Jordan Bardella, président du Rassemblement national et député européen, est l'invité du 8h20. Il revient sur la grève à venir contre la réforme des retraites et sur son opposition à ce projet de loi. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mercredi-01-mars-2023-4636105
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00:00 Bonjour Jordan Bardella, bonjour.
00:02 Eurodéputé, président du Rassemblement National, merci d'être avec nous ce matin.
00:06 Merci à vous.
00:07 À mes côtés pour vous interroger Yael Ghos.
00:09 J'attends également vos questions, auditeurs, auditrices de France Inter, 0145 24 7000
00:15 ou via l'application France Inter.
00:17 Jordan Bardella, mardi prochain, les syndicats donnent rendez-vous dans la rue pour, disent-ils,
00:21 mettre le pays à l'arrêt et s'opposer à la réforme des retraites.
00:25 Pendant ce temps hier, le texte a été validé en commission au Sénat.
00:29 Les sénateurs débuteront le débat dans l'hémicycle demain.
00:32 Est-ce que vous dites vous aussi ce matin, il faut mettre le pays à l'arrêt pour forcer le gouvernement à retirer son texte ?
00:38 Nous combattons depuis plusieurs semaines ce texte, notamment au Parlement et à l'Assemblée Nationale.
00:43 Moi j'ai eu l'occasion de me prononcer, tout comme Marine Le Pen, en faveur du soutien à l'ensemble de ces mobilisations populaires
00:48 qui se sont déroulées partout dans le pays, calmement, pacifiquement,
00:51 et qui ont réuni des Français qui venaient d'horizons politiques et professionnels très différents.
00:56 Un soutien sans participation ?
00:58 Pour une raison très simple, c'est que d'abord, beaucoup de nos élus, beaucoup de nos militants,
01:03 nos adhérents et beaucoup d'électeurs de Marine Le Pen étaient dans la rue pour manifester,
01:06 comme tous les Français d'ailleurs, comme 78% des Français qui sont opposés à cette réforme
01:11 pour combattre ce texte de loi et exprimer le rejet de la politique du gouvernement.
01:15 Nous ne n'y étons pas à titre personnel, parce que nous avons le premier groupe d'opposition à l'Assemblée Nationale
01:20 et que notre rôle est justement d'empêcher que ce texte ne soit adopté à l'Assemblée Nationale.
01:25 Et le 7 mars, pourquoi ne ne verrions-nous pas des élus RN dans la rue également ?
01:29 Écoutez, sur les blocages, moi je suis très clair.
01:32 Je pense que d'abord, s'il y a des blocages, c'est de la responsabilité du gouvernement.
01:35 C'est le gouvernement qui tente aujourd'hui de passer en force sur un texte
01:39 qu'une très large majorité des Français rejettent, parce que ce texte va faire beaucoup de mal aux Français
01:43 et à ceux qui travaillent le plus durement dans notre pays, premièrement.
01:46 Deuxièmement, je pense que le blocage n'est peut-être pas la solution idéale dans la mesure,
01:51 et moi je suis très réticent sur ce sujet, parce que ça pénalise les Français les plus modestes.
01:56 Donc, grève reconductible à la SNCF, par exemple, dit que c'est pas une bonne chose ?
01:59 Je pense que ça va pénaliser les Français les plus modestes,
02:02 qui en plus de devoir subir la réforme des retraites à 64 ans, auront en retour des difficultés
02:09 pour aller mettre de l'essence dans leur voiture.
02:12 Je pense aux infirmières libérales, aux policiers, aux pompiers et plus largement à tous ces Français
02:16 qui vont devoir faire des files d'attente interminables devant les stations-services.
02:20 Et pour certains d'ailleurs, ne pas pouvoir aller travailler et donc prendre le risque de perdre une journée de salaire.
02:26 Et donc quand la CGT, quand Philippe Martinez dit "j'appelle à des grèves reconductibles partout", là vous ne suivez pas ?
02:33 Je pense que c'est le bilan du gouvernement, encore une fois.
02:36 Et je pense que la solution à tous les blocages, parce que le premier des blocages est démocratique, c'est un référendum.
02:43 Si le Président de la République mettait en oeuvre la proposition du Rassemblement National,
02:47 de soumettre ce texte à l'avis du peuple français par un référendum,
02:51 alors le peuple français pourrait s'exprimer sur ce texte et on éviterait une logique de blocage
02:56 qui pénaliserait les plus modestes d'entre nous.
