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Chaque jour, des invités opposent leur point de vue sur l'actualité politique. Ce jeudi, David Revault d'Allonnes et Charlotte d’Ornellas.
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Transcription
00:00 Europe 1 Matin.
00:02 Le club de la presse Europe 1, elle, suit son cours.
00:04 La bataille des retraites au Sénat, alors c'est à coup de règlements intérieurs et d'amendements qu'on se bat.
00:08 Alors on se met pas le livre sur la tête, mais vous avez bien saisi l'image.
00:12 La majorité de sénatoriales de droite a donc voté cette nuit l'article 7.
00:16 Les débats reprennent à 10h30 ce matin.
00:18 Ça va chauffer sur un amendement de Bruno Retailleau pour l'extinction immédiate des régimes spéciaux.
00:23 L'intersyndicale, de son côté, elle, exige d'être reçue par Emmanuel Macron
00:27 qui les renvoie vers le ministre du Travail, si si, la porte reste toujours ouverte.
00:31 Répète ainsi l'Elysée, Matignon, le cabinet aussi d'Olivier Dussopt.
00:35 On fait le point ce matin avec Charlotte Dornelas, journaliste à Vélodres Actuel.
00:40 Pardonnez-moi Charlotte, bonjour.
00:41 Bonjour Dimitri.
00:42 Et David Reveau d'Allonnes, chef du service politique du Journal du Dimanche.
00:45 Bonjour David.
00:46 Bonjour Dimitri.
00:47 Pourquoi une telle insistance des syndicats à voir Emmanuel Macron, David ?
00:50 C'est peut-être parce que vous avez remarqué que cette réforme qui a été, j'exagère à peine,
00:55 voulue par et pour Emmanuel Macron, présentée dans sa campagne présidentielle,
01:00 inscrite dès le début à l'agenda de son deuxième quinquennat,
01:04 il voulait même, souvenez-vous, aller à la USARD puisqu'il envisageait un amendement,
01:07 un projet de loi de finances rectificatives à l'automne.
01:10 Ce qu'il fait finalement.
01:11 Alors là il y a un projet de loi dédié, un projet, oui, enfin il le fait,
01:14 mais là c'était un amendement, c'était vraiment à la USARD.
01:16 Donc il voulait vraiment aller vite et curieusement, dès que le débat a été lancé,
01:21 il a disparu des radars.
01:23 - Olivier Guessa, Olivier Dussopt et Elisabeth Born.
01:25 - Elisabeth Born.
01:26 Alors il fait un petit message de temps en temps, vous aurez remarqué,
01:28 au marché de Rungis, au salon de l'agriculture, un petit commentaire
01:31 pour expliquer que cette réforme est nécessaire, mais sinon il est totalement absent,
01:34 c'est le paradoxe de cette réforme.
01:36 Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il sait bien que la simple exposition de sa personne,
01:39 dans un moment aussi crispé politiquement,
01:41 ça serait en fait 10 000 fioles d'huile jetées sur le feu social
01:45 et ça ne ferait qu'envenimer encore davantage la situation.
01:49 - Donc finalement Elisabeth Born ne joue absolument pas le rôle de fusible,
01:52 quand elle jouait par exemple Dominique De Villepin au moment du CPE en 2006.
01:55 - Non, c'était prévu comme ça, mais vous aurez remarqué qu'Elisabeth Born,
01:58 malgré une forme de ténacité et d'abnégation,
02:01 elle a essuyé quand même vicissitude sur vicissitude,
02:05 entre le dernier épisode, les deux bras d'honneur de Dupont-Moretti
02:09 à l'Assemblée nationale qui n'ont pas mis la droite dans de meilleures dispositions,
02:12 les bourdes de ses ministres, enfin bref, j'en passe et des meilleures,
02:16 c'est quand même très difficile.
02:17 Donc effectivement c'est Elisabeth Born qui devait assumer le rôle de fusible
02:20 et ça ne fonctionne pas, d'où cet appel des syndicats qui ont bien compris
02:23 qu'en cherchant à attirer le président dans le marigot,
02:27 ils espèrent obtenir davantage de résultats.
02:30 Je crois que c'est un mauvais calcul.
