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François Mallet a été diagnostiqué bipolaire il y a 5 ans. Pour lui, ça a été un véritable soulagement. Aujourd'hui, il nous raconte son parcours.

Son spectacle "Heureux soient les fêlés" est disponible jusqu’au 7 janvier au Métropole à Paris.
Transcription
00:00Les gens te voient, t'es un mort-vivant, tu pleures sans arrêt.
00:02Ils essayent de faire des activités avec toi, ça marche pas.
00:04Ils font des câlins, ça marche pas.
00:06Et le diagnostic a vraiment été un soulagement.
00:08Salut, fraîche, c'est François Mallet.
00:11Je suis comédien et humoriste.
00:13Et aujourd'hui, on va parler notamment de bipolarité.
00:16Alors, la bipolarité, c'est une pathologie psychique
00:19qui pourrait se résumer très simplement par l'alternance de phase dépressive
00:23et de phase up ou d'excitation,
00:26ou qu'on appelle dans le jargon médical, maniaque.
00:29Et moi, j'ai été diagnostiqué bipolaire en 2017.
00:32Alors, moi, j'ai été diagnostiqué après 5 grosses dépressions.
00:35En fait, au début, on a cru que je faisais juste des dépressions à répétition.
00:38Chaque automne, chaque hiver, j'étais complètement au fond de mon lit,
00:41en train de pleurer pendant plusieurs mois.
00:42Et puis, chaque printemps, chaque été, j'allais mieux.
00:45Et puis, il y a eu une année où vraiment,
00:47j'ai eu une grosse phase d'excitation pendant un été.
00:50Et à la suite de ça, l'humeur est vraiment redescendue très, très bas.
00:54Et j'ai été hospitalisé, d'abord dans le public, ensuite dans le privé.
00:58Et c'est en étant hospitalisé dans le public,
01:00dans un centre expert bipolaire,
01:01parce que je commençais à avoir des suspicions un peu à ce niveau-là,
01:04qu'au bout de 2-3 semaines, en observation, le corps médical m'a dit
01:07« Bah, écoutez, monsieur François Mallet, vous êtes cyclotimique. »
01:10Donc, c'est-à-dire une forme atténuée de bipolarité.
01:12Je suis un peu un bipolaire petit joueur.
01:14Ouais, je me souviens des grosses larmes de soulagement,
01:16parce qu'en fait, ça faisait 5 ans que je souffrais comme pas possible,
01:18sans pouvoir mettre des mots sur ce qui m'arrivait.
01:21Ça a été très dur. Ça a été très dur pour ma maman, notamment.
01:23Elle m'a énormément accompagné là-dessus.
01:26En fait, il y a un moment où les gens se sont trouvés complètement démunis.
01:28C'est-à-dire que je n'étais pas du tout dans quelque chose d'agressif.
01:31Je ne faisais pas porter mon malheur aux gens qui m'entouraient,
01:34mais en fait, ça a forcément des répercussions.
01:35Enfin, les gens te voient, tu es un mort-vivant, tu pleures sans arrêt.
01:39Ils essayent de faire des activités avec toi, ça ne marche pas.
01:41Ils font des câlins, ça ne marche pas.
01:42Et le diagnostic a vraiment été un soulagement.
01:44Pour les phases dépressives, moi, ça a toujours commencé par les mêmes symptômes,
01:48à savoir le sommeil perturbé,
01:50avec grosses sensations de fatigue le matin et pas envie de se lever, surtout.
01:54Et la gorge un peu nouée.
01:56C'est-à-dire que tout de suite, je sens que c'est serré un petit peu ici,
01:59j'ai moins d'appétit.
02:00Et pour les phases maniaques d'excitation,
02:03c'est toujours une question de rythme.
02:06C'est-à-dire que je me mets à faire beaucoup d'activités en même temps
02:09et au bout d'un moment, je deviens assez irritable.
02:12C'est-à-dire que je vais toucher à plein de choses en même temps.
