Le 21 mai 2003, Le Journal du Cinéma diffusé sur Canal+ rend un vibrant hommage à Maurice Pialat, cinéaste emblématique du cinéma français. Retour sur la carrière marquante du réalisateur de "À nos amours" et "Sous le soleil de Satan", avec des témoignages et des extraits de ses films qui ont marqué l'histoire du 7ᵉ art.
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00:00 *musique triste*
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00:09 *musique triste*
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00:19 *musique triste*
00:30 Vivez toutes les émotions du cinéma avec Carte Noire.
00:33 *musique triste*
00:35 *musique triste*
00:56 Vous avez voulu d'abord être peintre.
00:58 La peinture c'était votre vrai premier désir de jeunesse.
01:02 -N'en parlons plus. -N'en parlons plus.
01:04 Après vous avez été acteur de théâtre.
01:06 -N'en parlons plus. -N'en parlons plus.
01:08 *rires*
01:09 Et après le cinéma.
01:11 *rires*
01:13 N'en parlons plus, vous avez raison.
01:15 Vous avez la réponse.
01:16 Oui, on pourrait très bien ne pas en parler.
01:18 *rires*
01:20 *musique triste*
01:24 Il avait un des plus beaux sourires que je connaisse.
01:26 Moi je trouvais qu'il était beau Pialat.
01:28 Moi je trouvais qu'il avait une très belle gueule.
01:29 On avait l'impression que quand il vous regardait, il vous soulevait.
01:31 Il a la grâce, Maurice, il a la grâce.
01:34 Personne n'imagine à quel point il pouvait être sensible.
01:36 Il était authentique, il était sincère.
01:38 Je pense que c'était un écorchiviste, tout le monde le dit, je pense que c'est clair.
01:41 J'ai toujours eu l'impression qu'il disait le contraire de ce qu'il pensait quasiment tout le temps,
01:46 en tout cas quand il disait des choses un peu brusques.
01:48 Au fond de lui on sentait que c'était un homme bon.
01:51 Il y avait quelque chose de constamment joyeux et d'amusé chez lui.
01:54 Il m'a appris à oser, Maurice Pialat.
01:56 Il avait cette espèce d'énergie extraordinaire que certains prenaient pour de la violence.
02:00 J'ai appris à regarder grâce à des gens comme Maurice Pialat.
02:03 C'était un maître. Moi j'en ai connu deux dans la vie comme ça, Rosselini et lui.
02:07 C'était quelqu'un de libre, Maurice.
02:09 C'est vrai que dans le cinéma actuel, je cherche, puis je ne sais pas,
02:16 je n'arrive pas à trouver véritablement celui avec qui parfois,
02:20 bon ben ça va et ça va pas des fois, mais avec lequel on vit.
02:24 Et c'est vrai qu'il me manque.
02:29 Personne n'imagine à quel point il pouvait être sensible.
02:31 Et d'où ses colères, d'où ses fureurs et tout.
02:34 Mais c'était toujours parce qu'on avait, sans le vouloir, égratigné un endroit secret.
02:39 Il était caractériel, bien sûr, il était comme ça.
02:42 Mais il était aussi extraordinairement généreux, extraordinaire observateur.
02:46 Je pense qu'il y a très peu de cinéastes comme lui qui pouvaient rester une journée dans un café
02:51 pour regarder les gens et pour être au cœur de la vie.
02:55 C'est quelqu'un pour qui la vie et le cinéma se sont mêlés de façon absolument intime à tous les moments.
03:02 Et on peut même dire que c'est la caractéristique de son cinéma.
03:06 Il créait un espace autour de lui où il y avait une telle exigence d'authenticité
03:23 que c'est même au-delà de l'écoute, c'était du ressenti.
03:28 C'est un charnel, c'est un sensualiste.
03:31 Et dans son rapport physique avec son regard incroyable de puissance comme ça.
03:37 Le fait qu'il ait souvent fait des films avec Depardieu,
03:40 il y a quelque chose de commun entre, je trouve, une énergie énorme
03:46 et un mélange, je dirais presque, de féminité et de virilité.
03:52 Ils peuvent être tour à tour très violents et en même temps parfois d'une sensibilité presque féminine.
03:58 On a l'air fin là. On est comme deux gamins.
04:02 Au contraire, je trouve que c'est ça qui est bien.
04:05 Les confidences des femmes qui ont vécu avec lui ou qui l'a pu approcher, c'est toujours la même chose.
04:12 L'impression qu'elles étaient uniques au monde, qu'elles étaient attentives à elle.
04:17 Et même, il faut remarquer que là, toutes les personnes avec qui il se serait fâché,
04:24 étaient toutes là autour de lui dans les derniers mois.
04:27 Il l'a dérangé, mais il l'a arrangé. Et les gens sont tous revenus vers lui.
04:33 Il ne s'est séparé de personne.
04:35 Tiens, le père.
04:37 Martin, est-ce que vous vous rendez toutes les deux la tape à court ce matin, Suzanne ?
