Jordan Bardella s’exprime devant les caméras de TV Libertés. Le président du Rassemblement national et député européen était en Hongrie les 4 et 5 mai 2023 pour participer à la CPAC Hungary, un rendez-vous incontournable des conservateurs du monde occidental organisé pour la deuxième année consécutive à Budapest par le Centre pour les droits fondamentaux, un think-thank proche du gouvernement hongrois. Lors de son séjour en Hongrie, où il a prononcé un discours dénonçant le wokisme, Jordan Bardella a notamment rencontré la Présidente Katalin Novák et a déjeuné avec le Premier ministre Viktor Orbán.
Yann Caspar, journaliste, juriste et auteur franco-hongrois l’a interrogé le 5 mai 2023 pour TV Libertés. Au menu de cet entretien : les relations du Rassemblement national avec la Hongrie de Viktor Orbán, les critiques émises en Europe de l’Ouest à l’encontre de la Hongrie, les élections européennes de 2024 et le jeu des alliances, la France d’Emmanuel Macron et les résultats de Gérald Darmanin en matière d’immigration.
Yann Caspar, journaliste, juriste et auteur franco-hongrois l’a interrogé le 5 mai 2023 pour TV Libertés. Au menu de cet entretien : les relations du Rassemblement national avec la Hongrie de Viktor Orbán, les critiques émises en Europe de l’Ouest à l’encontre de la Hongrie, les élections européennes de 2024 et le jeu des alliances, la France d’Emmanuel Macron et les résultats de Gérald Darmanin en matière d’immigration.
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00:00 Bonjour M. Bardella, merci d'accepter cet entretien pour TVMiller Liberté.
00:10 Merci de votre invitation.
00:11 Nous sommes aujourd'hui à Budapest, à la CIPAC, deuxième édition européenne du
00:16 rendez-vous des conservateurs américains.
00:19 Et vous avez aujourd'hui rencontré le Premier ministre hongrois, si je ne me trompe pas.
00:23 Qu'est-ce que vous retenez de cette rencontre, de ce déjeuner ?
00:26 J'ai eu l'honneur de rencontrer le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, la présidente
00:32 de la République, Katalin Novak.
00:34 C'est un plaisir de les rencontrer parce qu'ils portent la voix d'une nation européenne
00:40 qui est libre, qui ne se soumet pas aux injonctions de Bruxelles et surtout qui assume pleinement
00:45 la défense de son identité avec fierté, avec fidélité.
00:49 Et je crois que c'est un modèle aujourd'hui en Europe parce que la Hongrie résiste à
00:54 des périls auxquels nous sommes également confrontés.
00:57 Je pense évidemment à l'idéologie woke, à celle de la cancelled culture dont j'ai
01:01 parlé dans mon intervention et qui vise de manière très insidieuse à déconstruire
01:05 tout ce que nous sommes, à déconstruire tout ce que nous avons été pour aboutir
01:10 à l'air du vide pour les générations futures.
01:13 Et puis évidemment la question de l'immigration.
01:15 La Hongrie a tenu tête depuis très longtemps à l'Union européenne en refusant d'accueillir
01:19 des migrants.
01:20 Je pense qu'en cela, elle a appliqué un principe démocratique clair.
01:24 Les peuples d'Europe souhaitent demeurer eux-mêmes.
01:28 C'est aussi le cas pour le peuple français et je regrette qu'il n'ait pas été suivi
01:32 sur ce sujet.
01:33 Le Rassemblement national entend s'inspirer de la Hongrie de Viktor Orbán.
01:36 C'est un allié politique, un ami politique.
01:39 Comment est-ce que vous définiriez les dirigeants au roi ?
01:41 En tout cas c'est un gouvernement comme d'autres d'ailleurs avec lequel nous pourrons travailler
01:46 demain et après-demain pour réorienter l'Europe vers une Europe de la protection.
01:51 Je pense que le renforcement de Frontex par exemple, la police de garde frontière européenne,
01:57 la coopération qui est nécessaire aujourd'hui entre les États pour protéger l'Europe
02:00 de vagues migratoires actuelles et à venir est un exemple sur lequel nous pourrons travailler
02:04 avec Viktor Orbán.
