Les dernières images sont les plus belles, les plus émouvantes. Le gros plan sur Eric Di Meco permet de voir que ses yeux sont rougis, il est au bord des larmes lorsqu’il évoque son rapport à Marseille. "Ce titre me colle à la peau, chaque jour que Dieu fait. C’est l’histoire de ma vie".
Du début de l’entretien où il avoue qu’à l’été 1992, jamais il n’aurait imaginé que l’OM allait gagner la Ligue des champions cette saison-là, qu’il a bien failli quitter l’OM, poussé dehors par Bernard Tapie, jusqu’à la fin, quand "Bernard Tapie, Jean-Louis Levreau et Jean-Pierre Bernès sont venus me soutenir au stade Vélodrome, parce qu’ils ont cru que j’allais faire un malaise", le Minot assume son appartenance à cette ville, l’apogée de sa carrière à Milan qu’il attribue en premier lieu à Fabien Barthez, dont les arrêts ont été déterminants. Fidèle à lui-même, Eric est fluide, sincère, drôle, naturel, un vrai plaisir...
Du début de l’entretien où il avoue qu’à l’été 1992, jamais il n’aurait imaginé que l’OM allait gagner la Ligue des champions cette saison-là, qu’il a bien failli quitter l’OM, poussé dehors par Bernard Tapie, jusqu’à la fin, quand "Bernard Tapie, Jean-Louis Levreau et Jean-Pierre Bernès sont venus me soutenir au stade Vélodrome, parce qu’ils ont cru que j’allais faire un malaise", le Minot assume son appartenance à cette ville, l’apogée de sa carrière à Milan qu’il attribue en premier lieu à Fabien Barthez, dont les arrêts ont été déterminants. Fidèle à lui-même, Eric est fluide, sincère, drôle, naturel, un vrai plaisir...
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00:00 Ça fait 30 ans aujourd'hui, c'est déjà un bon bout de vie.
00:06 Alors que nous, ça a été l'apogée de notre vie.
00:10 On va se voir tous les 10 ans maintenant, mais 30 ans c'est une date qui me plaît.
00:14 Parce qu'on a beaucoup de recul par rapport à l'événement, donc il n'y a plus toute
00:17 l'effervescence.
00:18 Et on est encore conscients, on n'est pas encore tout à fait gaga tous.
00:22 Donc on est encore conscients de ce qu'on fait et on se rend compte qu'on est rentré
00:26 dans l'histoire.
00:27 Alors Eric, quand on reprend la chronologie de cette saison à l'été 92, on a du mal
00:44 à imaginer que vous allez gagner la Coupe d'Europe, non ?
00:47 Elle est hyper compliquée avec tout ce qui s'est passé, Furiani, l'équipe de France
00:53 qui se vote à l'Euro, les départs des tauliers comme Jean-Pierre, Carlos et Chris.
01:00 C'est une préparation de saison qui n'est pas faite pour aller chercher le titre de
01:06 champion d'Europe.
01:07 Vous-même, vous avez failli partir ?
01:08 Jean-Noël Fernandez arrive, je sors d'une saison blanche parce que j'avais été blessé
01:12 et Marthapy ne voulait plus de moi.
01:15 Et je sais que son épouse Dominique avait plaidé pour moi, mais surtout que Jean-Noël
01:22 Fernandez a tout fait pour me garder puisque je l'avais appelé un jour en lui disant
01:25 que je devais partir, je devais aller à Nîmes en plus.
01:27 Et Jean-Noël me dit "non, ne pars pas, tu verras, t'inquiètes pas, tu auras ta chance
01:32 et je sais que je peux compter sur toi".
01:35 Les premiers mois de cette saison ont été particulièrement compliqués.
01:38 La complexité du début de saison avec tous ces changements a fait qu'on a galéré.
01:44 Il y a eu ce fameux match contre Nantes au stade Vélodrome.
