En amont de la Conférence organisée le 30 mars prochain par l’Opinion « Entreprises responsables, des paroles aux actes », Hugo Mickeler, juriste chercheur chez Novethic, spécialisé dans les sujets de durabilité et de responsabilité sociale des entreprises, répond au micro de Cécile Desjardins. Il nous explique la définition même d’une entreprise responsable et comment un chef d’entreprise peut, aujourd’hui, avancer dans une démarche de responsabilité.
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00:00 Bonjour à tous, le 30 mars prochain aura lieu une conférence de l'opinion intitulée
00:07 « Entreprises responsables, des paroles aux actes ». Une heure et demie d'échanges où des experts
00:12 et des professionnels en entreprise nous expliqueront les enjeux et les défis de la mise en
00:16 œuvre d'une démarche responsable dans leur structure. En amont de cette rencontre, je suis
00:20 très heureuse d'accueillir Hugo Michelher. Bonjour Hugo. Bonjour. Hugo, vous êtes juriste
00:25 chercheur chez Novetic, spécialisé dans les sujets de durabilité et de responsabilité sociale des
00:30 entreprises. Tout à fait. Alors on va commencer par la base. Qu'est-ce qu'on entend par « entreprise
00:36 responsable » ? C'est une notion à la fois récente et évolutive. Alors concrètement, c'est quoi ? Alors
00:42 déjà je pense qu'il n'y a pas forcément une entreprise responsable, il y a plutôt des entreprises
00:46 responsables. À partir du moment où cette responsabilité découle à la fois d'obligations
00:51 et de démarches volontaires, on peut vraiment parler d'entreprise responsable au pluriel. Après
00:56 on peut néanmoins faire quand même deux observations. La première, c'est qu'aujourd'hui
01:00 l'idée que l'entreprise ne serait qu'un véhicule pour faire un bénéfice, ça c'est une idée qui
01:05 est morte et enterrée. L'entreprise a un impact sur l'environnement et sur la société. Il ne faut
01:10 pas oublier ce « S » de social. Et donc ça c'est quelque chose déjà qui est très important.
01:15 Deuxièmement, cette idée d'entreprise responsable, elle est fortement liée à l'ARSE, forcément. Et
01:22 justement à ce titre-là, il y a une décision de justice très récente qui a été rendue dans le
01:27 cadre du devoir de vigilance, qui nous donne une définition assez fraîche de ce qu'est l'ARSE.
01:32 C'est tout simplement la responsabilité sociale des entreprises, déjà. Et deuxièmement, c'est
01:39 quand une entreprise va intégrer des préoccupations sociales, environnementales et économiques dans le
01:45 cadre de ses activités et dans ses relations avec les parties prenantes. Donc il y a vraiment
01:49 cette idée, ces trois piliers, l'environnement, le social et ses activités économiques. C'est ça
01:54 qui va nous donner un petit peu une idée de ce qu'est une entreprise responsable.
01:59 En tant que dirigeant d'entreprise, comment est-ce qu'on peut prétendre rendre son
02:04 entreprise responsable ? Concrètement, ça va passer par quoi ?
02:08 Alors là, il y a je pense deux voies qu'on peut un petit peu explorer. Quand un dirigeant veut
02:13 responsabiliser son entreprise, la première déjà, c'est qu'aujourd'hui on a des obligations légales.
02:19 Le droit français a commencé à prendre en compte cette notion de RSE, à "veut responsabiliser les
02:25 entreprises". Et donc quand on est un dirigeant d'entreprise, la première chose à faire, c'est de
02:28 bien connaître et de bien creuser cette réglementation et de s'en saisir pleinement, pour pouvoir répondre
02:35 tout simplement aux attentes du législateur. Deuxièmement, la deuxième voie, c'est
02:41 aussi une démarche volontaire. Il existe aujourd'hui beaucoup de certifications,
02:46 il existe des outils mis en place par le législateur. Je pense par exemple à l'entreprise
02:51 Amission. Et donc c'est aussi la possibilité de se saisir de ces outils, d'avoir une démarche
02:56 volontaire pour mettre en place tout simplement son entreprise responsable.