02:58 Pas de participation d'élus aux manifestations, pas de meeting non plus ?
03:03 Si, si.
03:04 Vous faites des meetings ?
03:05 Nous organisons entre la mi-janvier et la mi-mars un peu plus d'une centaine de réunions publiques sur toute la France,
03:09 avec l'ambition d'aller rencontrer les Français aux plus proches des territoires.
03:13 Sur cette question précisément ?
03:14 Précisément sur cette question. D'abord pour expliquer aux gens que cette réforme des retraites,
03:19 ça va être à la fois la hausse des efforts et la baisse des pensions,
03:22 parce que c'est ça l'objectif derrière, c'est de faire des économies sur les pensions de retraite,
03:26 parce qu'il y a beaucoup de gens qui ne pourront pas aller jusqu'à 64 ans et qui partiront avec une décote.
03:30 Et nous menons campagne activement sur le terrain, avec des tractages, des distributions de tracts,
03:35 des rencontres avec les Français tous les week-ends, évidemment un travail très important au Parlement.
03:38 C'était moins actif précisément au Parlement, 212 amendements déposés,
03:42 moins que Renaissance, moins que LR. On se demande si vous êtes vraiment opposé à cette réforme.
03:46 Non mais écoutez, d'abord, les Français se sont exprimés.
03:52 Il y a eu des études d'opinion qui ont été faites depuis maintenant 10 jours.
03:55 Le sondage IFOP, sondage qui est paru dans le JDD la semaine dernière,
03:57 et qui dit que les Français considèrent que Marine Le Pen et les députés du Rassemblement National
04:02 ont été les plus crédibles dans l'opposition à ce texte.
04:05 Le bilan de l'obstruction parlementaire de la NUPES,
04:07 des 15 ou 20 000 amendements qui ont été déposés de manière irresponsable par la NUPES,
04:11 ça a confisqué le débat. Et que ça a empêché le Parlement, ça a empêché l'Assemblée Nationale
04:15 de faire voter les députés sur ce fameux article 7,
04:19 qui prévoit le décalage de l'âge de départ minimal à 64 ans.
04:24 Donc on peut déposer 15, 20 000 amendements pour déplacer des virgules,
04:28 ça n'a aucun intérêt. Ça n'a aucun intérêt sur le fond, ça sert le gouvernement,
04:32 et ça empêche précisément les députés de se retrouver confrontés à un vote,
04:37 alors qu'un seul amendement, j'explique bien pour que les Français comprennent,
04:40 un seul amendement de suppression aurait suffi avec le vote du Rassemblement National,
04:45 le vote de la NUPES, et peut-être le vote d'une partie des députés LR
04:48 qui ne souhaitent pas se mettre derrière Emmanuel Macron,
04:50 permis de faire tomber ce décalage à la retraite à 64 ans.
04:55 Donc NUPES a confisqué le débat et a facilité le travail du gouvernement.
04:59 C'est passé, il faut qu'on avance un petit peu.
05:01 Oui, mais c'est très important, parce qu'il n'y a pas eu de vote sur ce texte pour l'instant.
05:05 Le texte va revenir devant l'Assemblée Nationale,
05:07 mais NUPES a facilité le travail du gouvernement,
05:10 et pour le coup, Mélenchon a voté Macron une troisième fois.
05:12 Pourquoi c'est impossible, mardi 7 mars, de voir Jordane Bardella manifester
05:16 contre la réforme des retraites dans une rue en France ?
05:18 Parce que je suis président du Rassemblement National,
05:20 et que si je descends dans les rues, à côté des syndicats qui ont exprimé à plusieurs reprises,
05:25 d'ailleurs excusez-moi, si vous ne m'invitez pas à dire que chez vous…
05:27 Tous les leaders de la NUPE manifestent.
05:28 Oui, mais manifestement, M. Martinez a exprimé les critiques les plus vives à l'égard de M. Mélenchon.
05:34 En expliquant que M. Mélenchon fracturait le front d'opposition à la réforme des retraites.
05:39 Je pense que chacun est dans son rôle.
05:41 Les syndicats sont dans leur rôle.
05:43 Ce mouvement, qui est organisé par les syndicats,
05:45 ce n'est pas le Rassemblement National qui l'organise.
05:47 Et moi, je ne souhaite pas aller faire de la récupération sur un mouvement qui n'est pas le mien.
05:50 Si j'étais descendu dans la rue, vous m'auriez posé la question dans le sens inverse en me disant
05:54 "mais vous n'avez pas l'impression de faire un peu de récupération politique ?"