01:47 Je m'en souviens bien parce que d'abord, Bernard Tapie nous garde dans le vestiaire,
01:52 ça avait chauffé dans les tribunes après nous.
01:55 Et il y a même des supporters qui nous avaient attendus alors qu'on était sortis à une
02:00 heure du matin du vestiaire.
02:02 Et il y en avait un qui avait jeté une pierre sur la voiture de Rudy Voller.
02:08 Et il s'était arrêté pour le recourir après.
02:10 Donc c'était quand même chaud le début de saison.
02:13 Et puis il y a même la qualification pour ces fameux matchs de poules là, puisque la
02:17 formule était un peu bizarre à l'époque, où on tremble au retour contre Bucarest pour
02:24 se qualifier.
02:25 Et avec une grosse pression parce que Tapie allait tout dégager si jamais ça passait
02:30 pas en poules.
02:31 Peu à peu, cette équipe trouve son identité et notamment dans les gros matchs, en Europe
02:36 et en France contre PSG.
02:38 C'est clair que s'il y a un match qui symbolise un peu l'état d'esprit de cette équipe
02:42 là, c'est celui au PSG juste avant la trêve hivernale.
02:45 Je me plais à dire régulièrement que c'est pas la plus belle équipe dans laquelle j'ai
02:49 joué de l'OM, mais c'est celle avec laquelle j'irai à la guerre.
02:52 Et ce match là reflète l'état d'esprit de cette équipe là.
02:56 Moins de talent, plus de combativité, plus de solidarité justement.
02:59 Et ce match à Paris, on m'en parle encore.
03:04 Même moi quand je le revois aujourd'hui, ça fait peur.
03:09 Pendant les 21 minutes, il y a des coups de tous les côtés.
03:11 Il y a je ne sais pas combien de fautes sifflées, je ne sais pas combien de cartons jaunes.
03:14 Aujourd'hui ce match là, il s'arrête parce qu'il y a trop d'expulsés.
03:19 Quand on voit ce match là, quand on voit comment on va le gagner contre notre adversaire
03:23 de l'époque en championnat, on se rend compte que cette équipe là a un truc en plus par
03:28 rapport à ses devantières.
03:29 Peut-être plus talentueuses, mais là, je le dis, tu pouvais aller à la guerre avec.
03:35 Raymond Gauthals qui reprend les rênes de l'équipe au détriment de Jean Fernandez,
03:38 s'était attendu auprès des joueurs ?
03:40 On le voyait toujours tourner autour de l'équipe.
03:43 Il avait du mal à lâcher ce rôle d'entraîneur.
03:47 Il était derrière Jeanno Fernandez.
03:49 Je pense que Janno en a souffert.
03:51 Parce que c'est difficile de passer derrière Raymond et de pouvoir exister.
03:55 Je ne vais pas dire qu'il lui a savonné la planche, mais je pense que vu comment avait
04:02 débuté la saison, il a tout fait pour récupérer l'équipe.
04:06 Et nous malgré tout, on le sentait.
04:08 On sentait que Janno était fragilisé, que Bernard Tapie avait plus trop confiance en
04:12 lui et que Raymond n'attendait que ça.
04:15 C'était une demi-surprise on va dire.
04:17 Parmi ceux qui ont des difficultés initiales, celui qui a eu l'ascension la plus spectaculaire,
04:22 c'est sûrement Marcel Desailly.
04:23 Je me souviens de ses difficultés en début de saison où même lui le reconnaît aujourd'hui.
04:29 Il ne savait plus jouer au foot tellement qu'il avait pris la pression.
04:32 A l'entraînement, on prenait un malin plaisir quand on faisait les taureaux à lui faire
04:36 des petits paumes parce qu'il avait ses grands compas.
04:38 Et ça le rendait fou.
04:41 Et surtout, il a eu du mal à passer de Nantes à l'OM, à passer le palier supplémentaire.