04:41 On ne rencontre pas beaucoup de gens qui nous font parfois avancer dans la vie,
04:45 mais là, lui, il était là. C'est bien.
04:50 Il vous dit tout le temps qu'on n'a pas fait assez bien, mais c'est toujours pour vous pousser vers le haut.
04:58 Moi, je ne suis jamais sorti des films de pied à l'art.
05:01 Je suis sorti fatigué, mais heureux et j'avais monté quelques étages.
05:05 Hé, papa.
05:06 Il est plus court, moi.
05:07 Oui.
05:08 Elle te trouve mignon, Martin.
05:10 Elle trouve que tu as des beaux yeux.
05:14 Tu veux que je vienne dans le lit ?
05:16 Ce que beaucoup de techniciens disent, ce que beaucoup de gens qui l'ont approché ressentent,
05:19 c'est qu'on avait besoin qu'il vous aime. On était malheureux s'il ne vous aimait pas.
05:22 C'est vrai, par contre, que c'était fatigant de passer du temps avec lui, curieusement.
05:25 Parce qu'il faut tout le temps... C'est quelqu'un même au téléphone, si vous voulez.
05:30 Si à un moment donné, vous avez une inattention pour une raison, je ne sais pas, un enfant qui passe, un truc,
05:37 il le sentait. "Oh, ne m'écoutez plus, je vous embête."
05:41 Non, non, pas du tout, mais c'était un scanner pour ça.
05:44 T'es vraiment une bêtise, totale.
05:46 Je me souviens qu'il avait été assez dur à cette première rencontre, c'est vrai.
05:52 Je sais pas, de mon point de vue, ça sentait le test, quoi.
05:56 Oui, j'avais besoin d'être décortiquée, quoi, qu'il n'y avait rien de moi qui ne lui échapperait.
06:00 Dans tous ses films, il y a quelque chose de lui.
06:08 La solitude, en même temps, il n'était pas seul, mais cette sensation d'être seul, par moments.
06:13 Il disait des choses, puis toujours à la fin, il disait "en même temps, c'est pas complètement vrai, parce que bon..."
06:18 "En même temps, bon, alors, non, parce que je dis ça, puis..."
06:22 "En même temps, bon, j'aime bien ton blouson, mais en même temps, il n'est pas beau, quoi, on est d'accord, hein."
06:26 Alors, on ne savait plus très bien ce qu'il pensait, puis en sortant, je lui ai dit "Bah, je sais pas, vous le trouvez bien, mon blouson ?"
06:31 Il m'a dit "Oui, en même temps, bon, en même temps, ça sert à rien, un blouson, bon, il faut être con pour avoir des blousons."
06:37 Alors, j'ai dit "Si vous voulez, je vous le donne", il m'a dit "Ah, bah ça, c'est gentil, t'entends, Sylvie, il est gentil, lui, il me donne son blouson."
06:42 "Ah, mais oui, bien sûr, où avais-je la tête ? Le placard !"
06:47 "Non, Michael, non !"
06:49 "Quoi ? Maurice Pialat ? Quel merveilleux acteur !"
06:54 Quel merveilleux acteur, ça vient de lui, donc, c'est... ça nous a beaucoup fait rire.
06:58 Et on est resté en contact, et il s'est révélé être un téléspectateur assidu de notre émission,
07:04 ainsi que d'autres émissions d'humour, ce qui nous a totalement donné, quoi, il connaissait, bah, les Robins des Bois, les Nuls, etc.
07:11 Enfin, il était capable de raconter des sketchs par cœur, c'était incroyable.
07:15 Maurice me faisait beaucoup rire. Chaque fois qu'on se retrouvait autour d'une table, autour d'un bon vin et de bonne bouffe,
07:22 on refaisait un petit peu le monde, et j'aimais bien ces révoltes qui étaient pleines de charme.
07:29 Il était d'un naturel, peut-être un peu perturbé de temps en temps, mais il avait toujours ce beau sourire,
07:35 et puis ce regard sur les choses qui était tellement juste.
07:38 Et c'était un gars pas content, voilà, Maurice. Pas content de lui, pas content de nous, pas content de vous.
07:49 Donc, on voit tellement de gens satisfaits qui vous racontent leur parcours merveilleux,
07:54 surtout dans nos métiers comme ça où il y a beaucoup de forfaiterie qui dissimulent probablement des angoisses, heureusement.
08:01 Et lui, il la dissimulait pas. Elle était posée sur la table et on avait affaire avec elle.
08:06 Je ne connais pas quelqu'un qui aimait autant traiter la vie, la vérité, les silences. Il adorait les silences, la vérité.
08:22 Il aimait la vie et en même temps, sans arrêt, il paraissait écœuré de la vie.
08:28 Il adorait les gens, les gens simples, il savait très très très bien les faire tourner, les détecter, leur intériorité.
08:36 Et en même temps, il était écœuré.