03:03 Vous évoquiez les obligations, on pense évidemment à l'Europe. Alors l'Europe a fixé des objectifs
03:09 très ambitieux. Comment est-ce qu'on peut aujourd'hui résumer les attentes européennes en la matière ?
03:14 Tout à fait. Alors oui, l'Union européenne, inspirée par ce qui s'est fait en France, pousse
03:17 véritablement les entreprises à la transformation. Moi je pense qu'il y a deux piliers aujourd'hui.
03:24 Le premier pilier, c'est celui de la transparence. L'Union européenne, c'est le pilier le plus ancien,
03:29 c'est celui qui est déjà en place. On pense en 2014 avec la fameuse directive sur le reporting
03:35 extra-financier. Et donc c'est cette idée que tout d'abord on a voulu pousser à la durabilité,
03:41 à ce changement, à cette transformation par la finance durable. Et donc pour pouvoir flécher
03:45 les investissements, on a besoin que les entreprises nous remontent un certain nombre
03:49 d'informations. Affichent ce qu'elles font. Tout à fait, exactement. Et donc ça c'est très important.
03:53 Et c'est quelque chose qui est en rénovation actuellement. Le deuxième pilier, c'est celui
03:57 de la vigilance. Et ça c'est un pilier qui est en construction. Les directives qui vont venir
04:02 sont en train d'être construites, d'être votées par les instances. Sur ce point-là,
04:07 on parle de quel horizon ? On parle d'un horizon 2025. Le temps qu'une directive soit votée par
04:12 le Parlement puis transposée, on est un peu sur cet horizon de temps-là. Votre avis personnel,
04:19 j'ai envie de dire, est-ce que toutes ces directives que vous évoquez, déjà en place,
04:24 en train d'être revues ou qui vont être écrites d'ici 2025, est-ce que vous pensez que ça va
04:28 conduire les entreprises à véritablement changer leur pratique ? Alors, je pense que ça va dans la
04:33 bonne direction. C'est déjà un premier pas qu'on fait dans la bonne direction. Maintenant,
04:37 au regard des enjeux, au regard de ce qu'on peut lire dans les différents rapports,
04:41 celui du GIEC, etc., ça me semble peut-être encore un petit peu léger. Peut-être que,
04:46 enfin, c'est des piliers, juste la transparence et la vigilance, ça induit les entreprises à
04:51 mettre en place un certain nombre de processus au sein de leur structure, mais de perdre peut-être
04:56 un petit peu l'objectif qui est le plus important, qui est un objectif de résultat, de comportement,
05:01 véritablement. Et ça peut-être qu'il faudra un troisième pilier que l'Union européenne
05:06 mettra peut-être en place, qui soit un peu plus contraignant, pour pousser davantage les
05:10 entreprises à cette obligation de comportement et à rechercher un résultat. Maintenant,
05:17 bien évidemment, c'est un petit bémol à mettre, c'est qu'il faudra évidemment que l'Union européenne
05:20 et les États supportent les entreprises dans cette démarche-là, plus qu'elle ne le fait actuellement.
05:26 Alors, en guise de conclusion, justement, qu'est-ce que vous pouvez dire aux entreprises ? J'ai envie
05:31 de dire quel va être le message que vous souhaitez faire passer aux responsables qui nous écoutent.
05:37 Je pense que, vraiment, j'ai envie de terminer par une note un peu positive,
05:41 un petit peu optimiste. C'est de dire, de se saisir de cette réglementation qui arrive,
05:46 de ne pas l'aborder uniquement comme une contrainte et comme quelque chose qui peut
05:50 être très chronophage, mais véritablement de l'aborder comme une aide et comme des pistes
05:55 pour véritablement se poser les bonnes questions sur le modèle de notre organisation, sur le modèle
06:01 de notre économie et, concrètement, qu'est-ce que je mets en place pour devenir le plus responsable
06:06 possible. Et ça peut être positif. Et ça peut être positif, évidemment, et on en a tous besoin.
06:10 Merci beaucoup, Hugo Miquelher. Je rappelle que vous êtes juriste-chercheur chez Novetic.
06:15 Je vous donne rendez-vous, bien sûr, le 30 mars prochain. Avec grand plaisir. Ainsi qu'à vous tous.
06:20 Merci beaucoup. Merci.
06:22 [Musique]
06:26 Merci à tous !