04:48 Il y a un match à Toulon où on m'a joué, où lui joue en levée de rideau avec la 3ème
04:52 division.
04:53 Marcel ne comprend pas ce qui lui arrive.
04:56 Et c'est petit à petit.
04:58 Alors Alain Boxic, lui, c'est plus dès que sont arrivés les gros matchs où il a commencé
05:02 à claquer des buts importants.
05:03 On sait que le buteur, dès qu'il commence à marquer, ça se passe bien.
05:08 Lui, Marcel, il a fallu qu'il rentre, qu'il sorte, qu'il se fasse sa place, qu'il trouve
05:15 son poste dans un dispositif qui était particulier.
05:17 Puisque des fois, il jouait à deux défenses sur centros, mais souvent à trois pour arriver
05:21 au niveau qui a été le sien derrière.
05:23 Mais lui, ça a été six mois de souffrance.
05:25 Le tournant, c'est votre premier match de poule à Glasgow.
05:28 Le match à Glasgow, on peut le présenter comme le véritable tournant de la saison pour nous.
05:32 On a un truc de particulier dans cette équipe-là, notamment dans l'adversité.
05:37 Ce match-là, quand tu le revois, tu te dis, tiens, on aurait dû le gagner facilement.
05:43 Et puis, finalement, on est allé chercher un nul dans la souffrance qui montre qu'encore
05:48 une fois que cette équipe-là est capable d'encaisser des grosses pressions.
05:53 Alors, attention, Glasgow Rangers, ce n'était pas une grande Europe, mais à l'époque,
05:58 c'était solide.
05:59 Ils avaient une belle équipe, que des internationaux écossais, renforcés par des Anglais très forts.
06:05 Et surtout, le contexte du match, ce stade plein, avec cette ambiance, avec cette pluie
06:10 qui tombe pendant une heure et demie.
06:12 On peut dater le virage vers la finale à ce moment-là en Ligue des Champions.
06:19 Fabien Martès, c'est une révélation pour vous ?
06:21 Il joue très rapidement, alors que ce n'est pas prévu.
06:25 Et qu'il est, mais alors, d'un flingue assez impressionnant pour son jeune âge et
06:31 puis pour la pression qu'il a.
06:32 Parce qu'il y a la pression de Tapie au-dessus, il y a la pression de Pascal Lometa qui est
06:39 là derrière.
06:40 Et il n'a jamais montré de signe d'anxiété, même dans les moments où ça allait mal.
06:45 Parce que le fameux match de Glasgow, il prend la marée, sur tous les ballons aériens,
06:50 il s'est fait bouger parce que là-bas, il a eu l'ordre d'aplafonner le gardien.
06:55 Et on se rend compte que, même nous, sur le coup, on le trouve un peu tendre sur ce
07:01 match-là.
07:02 Parce que c'est toujours bien quand tu tiens un gardien qui rassure, notamment sur les
07:05 ballons aériens.
07:06 Et en effet, le baptême du feu pour lui avait été un peu douloureux.
07:11 Même après ce match-là, je n'ai jamais vu trembler ce mec.
07:17 Je n'ai jamais vu anxieux, je n'ai jamais vu soucieux par rapport à son poste ou à
07:25 ses performances.
07:26 Il prend naturellement la place de Pascal.
07:29 Et j'ai l'impression que Pascal, il le dira sûrement mieux que moi, normalement, quand
07:34 un gardien perd sa place, il le vit toujours un peu mal.
07:39 Et ce n'est pas évident, la gestion des gardiens de but.
07:42 On a l'impression aussi, voire même sur la gestion de toute la saison derrière, il
07:47 est adoubé par Pascal, finalement.
07:49 Pascal se rend compte que c'est un phénomène.
07:52 Nous, sur les premiers matchs, il a pu nous faire peur.
07:55 Pascal, il lâche presque vite l'affaire.
07:58 Il se dit « je suis en train de me faire piquer la place par un monstre ».