08:38 Au fond, Pialat, c'est étrange, c'est quelqu'un qui est, c'est à voir, comme intelligent, mais qui polémiquait, qui critiquait le monde,
08:43 comme quelqu'un qui ne fait rien.
08:45 Qui râle en disant "bah oui, les autres, au fond, c'est de la merde".
08:49 Lui, c'était pas ça. C'est qu'il y avait à côté de cette polémique qui aurait pu être stérile, il y a eu d'un oeuvre qui est sortie.
08:58 Si toi tu es un convoi et moi je suis un convoi, il y a les arcs-en-ciel.
09:02 C'est pas très original.
09:03 Si !
09:04 Mais il faut que je réfléchisse.
09:05 Je réfléchisse.
09:06 Je voudrais bien vous offrir un verre, mais ici c'est plutôt les femmes qui payent.
09:25 C'est pas un bon.
09:26 Ouais, ça marche pas. Ça marche pas très fort les affaires en ce moment, hein.
09:29 Hein ? Attends, attends. Non mais attends. Non attends, c'est pas grave.
09:33 Écoute, la prochaine fois que tu me fais un coup comme ça, Suzanne, je t'étrangle.
09:37 Mais ça va pas, non ?
09:39 J'en ai marre que tu te foutes de mes gueules tout le temps, comme ça !
09:42 Arrête.
09:45 Quoi ? Même t'aimes plus quand je te touche ?
09:49 Bon, c'est comme ça que je serai privé de quéquette pendant huit jours.
09:56 T'es fou, con.
09:58 Qu'est-ce que tu penses te faire dans la vie ?
10:00 Toujours dormir comme ça, traîner, la nuit, jusqu'à les deux heures, trois heures du matin.
10:04 Eh ben, pas plus mal.
10:06 Écoute, de notre génération, on n'aurait jamais fait ça.
10:09 J'en ai marre ! Je veux plus te voir ! T'entends ? Je veux plus te voir !
10:18 J'en ai marre de toi ! J'en ai marre de ta sale tête ! J'en ai marre de ton cyno !
10:22 Je fous le camp que je te revois plus !
10:23 Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce que je t'ai fait ? Je t'ai rien fait.
10:25 Tu sais ?
10:26 Il paraît que quand j'étais jeune, mes parents avaient peur de moi.
10:40 Ah bon ?
10:41 Comme un extraterrestre.
10:43 Il se lève la nuit. C'est pas normal, qu'est-ce qu'il fabrique, un gosse de dix ans ?
10:47 Écoutez, c'est pas possible, je sens que mes nerfs vont craquer.
10:51 Je vais vous paraître bête, mais il me fait peur. Enfin, dis-le, Roby, ça va mal se terminer.
10:55 Ma première femme qui en a eu sa dose de disputes avec moi disait toujours que ça, c'est quand on a vécu dans des familles où les gens s'engueulent tout le temps,
11:05 on traîne ça tout le reste de sa vie. Je sais pas.
11:09 Longtemps, j'ai habité la banlieue.
11:12 Mon premier souvenir est un souvenir de banlieue.
11:16 Aux confins de ma mémoire, un train de banlieue passe, comme dans un film.
11:22 La mémoire et les films se remplissent d'objets qu'on ne pourra jamais plus appréhender.
11:27 Il y a des gens qui vont vers les autres en toute douceur, en toute harmonie, parce que tout a été organisé pour que ce le soit.
11:34 Lui, non. Je pense que tout s'est fait avec peine.
11:37 À la force du poignet, des sentiments, de tout.
11:40 Mais t'es vraiment une salope, hein ?
11:42 Écoute, je vais te crever, moi !
11:44 Je vais te crever, moi !
11:46 C'est quelqu'un qui a eu à se conquérir.
11:49 Faut pas oublier que c'est quelqu'un qui a travaillé tard, qui a réussi tard, qui a été connu tard.
11:54 Il y a eu des longs moments de piétinement dans sa vie.
11:56 C'est quelqu'un qui n'avait pas d'argent, il fallait gagner sa vie.
11:59 En même temps, il voulait faire du cinéma.
12:01 Et il avait été acteur, il a été peintre, d'abord, comme vous le savez.
12:04 Les années d'apprentissage ont été lentes.
12:08 Et en même temps, le fait de réussir tard, de tourner tard, lui a donné très longtemps, jusqu'au bout, cette juvénilité.
12:15 Il n'a jamais été un vieux metteur en scène.
12:17 Je dis franchement, tu pourrais mourir à l'instant, ça ne me ferait rien.
12:20 Mais je serais embêtée, parce qu'on croira que c'est de ma faute.
12:23 Il a osé arriver dans des zones qui avaient été inexplorées.
12:27 Il a osé une certaine violence dans la peinture des rapports humains.
12:31 Une certaine amoralité mélangée à l'émotion profonde
12:34 et que nous procurent ces personnages et la façon dont nous nous jetons,
12:38 un corps perdu dans ces personnages, à cause de leur humanité.
12:41 Tu veux que je me crève ? Tu y arriveras, salope !
