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Jeudi 15 juin 2023, SMART BOURSE reçoit Michael Israël (IVO Capital Partners)

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00:00 *Musique*
00:10 Le dernier quart d'heure de Smart Bourse, c'est le quart d'heure thématique.
00:13 Le thème ce soir, c'est celui du crédit, de la dette émergente plus précisément, qui est la spécialité,
00:20 une des grandes spécialités d'Ivo Capital Partners et son co-fondateur Michael Israel, qui est à mes côtés en plateau.
00:25 Michael, bonsoir.
00:26 - Bonsoir Yves.
00:27 On est quasiment à mi-parcours de l'année 2023, où l'idée était de faire un bilan peut-être de cette première partie d'année
00:33 et puis d'ouvrir sur les perspectives pour les prochains mois et les prochains trimestres.
00:36 C'est le constat peut-être duquel on peut partir avec vous, Michael.
00:40 Ce phénomène de divergence qu'on peut observer entre la dynamique des marchés de crédit dans le monde développé,
00:46 Etats-Unis et Europe, et la dynamique du crédit des entreprises appartenant à la sphère émergente.
00:54 Les "spreads", comme on dit, les écarts de taux entre le monde développé et le monde émergent n'ont pas évolué de la même manière sur cette première partie de l'année ?
01:01 - Oui, c'est totalement vrai.
01:04 Les émergents en général n'ont pas la cote depuis le début de l'année.
01:08 Les marchés actions sont largement moins performants que les marchés développés depuis le début de l'année.
01:15 C'est vrai aussi dans les obligations.
01:18 Et on a assisté à de l'écartement de "spreads".
01:22 C'est marrant parce que depuis deux semaines, il y a des bonnes nouvelles sur les émergents.
01:29 Les performances sont en train d'accélérer.
01:32 Mais jusqu'au 30 mai, il y avait des écarts assez spectaculaires qu'on ne voit pas toujours.
01:38 On avait d'un côté de la compression de "spreads" sur les pays développés, et notamment sur le High Hill du US.
01:43 Sur les émergents, c'est un peu la logique "qu'est-ce que j'ai d'abord chez moi, et quand ce n'est plus assez bien chez moi, qu'est-ce qu'il y a un peu plus loin ?"
01:51 Donc normalement, les US "drive" un peu ce qui va se passer sur les émergents.
01:56 Surtout pour nous qui sommes sur les obligations au dollar.
02:00 On a vu de la compression de "spreads" tout au long de l'année, depuis le début de l'année.
02:04 Et donc des performances relativement positives.
02:07 Puisque si vous avez de la compression de "spreads", vous avez les prix des obliques qui augmentent, et les coupons.
02:12 Tout ça, mi-bout à bout, 6 mois de coupons.
02:14 Ça fait des performances assez jolies à regarder pour les pays développés.
02:18 Et c'est moins le cas sur les pays émergents, parce qu'on a eu des écartements de "spreads" au point d'effacer des coupons encore plus élevés que ceux qu'on a sur les...
02:28 Donc en fait, à fin mai, on avait effacé avec l'écartement des "spreads", on parle quand même de plus de 100 BP d'écartement de "spreads" à un certain moment de l'année.
02:37 Au point d'effacer les coupons qui avaient été encaissés, parce que les entreprises "performent", elles payent leurs coupons.
02:43 Donc il y a eu vraiment une divergence réelle.
02:45 Qu'est-ce qui a pu motiver cet écartement un peu sévère, un peu sérieux, tel que vous le présentez, Michael ?
02:51 Alors jusqu'au 30 mai, on parlera de ce qui se passe depuis le début du mois de juin ensuite, mais qu'est-ce qui a pu motiver cette divergence ?
02:59 Alors, moi, j'aime bien dire ça, c'est que si vous aimez les marchés imparfaits, ce qu'il paraît que les financiers cherchent, les imperfections...
03:06 Les inefficiencies !
03:07 Les inefficiencies, eh bien, bienvenue !
03:09 Donc qu'est-ce qu'on a ? On a ce qu'on vous raconte à chaque fois, c'est-à-dire que ça dépend de ce qui se passe sur les souverains.
03:15 Et donc depuis le début de l'année, ça s'est allumé à pas mal d'endroits au niveau souverain.
03:21 Et il y a eu la contamination. Si je vous dis la Turquie, vous en doutez. Il y a eu les élections.