08:01 Et ce qui sera la réalité derrière quand on voit ce qu'il fait cette saison-là,
08:06 ce qu'il fait en finale, parce que je parle du principe que Fabien nous fait gagner la
08:09 finale, et ce qu'il fait sur l'ensemble de sa carrière.
08:13 Signe de sa décontraction, il se dit même qu'avant le coup d'envoi, il se rend compte
08:16 qu'il n'a pas ses gants.
08:17 Je ne sais toujours pas ce qui est la réalité, ce qui est la légende.
08:20 Parce qu'il y a beaucoup de légendes après des matchs comme ça ou des épopées comme
08:24 ça.
08:25 Le fait qu'il s'endorme dans le bus, c'est la réalité parce que j'étais à côté
08:28 de lui.
08:29 Donc voilà, je ne sais pas, quand tu...
08:31 Moi, en tout cas, quand j'allais sur un match dans le bus, tu es toujours un peu anxieux.
08:36 Tu es déjà en train de visualiser le match.
08:38 Et l'autre, il dormait à côté.
08:40 Donc il finissait sa sieste.
08:41 Après, l'histoire des gants, on ne sait plus s'il a oublié les gants à l'hôtel,
08:46 s'il a oublié les gants sur le terrain quand il a fait la photo ou dans les vestiaires
08:50 au moment de la photo.
08:51 La décontraction, elle est tout de même générale.
08:54 Vous aussi, vous faites vos petites blagues.
08:55 J'aimais bien quand un mec lisait le journal, je lui mettais le feu au journal.
09:00 Alors des fois, c'est rigolo, c'est le contexte.
09:02 Et là, c'était dans le bus en partant du stade Vélodrome pour aller à Munich.
09:05 Et c'est vrai que Basile était déjà un peu dans sa bulle.
09:08 Comme un con, il lisait le journal.
09:12 Je suis allé avec le briquet, j'ai allumé le journal.
09:14 En plus, ça prend vite feu.
09:15 J'avoue que c'est impressionnant, dans un bus.
09:18 Il avait mal pris, il m'avait coursé dans le bus.
09:20 Je crois même que les autres nous avaient séparés parce qu'on allait en Muniromaine.
09:24 L'applaisatorie ne lui avait pas particulièrement plu.
09:28 Pour résumer, la préparation du match se fait dans la bonne humeur.
09:31 La préparation du match, finalement, elle est à l'opposé de ce qu'on avait vécu à
09:37 Bari, où on a été calfeutrés d'Alzenbunker.
09:41 Je crois que vous n'avez pas croisé pendant la préparation du match.
09:46 Parce que c'était Rennes-du-Côte, et on a retapé que c'était Rennes-du-Côte,
09:50 que ça avait été contre-productif.
09:51 Donc là, c'est clair que c'était...
09:55 Moi, j'ai l'habitude de dire qu'on était au club-maître.
09:58 Il nous avait mis dans un hôtel dans la campagne, c'était ouvert, vous veniez aux entraînements
10:04 facilement.
10:05 Les anciens venaient, puisque Chris était venu.
10:07 Bernard Tapie venait s'entraîner avec nous à l'échauffement.
10:12 Les repas étaient buffés dehors, au soleil, parce qu'il faisait beau en Allemagne à
10:16 ce moment-là.
10:17 Et pour nous, les trois anciens, les trois traumatisés, soi-disant, de 91, finalement,
10:29 du coup on avait mieux vécu la préparation de ce match-là.
10:31 Parce que Basile avait fait le cours, bien sûr, comme souvent.
10:34 Et par contre, une fois qu'on s'était retrouvé en Allemagne, le contexte avait fait qu'on
10:39 avait moins de pression.
10:41 Et surtout, nous, les trois anciens de 91, donc Bedi, Basile et moi, on aurait pu être
10:48 traumatisés, en tout cas pour moi, au contraire.
10:53 Parce que d'abord, après 91, je pensais plus jamais revivre aux deux finales.