12:44 Parce que moi, j'en ai marre de la vie !
12:46 Tu m'entends ? Tu m'entends ? J'ai ma vie de morte !
12:50 Beaucoup de ces personnages, on a toujours l'impression que quelque chose n'est pas possible.
12:54 Qu'ils s'aiment, qu'il y a un appétit charnel, comme dans nos amours.
12:59 Et pourtant, l'amour, ce n'est pas possible.
13:01 Ça ne suffit pas, ça ne marche pas, ça ne va pas.
13:04 Il y a toujours quelque chose qui fait que ça ne va pas.
13:06 Il a une vision souvent très noire de l'humain, et c'est troublant,
13:09 parce qu'au fond, il y a quelque chose de très chaleureux,
13:11 il y a une grande générosité, une grande bonté dans ce cinéma.
13:15 Mais en même temps, il n'a aucune complaisance vis-à-vis de ce qu'il peut y avoir de plus dur,
13:18 de plus brutal, au fond, dans les rapports humains.
13:23 Je crois qu'il a sans arrêt essayé de doter tous les voiles,
13:27 doter tous les masques, et de montrer vraiment un humain accru.
13:31 Il s'empare d'un sujet que d'autres ont déjà traité,
13:36 et il le dévaste de tous les lieux communs,
13:39 de toutes les émotions toques, faciles, truquées, etc.
13:43 Ta douleur est stérile, Satan.
13:50 Quel jour ai-je cédé pour la première fois ?
13:55 Quel jour ai-je reçu ton désespoir, avec une complaisance insensée ?
14:00 Ce désespoir et cette colère, je pense que c'est effectivement son combat de titan avec lui-même.
14:06 Maurice, il voulait faire des films encore plus beaux que ceux qu'il faisait.
14:10 Donc il s'en voulait à lui-même de ne pas atteindre,
14:13 parce que tout artiste n'atteint jamais la satisfaction.
14:15 C'est formidable.
14:16 Je veux dire, s'il avait été auto-satisfait, il aurait été imbuvable, non ?
14:23 Bon, la clé, là. On a trouvé une clé chez toi.
14:25 Ça te dit quelque chose ?
14:27 Regarde, la clé, là. Elle est à toi ou à Simon ?
14:30 Elle est de ma vie, c'est ce qu'elle est, pas à moi.
14:32 Elle est pas à toi.
14:33 Tiens, ça, c'est la déposition de Raoul Bettimy.
14:36 C'était une sorte de dandise de dire qu'il n'y avait pas de scénario.
14:38 Il y en avait. Je ne sais pas où il était, mais il y en avait quelque part, dans sa tête, en tout cas sûrement.
14:43 Le scénario de police était oral pendant très longtemps.
14:46 Dis donc ! Ramasse ça, ramasse !
14:49 Le film était en préparation, il n'y avait pas de scénario.
14:52 Il y avait une histoire qu'on se racontait et que je lui racontais.
14:55 Alors, cette conversation n'a jamais été enregistrée, c'est ça ?
14:58 Je n'arrivais pas à écrire le rôle de Depardieu, en fait.
15:01 Et je lui ai dit, je vais l'écrire sous forme de roman, à la première personne du rôle de Depardieu.
15:06 Donc, je trouverai et je ferai attention, il y aura tous les dialogues et tout.
15:09 Après, je dicterai à une secrétaire.
15:11 Et en fait, il m'avait donné quatre jours.
15:13 Et on était très amis, on se voyait tous les jours, toute la journée.
15:16 Et j'en ai mis six, et à partir de là, on a été fâchés, en fait.
15:20 Bon, ça n'a jamais été enregistré, ça, jamais.
15:22 Hein ? Jamais.
15:23 Non.
15:24 Finalement, l'écrire sous une forme qui était un roman un peu série noire, comme ça, et tout,
15:30 ça le déconcertait, je n'étais plus là, je ne lui racontais pas l'histoire.
15:34 Ces six jours ont dû lui sembler un temps immense.
15:38 Et c'était comme un abandon.
15:40 Un metteur en scène est très fragile avant un film.
15:43 Pour moi, c'était assez effrayant de me retrouver parachuté du jour au lendemain sur ce tournage.
15:48 Il fallait que quelque chose soit écrit, mais quoi ?
15:50 C'était fait au Parc et de Marseille.
15:52 C'est dommage.
15:54 Dès qu'on arrivait à des fictions, à des solutions dramaturgiques,
15:59 à des propositions d'engrenages dramatiques, ça ne valait pas du tout.
16:04 C'est le réport !
16:08 Il fallait donner la scène au comédien juste avant.
16:12 C'est-à-dire, soit la veille, soit le matin.
16:15 Parce que comme ça, il conserve une fraîcheur.
16:17 Il fallait les débusquer dans ce qu'ils ont encore de frais,
16:20 et à ce moment-là, les mettre dans un contexte où ils peuvent être...
16:24 pas toujours forcément malmenés.