05:56 Donc, je pense que chacun est dans son rôle.
05:58 On a besoin, dans cette opposition à la réforme des retraites,
06:01 de la mobilisation de chacun, de l'énergie de tous.
06:04 Moi, je regrette un peu le sectarisme de la gauche.
06:06 Mais il y a 78% des Français qui font vivre cette majorité de refus.
06:10 Il faut qu'on soit capables, chacun dans notre couloir,
06:12 l'ERN au Parlement, parce qu'on a le premier groupe d'opposition à l'Assemblée,
06:15 les syndicats et tous les Français qui y sont opposés,
06:18 de la mobilisation collective.
06:20 Vous dites Jordan Bardella, il n'y a pas eu de vote à l'Assemblée Nationale,
06:24 pas sur l'ensemble du texte, mais il y en a eu un sur l'article 1.
06:27 Et vos députés ont voté contre la suppression des régimes spéciaux.
06:30 Sur les régimes spéciaux, quelle est votre position ? Est-ce qu'il faut les garder ?
06:33 Nous avons déposé un certain nombre d'amendements.
06:35 Je pense que, sur les régimes spéciaux, le gouvernement fait les fonds de tiroir.
06:38 On parle là de 6% des retraités, c'est-à-dire de 7 milliards d'euros
06:42 dans les dépenses qui sont faites sur les retraites,
06:45 sur les 360 milliards que nous coûtent les retraites chaque année.
06:48 En vérité, le gouvernement, et c'est peut-être là le reproche
06:51 que nous le faisons sur les régimes spéciaux,
06:53 cherche à supprimer les quelques avantages qu'offrent un certain nombre de professions
06:57 sur des domaines où on a déjà beaucoup de mal à recruter.
07:00 On a parlé de la RATP et nous avons déposé un amendement,
07:03 parce qu'on a aussi tenté d'amender ce texte pour faire en sorte
07:06 qu'il y ait une clause du grand-père qui se mette en place à partir de 2035.
07:09 Mais quand vous avez seulement 900 emplois qui sont pourvus sur les 1 400 offres
07:14 qui sont faites l'an dernier par la RATP, que vous avez 20% du réseau
07:17 Île-de-France Mobilité qui fonctionne mal parce qu'on manque de personnel,
07:21 je ne crois pas que de supprimer le seul avantage là, tout de suite,
07:24 c'est de la chirurgie économique. Je vous donne un exemple très simple.
07:28 Dans l'industrie énergétique et gazière, aujourd'hui, on est contraint d'importer
07:32 des ingénieurs américains. 70% des besoins en chaudronnier et en soudure,
07:37 en couvreur pardonnez-moi, ne sont pas couverts aujourd'hui
07:44 dans l'industrie énergétique et gazière.
07:46 Donc je dis que d'aller supprimer le régime spécial d'une profession
07:50 qui a déjà du mal à recruter, je pense que ça va encore accroître
07:54 les difficultés de recrutement. En revanche, il y a des régimes spéciaux
07:58 comme celui de la Banque de France qui n'impliquent pas une exposition
08:01 particulière du corps, physique, mental, etc. qui fait qu'on peut se passer
08:07 d'un régime spécial. Mais je veux faire comprendre aux gens que là,
08:10 on parle de 6% des dépenses de retraite. Donc ça n'est pas un sujet central.
08:14 C'est un sujet extrêmement sensible.
08:16 Ça pose la question de la justice. Nous avons déposé des amendements
08:19 en ce sens. Mais je veux dire là, le gouvernement fait preuve de brutalité
08:22 et racle les fonds de tiroir pour une raison très simple.
08:25 C'est qu'on nous a vendu cette réforme comme un acte courageux,
08:28 comme une prise de responsabilité en nous expliquant que le système
08:31 des retraites était en danger. On s'aperçoit que toutes les compromissions
08:35 qui ont été faites sur ce texte, par exemple le fait qu'on limite
08:40 à 43 ou 44 annuités le taux de cotisation, fait qu'on n'aura pas le bénéfice
08:45 qui était attendu au début dans cette réforme.
08:48 C'est de la casse sociale qui économiquement ne va pas rapporter grand chose.
08:52 Il y a d'autres choix et c'est ce qu'on a essayé de défendre à l'Assemblée nationale.
08:55 Si la réforme passe en 2027, lors de la campagne présidentielle à venir,
09:01 vous porterez quoi comme discours ? Retour à 62 ans ?