02:06 Alors lui a avec la Hongrie des frontières qui sont des frontières terrestres, des frontières
02:10 avec les autres pays d'Europe pardonnez-moi, des frontières physiques.
02:12 Mais la France peut évidemment travailler avec la Hongrie.
02:16 Elle travaillera demain avec la Hongrie et je n'ai aucun doute que lorsque nous serons
02:19 au pouvoir en 2027, nous aurons l'occasion de revenir ici à Budapest dans le cadre de
02:23 rencontres plus institutionnelles.
02:24 Alors la Hongrie est un modèle pour certains, une source d'inspiration mais aussi un mouton
02:29 noir.
02:30 L'Europe critique la Hongrie parce qu'elle ne respecterait pas les critères liés à
02:33 l'état de droit, la dépendance de la justice.
02:36 Qu'est-ce que vous disiez à tous ces Hongrois qui s'interrogent et qui pensent que finalement
02:40 les Européens de l'Ouest et particulièrement la France d'Emmanuel Macron n'a pas forcément
02:45 de leçons à donner, à s'ingérer dans les affaires internes de la Hongrie.
02:50 Est-ce que la France est un état de droit ? Est-ce que l'indépendance de la justice
02:54 y est respectée ? Je pense notamment à toutes ces images qui circulent en ce moment, les
03:00 violences policières, un ministre, M.
03:04 Darmanin, on n'arrive pas trop à savoir comment est-ce qu'il entend soutenir les
03:12 policiers dans cette situation.
03:13 Qu'est-ce que vous pensez de tout ça ?
03:15 Écoutez, moi je veux dire aux Hongrois qu'Emmanuel Macron n'est pas la France et qu'Ursula
03:19 von der Leyen n'est pas l'Europe.
03:20 Et que précisément il y a des mouvements politiques comme le nôtre en France qui,
03:25 chaque jour que Dieu fait, se battent pour rendre au peuple la fierté de ce qu'ils
03:29 sont, pour leur rendre la défense de leur identité, pour leur rendre la maîtrise de
03:33 leurs frontières et notamment la maîtrise de leur destin.
03:36 Et en vérité si la Hongrie est persécutée comme la Pologne d'ailleurs, moi je suis
03:40 député européen, je vois tous les jours au Parlement européen, il y a une volonté
03:43 aujourd'hui assumée de la Commission.
03:44 De persécuter pour un motif ou pour un autre la Hongrie de Viktor Orbán et la Pologne
03:50 de Kaczynski également, parce que ces pays-là refusent de se soumettre aux injonctions de
03:54 la Commission, parce qu'ils ont fait le choix de ne pas accueillir de migrants à
03:58 la suite de la crise des réfugiés syriens en 2015, qu'ils ont fait le choix de préserver
04:02 leur identité.
04:03 Et j'ai eu l'occasion de dire au Premier ministre et à la Présidente hongroise qu'en
04:07 fait, ils représentent tout ce qu'Emmanuel Macron rejette.
04:09 Il représente la défense de la famille, il représente la défense de la nation, il
04:14 représente la défense… En tout cas, ils assument une identité chrétienne qui s'inscrit
04:18 pleinement dans la civilisation européenne, dans cette idée de la civilisation européenne
04:22 que je ne mélange pas avec l'Union européenne.
04:24 Et c'est justement pour ces motifs-là, pour ce qu'ils incarnent idéologiquement,
04:28 qu'ils trouvent en Emmanuel Macron et en Ursula von der Leyen des adversaires revendiqués.
04:34 Mais je pense qu'Emmanuel Macron ne peut pas incarner seul l'image de la France.
04:41 Et en venant là aussi, on rassure les Hongrois sur le fait qu'il existe aussi à l'Ouest
04:45 un espoir pour travailler demain avec eux.
04:48 Puis si vous voulez, le sujet c'est avec quel pays, avec quel État Emmanuel Macron
04:52 ne nous a pas fâchés.
04:53 En fait, on a le sentiment qu'il nous a isolés sur la scène européenne.