02:32 - Charlotte, impression personnelle, l'impression d'un concours de faiblesse
02:35 quand même dans cette réforme des retraites,
02:37 des syndicats d'abord qui espéraient qu'il y ait un espèce de changement de braquet
02:41 il y a deux jours et qui n'a pas finalement eu lieu,
02:43 même s'il y avait beaucoup de monde dans la rue,
02:45 on n'a pas eu l'impression que le mouvement d'un coup prenait une nouvelle dimension.
02:48 De l'autre côté, vous regardez ce qui se passe par exemple à l'Assemblée nationale,
02:51 on est obligé de menacer aujourd'hui les députés macronistes de les exclure
02:54 s'ils ne votent pas la réforme.
02:56 Et se pose cette question-là dans la majorité relative,
02:59 la figure d'Emmanuel Macron, on a l'impression qu'elle ne fait plus vraiment autorité.
03:03 - D'autant qu'elle est très absente en réalité.
03:06 Je pense que ce qu'ils veulent voir aussi Emmanuel Macron,
03:09 c'est qu'en Macronie tout repose sur Emmanuel Macron, tout le temps.
03:12 Donc sauf le moment où en effet ces syndicats veulent parler,
03:15 ne sont plus mesurés sur la faiblesse des syndicats.
03:19 Alors peut-être pas des syndicats en effet, sur la mobilisation.
03:22 - Faiblesse c'était peut-être pas le bon mot, mais plafonnement quoi.
03:24 - C'est ça, sur le plafonnement de la mobilisation.
03:26 Il n'empêche qu'il y a un mois et demi, je ne pense pas que du côté du gouvernement,
03:29 on imaginait que les débats allaient partir comme ça.
03:31 En effet, chacun marche sur des oeufs,
03:33 et même les gens qui initialement défendaient la réforme,
03:35 soit ne la défendent plus, soit la défendent sur complètement autre chose,
03:38 soit se félicitent de l'avoir corrigée, pour ce qui est en l'occurrence DLR.
03:42 - Sauf la droite sénatoriale.
03:43 - Il se félicite quand même de l'avoir corrigée,
03:45 ils y ajoutent des choses qui ne seront peut-être pas retenues,
03:47 mais chacun joue un peu sa partition quand même.
03:49 - Elle tient bon la barre, elle tient bon le flow dans cette affaire-là.
03:51 - Elle tient bon sur la question de principe, on va dire, de la réforme des retraites,
03:55 mais elle veut la faire sienne,
03:57 en appuyant sur certains points qui n'étaient pas initialement prévus.
04:01 Donc franchement, l'opposition a plus joué son rôle
04:05 que le gouvernement qui est quand même perdu.
04:07 - Alors ça dépend quelle opposition, je suis d'accord avec votre analyse Dimitri,
04:11 je trouve que tout le monde est perdant, certes les syndicats ont réalisé
04:15 un combat assez réussi, puisque d'abord ils étaient tous de concert,
04:20 c'était un front commun, c'est la première fois depuis 13 ans.
04:22 - Ils étaient de retour quoi.
04:23 - Comment ?
04:24 - Ils étaient de retour tout simplement.
04:25 - Ils étaient de retour, ils ont quand même mobilisé assez largement,
04:27 mais vous avez raison, c'est-à-dire que depuis un mois et demi,
04:30 on est à l'étal, la France à l'arrêt, ça n'a pas fonctionné.
04:33 Donc je pense qu'on est arrivé à un plafond du côté syndical.
04:36 Le gouvernement, on vient de le chroniquer, Emmanuel Macron,
04:39 on voit que cette réforme était très mal emmanchée,
04:41 sur les explications, on nous a dit d'abord que c'était une question de justice,
04:44 puis de sauvetage du système, on nous a dit que ça servirait
04:47 à financer des services publics et des politiques publiques,
04:49 puis à financer les dépenses sociales, et puis dès qu'on regardait
04:53 sous un article, on découvrait un lièvre, un problème,
04:55 ou quelque chose qu'on n'était pas réglé.
04:57 - Ou une imprécision.
04:58 - Une imprécision, et à l'arrivée on s'aperçoit que cette réforme
05:00 qui devait rapporter 13 milliards, finalement...
05:03 - Elle va en coûter autant.
05:04 - Elle va en coûter quasiment autant.