09:04 Je pense que notre réforme des retraites, le contre-projet qu'on a proposé,
09:08 aux yeux d'un beaucoup de Français, 42% d'entre eux si on en croit
09:12 la dernière élection présidentielle, est peut-être le plus lisible et le plus juste.
09:15 Nous, on intègre de facto la pénibilité dans la progressivité.
09:19 Je parle de l'âge légal, vous reviendrez en arrière ?
09:22 C'est un peu plus compliqué.
09:24 On défend un système de retraite à 60 ans et 40 annuités
09:30 pour ceux qui ont commencé à travailler entre 17 et 20 ans.
09:32 Au-delà, il y a une progressivité et c'est normal que quand vous avez commencé
09:35 à travailler à 24-25 ans, vous partiez évidemment plus tard.
09:38 Mais Marine Le Pen a dit qu'en 2027, si nous arrivions à la tête de l'État,
09:44 qu'elle permettrait ce départ à 60 ans et 40 annuités
09:47 pour ceux qui ont commencé à travailler entre 17 et 20 ans.
09:49 Et donc en abrogeant tout ou partie de ce texte qui va être, je pense,
09:53 très difficile pour les gens les plus modestes parce que c'est ça le sujet.
09:56 Comment expliquer aujourd'hui à un boulanger, à un artisan, à une caissière,
10:01 à un électricien qu'il va devoir travailler jusqu'à 64 ans ?
10:04 Et donc pour les autres, 62 ans ?
10:06 62 ans, vous savez que c'est une mesure d'âge et de temps de cotisation.
10:09 Donc 62 ans et 42 annuités de cotisation.
10:12 Ça permet d'équilibrer le régime de retraite alors que le nombre de retraités
10:16 par rapport au nombre de cotisants, on le sait, va continuer d'augmenter
10:19 ces prochaines années.
10:20 Alors vous m'amenez là sur deux débats qui sont essentiels,
10:23 celui de la natalité et de la productivité.
10:25 En réalité, dans un système où ceux qui travaillent paient la retraite
10:28 de ceux qui ne travaillent plus, il faut soutenir l'emploi.
10:31 Or les emplois qui ont été créés par Emmanuel Macron depuis 2017
10:34 sont des Uber jobs, ce sont des emplois précaires.
10:36 La productivité de notre économie, elle stagne depuis 2017.
10:40 On fait quasiment exception au sein des pays de l'OCDE.
10:43 Et donc il faut réindustrialiser le pays et il faut surtout soutenir
10:46 une politique familiale et une politique nataliste.
10:48 Parce que le vrai sujet, c'est que la France n'a jamais été aussi peuplée,
10:52 mais nous avons jamais fait aussi peu d'enfants dans notre société.
10:55 Or, les enfants d'aujourd'hui sont les cotisantes demain.
10:58 Et donc il faut desserrer les taux financiers sur les familles
11:00 qui souhaiteraient avoir des enfants, mais qui sont inquiets
11:03 des fins de mois difficiles, qui sont inquiets de la crise du pouvoir d'achat.
11:07 Et nous avons proposé, entre autres, qu'on revienne sur les mesures
11:11 qui ont été prises contre les familles par François Hollande en 2014,
11:15 qui avaient notamment réformé, vous savez, l'abaissement du quotient familial
11:18 et le caractère universel des allocations familiales.
11:21 La baisse du taux de fécondité en France, elle remonte à 2010,
11:23 c'est avant Jordan Bardella.
11:25 Vos modèles en matière de politique de natalité sont la Hongrie et la Pologne.
11:29 Or les succès de ces politiques sont très contestables aujourd'hui.
11:32 Alors sur la Hongrie, non c'est faux.
11:34 Sur la Hongrie, on est passé en 10 ans d'un taux de fécondité qui était de 1,22 à 1,52.
11:38 Et ça stage, on est très loin du renouvellement générationnel.
11:41 Pour une raison très simple.
11:43 Mais ces politiques-là, elles ont 5 à 10 ans.
11:47 Une politique nataliste, ça se mène sur le temps long.
11:49 Or aujourd'hui, les familles qui aimeraient faire des enfants,
11:53 renoncent à en faire.
11:55 Je vous rappelle qu'il y avait un sondage Cantar qui disait
11:57 que le taux idéal d'enfants par famille, ce que disaient les Français,
12:00 c'était à peu près 2,49.
12:02 C'est un sondage qui a été fait par Cantar.