03:25 À un moment donné, on était au 30 mai, on était à plus de 170 BP d'écartement de "spreads" sur le souverain.
03:29 Mais évidemment, tout le corps-pau a été emporté.
03:32 Vous avez des grands pays comme la Colombie. Pareil, plus de 130 BP.
03:36 L'Afrique du Sud, quand il y a eu l'histoire des ventes d'armes à la Russie, c'est un gros écartement de "spreads" sur le souverain.
03:43 Donc il y a eu cette contamination, et assez marquée depuis le début de l'année, sur les codes postaux.
03:48 Puis il y a aussi le problème chinois du "real estate", etc.
03:51 Il y a eu plus de 600 BP d'écartement de "spreads", encore, sur la première partie de l'année.
03:56 Ah oui, parce qu'on n'en parle plus du tout. Enfin, on n'en parle plus du tout...
03:59 Mais le problème, non seulement, est loin d'être réglé, mais il est encore en cours, de ce point de vue-là.
04:03 Il est encore en cours, et évidemment, c'est très volatil.
04:07 Maintenant, il y a un autre sujet technique qui est intéressant, parce que là aussi, ce n'est pas lié aux fondamentaux.
04:14 C'est des... Comment vous avez dit ? Des "inefficients" ?
04:16 Oui !
04:17 Je vais vous donner un exemple. Si vous êtes dans les actions émergentes, parce que c'est la meilleure analogie pour comprendre ce point-là.
04:22 Si vous êtes dans les actions émergentes, les émergents, c'est un pot pourri.
04:26 On a mis un peu tout là-dedans, et on sait qu'il y a beaucoup d'hétérogénéité.
04:30 Quand vous êtes dans les actions émergentes, si vous n'êtes pas positif sur la Chine, vous pouvez acheter un ETF sur le MSCI India.
04:38 Depuis quelques mois, c'était un peu le plai. Les gens étaient négatifs sur la Chine, positifs sur l'Inde.
04:43 Et donc en termes de flux, ce n'est pas parce que vous êtes négatif sur les émergents que tous les pays sont affectés de la même manière en termes de flux.
04:50 D'accord.
04:51 Mais vous ne pouvez pas faire ça sur les obliques. Vous ne pouvez pas.
04:53 C'est-à-dire que si vous voulez dire demain que vous êtes positif sur l'Inde, que vous voulez acheter un ETF sur les corpos émergents indiens, ça n'existe pas.
05:01 Donc vous ne pouvez acheter qu'un seul ETF. Et donc on a eu les flux contre nous, parce qu'il y a quand même eu des mauvaises nouvelles sur la Chine notamment,
05:09 que ce soit la géopolitique, en parlant de l'économie.
05:12 Eh bien, vous avez tout l'émergent qui n'a pas de flux.
05:16 Voilà.
05:18 Non mais c'est intéressant. C'est un sujet industriel. Il y a un manque de finesse dans l'offre de produits sur la dette émergente qui rend les choses beaucoup plus difficiles, en tout cas à piloter finement.
05:32 Oui, exactement. C'est-à-dire que comme il n'y a pas d'ETF, je parle des ETF parce que c'est quand même aujourd'hui dans les autres marchés que vous avez les flux.
05:38 Oui, c'est ce qui drague beaucoup de liquidités, bien sûr.
05:39 Eh bien, comme il n'y a pas d'ETF au niveau granulaire au point d'être dans les pays, on se retrouve toujours dans le pot pourri.
05:45 Oui, je comprends.
05:46 Et si vous aimez les indifférenciations, eh bien là, vous êtes en plein dedans.
05:51 Très important de comprendre ça pour comprendre comment le marché, cette partie-là du marché fonctionne.
05:55 C'est très propre à cette classe d'actifs.
05:57 Bon, donc ça c'était jusqu'au 30 mai, Michael.
06:01 Voilà.
06:02 Depuis le début du mois de juin, vous dites, le phénomène semble se renverser. En tout cas, il y a un rattrapage de la dette émergente, des spreads émergents qui commencent à se resserrer.
06:12 Tout ça, Michael.
06:13 Tout à fait, exactement. Donc on a vu là un bon ressortement des spreads.
06:17 Alors on a encore de la marge. Pourquoi on a encore de la marge ?
06:20 On a de la marge en absolu parce qu'on est au-dessus des 500 BP.
