Anne Fulda reçoit Patrick Chesnais pour son livre «Lettres d’excuses» dans #HDLivres
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Bonjour Patrick Chesnet.
00:02 Bonjour.
00:02 Alors bon, tout le monde vous connaît, le comédien de cinéma, de théâtre.
00:05 Vous avez écrit aussi des livres et là vous venez de publier votre troisième livre
00:09 qui s'appelle "Lettre d'excuse", c'est publié aux éditions de l'Archipel.
00:13 Alors c'est un très joli livre qui est tendre, plein d'humour,
00:18 parfois mélancolique, parfois drôle,
00:21 et qui s'adresse finalement un petit peu à tout le monde,
00:24 et dresse une sorte d'auto-portrait.
00:26 Alors d'abord, écrire un livre d'excuses, c'est étonnant a priori.
00:31 Ce n'est pas un pardon d'ailleurs, ce n'est pas la même chose.
00:35 C'est le mot "excuse", on peut l'employer de différentes manières, c'est très large.
00:37 Le panel est large, on peut chercher les excuses, avoir des bonnes excuses,
00:42 présenter les excuses, etc.
00:44 Voir de mauvaises excuses.
00:46 Les accepter ou pas d'ailleurs.
00:47 Donc on peut jouer avec le mot "excuse" un peu comme on veut, comme on en a envie,
00:52 sauf que je m'excuse vraiment, parce qu'il y a souvent matière à s'excuser,
00:56 surtout moi qui suis quand même d'un âge...
00:59 Donc j'ai beaucoup d'excuses à faire, à avoir derrière moi.
01:02 D'ailleurs c'est le tome 1,
01:04 et je suis en train de préparer le tome 2, 3 et peut-être 10.
01:08 Je m'excuse auprès de gens que j'ai pu blesser,
01:12 ou auxquels je n'ai pas prêté suffisamment l'attention,
01:16 ou où je me suis mis un petit peu en avant.
01:20 J'ai pensé à moi avant eux, par exemple.
01:25 Voilà.
01:27 Et petit à petit, c'est être en train d'excuser des gens que j'aurais pu blesser,
01:32 ou même des gens que j'ai aimés, ou que j'aime toujours,
01:34 la famille, mes proches.
01:36 C'est à glisser vers des excuses à des concepts au soleil, au jazz, à la mort.
01:45 - À l'île de Ré.
01:46 - Le premier auquel vous adressez votre lettre d'excuses, c'est votre fils, Ferdinand.
01:52 Vous écrivez "J'ai des excuses à adresser à tout le monde, je commence par toi, à tout seigneur,
01:56 mais je ne sais pas comment commencer, je ne peux pas dire qu'est-ce que tu deviens mon grand,
02:00 ni alors quoi de neuf, attends je vais trouver mieux, tu me manques là, ça y est, cette fois, on est sur les bons rails."
02:04 C'est très joliment écrit, vous l'adressez à votre fils qui est mort, Ferdinand,
02:09 qui est mort en 2006 dans un accident de voiture.
02:11 Finalement, d'une certaine façon, vous vous excusez d'être toujours là, d'être vous en vie,
02:16 de dire "je m'excuse de vieillir", c'est ce que vous dites.
02:19 - Oui, c'est l'injustice absolue qu'un jeune homme de 20 ans qui meurt,
02:27 c'est sa vie qu'il n'a pas vécue.
02:30 Moi, ça y est, j'ai fait la mienne.
02:32 Oui, je m'excuse, c'est une grosse excuse.
02:35 - Oui.
02:36 Alors, il y a d'autres excuses qui sont moins graves.
02:40 Votre mère, mai 68, l'île de Ré, votre carrière, vous vous excusez auprès de votre carrière.
02:45 Et aussi auprès de Michel Bouquet, qui est un personnage qui compte.
02:49 Dites-nous pourquoi Michel Bouquet, par exemple.
02:51 - Parce que j'ai remplacé Michel Bouquet, qui ne jouait qu'une fois par semaine,
02:57 et moi je jouais le reste du temps, pour des raisons compliquées à expliquer.