12:03 Or, le taux de fécondité réel dans notre société, il est d'1,88.
12:06 Donc Marine Le Pen avait proposé des mesures très simples,
12:08 très claires pendant la présidentielle.
12:10 C'est notamment des prêts qui étaient faits par l'État.
12:12 Des prêts de 100 000 euros qui pouvaient être contractés par les jeunes coups,
12:15 par les familles, avec l'intérêt qu'au bout du 3ème enfant,
12:19 le capital restant disparaît.
12:21 Et que ce prêt était donc transformé en subvention.
12:23 Et nous avions notamment proposé, encore une fois,
12:25 c'était financé dans le projet présidentiel de Marine Le Pen,
12:28 qu'on puisse octroyer une part fiscale pleine dès le 2ème enfant.
12:31 Donc il y a des mesures très claires pour ajouter une liberté supplémentaire
12:35 aux familles qui souhaitent faire des enfants et desserrer véritablement les taux fiscaux.
12:38 Vous reprendriez l'expression de Sébastien Chenu, ici même, le 13 février ?
12:41 Moi je préfère qu'on fabrique des travailleurs français plutôt qu'on les importe.
12:44 Je pense que le choix, il est très clair.
12:49 C'est-à-dire que soit on a recours à l'immigration,
12:51 et c'est ce qui est en train d'être fait aujourd'hui pour résoudre un déficit démographique,
12:56 trois quarts de l'accroissement naturel, c'était Hervé Le Bras qui rappelait ça
12:59 chez vos confrères de C'est-à-vous, trois quarts de l'accroissement naturel de la population
13:03 est lié aujourd'hui à l'immigration.
13:05 L'immigration ce n'est pas juste une variable économique,
13:07 c'est aussi une variable qui peut profondément changer dans un certain nombre de territoires
13:11 la culture de notre pays, notre langue, nos coutumes,
13:14 et changer la manière dont on vit dans un certain nombre de territoires.
13:17 Donc plutôt que de recourir à l'immigration comme le fait l'Allemagne,
13:20 qui fait rentrer des centaines de milliers de travailleurs chaque année,
13:24 moi je préfère soutenir une politique nataliste
13:26 et surtout mettre en place la vraie solidarité nationale,
13:29 c'est-à-dire réserver le système social français
13:32 et notamment les allocations familiales aux familles françaises.
13:34 Qu'est-ce que vous répondez à tous ces chefs d'entreprise, hôtellerie, restauration,
13:38 qui ont besoin urgentement de main-d'oeuvre, qui veulent régulariser vite
13:41 parce qu'ils ont 200 à 300 000 postes vacants à combler ?
13:45 C'est le sujet du manque de main-d'oeuvre dans un certain nombre de professions,
13:48 dans l'hôtellerie, dans la restauration, moi je suis très pragmatique.
13:51 On n'a pas le temps de faire des enfants, c'est urgent.
13:53 Mais aujourd'hui, au moment où on se parle, quand vous me poussez dans le vide
13:56 et que je n'ai pas de parachute,
13:58 eh bien beaucoup de chefs d'entreprise n'ont pas le choix que de recourir à une main-d'oeuvre étrangère.
14:02 C'est mal ça ?
14:03 Il faut, et je pense que ça doit être l'un des objectifs.
14:06 Je pense que l'objectif des politiques qui sont conduites en France,
14:11 c'est à partir du moment où nous avons 6 millions de chômeurs,
14:13 de recréer les conditions économiques pour faire en sorte que les patrons puissent recourir à une main-d'oeuvre.
14:17 Donc il y a un problème de formation, bien souvent dans les professions que vous avez citées,
14:20 et j'en discutais moi il y a quelques jours avec des chefs d'entreprise dans le sud de la France,
14:24 il y a un problème de logement.
14:25 C'est-à-dire que quand vous faites venir chaque année, sur la côte d'Azur par exemple,
14:29 des étudiants, des jeunes, pour travailler dans l'hôtellerie, la restauration,
14:33 eh bien quand la quasi-totalité du salaire part dans le logement,
14:38 eh bien ça pose un problème.
14:39 Et ces travailleurs-là ne contribuent pas, par leur cotisation, au régime de retraite de tous les Français ?
14:44 Qui ça ?
14:45 Ces travailleurs-là, étrangers, ne contribuent pas aussi à la récréation générale ?
14:48 Monsieur Gosse, c'est que nous avons 6 millions de chômeurs en France,
14:50 et que mon boulot, ce n'est pas de trouver du travail à des Afghans ou à des Tunisiens.
