La vie de couple d'Arnaud & Florie a basculé le jour où iels ont eu un accident de moto, événement ayant entraîné la tétraplégie d'Arnaud. Iels nous racontent comment ils ont surmonté cette épreuve qui a profondément changé leur relation et leur intimité ❤️
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00:00 en état de santé, je me suis dit qu'il ne fallait pas qu'elle reste, que sa vie allait
00:05 être plutôt gâchée.
00:07 Donc du coup je lui ai dit "si tu veux me quitter, tu peux".
00:10 Cela fait 6 ans que nous nous sommes rencontrés en Australie, où nous avons voyagé ensemble
00:15 pendant 2 ans.
00:16 Notre vie a basculé le 21 mai 2018.
00:19 Nous avons eu un grave accident de la route, j'étais conducteur d'une moto et Florie
00:25 était passagère derrière moi.
00:26 Après mon réveil, le lendemain de l'accident, les médecins m'ont annoncé que j'avais
00:29 eu une fracture cervicale dans l'accident de moto, que j'étais devenu donc tétraplégique.
00:34 Moi j'ai été emmené dans un hôpital et Florie dans un autre.
00:37 J'ai eu plusieurs fractures de la colonne au niveau des cervicales.
00:41 Elle ne pouvait pas bouger, elle était interdite de voiture.
00:44 On ne s'est pas vu pendant 3 mois.
00:46 L'annonce du handicap, l'annonce que la vie ne sera plus la même, plus la séparation,
00:51 ça a été beaucoup de sentiments à gérer.
00:55 Ça a été très compliqué les premières semaines.
00:57 Le médecin m'a autorisé à aller voir Arnaud en voiture.
01:01 Elle me découvrait dans mon état de tétraplégique, où je ne bougeais pas beaucoup.
01:07 Et moi j'avais encore mon corps séminaire.
01:09 Donc c'est vrai que pour faire le premier bisou c'était drôle.
01:12 Il a récupéré au niveau des bras, mais au début tu ne les bougeais pas beaucoup.
01:15 Au début c'était assez limité, c'est vrai que j'avais besoin d'aide pour le repas.
01:19 Donc j'ai dû lui donner à manger et là j'ai commencé à vraiment réaliser son handicap.
01:25 Je me disais que s'il reste toute la vie comme ça, ça risque d'être assez compliqué.
01:30 Mais je l'ai gardé pour moi.
01:32 Parce qu'à ce moment-là il faut savoir qu'Arnaud avait beaucoup de moments de déprime.
01:36 Tu te souviens de ce que tu m'as dit ?
01:38 Oui, vu mon état de santé, je me suis dit qu'il ne fallait pas qu'elle reste.
01:44 Que sa vie allait être plutôt gâchée.
01:47 Donc je lui ai dit que si je voulais me quitter, je pouvais.
01:50 Je me suis dit que la vie serait trop compliquée,
01:52 qu'il valait mieux qu'on se sépare et qu'elle puisse vivre une vie pleine et riche.
01:58 Je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il me dise ça.
02:00 Il y avait beaucoup d'émotions.
02:03 Moi je n'ai jamais envisagé de le quitter.
02:06 Au contraire, je m'étais dit "Allez, on va y aller, on va rester fort".
02:10 J'étais sûre à ce moment-là de la solidité de notre couple.
02:13 J'ai décidé de rester et de me battre à tes côtés.
02:16 Quand on s'est rencontrés il y a 6 ans, on a aménagé tout de suite ensemble.
02:20 Donc on avait déjà une vie commune ensemble.
02:21 C'était compliqué parce qu'on s'est rendu compte qu'elle était différente avec l'handicap.
02:26 Et que j'étais beaucoup plus limité en termes de ce que je pouvais faire dans l'appartement.
02:30 J'avais repris le boulot.
02:31 Je rentrais à la maison le midi et je devais m'occuper de notre repas.
02:35 Et ensuite je prenais le relais sur les auxiliaires de vie.
02:37 Pour moi c'était comme si j'enchaînais une deuxième journée de boulot finalement.
02:40 J'étais devenue ton aidante à la maison et non ta femme comme on était avant l'accident.
02:46 Dans notre quotidien, c'est vrai qu'il y a beaucoup de choses qui ont été impactées par l'accident.
02:51 Comme le fait, le soir quand je vais me coucher,
02:54 et que Florie elle me dit "Bah attends je vais aller te coucher".
02:57 C'est vrai que j'avais tendance au début beaucoup à l'infantiliser.
03:00 Mais je ne m'en rendais pas compte.
03:02 On fait tout pour nous, comme un enfant.
03:05 Et l'ego, oui, en prend un très gros coup.
03:08 Tous les gestes prenaient du temps.