16:26 Je veux dire, ce n'est pas non plus la torture,
16:29 mais de temps en temps, oui, à la tempête,
16:31 parce qu'il y a besoin de cette médiation
16:33 pour arriver à, justement, cette fameuse vérité de la scène.
16:36 Je suis Monsieur Lautrec,
16:38 peintre plutôt beau mec,
16:40 cherchant l'inspiration jusqu'au fond des boxons.
16:43 Quoi que bien court sur pattes,
16:45 les femmes, je les ai pattes.
16:47 Cachez bien vos épouses, car elles veulent tout coquer la saucisse de Toulon.
16:51 Contrairement à ce que beaucoup croient et l'ont écrit,
16:54 mes films sont beaucoup moins improvisés qu'il y paraît,
16:56 mais il y a aussi quand même une paire d'improvisations.
16:59 Moi, c'est un de mes rêves, ça,
17:01 que quand les acteurs jouent tout seuls.
17:04 Tu le prends comme ça, tu le prends au hasard ?
17:06 Allez, viens.
17:07 En contre la maison, ça suffit.
17:08 On a un petit histoire.
17:09 Tu m'appelles, tu me demandes, tu prends moi comme ça au hasard.
17:11 Là, comment... Dans quel état il est, maintenant ?
17:12 De toute façon, tout était possible, donc...
17:15 Il fallait surtout que rien s'interdire, quoi,
17:17 parce que si on essayait un truc, ça pouvait être bon.
17:20 Alors il va aller mieux le faire.
17:21 On pouvait faire énormément de prises, il n'était pas satisfait.
17:25 Je sais qu'une fois, j'en ai fait énormément.
17:27 J'ai l'impression d'en avoir fait 100, mais...
17:29 J'en ai pas fait 100, hein.
17:30 La caméra, il savait où il la mettait.
17:34 C'était vraiment pas ça, le problème, quoi.
17:35 Je crois que c'était plus...
17:37 Il voulait l'étincelle, quoi.
17:40 Au moins, t'as les bras...
17:41 Pas trop musclés.
17:43 C'est pas joli pour une femme d'être musclée.
17:45 Un petit modelé...
17:47 Dans la famille, il y a que papa qui fait de la gymnastique.
17:52 J'ai vécu des moments durs, parce que...
17:54 De doute absolue, absolue.
17:56 C'est mon premier film,
17:57 et on a parfois arrêté la journée à cause de moi à 4 heures.
18:00 Non, t'es généreuse.
18:01 Dans ce truc, les putes, ça expédie le client.
18:04 Je suis pas une pute.
18:05 Donc c'était très difficile quand ça se passe comme ça.
18:07 Et en même temps, j'avais une...
18:09 Je l'ai tout de suite identifiée à l'image d'un père.
18:11 Quelqu'un de très important.
18:12 Que j'avais envie qu'il m'aime.
18:14 Je pouvais pas le décevoir.
18:16 Donc...
18:17 Et puis en même temps, il avait ce côté génial.
18:19 On bloquait.
18:20 Après, le lendemain matin, il arrivait, il me dit...
18:21 "Non, mais en fait, c'est la scène qui est mal écrite.
18:23 T'as sûrement raison.
18:24 C'était pas facile à dire."
18:26 Tiens, mon feu est allumé.
18:28 Je n'ai fait qu'allumer ma cuisinière.
18:32 Je sais qu'une fois, par exemple, il a crié, puis...
18:35 J'étais avec ma maman, elle lui a dit...
18:37 "Ah, mais vous savez, faut pas crier comme ça,
18:39 c'est pas la bonne manière."
18:41 Et donc, je crois que ça, ça l'a fait rire.
18:44 Si vous, vous avez amené ma cuisinière,
18:46 vous devriez le faire tous les jours,
18:48 et puis m'amener le petit déjeuner.
18:50 Mais je ne suis pas gibet.
18:52 J'ai senti que même s'il criait, c'était pas...
18:55 Des fois, c'était...
18:57 Au fond de lui, on sentait que c'était un homme bon, quoi.
19:02 Peut-être qu'il savait pas comment...
19:05 Comment exprimer aux gens aussi
19:08 qu'il les aimait ou qu'il les trouvait bien,
19:11 ou qu'il savait pas juste dire "Non, ça, c'est nul, on le refait."
19:14 Et qu'il savait pas le dire comme ça,
19:16 qu'il fallait qu'ils le disent en gueulant,
19:18 parce qu'il était comme ça.
19:20 Écoute...
19:21 Pas ce soir. Je suis fatiguée.
19:24 Après, il faudra que je me relève.
19:26 Ah ! Jean !
19:28 T'es fou ! T'es fou !
19:30 Je me souviens d'une chose, c'est que...
19:32 Jean-Yann était absolument contre
19:35 certains comportements du personnage.
19:38 Il avait pas envie de jouer ce personnage un peu...
19:42 Odieux, finalement.
19:45 Et Maurice, il tenait, parce que c'était aussi sa vie.