04:56 Et vous citiez les propos de Gérald Darmanin, mais l'incident diplomatique en cours entre
05:01 la France et l'Italie, qui sont de petites politiques politiciennes, l'illustre parfaitement.
05:06 Alors, quand est-ce que cette situation est possible de se débloquer en Europe ? L'année
05:10 prochaine se tiendront les élections européennes, qui sont d'ordinaire boudées en France.
05:15 Est-ce que, étant donné que la situation est exceptionnelle…
05:18 Les dernières n'étaient pas boudées.
05:19 C'est vrai que les dernières avaient lieu durant les Gilets jaunes et on avait eu une
05:23 hausse de la participation qu'on n'avait jamais vu depuis 25 ans et qui nous avait
05:26 porté en tête.
05:27 Plutôt au niveau des thématiques, est-ce qu'on aura vraiment un focus plus national ? Est-ce
05:34 que ce sera en quelque sorte un référendum sur Emmanuel Macron ? Est-ce que c'est la
05:38 carte que vous entendez jouer l'année prochaine ou alors c'est plutôt attendre que les
05:42 choses se déroulent tranquillement jusqu'à 2027 ?
05:46 Je pense que c'est plus qu'un référendum, ce sont les mi-termes.
05:48 C'est les élections de mi-mandat du quinquennat d'Emmanuel Macron.
05:51 Il va y avoir une dimension européenne qui va être très forte.
05:54 Si je suis ici en Hongrie pour le CIPAC, c'est aussi pour rencontrer nos alliés, nos potentiels
05:58 alliés demain au Parlement européen.
06:00 Mais il y aura aussi une dimension très nationale.
06:03 Et vous évoquiez les sujets.
06:04 Mais moi, je pense que précisément les élections européennes, ça va être l'occasion de
06:07 parler de tout.
06:08 Ça va être l'occasion de parler de l'immigration, parce que l'exemple italien montre bien que
06:12 le premier, d'abord et avant tout, européen et qu'il touche toutes les nations d'Europe
06:15 et qui appelle aussi à une réponse coordonnée entre tous les États européens pour protéger
06:20 notre continent.
06:21 La question de l'énergie, je veux dire si aujourd'hui les artisans boulangers, les
06:26 commerçants, les indépendants, les familles françaises payent 2, 3, 4, 5, 6 fois leur
06:32 facture énergétique par rapport à l'année dernière, c'est bien parce que l'énergie
06:35 est piézé-poignée dans ce marché européen de l'électricité qui fait que les prix
06:38 de l'électricité sont adossés sur ceux du gaz.
06:40 La question du modèle social, je rappelle quand même que la réforme des retraites,
06:44 elle est inscrite dans toutes les revendications qui sont faites par la Commission européenne
06:49 chaque année à la France.
06:51 Et en ce moment, Emmanuel Macron se soumet aux recommandations qui sont faites par Bruxelles.
06:56 La question du pouvoir d'achat, elle est aussi évidemment liée à cette question
07:00 de l'énergie.
07:01 Il y a beaucoup de sujets qui sont en fait des sujets évidemment européens parce que
07:05 l'Europe, même si les Français ne s'y intéressent pas, elle est partout dans leur
07:08 quotidien, elle est partout dans leur vie.
07:09 Donc ce serait une élection en fait sur deux niveaux, un niveau national, un niveau européen.
07:14 Et moi, je souhaite emmener le Rassemblement national au sommet dans cette élection.
07:17 Et concernant les alliés politiques que vous évoquiez dans le cadre d'un nouveau Parlement
07:22 européen, est-ce qu'il ne risque pas d'y avoir des points de blocage, notamment sur
07:29 la question russe, des blocages avec certains partenaires allemands ?
07:33 Est-ce que la dynamique des alliances, des parties de votre tendance, est-ce qu'elle
07:39 changera à partir de 2024 par rapport à tout ce qui s'est passé ces dernières années ?
07:43 Écoutez, moi j'ai un objectif, c'est le rassemblement.
07:46 C'est le rassemblement en France de tous les patriotes, de tous les amoureux de la France
07:49 qui veulent venir s'inscrire dans la dynamique qu'on est en train de construire pour emmener
07:53 le camp national au pouvoir en 2027.