06:23 On était passé bien au-dessus des 600.
06:25 Évidemment, quand vous êtes prêteur, vous aimez prêter quand l'argent est cher.
06:29 Et quand on était à 600, les gens sont un peu plus hésitants.
06:33 Mais c'est là où c'est plus intéressant, évidemment.
06:35 Et à 550, on est encore dans une zone qui n'est pas inintéressante.
06:38 Mais là où c'est plus intéressant, c'est ce que je vous disais tout à l'heure par rapport au high yield US.
06:41 Les gens nous trouvent intéressant s'il y a un extra rendement par rapport au high yield US.
06:47 Et là, pour le coup, c'est intéressant.
06:49 On est vraiment, si vous regardez par rapport à la médiane, on est deux fois...
06:52 Deux écarts typos dessus.
06:54 Exactement. On donne le double du spread habituel, enfin d'écart habituel entre les deux.
06:59 Donc ce qui est possible, c'est qu'il y ait encore du chemin de compression de spread
07:03 pour venir se remettre au moins à la médiane.
07:05 Et là, on parle de à peu près 50, 70 BP encore assez facilement.
07:10 Et puis si les spread US continuent à baisser, là il y a encore plus de chemin possible à faire.
07:16 Qu'est-ce qui va motiver ce scénario que vous décrivez, Michael, ou à l'inverse ?
07:22 Quel est le risque que le scénario ne se déroule pas comme prévu au-delà des quelques semaines du mois de juin
07:27 qui montre effectivement qu'il y a un redémarrage assez fort d'appétit pour la dette émergente ?
07:32 Bon, alors d'abord, c'est que la macro, très macro mondiale,
07:37 elle se déroule un peu comme, un peu idéalement pour les obliques.
07:41 C'est-à-dire que finalement, on n'est pas dans un scénario d'une énorme récession et le mur en face de nous.
07:49 Et donc on va dire que les sociétés, le segment high yield qui est supposé être plus vulnérable,
07:55 c'est un peu le scénario idéal. C'est-à-dire qu'il n'y a pas une grosse récession, il y a du rendement,
07:59 les entreprises peuvent passer ça et vous êtes bien payés.
08:02 Et comme je le disais de temps en temps, en plus c'est des scénarios intéressants pour les prêteurs
08:06 parce qu'on n'a pas les lunettes roses, donc les sociétés ne sont pas en train de faire des plans d'investissement, etc.
08:12 Elles ne sont pas dans l'endettement mais plutôt dans le désendettement.
08:16 Donc là, c'est un peu ce qui est en train de se produire.
08:19 L'histoire des taux et de l'inflation, là aussi il y a plutôt des bonnes nouvelles.
08:23 Et puis sur la courbe américaine, on disait qu'elle est peut-être un peu plus en avance que l'européenne.
08:28 Aujourd'hui, on se dit "tiens, pourquoi pas".
08:30 Donc là aussi, il y a peut-être une désynchronisation.
08:33 Tout ça, ce sont des ingrédients parfaits pour les obligues en dollars et pour les émergentes, c'est très positif.
08:41 De manière plus générale encore, il y a ce concept, pour bien comprendre l'intérêt de l'obligataire,
08:48 de la dette d'entreprise notamment aujourd'hui, mais émergents ou développés,
08:53 il y a ce concept de valeur embarquée, c'est ça que vous développez, Michael.
08:59 Certes, les rendements sont attirants, surtout pour toute une génération qui n'a pas connu des rendements de ce niveau-là.
09:05 Alors il faut regarder, corriger de l'inflation, rendement réel, etc.
09:09 Mais c'est vrai que les rendements sont intéressants.
09:11 Mais encore une fois, quand je fais le bilan à mi-année, à la fois j'ai des actifs risqués type actions qui ont très bien rendu.
09:18 On est sur des PERF à 2 chiffres, +15% même pour le marché américain.
09:22 Donc de ce point de vue-là, le risque ultime a quand même très bien payé.
09:26 Et puis à l'inverse, j'ai des produits monétaires, des produits bancaires, des produits de cash dont on ne parlait absolument plus,
09:34 qui redeviennent une classe d'actifs également en concurrence.
09:37 Alors là, pour du sans risque, mais avec des rendements justement pour du sans risque, qui sont quand même très appréciables.
09:43 Et au milieu de ça, on ne sait plus trop si l'obligataire est vraiment intéressant ou pas, Michael.