19:48 Et alors, ils étaient en conflit en permanence,
19:53 et surtout le soir.
19:55 Je sais pas pourquoi ça se passait pas tellement sur le tournage,
19:58 mais c'était terrible, il y avait des séances...
20:03 T'as jamais rien réussi et tu réussiras jamais rien.
20:06 C'est tout.
20:07 Et tu sais pourquoi ? Parce que t'es vulgaire.
20:09 Irrémédiablement vulgaire.
20:11 Et non seulement t'es vulgaire, mais t'es ordinaire, en plus.
20:14 Toute ta vie, tu resteras une fille de concierge.
20:17 Tu peux me regarder comme ça ?
20:19 Ça change rien.
20:20 Je pense que plus je la connais,
20:22 j'ai rencontré des filles formidables, j'aurais mieux fait de rester avec elles.
20:25 Moi, j'ai pas trop eu à souffrir sur "Un aux amants",
20:28 parce qu'il m'aimait bien,
20:30 et pour lui, c'était le fait que,
20:33 comme j'étais pas un acteur professionnel,
20:35 et qu'il me permettait quand même de jouer un rôle qui était pas évident...
20:39 Donc son discours, c'était toujours "Mais qu'est-ce que tu fais, être casting, directeur ?
20:47 T'es médiocre, tout ferait mieux d'être un acteur,
20:49 que t'es un grand acteur."
20:51 Donc, directement, ça me faisait plaisir.
20:53 En même temps, tout ça était dans le charme,
20:55 et en même temps, le lendemain,
20:57 il pouvait me dire "J'ai vu des rushs,
20:59 mais vraiment, je sais pas comment on va faire pour te garder."
21:02 C'était pas quelqu'un qui sautait en l'air après une prise,
21:05 parce qu'il était fou de joie, comme certains metteurs en scène,
21:08 mais on sentait à travers ses yeux qui frisaient,
21:13 son tout petit sourire en coin, que ça allait.
21:16 C'est vrai que les gens disaient des conneries sur sa façon de tourner.
21:23 On disait "Tiens, il perd du temps, c'est quelqu'un qui tourne très peu,
21:26 les techniciens sont là à attendre, alors on fait rien, on fait rien."
21:29 Mais c'est totalement faux.
21:31 Il installait de la vie, quoi.
21:34 Donc, évidemment, les gens, les techniciens, ils attendaient,
21:37 mais c'est là où ce film se fabriquait.
21:40 Je sais pas, où Gérard et Aline devaient manger,
21:43 et ben, ils finissaient par pas vraiment manger, tout d'un coup.
21:47 Et puis, c'est quelqu'un qui disait par moteur,
21:50 tout d'un coup, il faisait un petit signe, une claque,
21:52 et puis la caméra tournait.
21:54 Et puis, c'est vrai que tout d'un coup, il y avait quasiment 5 minutes de film
21:59 qui se tournaient là, sur la dernière demi-heure de la journée.
22:02 Alors, tu vas te faire Michel.
22:05 Et Jean-Pierre là-dedans.
22:10 Il avait toujours dit "Le père est mort",
22:12 donc on avait, dans le scénario, il était mort.
22:16 Et tout d'un coup, il est arrivé sans prévenir,
22:19 et comme on pouvait pas arrêter Michel sans qu'il nous le dise,
22:22 donc il a fallu, ça a été une espèce de happening.
22:27 Et là, il y a un regard qui est...
22:38 Je me dis "Mais comment il me l'a...
22:41 J'ai l'impression qu'il s'était foutu de ma gueule".
22:43 Et là, je veux dire, ça c'est un trait de génie.
22:48 C'est-à-dire, c'est comme d'un coup, c'est un peintre,
22:50 c'est-à-dire qu'il met une autre couleur.
22:52 Tu viens ici pour foutre la merde,
22:54 te tailler...
22:55 Ah bah oui, évidemment, quand on dit des choses comme ça...
22:57 C'est devenu ronflant, maintenant.
22:58 Ah bah oui.
22:59 Alors vous savez, être bien dans ces moments-là,
23:02 c'est pas très difficile.
23:03 Parce que la force de Maurice, c'est que...
23:05 Ce personnage, c'est vous,
23:08 en fouillant des choses que vous ne donnez jamais.
23:12 Je me rappelle d'un truc, c'est que,
23:17 quand il m'a donné le rôle, le lendemain, je suis arrivée,
23:19 alors j'étais contente.
23:20 Je me suis mise dans une carriole, je me rappelle,
23:22 et j'étais assez à l'aise, j'étais heureuse, quoi.
23:25 Et j'ai commencé à mettre les jambes sur une carriole.
23:28 Il me dit "Ah bah d'accord, ça y est, tu t'y crois.
23:30 Tu crois que ça y est."
23:32 Et juste parce que j'étais à l'aise, il me cassait.
23:36 Et c'est là où j'ai commencé à comprendre
23:38 qu'il voulait constamment que les gens soient en danger.
23:40 Et ça, ça m'a jamais quittée.