03:10 Et du coup il fallait toujours que je te demande pour me ramasser quelque chose
03:14 ou pour attraper quelque chose.
03:17 Et en fait toi ça t'agacais.
03:19 Comme à la rééducation, on est comme dans une bulle.
03:22 Qu'on a toujours quelqu'un qui va répondre à la sonnette quand on appelle.
03:28 Donc c'est vrai que j'avais pris cette mauvaise habitude.
03:31 Et c'est vrai que finalement je pensais qu'à la maison ça allait être pareil.
03:35 Et non, la maison c'est pas comme le centre de rééducation.
03:38 C'était très compliqué pour moi d'avoir une vie sociale.
03:41 Parce que je pensais toujours à toi en fait.
03:44 J'avais toujours mon téléphone auprès de moi si jamais tu m'appelais
03:48 parce que t'étais pas bien.
03:49 À partir de l'accident en fait, j'ai consacré mon temps que pour toi.
03:54 Je me suis un peu oubliée, même beaucoup oubliée.
03:57 Pendant les 20 mois que t'étais au centre de rééducation et à l'hôpital,
04:00 niveau intimité il se passait rien.
04:03 Il y avait toujours quelqu'un avec nous.
04:04 Alors soit on avait de la visite, soit on avait...
04:07 Les infirmières, les auxiliaires.
04:09 On avait des moments tranquilles, tu te rappelles.
04:12 Mais finalement moi j'étais tellement épuisée par mon boulot
04:15 et par le fait que je devais l'aider,
04:17 que finalement pendant une période on n'y pensait même plus.
04:21 Ma place avait un peu changé au niveau du couple.
04:24 Je me considérais plus trop comme ta femme, on était plus en colocation.
04:29 On appréhendait de se retrouver et à repasser le cap.
04:32 Parce que moi je me disais qu'il n'a plus les mêmes sensations.
04:35 On ne savait pas exactement vraiment ce qui marchait, ce qui ne marchait plus.
04:40 Puis vu que je ne bougeais plus, la masculinité elle en prend un coup.
04:44 Puisqu'au final vu que plus rien ne fonctionne naturellement.
04:48 Donc on est obligé d'utiliser des médicaments pour pouvoir aider.
04:52 Mais c'est vrai qu'en tant qu'homme, on a une réelle blessure dans la masculinité.
04:56 Au final, tout ne se résume pas qu'à une érection.
05:02 Et au principe d'être un homme et qu'il y a plusieurs façons de l'être.
05:08 Pour qu'on retrouve une sexualité épanouie,
05:10 il a fallu qu'on soit inventif.
05:14 On va plus être dans la tendresse, dans le câlin.
05:17 L'intimité peut être passée maintenant plus en second plan.
05:22 On a réussi à se retrouver sur la même longueur d'onde à ce niveau-là finalement.
05:26 Notre point fort de notre couple, je pense que c'est la communication.
05:30 Même avant l'accident, elle était assez présente.
05:33 C'est une réelle force pour nous deux.
05:34 Et l'humour ?
05:35 On a beaucoup d'humour.
05:36 Plus moi que toi maman.
05:39 Il faut profiter, rigoler, ne pas trop se prendre la tête.
05:43 On a un projet enfant.
05:45 On l'avait avant l'accident.
05:47 C'est vrai qu'on l'avait mis un peu en stand-by.
05:49 Et là qu'on se sent mieux, qu'on a envie d'avancer,
05:52 qu'on est dans un bon mood, on peut faire un enfant.
05:56 Alors certes, c'est plus compliqué, plus délicat.
05:59 Par le principe que nous allons passer, il y a des possibilités d'avoir des jumeaux.
06:04 Donc une personne en situation de handicap, plus une paire de jumeaux,
06:10 c'est sûr que pour Florie, ça reste d'être beaucoup de travail.
06:13 Mais on est quand même prêts à accueillir un enfant.
06:18 Ou deux.
06:19 Ou deux, si jamais la nature nous en donne deux.
06:22 Mais c'est vrai qu'on a envie de fonder une famille,
06:25 de montrer que malgré le handicap, malgré les difficultés,
06:30 qu'on peut quand même y arriver et avancer avec.
06:33 Moi, je suis fière de notre parcours.
06:35 Parce que ça n'a pas été tous les jours rose.
06:37 Il a fallu se battre sur pas mal de points.
06:39 On peut être fier de ce qu'on a déjà parcouru et de ce qu'on va parcourir.
06:46 Et montrer que notre vie ne s'arrête pas à un simple fauteuil.
06:51 Et qu'on peut aller de l'avant malgré tout.
06:54 Sous-titrage Société Radio-Canada
06:56 [Sous-titrage Société Radio-Canada]
06:58 Merci à tous !
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