09:48 C'est un bon diagnostic. On est pris en étau un peu par tout ça.
09:53 Et en plus, les PERF depuis le début de l'année, de l'obligataire, même les développés qui ont bien marché,
09:58 comme le reste a très bien marché, ça paraît...
10:01 — Il m'émince ! On m'a dit d'aller sur les bonds, mais en fait c'est les actions que j'aurais à ajouter.
10:05 — Alors c'est intéressant parce qu'on pourrait dire qu'on est mal habitué. Je vais vous dire pourquoi.
10:10 Jusqu'à maintenant, qu'est-ce qui se passe ? Le principe des obligations... Moi, je prends souvent aussi cette analogie.
10:15 J'aime bien les analogies. Donc on va dire que c'est un petit peu comme... Vous prenez une gourde, d'accord, et vous la remplissez d'eau.
10:21 Et on va dire que cette eau, c'est votre rendement futur. D'ailleurs, c'est une bonne analogie, parce que c'est ce qui va vous donner
10:27 votre rentabilité de demain, votre survie de demain. Et qu'est-ce qui s'est passé ? On a eu un énorme krach obligataire.
10:34 On a eu des écartements de spread. Et donc on a rempli la gourde. On l'a bien remplie. Elle s'est bien remplie.
10:38 C'est un peu tout ce que tout le monde vous dit, le retour des obligations. Il est là. Il est vrai.
10:43 Les gourdes se sont remplies. Et significativement, et selon comment on construit les portefeuilles, avec du high yield,
10:48 de l'investment grade, de la duration... Pas de la duration, mais de la valeur, il y en a. Ça, c'est sûr.
10:53 Seulement, jusqu'à maintenant, à chaque fois qu'il y a eu ces moments-là où on avait re-rempli la gourde,
10:57 on a réglé ça immédiatement par des banques centrales qui ont troué la gourde et toute l'eau est retombée d'un coup.
11:04 Et tout ce rendement futur qu'on avait pris, on le touchait tout de suite. Un de nos fonds a fait 19 % une année.
11:11 Ce ne sont quand même pas des performances obligataires.
11:13 Ah oui, sur le marché obligataire, oui.
11:14 Exactement. Et ce ne sont pas les performances qui étaient annoncées. Ça n'a rien à voir avec le rendement.
11:18 Donc, ça n'affichait pas 19 % de rendement. Les gens sont habitués à avoir eu le rendement tout de suite.
11:23 Et comme là, tout simplement, on a évidemment rechargé en valeur embarquée, mais on n'a pas troué la gourde.
11:30 Bien sûr.
11:31 Et qu'on va peut-être toucher ce rendement le même, mais plus durablement. C'est des notions qui sont un petit peu courtières.
11:39 Oui, je comprends tout à fait. Ce qu'on pouvait obtenir en un temps très réduit en termes de rendement, on l'obtiendra toujours,
11:45 mais sur une période capitalisée, sur la durée de vie de l'obligation ou de l'investissement obligataire.
11:51 Et si vous vous mettez over the period, comme on dit, je peux vous dire, je le redis, mais là,
11:56 et vous regardez vraiment cette valeur qu'il y a dans la gourde, ça va être dur à battre.
12:00 On parle de portefeuilles obligataires qui ont entre 30 et 50 % de rendement embarqué.
12:05 Même si vous mettez les frais, les défauts et tout ce que vous voulez, en net de net, ça commence à faire des rendements très sérieux.
12:13 C'est la réalité, c'est dans la gourde. En combien de temps et quand elle va être servie, comment, ça c'est l'histoire qui va le dire.
12:21 Oui, mais je pense qu'on a été mal habitué à plein de choses.
12:25 Ça prend un peu de temps de se déshabituer ou de se réhabituer à quelque chose de plus normal, mais c'est en cours.
12:33 Exactement.
12:34 Merci beaucoup, Michael. Merci de venir nous éclairer sur ces sujets obligataires.
12:37 La dette émergente, je le rappelle, qui est la spécialité d'IVEO Capital Partners.
12:41 Vous êtes cofondateur d'IVEO Capital Partners.
12:44 Michael Israël, qui était l'invité du quart d'heure thématique de Smart Bourse ce soir.
12:47 Voilà pour cette édition. On se retrouve demain à 12h30 en direct sur Bismarck.
12:52 [Musique]

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