C’est quoi le problème avec MonParcoursPsy ? Cofondatrice du #manifestepsy, Camille explique pourquoi elle et beaucoup de psychologues ont décidé de boycotter le dispositif du gouvernement sur la santé mentale
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Mon parcours psy, c'est un gros problème pour les psychologues français et puis pour les patients,
00:04 mais c'est un pied dans la porte, c'est une ouverture vers une véritable destruction des soins psychiques en France.
00:10 Le gouvernement a mis en place le dispositif Mon parcours psy,
00:14 c'est soi-disant un dispositif de prise en charge psychologique, de soutien psychologique sur 8 séances,
00:20 remboursé par l'assurance maladie et votre mutuel.
00:24 Les chiffres du gouvernement qui sont tombés la dernièrement,
00:26 c'est qu'il y a environ 2200 psychologues qui se sont conventionnés sur près de 70 000 psychologues en France.
00:32 Pourquoi les psychologues français luttent contre ce dispositif ?
00:37 Déjà, vous êtes obligé de passer par un médecin généraliste pour avoir une prescription,
00:41 alors qu'en tant que patient en souffrance psychique, vous n'avez peut-être pas forcément le souhait
00:46 d'aller parler de votre intimité psychique à votre médecin,
00:49 notamment votre médecin traitant qui peut-être connaît votre famille.
00:52 La difficulté, c'est que forcément, vous êtes obligé d'aller voir un des psychologues conventionnés,
00:58 donc vous n'avez plus le libre choix du professionnel.
01:01 Il y a aussi d'autres problématiques avec ce dispositif.
01:04 Déjà, en tant que patient, vous allez voir un psychologue et au bout de 8 séances, c'est terminé.
01:09 Vous êtes finalement au tout début d'une prise en charge et ensuite, ça s'arrête là.
01:13 On nous a expliqué de la part du gouvernement que c'est parce que c'est un dispositif de première ligne,
01:18 uniquement pour des troubles légers à modérer, et qu'en 8 séances, c'est réglé.
01:22 Et que s'il y avait besoin de plus de séances, c'est que ce n'est pas un trouble léger à modérer,
01:25 et que dans ce cas-là, il faudrait consulter un psychiatre.
01:27 Ça n'existe pas de trouble léger, modéré, sévère, pas sévère.
01:31 On ne sait pas ce que c'est, nous, en tant que psychologues cliniciens,
01:34 cette intensité des troubles et des symptômes. On ne travaille pas comme ça.
01:38 Donc en fait, ce dispositif n'est pas adapté à la réalité du terrain.
01:41 Nous, on reçoit toutes les souffrances psychiques, quelles qu'elles soient.
01:44 C'est un dispositif de soins somatiques. Il a été calqué sur un modèle médico-centré.
01:50 Mais on ne soigne pas les problématiques psychiques et les souffrances psychiques
01:53 comme on soignerait un problème de santé somatique.
01:56 Finalement, on peut résumer mon parcours psy comme étant un pansement troué sur une plaie infectée.
02:01 Quelle est la plaie infectée ? Ce sont les services publics,
02:03 les services de soins psychiques publics français, qui sont en ce moment en train d'être totalement démantelés.
02:08 Donc tout a été mis dans ce dispositif poudre aux yeux, mon parcours psy,
02:12 afin que la population se dise "Tiens, finalement, les séances chez un psychologue, ça peut être gratuit, ça peut être remboursé".
02:18 Mais ça, ce n'est pas nouveau. Les séances chez un psychologue gratuites et 100% remboursées, ça existe depuis près de 30 ans.
02:25 C'est dans les CMP, dans les centres médicaux psychologiques,
02:28 et dans toutes les structures publiques de soins psychiques en France.
02:32 Mais malheureusement, actuellement, les CMP, comme il n'y a plus de moyens humains et financiers qui sont injectés à l'intérieur,
02:38 il y a des laissez-d'attente parfois de plus de 3 ans dans certaines structures.
02:42 Le budget du gouvernement qui est passé dans le dispositif mon parcours psy, effectivement, on estime que c'est monteux.
02:48 On l'a dit, ça n'a servi à rien.
02:50 Ça a permis de recevoir 0,13% de la population française pour une moyenne de 4,2 séances,
02:58 donc environ 2 heures de prise en charge par patient.
03:03 Donc ça n'a servi globalement à rien.
03:05 Ces 50 millions qui ont été alloués dans mon parcours psy cette première année
03:09 auraient effectivement pu être injectés dans les services publics et dans les structures de soins psychiques publiques françaises.
03:16 Ça aurait permis sur 10 ans de développer 200 postes de psychologues de façon pérenne.
03:21 Ce qui est énorme et ce qui aurait justement permis d'alléger et d'amincir ces listes d'attentes.
03:28 Pratiquer les soins psychiques auprès des patients, ça relève d'un haut niveau de compétence.
03:32 Tout le monde n'est pas formé pour ça et peut-être que le gouvernement devrait discuter et échanger véritablement avec les acteurs de terrain,
03:40 que sont les psychologues, cliniciens, psychothérapeutes,
03:42 qui sont les seuls professionnels qui soient vraiment compétents dans les soins psychiques.
03:46 On ne peut pas créer des dispositifs qui contreviennent en tout point à notre éthique et à notre code de déontologie,
03:53 qui ne permettent pas aux patients d'aller mieux, sans nous concerter et sans échanger avec nous.
03:59 [Musique]