'il a rendu entre 1802 et 1905,
02:51 près de 400 décisions en matière religieuse.
02:54 C'était des sonneries de cloche à l'époque, aujourd'hui c'est le djab, c'est différent,
02:57 mais le Conseil d'État connaît bien ces questions.
03:00 Le Conseil d'État est attentif à plusieurs principes.
03:03 Le premier, c'est la neutralité de l'État, la neutralité des services publics.
03:08 Le second, c'est la liberté de conscience,
03:10 qui contient en elle-même la liberté religieuse.
03:13 Et le troisième principe, c'est le pluralisme.
03:15 C'est cela la laïcité en France.
03:17 Il y a beaucoup de malentendus sur la laïcité.
03:21 La société civile n'est pas laïque.
03:24 La société civile est libre par définition, elle est plurielle.
03:28 Et le Conseil d'État veille précisément à ce que ces libertés s'exercent
03:33 dans un cadre déterminé et, ce qui est important, dans le respect de l'ordre public.
03:37 On parle beaucoup de l'ordre public ce matin.
03:39 Il y a un ordre public en France qui est aussi un ordre public immatériel.
03:44 - Mais alors, ça pose quand même beaucoup de questions, parce que certains voient,
03:46 on le voit dans le hijab, un instrument de prosélytisme religieux.
03:52 Et donc, finalement, on se dit que la laïcité à la française,
03:56 qui implique une certaine forme de discrétion religieuse dans l'espace public,
04:00 à ce moment-là, se retrouve attaquée par le hijab.
04:03 Est-ce que cette décision attendue du Conseil d'État est une bombe juridique
04:08 qui est à même d'anéantir l'édifice de la laïcité à la française, François Réveillard ?
04:12 - Alors, je ne crois pas. Je pense que la décision du Conseil d'État,
04:14 je vous l'ai dit, va s'inscrire dans une continuité.
04:16 Regardez l'avis de 1989 sur le port du voile à l'école.
04:21 Le Conseil d'État dit bien qu'évidemment, en soi, il y a une liberté.
04:25 C'est la liberté de se vêtir.
04:27 La liberté de se vêtir appartient à la sphère de la liberté personnelle.
04:32 - Mais le hijab est-il un vêtement comme un autre ?
04:35 - C'est la question du prosélytisme.
04:39 C'est une réserve que vous retrouvez dans la ville, 1989.
04:42 Le Conseil d'État fait toujours la réserve en disant "Attention, vous vous habillez comme vous voulez,
04:46 mais pas de pression, pas de prosélytisme, pas de propagande, respectez la liberté d'autrui."
04:53 - Oui parce qu'en fait, finalement, les hijabeuses s'appuient sur cette idée que
04:58 le port du hijab, le droit à se vêtir comme on l'entend,
05:02 même si c'est considéré par certains comme un signe religieux,
05:04 c'est une liberté individuelle indépassable, finalement.
05:08 Est-ce que, je vous repose la question,
05:10 certains ne vont pas y voir une attaque directe de la conception française de la laïcité ?
05:15 Chateauvres en péril, quelque part ?
05:17 - Non, moi je ne pense pas. Je pense qu'il faut être intransigeant sur la neutralité,
05:22 sur le principe de neutralité de l'État, c'est absolument fondamental.
05:25 - De l'État ? - De l'État, des services publics,
05:28 des personnes privées chargées d'une mission de service public, c'est essentiel.
05:31 Pas de religion.
05:32 - Si on prend un... Alors, évidemment, ce que vous dites là, je pense que tout le monde ne sera pas d'accord,
05:36 mais c'est précisément l'enjeu qu'il y a autour de cette décision.
05:39 Si on prend un peu de champ, je relisais un portrait de vous,
05:42 François-Henri Briard, paré dans le Figaro, il y a deux ans,
05:44 vous aviez cette phrase, vous déploriez,
05:46 "Le désordre revendicatif est la névrose juridique contemporaine."
05:51 Est-ce que ce contentieux entre les hijabeuses et la Fédération française de foot
05:54 n'illustre pas justement ça, cette névrose juridique, d'une certaine manière ?
05:59 - Oui, alors écoutez, c'est un thème qui m'est cher...
06:01 - Je ne vais pas vous faire perdre ce que vous n'avez pas dit, mais voilà, je vous pose malgré tout la question.
06:03 - C'est un thème qui m'est cher, je pense que la liberté, en effet, n'est pas...
06:08 La liberté humaine n'est pas la liberté narcissique.
06:11 La liberté ne consiste pas à faire ce que l'on veut,
06:13 la liberté consiste à vouloir ce que l'on fait,
06:16 et la liberté s'exerce dans le cadre d'une société organisée.
06:19 C'est le sens du message que je voulais délivrer,
06:22 et de ce livre dont on a parlé il y a un instant.
06:24 - J'aurais un mot de l'affaire du moment, l'affaire Nahel, si vous me permettez, François-Henri Brouillard.
06:28 On attend beaucoup de la justice dans cette affaire, seulement il y a un brouhaha politique très puissant.
06:33 On pense à Elisabeth Borne, Première ministre, évoquant une intervention manifestement pas conforme.
06:37 Quelles conséquences ça peut avoir sur le travail juridique, selon vous, ça ?
06:41 - Alors écoutez, je pense que les autorités politiques ne doivent pas se prononcer,
06:45 c'est à la justice de se prononcer.
06:47 Ce que je souhaite, comme toutes les Françaises et comme tous les Français,
06:51 c'est que la paix civile revienne, et que l'ordre public soit rétabli.
06:56 Que l'ordre public soit rétabli.
06:57 Je rappelle que l'ordre public est le bouclier des libertés.
07:01 Il n'y a pas de liberté individuelle sans ordre public.
07:04 Ensuite, la justice fera la vérité sur ce qui s'est passé.
07:08 - Merci François-Henri Brouillard d'être venu sur Europe 1 ce matin.
07:11 Je signale votre dernier essai, "Le virus de la liberté",
07:13 préfacé par le général d'armée Jean-Louis Georgelin, c'est aux éditions Ipanema.
07:18 Merci d'être venu nous voir ce matin.
07:19 - Merci Dimitri. - Bonne journée à vous.

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