• l’année dernière
Avec Anne Rosencher, journaliste, écrivain et directrice déléguée de la rédaction de l’Express.

Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/en-toute-subjectivite

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Transcription
00:00 toute subjectivité ce matin avec la directrice déléguée de la rédaction de L'Express.
00:04 Bonjour Anne-Rose Ancher !
00:05 Bonjour Jérôme, bonjour à tous !
00:06 Vous vous interrogez ce matin sur le succès politique et médiatique des fameuses casserolades.
00:12 Oui, depuis qu'elles ont fleuri à la mi-avril, les casseroles se sont imposées comme les
00:16 stars du printemps de notre mécontentement.
00:18 On en fait des éditions spéciales où l'on débat sur le maintien de l'ordre, l'impopularité
00:23 du gouvernement et la dérive autoritaire ou pas de la riposte préfectorale.
00:27 Les humoristes s'en donnent à cœur joie et les historiens replongent dans les archives
00:32 de la contestation politique par batterie de cuisine.
00:34 Entendons-nous, le droit de manifester son opposition par le biais du teint amarre me
00:38 semble indiscutable.
00:40 Ce qui me laisse perplexe, c'est comment le rassemblement de quelques dizaines de personnes
00:44 à chaque casserole, souvent des militants politiques et syndicaux, s'est frayé un
00:49 chemin, un breaking news permanent de notre conversation publique.
00:52 Question de télé-génie d'abord, nous vivons à l'ère de l'écran et la colère mise
00:57 en scène donne toujours plus de matière que le désarroi qui mijote derrière le crépit
01:02 des pavillons ou dans les bars d'immeubles.
01:04 Mais au-delà de cet aspect médiatique, il y a une autre raison à cette mise en avant
01:09 des casserolades.
01:10 Elles sont un outil pratique pour l'opposition, notamment de gauche, qui depuis le recours
01:15 au 49-3 a délaissé la question sociale pour faire de la dérive autoritaire du pouvoir
01:19 son seul et unique mantra.
01:22 En cela, la gauche trouve dans la dénonciation d'une « répression des casseroles » l'occasion
01:27 de marteler ce qui est devenu sa seule ligne politique, se poser en partie de la défense
01:32 de la démocratie.
01:33 Et ça, ça vous fait tiquer ?
01:34 Au débattre de nos institutions, de la doctrine du maintien de l'ordre ou de notre éthos
01:38 démocratique est tout à fait légitime.
01:40 En revanche, caricaturer la France en Hongrie et Macron en Caligula est excessif et donc
01:46 insignifiant.
01:47 Par ailleurs, l'idée que les Insoumis, qui ces dernières années n'ont pas tout à fait
01:50 brillé par une grande pratique de la démocratie interne, donnent des leçons à la matière
01:55 ne manque pas de sel.
01:56 Mais l'essentiel est ailleurs.
01:58 L'essentiel, c'est l'escamotage du débat de fond par le bruit et la fureur des slogans
02:02 faciles.
02:03 La force de gouverner s'effondre et d'immenses urgences politiques naissent à l'ombre de
02:08 cette paralysie.
02:09 Écoles, hôpitales, industries, fractures sociales, géographiques, culturelles…
02:13 Face au déclenchement qui nous taraude, la France a besoin d'un souffle politique et
02:18 notamment d'une opposition qui, par le travail du débat et du diagnostic, fasse émerger
02:23 des alternatives crédibles à la place.
02:25 Et depuis quelques années déjà, le pays semble comme coincé.
02:29 D'un côté, un exécutif de plus en plus faible, impopulaire et élu par défaut.
02:34 De l'autre, personne pour convaincre une majorité de citoyens qu'il ou elle serait
02:38 une alternative préférable.
02:40 De cette crise majeure-là, les casseroles ne nous disent rien.
02:43 Merci à vous Anne Rosencher, je vous dis à jeudi prochain.

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