23:46 Il met les gens dans le danger, dans une urgence,
23:49 dans quelque chose de...
23:51 Ils ont tout le temps une mission à remplir,
23:55 et tout ça en même temps, dans la liberté.
23:57 Comme c'est quelqu'un de très exigeant,
24:04 c'est évidemment conflictuel.
24:06 Il se voit se barrer en claquant la porte, etc.
24:09 Puis souvent, aussi, quand même, on avait, je me rappelle,
24:11 pas loin du mixage, on avait un petit rappel à l'ordre.
24:14 On venait déjà de travailler 5 mois, 8 jours, et tout ça.
24:17 Et puis, il se dit "Bon là, il faudrait se mettre aux choses sérieuses,
24:19 parce que quand même, c'est vraiment pas terrible."
24:21 Parce que ce film, je sais que les rushs sont vraiment pas terribles,
24:24 mais là, quand même, vous êtes bien acharnés à bousiller tout ça.
24:26 Non, c'était sévère, c'était sévère, oui.
24:28 C'était sévère, mais toujours vers l'exigence.
24:30 Et puis, on sortait du film, je vous le dis encore une fois,
24:32 toujours "Zzzz" sur un aéroplane.
24:34 Sur les 3 films que j'ai fait avec lui,
24:43 "Le soleil de Satan", "Van Gogh" ou "Le garçu",
24:45 ça a toujours été ce genre de relation
24:48 où il fait confiance aux gens avec qui il travaille,
24:51 contrairement à ce qu'on peut dire,
24:53 sauf qu'il leur demande toujours plus.
24:55 Il m'a appris que la bande-son d'un film
24:59 pouvait raconter quelque chose.
25:01 Comme par exemple, dans "Van Gogh",
25:03 quand Van Gogh revient après s'être tiré le coup de revolver
25:07 et il se laisse glisser le long de l'arbre jusqu'à s'asseoir,
25:11 il m'a poussé à faire quelque chose
25:13 qu'a priori je n'aurais pas fait naturellement
25:15 s'il n'avait pas été avec moi.
25:17 C'est de garder presque un accident de son,
25:20 qui est un accident de micro-cravate
25:22 qui bouge un peu dans ses vêtements,
25:24 donc qui donne, sur le plan sonore,
25:26 quelque chose d'hyper présent.
25:28 D'un seul coup, on est avec Van Gogh.
25:36 Quand on regarde un film de Pialat,
25:38 moi j'ai une admiration particulière pour "À nos amours", par exemple,
25:44 et puis derrière on voit un film classique, on va dire.
25:49 Parfois, on a l'impression que c'est toc,
25:52 que d'un coup, dans l'autre film, les temps sont faux,
25:55 que les gens trichent,
25:57 que la caméra sait exactement ce qu'il veut dire,
26:00 que les gens sont en train de se faire chier,
26:02 que les gens trichent,
26:04 que la caméra sait exactement ce qui va se passer,
26:06 que tout ça a été fabriqué.
26:08 - Vous avez envie de foutre, vous ? - Je me barre, ça, y a pas de problème.
26:11 - Je fous le conditionnement. - Mais qu'est-ce que tu ferais, tiens ?
26:14 - Je trouverais bien. - Tu ferais un manche dans le métro ?
26:17 - Oui, pourquoi pas.
26:19 - Qu'est-ce que je fais dans l'histoire, moi ?
26:22 - Je m'amène avec toi. - Ah, bon, je préfère.
26:25 - Et lui, il va rester tout seul ? - Non, on va aller chez sa parent.
26:29 Moi, je suis un jour comme ça, dans un couloir,
26:33 on m'avait poursuivi à Cane-Lars-Ventry,
26:36 parce qu'il savait que je travaillais avec Pialat,
26:38 et il m'a dit que c'était un homme essentiel pour lui.
26:41 C'est intéressant, parce que dans les maîtres européens,
26:45 on sait, Godevard, Lars-Ventry, Boréti, etc.,
26:50 mais au cœur et avant eux, il y a eu Pialat.
26:53 Il monta sur un arbre pour voir ses chacous et le carabine.
26:57 La broche le voit par-haut,
26:59 et dit "Oh, ils sont mis par-dessus, p'tit arbre, mon carabine."
27:02 Oh, tu me fais changer tout le temps.
27:04 J'ai fini d'écrire "Normes", mon premier film,
27:06 et c'est un film un petit peu autobiographique,
27:09 et j'ai cherché la personne qui allait jouer mon père,
27:12 et j'ai pensé à Pialat comme acteur.
27:14 Je suis allé chez Pialat, je lui ai mis dans sa boîte aux lettres le scénario,
27:19 et par hasard, je le rencontre dans la rue,
27:21 et alors je lui dis "Bonjour, M. Pialat, excusez-moi,
27:23 je vous ai mis un scénario dans votre boîte aux lettres,
27:25 est-ce que vous l'avez eu ?"