07:55 Et je pense qu'en cela, le rassemblement national est la plateforme la plus rassembleuse
08:00 aujourd'hui, en tout cas moi c'est comme ça que je la conçois la plus efficace, et
08:03 le rassemblement en Europe.
08:04 Vous avez raison de rappeler qu'aujourd'hui il y a deux forces essentiellement qui représentent
08:08 le mouvement souverainiste et national au Parlement européen, le groupe ECR, des conservateurs,
08:15 où siège Mme Meloni de Fraternité d'Italia, et le groupe Identité et Démocratie, où
08:20 nous siégeons avec d'autres alliés qui connaissent une percée dans leur pays.
08:26 Notre objectif c'est évidemment cette grande coalition, on essaie de mettre tout le monde
08:29 dans le même mouvement, dans la même dynamique, peut-être dans le même groupe au Parlement
08:32 européen.
08:33 C'est mon ambition, je pense que la France a le poids, la légitimité pour porter cette
08:38 ambition.
08:39 Est-ce qu'on va y arriver ? Bah écoutez, je ne suis pas devin, il faudra d'abord se
08:42 compter au lendemain des élections européennes, et moi je souhaite en tout cas que la France
08:46 est la plus grosse délégation souverainiste au Parlement européen.
08:49 Je crois aussi que les Républicains peuvent disparaître de l'hémicycle de Strasbourg,
08:53 je pense qu'ils ne feront pas les 5% nécessaires pour obtenir des élus, et moi j'en appelle
08:58 en cela à l'ensemble des électeurs patriotes de droite de venir nous rejoindre, de travailler
09:03 avec nous, parce que je pense que les mots "nation", les mots "autorité", les mots
09:06 "identité", la volonté de transmettre les savoirs fondamentaux à l'école, de
09:11 défendre aussi une Europe des nations, sur toutes ces grandes idées-là, on peut se
09:13 rejoindre, donc il est peut-être temps qu'on travaille ensemble.
09:15 Pour terminer, une question très brève sur M.
09:18 Darmanin, qui a récemment critiqué Mme Mélanie en expliquant qu'elle n'avait pas les résultats
09:24 attendus en matière d'immigration.
09:25 Que dites-vous à M.
09:27 Darmanin aujourd'hui ?
09:28 Que c'est l'hôpital qui se foule la charité, quand on a un bilan comme celui de M.
09:33 Darmanin qui a pulvérisé tous les records, records de demande d'asile, records d'entrée
09:38 légale sur le territoire, records de clandestins, 900 000 d'après Patrick Stefanini, records
09:43 de mineurs étrangers non accompagnés, qui on le sait ne sont ni mineurs ni isolés,
09:49 records de naturalisation.
09:50 Quand on a un bilan comme celui de M.
09:52 Darmanin, normalement et logiquement, quand on est à peu près conscient de ce que vivent
09:58 les Français et qu'on a surtout le sens du devoir et le sens de la politique, ça
10:01 appelle à beaucoup d'humilité.
10:02 En vérité, l'Italie est confrontée à un afflux très important.
10:05 Si les Italiens ont porté au pouvoir M.
10:08 Salvini et Mme Mélanie, c'est précisément parce qu'ils veulent rester eux-mêmes dans
10:11 ce XXIe siècle et je pense que la réponse doit aussi être européenne.
10:14 Il faut renforcer les moyens de Frontex et il faut aussi organiser la relocalisation
10:19 des migrants, non pas dans les villages et dans les campagnes françaises, mais dans
10:22 leurs pays d'origine, dans les pays de départ.
10:24 C'est ce que je porterais dans le cadre de la campagne européenne et ce sera précisément
10:27 l'un des grands sujets de ces élections européennes.
10:30 Rendez-vous l'année prochaine.
10:31 Merci M.
10:32 Bardella.
10:33 Merci à vous.
10:34 Et bonne fin de séjour en Hongrie.
10:35 Merci à vous.
10:36 Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org
10:39 Sous-titrage Société Radio-Canada