10:57 Donc pour moi, c'était du bonus.
10:58 Et surtout, on n'était pas favoris.
11:01 Il y avait cette préparation où on s'était enlevé toute la pression.
11:05 Et puis la pression, c'était Milan qui l'avait, c'était eux les favoris.
11:07 Donc, à 91, on était favoris, soi-disant.
11:09 Peut-être d'ailleurs, ce n'était pas si réaliste que ça, mais en tout cas, on avait
11:15 pris toute la pression.
11:16 Je l'ai vécu vraiment à l'inverse, que ce soit au niveau de la préparation, de la
11:19 pression, de la manière d'appréhender le match.
11:22 Ça a été le jour et la nuit avec ce qu'on avait vécu à Paris.
11:25 Et ça peut expliquer même le résultat du coup.
11:28 Est-ce que, bien que largement favoris, les Milanais étaient revanchards par rapport
11:33 à 91 ou au moins plus méfiants ?
11:36 À Munich, sous le tunnel, je peux te dire que tu sens déjà quand les mecs ne te prennent
11:44 pas de haut.
11:45 Peut-être qu'à San Siro, ils nous avaient pris de haut au début.
11:48 Et en plus, ils marquaient rapidement.
11:49 Là, tu sens.
11:50 Tu ne sens pas dans leur regard.
11:53 Tu sens que tu es aussi grand qu'eux.
11:56 Que tu leur fais peur autant qu'ils te font peur.
11:59 Et qu'ils ne sont pas aussi monstrueux que ça.
12:03 Et c'est pour ça que des fois, il y a des signes dans des matchs.
12:07 On dit des fois que tu gagnes un match dans le tunnel.
12:10 Moi, j'y crois moins à ça.
12:12 Parce que je l'ai vécu.
12:13 J'ai eu des sensations dans le tunnel qui se sont vérifiées souvent derrière.
12:17 L'OM a passé sa finale à défendre.
12:19 Donc, vous défenseur, vous avez dépassé la ligne médiane en 90 minutes.
12:23 Je crois que je dépasse la ligne médiane une fois sur un contre.
12:28 On est enculé.
12:29 On doit avoir une ou deux occasions.
12:31 Mais vraiment sur des dégagements un peu à l'arrache.
12:35 Pour moi, Fabien nous fait gagner ce match-là.
12:39 Quand on se souvient les arrêts qu'il fait Massaro, Van Basten.
12:43 S'ils avaient marqué, c'était fini pour nous.
12:45 Mais c'est vrai que c'est une longue souffrance jusqu'à la mi-temps.
12:52 Et jusqu'à cette minute où il y a le corner.
12:55 C'est un miracle qu'on arrive déjà au vestiaire.
12:59 Et c'est même l'idée qu'on a sur le terrain quand on va vers la mi-temps.
13:03 C'est d'arriver à 0-0.
13:05 Mais le score à la mi-temps ne va pas être 0-0.
13:08 Alors, racontez-moi votre vision de ce but.
13:11 C'est fou parce que je ne vois pas rentrer le ballon sur le but.
13:15 Donc, je suis peut-être le dernier à avoir vu qu'on avait marqué.
13:17 Après la deuxième mi-temps, c'est un long combat pour garder le résultat.
13:22 J'ai souvenir d'avoir été replacé dans l'axe à un moment donné.
13:26 De courir après Van Basten et de faire je ne sais pas combien de tackles défasifs
13:30 le long de la ligne là-bas.
13:31 Parce qu'on joue le 1-0.
13:37 Et vous allez parvenir à le garder.
13:38 La fin était longue à venir ?
13:40 La fin est particulière.
13:41 Je me suis rendu compte de tout ce qu'on était en train de faire.
13:43 Et là, j'ai passé, je ne sais pas si c'est 2, 3, 4 minutes,
13:47 je ne sais pas combien de temps c'est, mais j'ai l'impression que c'est long.
