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Olivier Poels nous raconte l'histoire de la toque.
Retrouvez "Mes aïeux quelle époque !" sur : http://www.europe1.fr/emissions/mes-aieux-quelle-epoque

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Transcription
00:00 historiquement votre, avec Stéphane Bern.
00:02 Mais aïeux, quelle époque !
00:04 Mais aïeux, quelle époque !
00:06 Oui, mais aïeux, quelle époque !
00:07 Une époque et même plusieurs
00:08 qu'on vous raconte chaque jour pendant deux heures.
00:10 Toujours avec Jean-Luc Lemoyne,
00:11 David Cassez-Lopez, qu'on retrouve dans un instant.
00:13 Et maintenant, avec vous, Olivier Pouls,
00:15 notre guide culinaire vivant et même bon vivant.
00:17 Ça s'est passé dans le passé,
00:19 on remonte 700 ans avant Jésus-Christ,
00:21 quand est apparue la première toque de cuisine.
00:25 Le gendarme a son képi, le cow-boy son Stetson,
00:28 le garde britannique son bonnet à poils
00:31 et le cuisinier, sa toque.
00:33 Il faut dire que ce couvre-chef en impose.
00:37 Si vous vous rendez dans les cuisines d'un restaurant gastronomique,
00:40 le simple fait de voir la brigade fièrement coiffée de ses hautes toques
00:45 vous indique qu'on n'est pas là pour rigoler,
00:47 qu'il y a de la compétence derrière les fourneaux
00:50 et que le rite-vaux va être délicieux.
00:53 La toque actuelle a commencé à coiffer les chefs
00:57 au début du 19e siècle.
00:59 Mais l'acte pour le personnel de cuisine
01:01 de porter un couvre-chef spécifique remonte,
01:04 vous l'avez dit, à bien plus loin.
01:06 Et il était au départ symbolique.
01:09 Au 7e siècle avant Jésus-Christ,
01:11 le roi d'Assyrie avait octroyé à ses cuisiniers
01:14 le droit d'arborer des chapeaux distinctifs
01:17 en forme de couronne de tissu.
01:20 Pourquoi ?
01:21 Parce que ça valorisait ceux qui la portaient
01:24 et donc ça aurait pu les dissuader
01:27 de vouloir empoisonner le roi.
01:29 - C'était bien vu.
01:30 - C'était bien vu.
01:31 Durant l'Antiquité, il semblerait que les organisateurs de festins
01:34 coiffaient les cuisiniers d'un haut bonnet
01:37 orné de feuilles de laurier
01:38 pour marquer le début des agapes.
01:41 Mais durant des siècles, toutes ces pratiques ont disparu
01:44 et c'est le crâne nu que le personnel de cuisine a officié.
01:49 Mais en dehors du côté statufiant de celui qui porte la toque,
01:53 cette dernière a aussi une autre fonction,
01:55 hygiénique.
01:57 Ce qu'un cuisinier du roi d'Angleterre, Henri VIII,
02:00 va pouvoir vérifier à ses dépens.
02:02 - J'ai l'impression qu'il ne lui est rien arrivé de bon.
02:04 - Mais non.
02:05 Le malheureux qui préparait le repas tête nue
02:08 a perdu un cheveu
02:09 qui s'est retrouvé dans l'assiette royale.
02:12 Henri VIII, qui coupait davantage les têtes que les cheveux en quatre,
02:17 a fait décapiter ce pauvre marmiton
02:20 à qui appartenait le tif.
02:22 - C'était radical ?
02:23 - C'était très radical.
02:24 Alors vous imaginez bien que fit ça,
02:26 tout le personnel de cuisine s'est évidemment couvert la tête
02:29 immédiatement dans la foulée
02:31 et n'a plus quitté ses couvre-chefs.
02:32 C'est à cette période, au XVIe siècle,
02:34 qu'un peu partout en Europe, les cuisiniers
02:37 ont pris l'habitude de mettre quelque chose sur leur tingasse.
02:41 Aucune règle n'étant établie, à chaque cuisine sa tradition.
02:45 Et c'est en général un bonnet qui est privilégié.
02:47 Il varie de taille, de couleur, de forme.
02:50 Mais au début du XVIIIe siècle,
02:52 un grand chef dont je vous ai déjà parlé
02:55 va mettre de l'or dans tout cela.
02:58 Et ce chef, c'est Antonin Carême.
03:00 - Oui, celui-là même qui accompagnait Talerand
03:03 lors des négociations du traité de Vienne en 1815.
03:05 - Exactement.
03:07 Et qui, quelques années plus tard, en 1821,
03:10 était au service de Lord Charles Stewart, toujours en Autriche.
03:14 Homme rigoureux, précis et attentif aux détails,
03:17 il n'aimait pas les bonnets flasques et mous
03:20 qui coiffaient les cuisiniers.
03:22 Il imagina alors une coiffe plus prestigieuse et imposante,
03:25 dont la hauteur définissait la hiérarchie au sein de la brigade.
03:30 La plus haute étant réservée au chef,
03:33 la sienne mesurait 41 cm.
03:36 C'est aussi lui qui impose la couleur blanche
03:38 pour les tabliers, les vestes et les toques.
03:40 Toques qui sont composées de nombreux plis.
03:43 Est-ce que vous connaissez leur signification,
03:45 tous ces petits plis ?
03:46 - C'est pour serrer la tête.
03:47 A l'époque, ça correspondait au nombre de techniques culinaires
03:51 maîtrisées par celui qui la portait.
03:53 Un chef qui avait 100 plis, c'était le maximum,
03:56 autour de sa toque signifiait qu'il maîtrisait par exemple
03:59 100 recettes d'œufs.
04:01 C'est imparable.
04:02 Les toques hautes ont un autre avantage,
04:05 elles permettent de ventiler le crâne des cuisiniers
04:08 dans des ambiances qui lui fait souvent extrêmement chaud.
04:10 Aujourd'hui, il faut bien dire que la toque n'a plus trop la cote.
04:13 Pour marquer leur originalité,
04:15 les chefs choisissent d'autres couvre-chefs,
04:17 plus tendances, et en font un emblème d'ailleurs.
04:20 Marc Vérat et son célèbre chapeau noir,
04:23 Paul Perret et sa casquette grise,
04:25 ou encore Dominique Grine et son béret.
04:28 Mais la plupart des cuisiniers d'aujourd'hui
04:30 ne portent plus rien.
04:31 Bon, comme un certain nombre d'entre eux
04:33 n'ont plus un poil sur le caillou,
04:34 il y a peu de chances pour que vous retrouviez
04:36 un cheveu dans vos ravioles de homard.
04:38 - Ce serait même un honneur, moi,
04:39 d'avoir un cheveu de Pierre Gagnère dans ma soupe.
04:43 - Vous la garderiez ?
04:44 - Vous le sauriez cloner et reproduire.
04:47 - David qui est d'ailleurs un peu fétichiste des cheveux,
04:49 puisqu'il a gardé des cheveux de 8 mètres.
04:52 Vous nous avez raconté, c'est une foi.
04:53 - Bien sûr, il a trop peur qu'on lui retrouve dans la soupe.
04:56 Merci beaucoup Olivier Mézailleux.