05:05 - Peut-être même un peu plus.
05:06 - J'exagère à peine.
05:07 - Je pense qu'elle est à l'heure, vous avez raison, sur le Sénat,
05:09 mais la droite, à l'Assemblée nationale, c'est quand même un petit peu ridiculisé,
05:13 notamment, je pense quand même à la figure d'Aurélien Pradié,
05:16 qui a professé des positions exactement inverses à celles qu'il professait
05:20 il y a trois mois, les Insoumis, n'en parlons pas,
05:22 et quant au Rassemblement national, qui semble engranger les points
05:25 dans les sondages, on ne sait pas ce qu'il pense.
05:27 Moi, si vous m'expliquez ce qu'est la position de Marine Le Pen
05:29 sur la retraite...
05:31 - Sur la retraite à 60 ans, tout le monde n'entend plus.
05:33 - Je ne sais pas, donc en réalité, je suis assez d'accord avec vous,
05:36 tout le monde est parlant, perdant, y compris les syndicats
05:39 et tous les partis et toutes les oppositions.
05:41 - Pendant ce temps-là, on a vu Emmanuel Macron faire des annonces,
05:44 hier, pendant l'hommage à Gisèle Halimi, il annonce sa volonté d'inscrire
05:47 dans la Constitution la liberté, le mot est important,
05:50 liberté des femmes de mettre fin à leur grossesse,
05:52 ce soir, dîner avec 16 personnalités sur la fin de vie,
05:55 on va détailler, parce qu'il y a des choses à dire,
05:57 mais d'abord, peut-être l'interprétation politique,
05:59 Charlotte Dornelas, le Figaro, mais aussi Libération,
06:03 ce matin, ils voient tous les deux une diversion sociétale.
06:06 - Oui, c'est une diversion, mais sur un sujet qui ne devrait pas servir de diversion,
06:09 me semble-t-il, vu la gravité des sujets qui sont encourus.
06:12 C'est vrai qu'il y a un côté diversion,
06:15 il y a un côté américanisation
06:18 de la vie politique française,
06:22 alors que les situations sont extrêmement différentes,
06:24 notamment sur le sujet de l'avortement en question.
06:28 Mais pour faire un lien avec la conversation précédente,
06:32 c'est-à-dire que la mobilisation,
06:35 oui, d'accord, il y a un plafond, ça fait quand même un mois et demi
06:38 que les chiffres sont extrêmement stables,
06:40 que l'immense majorité des Français est contre cette réforme
06:43 pour des raisons diverses et variées,
06:45 et même beaucoup plus larges que cette réforme elle-même.
06:47 Et on a un président qui va en Afrique,
06:50 on n'a aucun retour sur ce voyage
06:53 de la part d'Emmanuel Macron lui-même,
06:55 on n'est même pas tenu au courant depuis un mois et demi de ce que fait le président.
06:58 Il va à droite, à gauche, on ne sait pas, on n'en sait rien.
07:00 Les relations avec l'Algérie, c'est l'horreur,
07:02 et personne ne parle, et Gérald Darmanin refuse de commenter.
07:05 Et là, on apprend, trois jours après le début de cette mobilisation,
07:09 que le matin, il nous parle d'IVG, et le soir d'euthanasie.
07:12 C'est quoi le but ? C'est la dépression collective en fait ?
07:14 C'est une diversion qui est particulièrement glauque
07:17 de la part du président de la République.
07:19 - Alors, à l'échange du président, il faut dire quand même, David,
07:21 que l'IVG, en l'occurrence,
07:24 effectivement, il y avait cette question d'hommage à Gisèle Halimi,
07:27 on sait que c'était son grand combat.
07:28 Il y a quand même, depuis l'été dernier,
07:30 on sent que ça vient quand même en réaction
07:32 au débat qu'il y a eu aux États-Unis,
07:33 effectivement, cette volonté d'inscrire la notion dans la Constitution.
07:37 Et puis pour la fin de vie, c'est aussi une histoire de calendrier,
07:39 on a une convention citoyenne qui doit rendre ses conclusions
07:41 dans trois semaines, et ce dîner de ce soir,
07:43 il devait avoir lieu, je crois, il y a deux semaines,
07:45 il avait été reporté.