13:50 J'ai passé cette fin de match entre me dire "putain, mais t'es en train de faire le truc de ta vie"
13:56 et "mais non, mais ce n'est pas fini, quand est-ce qu'il siffle le mec en noir là ?"
14:03 Donc, je le regardais tout le temps.
14:06 Je le cherchais du regard pour voir quand est-ce qu'il allait mettre le sifflet à la bouche
14:11 parce que c'était interminable.
14:13 Et alors, c'est rigolo parce que s'il siffle, si je me souviens bien, il siffle la fin
14:16 sur une touche où j'étais concentré sur le mec qui faisait la touche.
14:19 Il était derrière moi et c'est peut-être ce moment où je ne le regardais pas,
14:23 où j'entends le sifflet.
14:27 Et là, alors c'est rigolo parce que j'ai toujours pensé que j'étais tombé à l'inverse sur le terrain
14:32 alors que j'ai revu les images et non, je suis là comme un con.
14:35 Moi, je me suis rendu compte de ce qu'on avait fait à ce moment-là,
14:38 peut-être même de ce que ça représentait.
14:40 Mais tu es fatigué, tu ne sais pas comment le retranscrire et tout.
14:47 Vous imaginez alors la folie que ce succès va engendrer ?
14:51 Moi, je suis appelé sur le plateau de TF1 et quand j'arrive,
14:56 je crois que la première question que me pose ou la première remarque que me fait Jean-Michel,
15:00 c'est "tiens, regarde les images à Marseille".
15:03 Et TF1 a mis des caméras sur le vieux port.
15:06 Je me souviens, je suis rentré dans le vestiaire, je crois que j'allais dire à mes copains,
15:10 "on a rendu des gens heureux".
15:13 Le retour à Marseille était encore plus grandiose.
15:15 On a pris une claque quand on a atterri à Marseille.
15:17 On monte dans le bus, on sort de l'aéroport et là, c'est énorme le monde.
15:23 Les gens s'arrêtaient au bord de la route.
15:25 Il y avait les voitures arrêtées au bord de la route qui nous attendaient.
15:27 Il y avait les motos et des voitures qui nous suivaient.
15:29 Ou par les vitres du bus, aux gamins, ils faisaient des roues arrière,
15:33 ils faisaient l'écho, comme on pouvait tout faire quand on était jeune.
15:38 Ou alors on disait "attention, attention" parce qu'il y avait des voitures, des scooters.
15:41 Et tout ce monde jusqu'au stade Vélodrome.
15:44 Il y avait une haie d'honneur de Marignane au stade Vélodrome.
15:48 Alors sur l'autoroute, il y avait des voitures arrêtées,
15:50 des gens qui étaient debout sur le capot.
15:53 Et jusqu'à M'Vivre, c'était une marée humaine.
15:57 Et alors le stade Vélodrome,
15:59 je crois qu'ils ont rentré plus de monde que le stade qu'on tenait, il me semblait.
16:02 Au Vélodrome, vous avez même failli défaillir sous le coup de l'émotion.
16:06 J'avais un rapport particulier avec le public.
16:09 L'ancien minot, formé au club.
16:11 J'avais une chanson.
16:14 Puis moi, j'ai toujours habité en ville longtemps.
16:16 Donc j'ai toujours fait partie des meubles.
16:18 Donc bon, j'étais le petit jeune du centre de formation qui était là.
16:21 J'ai un peu la dernière roue du carrosse.
16:23 Et ce soir-là, je me suis senti grand.
16:27 Je me suis senti à l'égal de mes copains qui étaient des stars,
16:31 voire même au-dessus parce que l'accueil que j'avais reçu à ce moment-là était particulier.
16:37 Et donc du coup, je tremblais, je chialais.
16:43 Et Bernard Tapie, Jean-Louis Lebrou et Jean-Pierre Bernays étaient venus me soutenir
16:46 parce qu'ils avaient cru que j'allais tomber dans les pommes.