02:14Du coup, je vais commencer à faire les choses avec moins d'intérêt.
02:18En tout cas, ça sera de moins bonne qualité.
02:19Et quand les gens vont me dire,
02:21« Ah, j'ai l'impression que tu t'éparpilles un peu,
02:23et puis t'es beaucoup sorti, et puis tu te lèves tard,
02:25et puis d'un coup, tu te remets à éclater de rire,
02:27et puis d'une seconde à l'autre, t'es super irritable. »
02:29Là, je me rends compte qu'il y a un sur-régime.
02:31J'ai un traitement médicamenteux.
02:32En fait, quand je suis arrivé à l'hôpital,
02:34tout de suite, on m'a enlevé les antidépresseurs que j'avais depuis cinq ans
02:37parce qu'on pensait que c'était des dépressions
02:38et qui, du coup, n'étaient plus du tout indiqués pour ce que j'avais.
02:40Et on a commencé à me donner ce qu'on appelle un thymorégulateur,
02:43donc un régulateur d'humeur.
02:44Le traitement, la thérapie font que j'ai une humeur assez stable.
02:48Alors, à la fois, c'est super cool,
02:49et à la fois, le point négatif, c'est que du coup, à certains moments,
02:52quand il y a des choses qui sont ouf qui se passent dans ma vie
02:55et qui sont des très bonnes nouvelles,
02:57l'humeur étant stabilisée,
02:59je prends la bonne nouvelle avec un peu moins d'enthousiasme.
03:01Et ça, j'ai mis un peu de temps à l'accepter.
03:03Donc ouais, thérapie par la parole, traitement, et saine.
03:06Et du coup, ça fait un joli cocktail qui me permet d'aller bien.
03:08Très dangereux, l'autodiagnostic est en même temps ultra tentant.
03:12Je m'étais un peu autodiagnostiqué bipolaire en me disant
03:14j'ai l'impression qu'il y a des signes de ce trouble psychique.
03:18Donc tu ne peux jamais t'empêcher d'aller voir des choses qui traînent sur Internet.
03:22Par contre, il y a un moment, c'est hyper important de consulter.
03:26Je sais que c'est ultra difficile.
03:27C'est difficile de conseiller aux gens de consulter et de ne pas lâcher l'affaire
03:30parce qu'il y a des listes d'attente pas possibles.
03:32Il y a plein de thérapeutes qui sont ultra chers,
03:34qui ne sont pas conventionnés.
03:35Et ça, c'est très compliqué.
03:36Et je comprends que ce soit décourageant.
03:38À la limite, médecin traitant, en fait, pour commencer.
03:40Médecin traitant, quelqu'un que tu vois souvent, qui t'a confiance.
03:42Tu lui parles de tes émotions, de tes déprimes, de tes symptômes dépressifs,
03:46ce que tu veux et il t'oriente vers quelqu'un.
03:49Effectivement, on en parle de plus en plus dans la société et sur scène
03:51et ça, c'est génial.
03:52Et chez les hommes, je crois tout simplement que, en fait,
03:56c'est tellement compliqué de tomber les masques.
03:58Et une fois que les masques sont tombés,
04:00tu te rends compte que les hommes, évidemment, ont plein d'émotions comme tout le monde
04:03et sont prêts à en parler.
04:04J'ai l'impression qu'entre hommes, il y a un peu ce truc de
04:08si personne ne fait le premier pas,
04:10on est capable pendant très longtemps de faire semblant que tout va bien.
04:14N'ayez pas peur de parler de ce que vous avez.
04:17Je crois que les gens sont maintenant vraiment de plus en plus à l'écoute.
04:20Ce n'est pas facile tout le temps.
04:21Ce n'est pas facile avec tout le monde.
04:22Mais il y a de la place pour les émotions.
04:24Il y a de la place pour la sensibilité.
04:26Il suffit de faire ce tout petit premier pas qui est compliqué
04:30mais qui est tellement gratifiant pour la suite.
04:32Tellement gratifiant.

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