07:47 On pourrait dire aussi, voilà, c'est un peu accident de calendrier.
07:50 - Je trouve que c'est un peu, bien sûr, il y a forcément
07:52 une dimension de diversion, dans la mesure où le président
07:54 est en train de chercher sur quoi débouchera, je dirais,
07:58 l'agenda présidentiel et gouvernemental,
08:00 une fois la réforme des retraites adoptée,
08:02 ou pas d'ailleurs, puisqu'on reste encore dans une forme de suspendre.
08:05 Donc il y a une vraie interrogation.
08:06 Au début, on était plutôt sur la loi immigration,
08:08 on s'aperçoit qu'avec la crispation et la violence des débats
08:11 sur les retraites à l'Assemblée nationale,
08:13 c'est peut-être pas le bon sujet à inscrire à l'agenda parlementaire.
08:16 - Alors, est-ce que ça produit autant de consensus qu'on le dit ?
08:18 Parce qu'il y a cette phrase que j'ai citée tout à l'heure,
08:20 "le social fracture et le sociétal ressoudre".
08:23 - Pas forcément. - Sur la fin de vie, c'est pas évident.
08:25 - Non, certes, sur les deux sujets, vous avez, semble-t-il,
08:28 une majorité dans l'opinion qui est favorable,
08:31 mais il y a aussi des opposants qui sont très bruyants,
08:34 qui peuvent donner de la voix, et ce que redoute le pouvoir,
08:36 c'est aussi un scénario du type "mariage pour tous",
08:39 où vous réveillez quand même les oppositions
08:41 et une forte mobilisation contre le gouvernement.
08:44 - Et d'où la prudence d'Emmanuel Macron, il n'y a pas de référendum.
08:47 - Absolument, d'où la prudence dans les mots aussi,
08:49 et la question de la liberté et non du droit,
08:52 reprend la formule du Sénat,
08:54 considérant que l'IVG est une liberté et pas un droit,
08:58 contrairement à ce que préconisait la proposition de loi des Insoumis à l'origine.
09:01 - On peut expliquer pourquoi ? Parce que si vous faites un droit,
09:03 qu'est-ce qui va se passer concrètement ?
09:05 - C'est opposable, un droit. - Absolument.
09:06 - Une femme, 7 mois de grossesse, va vous dire
09:08 "on me refuse l'IVG", question prioritaire de constitutionnalité,
09:11 la constitution étant supérieure à la loi, voilà ce qui va se passer.
09:14 - Voilà, c'est la porte ouverte à un allongement, évidemment.
09:16 Juste un mot sur l'argument de l'américanisation.
09:19 J'ai entendu l'édito de Vincent Tremolet de Villières tout à l'heure,
09:21 très intéressant, qui expliquait qu'il ne fallait pas faire
09:25 une proposition de loi ou une loi en réaction à ce qui se passe aux Etats-Unis,
09:28 en Iran, etc. Mais pardon, la constitution, c'est quand même une valeur universelle.
09:32 Il s'agit aussi de démontrer et de montrer au monde, à la planète,
09:36 quelles sont les valeurs politiques, idéologiques, culturelles françaises.
09:40 Les hommes naissent libres et go en droit, je crois,
09:43 c'est inscrit dans la constitution.
09:45 On donne aussi une petite leçon au monde, et en inscrivant cela,
09:48 bien sûr, là où je suis d'accord, c'est que ce droit n'est pas menacé,
09:52 ici et maintenant, en France, mais il pourrait l'être à l'avenir.
09:55 Et il y a aussi une valeur pédagogique dans ce qu'on inscrit dans la constitution.
09:57 - Non mais dans la constitution, il y a les fondements juridiques
09:59 de la communauté nationale, l'avortement en l'occurrence,
10:02 c'est pas le sujet. Par ailleurs, les leçons au monde,
10:04 on ferait bien déjà d'essayer de se gérer nous-mêmes,
10:08 avant d'aller faire des leçons au monde. Ça suffit, les leçons au monde.
10:10 - Merci Charlotte Dandelas, merci David Robodeaux.
10:12 L'édito de Vincent Tremolet de Villières, pour ceux qui ne l'ont pas entendu,
10:14 à réécouter en podcast sur votre appui européen ou européen.fr

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