16:50 Alors les hommages qui vous ont été rendus vous ont permis aussi
16:53 de rencontrer le président de la République.
16:55 Dans les festivités d'après-match, il y a la réception à l'Elysée.
16:58 François Mitterrand, président de la République à l'époque,
17:01 on l'avait briefé sur tous les joueurs parce que je ne suis pas sûr
17:03 qu'il était grand, grand fan de foot.
17:05 Et donc on était en randonnion et il passait nous saluer.
17:08 Il avait un mot pour tout le monde.
17:10 Et donc il se trouve que j'avais pu entendre ce qu'il disait à mes copains.
17:12 Il avait un mot pour chacun, très personnel.
17:16 Et moi, il m'avait parlé de mon village d'enfance, Robion.
17:19 Alors Robion était connu parce que Georges Marchais était un citoyen robionné.
17:24 Et la culture de François Mitterrand fait qu'il devait connaître ce joli village du Lubeuron.
17:29 Et il m'avait parlé de mon village.
17:31 Donc je ne sais plus si il m'avait dit M. Numeco ou Eric.
17:36 Vous êtes au Clujien, Robion, je connais.
17:39 Je ne sais pas s'il m'avait pas fait une référence à Georges Marchais.
17:43 Et j'avais été impressionné d'abord par le charisme de l'homme.
17:47 Et puis par le...
17:48 Voilà, on lui avait raconté une anecdote sur 20 joueurs et machines de guerre.
17:55 On a l'impression qu'un petit vieille te connaît, alors qu'il avait juste été briefé.
18:00 Pour tous ceux qui ont vécu cette semaine folle,
18:03 le OMPSG qui suit le samedi, trois jours après la finale, en est indissociable.
18:09 L'après-match a été particulier parce que...
18:14 On ne peut pas oublier qu'on avait un match de championnat
18:17 pour jouer le titre contre le PSG trois jours après.
18:21 Et moi, je faisais chambre avec Franck Sauzé.
18:25 Et je lui parlais plus du match contre le PSG que de la finale.
18:28 Gagner contre le PSG et être champion de France trois jours après,
18:32 ça voulait dire aussi pour moi cinq titres d'affilé.
18:35 Je rentrais un peu dans l'histoire même du football,
18:38 puisque je crois que cinq d'affilé, ça n'était jamais arrivé à l'époque.
18:41 Et du coup, je t'ai focalisé sur ce match-là.
18:44 Il nous faut une haie d'honneur quand on rentre, je crois.
18:47 Bon, il y avait une grosse rivalité à l'époque.
18:51 Et on commence le match, nous, on est encore avec les bulles de champagne dans la tête.
18:55 Les jambes un peu raides et il marque d'entrée.
19:00 Et je crois que c'est ça qui nous sauve le match.
19:03 On se regarde tous, même sans se parler,
19:06 parce que des fois, on croit qu'on se parle, mais juste dans le regard,
19:08 on s'est dit, on ne va pas se laisser marcher dessus.
19:12 Il nous marche dessus.
19:14 Et en réalité, derrière, c'est une longue rébellion,
19:18 où on décide de...
19:21 Moi, je me souviens, je me chope avec David Ginolin,
19:26 Basile et Marcel avec Georges Bouéa.
19:28 On envie Romain dans le tunnel rentrant à la mi-temps parce que c'est chaud.
19:32 On se sert du combat et un peu de la castagne pour se remettre en route.
19:38 Quand on se souvient du but de Basile, la manière dont il marque,
19:40 ce n'est pas un but de la tête, c'est l'argne.
19:44 Il le dit lui-même, il veut, en faisant sa tête,
19:48 il veut emplâtrer Ricardo.
19:52 Et voilà, c'est la haine de perdre contre Paris qui nous fait marquer ce but-là.
19:57 C'est un but d'anthologie.