27:27 Et là, il tape un code sur une porte, il ouvre la porte,
27:30 il rentre, il dit "Oui, oui, c'est nul, c'est de la merde,
27:33 mais de toute façon, tout le monde fait de la merde,
27:35 alors vous, vous ferez de la merde aussi."
27:37 Et il m'a reclaqué la porte au nez,
27:39 et là je suis resté très mal,
27:43 parce que c'était un mythe pour moi.
27:46 - Vas-y sur la figure !
27:48 - Et après, je lui ai écrit une lettre très méchante
27:52 en disant que s'il fallait être aussi con
27:54 pour faire des films aussi beaux que "L'enfance nue",
27:56 alors il avait sûrement raison, j'allais faire de la merde.
27:58 C'est Cédric Kahn qui disait que dès qu'on lui dit
28:00 qu'on aime bien un truc de son oeuvre,
28:02 il se referme comme une huître.
28:04 - J'ai l'impression que pour tous les films que je fais,
28:06 je me dis que c'est jamais assez bien,
28:08 j'ai toujours sa voix à l'intérieur de ma tête,
28:10 mais pour tous les films que je fais, toutes les pièces,
28:12 chaque fois que je rentre en scène,
28:14 chaque fois qu'il y a un clap de cinéma.
28:29 - On a discuté de ça avec Géraldine Pellas,
28:31 qui a tourné avec lui aussi,
28:33 et on se disait qu'en fin de compte, dans tout ce qu'on a fait,
28:35 il n'y a pas une fois, pas un film,
28:37 pas une petite chose où on ne s'est pas dit
28:39 "Mais tiens, qu'est-ce qu'il va penser de ça, Maurice ?"
28:43 - À chaque fois que je vais faire un film,
28:45 la première chose, je suis prête, j'attends,
28:47 donc il m'a appris la rigueur, la patience,
28:51 et voilà, alors à chaque fois, on me dit toujours
28:53 "Ah, mais lisez toujours prête",
28:55 et alors je dis, ben voilà,
28:57 j'ai eu une expérience avec M. Pialat,
28:59 et quand on tourne avec M. Pialat,
29:01 il faut toujours être prête, donc ça me restera,
29:03 je crois, jusqu'à la fin de mes jours.
29:07 - C'est quelqu'un qui les a vraiment
29:09 emmenés sur des chemins
29:11 plus loin que nous-mêmes.
29:13 - La richesse qu'il y avait en lui
29:15 n'a pas pu s'exprimer dans le cadre
29:17 et le système de production qu'on nous fait.
29:19 Il n'avait rien à faire avec
29:21 les préoccupations des adolescents.
29:23 Il avait à faire, il pouvait brasser,
29:25 quelque chose de beaucoup plus important.
29:27 Dans son agonie, il ressemblait
29:29 à un chef de guerre afghan,
29:31 et on sentait qu'il y avait
29:33 un royaume insoumis qui était encore là,
29:35 et ça, c'est ce qui restera,
29:37 c'est ce qui restera de lui.
29:39 C'est qu'il aura buté,
29:41 il aura buté sur la petitesse française.
29:45 - Il est mort pauvre,
29:47 et c'est tout à son honneur,
29:49 parce que d'une part, il était généreux,
29:51 d'autre part, il n'a jamais été
29:53 très payé sur les films.
29:55 Il n'y a qu'un film sur lequel
29:57 il a été bien payé, c'est "Le Garçu".
29:59 Les autres, on lui faisait
30:01 l'honneur de le laisser tourner,
30:03 mais ça ne l'intéressait pas, l'argent.
30:05 C'était un homme libre, il ne voulait pas
30:07 être prisonnier, il ne devait rien,
30:09 y compris de l'argent.
30:11 - C'est peut-être la mort de la franchise aussi,
30:13 parce que, somme toute, il ne mâchait pas
30:15 ses mots, il était peut-être l'air
30:17 parfois d'un vieillot sans colère,
30:19 mais finalement, il était sur une ligne
30:21 très intègre, qui était une ligne de cinéma,
30:23 et que la ligne de "je veux faire du cinéma",
30:25 ça veut aussi dire "je ne veux pas
30:27 abétir les gens, et je ne veux pas
30:29 m'abétir moi-même". Or, c'est plus l'époque,
30:31 donc c'est aussi peut-être
30:33 le deuil d'une époque.
30:35 - Hier, on était en vie, tous les deux.
30:37 - Tant d'années, dix films,
30:39 il reste ça.
30:41 Pourtant, moi, je me fous de la postérité,
30:43 mais seulement, c'est pareil,
30:45 la postérité, on dit ça,
30:47 mais même une petite postérité,
30:49 on est quand même bien contents.
30:51 (rires)
30:53 (applaudissements)
30:55 (...)
31:23 (...)
31:25 (...)
31:27 (...)
31:29 (cris)
31:31 (cris)
31:33 (cris)
31:35 (cris)
31:37 (cris)
31:39 - Vivez toutes les émotions du cinéma
31:41 avec "Carte noire".
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