03:01 Et les gens venaient voir Michel Bouquet et tombaient sur moi,
03:07 j'étais surpris, un peu pas très content au début, j'imagine.
03:13 Et puis finalement, à la fin, ça allait.
03:15 Et puis, voilà, je m'excuse auprès de Michel Bouquet d'avoir eu l'arrogance
03:22 et la prétention de le remplacer, parce que Michel Bouquet était remplaçable.
03:27 - Alors, il y a une autre lettre d'excuses assez savoureuse
03:29 que vous avez laissée à Elvire Popesco.
03:31 - Oui.
03:32 - Vous vous êtes finalement gentiment moqué d'elle.
03:35 - Oui, Elvire Popesco était une femme avec le langage,
03:39 une immense star du théâtre, j'étais très jeune acteur,
03:45 on avait le fourrure facile avec mes autres potes acteurs.
03:49 Et un jour, il y avait Al Capone, ça se passait à Chicago,
03:54 c'est une pièce de Frédéric Dard.
03:56 En parlant d'Al Capone, au lieu de dire un petit que je faisais sauter sur mes genoux
04:02 et qui me volait mes figues, c'est devenu un petit que je sautais sur mes genoux
04:06 et qui me suçait ma figue.
04:09 Donc là, c'était un peu compliqué pour nous qui avons le fourré constant.
04:15 Voilà, donc on a reçu quelques coups de canne pour nous calmer,
04:18 ça n'a pas suffi, et il y avait surtout une souffleuse,
04:21 vous savez, les trous des souffleurs, comme c'était à l'époque,
04:24 qui hurlait de rire de sa voix d'ancienne tragédienne au chômage,
04:28 de sa voix cassée qui hurlait de rire.
04:31 Et voyant ça, Elio Vosco a pris sa chaussure et l'a balancée de rage,
04:36 toutes ses forces dans l'autre lac, l'a esquivée,
04:40 et on entend à ce moment-là "Raté !"
04:43 Donc là, c'était plus jouable, on a baissé le rideau.
04:46 Pour baisser le rideau quand même, il faut qu'on soit arrivé à un point de non-retour.
04:51 - Et alors aussi, rapidement, il y a une jolie lettre que vous adressez à Mimé de La Garenne.
04:56 Là, c'est une vraie lettre d'excuse, votre grand-mère.
04:59 - Oui, parce que c'est surtout la description de Mimé de La Garenne d'une époque.
05:04 - Oui, toute une époque.
05:05 - Du 19e siècle, qui allumait pas l'électricité parce que ça coûte cher,
05:08 et puis on n'était pas habitués.
05:10 Donc c'était la lampe à pétrole où la lumière du jour,
05:12 elle était petite main pour un couturier.
05:16 Et puis voilà, j'étais provincial,
05:19 et elle m'emmenait à Paris visiter les galeries Lafayette,
05:24 passer devant chez Maxime, en disant "Maxime".
05:27 Et puis une fois, on est allés au théâtre, voir...
05:30 Au théâtre de l'Européen, parce que c'était pas dans la Gare Saint-Lazare,
05:33 c'est juste à côté, voir une pièce avec Fernand Sargoult, père de Michel.
05:39 Et un jour, Mimé est morte, et je suis pas allé la voir tout de suite,
05:43 je suis allé la voir quelques temps après, me recueillir sur sa tombe.
05:48 Et sa tombe avait été détruite parce que c'était que pour un certain temps,
05:53 les concessions étaient menées pour un an, je crois, ou six mois, moins cher.
05:57 Donc je n'ai pas pu la remercier.
06:00 Donc j'ai fait dans ce bouquin.
06:02 Oui, c'est un très joli passage.
06:05 Il y en a plein d'autres, donc dans "Lettres d'excuses",
06:07 ce livre publié aux éditions de l'Archipel.
06:09 Merci beaucoup.
06:10 Merci à vous.
06:11 C'est à lire, et puis en plus, c'est bien écrit.
06:13 Mais...
06:14 C'est ce que je peux.
06:16 Merci Patrick Chenet.
06:17 Merci à vous.
06:18 (musique)
06:22 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]