19:59 J'avoue que j'ai plaisir à le revoir, ce but-là,
20:00 parce qu'il y a tout dans ce but, à part de Basile, cette argne,
20:04 le tala avant, des mecs qui font toute l'action.
20:07 Et la lucarne, bon, il est irréel ce but-là.
20:10 Et encore, ce n'est pas fini.
20:10 Le dimanche, les handballeurs d'OM-Vitrolles gagnent eux aussi la Coupe d'Europe.
20:14 Bonne occasion pour fêter tout ça ensemble, handballeurs et footballeurs.
20:19 Et le lendemain, les handballeurs sont les champions d'Europe à leur tour.
20:23 Donc avec le frère de Bernard Tapie qui est président,
20:25 et avec tout ce que ça engendre derrière,
20:28 c'est-à-dire nos festivités de championnes d'Europe sont partagées avec les handballeurs.
20:33 Il y a notre défilé sur le Vieux-Port, dans le bus à l'impérial avec eux,
20:38 plus la fête derrière.
20:40 Alors je sais ce que c'est la fête avec des rugbymans,
20:42 avec les handballeurs, c'est pas mal.
20:44 Ils sont bons, ils sont bons.
20:47 Ils étaient meilleurs que nous, parce qu'on était un peu des agneaux avec.
20:51 Donc du coup, je me souviens avoir eu pas mal mal à la tête après les sorties avec eux,
20:56 parce qu'ils en boivent peu et nous on pouvait pas suivre.
21:00 C'est des bons.
21:01 Ce succès, ça a créé un lien indéfectible entre les joueurs de l'OM ?
21:06 Il reste un lien, même si tu t'es séparé, même si tu te vois que tous les dix ans,
21:10 même s'il y a des animosités entre certains,
21:12 t'y as combattu, t'y as allé au front ensemble.
21:15 Et donc moi, quand je recroise mes potes, on est frères de sang.
21:18 Alors après, c'est sûr qu'on en a perdu deux.
21:21 Et malheureusement, on va se revoir tous les dix ans.
21:26 C'est la vie, il va manquer chaque fois, j'espère le moins possible.
21:29 Mais voilà, c'est pour ça qu'il faut profiter de ces 30 ans,
21:33 parce que voilà, on est toujours tous là.
21:36 Et pour vous, l'Enfant du Cru, c'est une fierté particulière ?
21:41 Ouais, moi, ce titre là me colle à la peau chaque jour que Dieu fait,
21:46 puisque je vis dans Marseille, Sainte-Treville.
21:49 Et pour exemple, récemment, au cours Julien, un matin tôt,
21:55 j'avais un rendez-vous, j'attendais sur mon scooter,
21:58 et il y a un petit gamin de 10 ans avec son cartable qui allait à l'école
22:01 et qui s'est arrêté, il m'a dit "Vous êtes Monsieur Dimecco".
22:03 Et j'ai dit "Mais, t'es tout petit".
22:05 Il m'a dit "Mais, mon père m'a montré tous les matchs".
22:07 Et il n'y a pas longtemps, j'ai encore vu la finale et tout.
22:10 Et voilà, ça c'est collé à nous et encore plus qu'à Depuis Vierd' à cette ville.
22:15 Tous les jours, on te renvoie à ça.
22:17 Voilà, donc c'est l'histoire de ma vie.
22:19 À la fin du match, j'échange le maillot avec Van Masten
22:24 et je suis tout fier de l'offrir à mon père.
22:27 Et quand mon père me regarde, il me dit "Mais, je m'en fous de Van Masten,
22:31 moi je voulais celui de Maldini".
22:32 Alors que celui-là, il est mythique,
22:34 parce que c'est le dernier maillot que Van Masten a porté sur un terrain.
22:38 Malheureusement, il avait été gravement blessé, il n'a plus rejoué derrière.
22:41 Bon, le capteur se souvient le joueur.
22:42 [Musique]