14:54 Mon boulot, c'est de créer les conditions économiques pour faire en sorte qu'on baisse le chômage en France.
14:58 Votre boulot, c'est aussi de permettre que les conditions économiques soient réunies pour que les entreprises fonctionnent ?
15:02 Et que tous les jeunes…
15:03 Bon, d'abord, il y a un problème de salaire dans un certain nombre de filières.
15:05 Et l'immigration est utilisée depuis maintenant plusieurs années pour faire peser à la baisse sur les salaires.
15:11 En Grande-Bretagne, ils ont mis en place des mesures très strictes pour lutter contre l'immigration clandestine,
15:16 et ils ont abouti à une augmentation des salaires de 8%, et notamment dans les secteurs les plus difficiles.
15:22 Or, aujourd'hui, quand vous permettez l'embauche d'une main-d'œuvre bon marché,
15:26 c'est le cas par exemple avec la Directive du Travail Détaché qui est permise par l'Union Européenne,
15:30 qui fait qu'aujourd'hui, dans le BTP par exemple, je suis très concret,
15:33 vous pouvez recourir à des travailleurs polonais ou des travailleurs d'Europe de l'Est qui paient les charges dans le pays d'origine.
15:38 Donc tout cela crée une concurrence déloyale avec les travailleurs français.
15:42 Or, quand dans un département, il y a une seule boîte du BTP qui recourt au travail détaché,
15:46 toutes les autres sont obligées de s'aligner, sinon elles ne sont plus compétitives.
15:49 La Directive a été modifiée depuis.
15:51 Non, que dalle. Je vous assure, je siège au Parlement Européen, Emmanuel Macron avait promis de la réformer,
15:56 il y a un certain nombre de critères administratifs qui ont été réformés, mais en fait, le fond du problème, il demeure.
16:02 Donc il faut augmenter les salaires, beaucoup de chefs d'entreprise ne le peuvent pas aujourd'hui parce que les charges sont trop importantes,
16:07 et nous défendons une mesure qui est une mesure, me semble-t-il, de bon sens,
16:10 qui vise à dire aux chefs d'entreprise de TPEPM notamment,
16:13 que vous augmentez de 10% les salaires de votre entreprise, ces 10% sont exonérés de cotisations patronales.
16:17 Et ça, c'est vraiment une mesure de fond pour rendre du pouvoir d'achat aux Français
16:20 et permettre aux chefs d'entreprise de desserrer les taux des charges qui passent sur eux.
16:24 Jordan Bardella, je voudrais qu'on parle de la situation sur le front en Ukraine.
16:27 Les combats se concentrent depuis plusieurs semaines sur la ville de Barmoutes dans l'Est.
16:30 Combats terribles, la situation pour l'armée ukrainienne est extrêmement tendue.
16:34 Certains soldats ukrainiens parlent de retraite à venir.
16:37 Est-ce qu'il faut aider encore davantage l'armée ukrainienne à se défendre ?
16:41 Écoutez, d'abord, je pense que la Russie doit comprendre qu'elle n'a plus rien à gagner en Ukraine.
16:48 Je pense qu'on a deux principes à poser.
16:50 Le premier principe, c'est qu'il n'y aura pas d'issue militaire à ce conflit.
16:53 Et en cela, le président de la République a raison de rappeler que viendra le temps
16:56 où l'ensemble des belligérants devront se mettre autour de la table pour négocier.
17:00 Et la France s'honorerait d'ailleurs, Marine Le Pen l'a proposé il y a quelques jours,
17:04 de proposer à l'ensemble des belligérants une conférence internationale pour la paix
17:08 parce que je pense que notre pays a à la fois un rôle de porter la paix et un rôle d'équilibre.
17:14 Nous, nous sommes favorables à tout ce qui peut permettre à l'Ukraine de se défendre.
17:19 Conférence sur la paix sans conditions ?
17:21 Je pense que la première des conditions, c'est que la Russie retire ses troupes.
17:24 Je veux dire, la Russie doit comprendre qu'elle n'a plus rien à gagner en Ukraine.
17:27 Y compris de Crimée, dont vous aviez approuvé l'annexion ?
17:30 Je pense que la Crimée, excusez-moi, je pense que tout n'est pas égal par ailleurs.
17:36 Et je pense que la Crimée est un cas un peu à part.
17:38 La Crimée avait été cédée par Khrouchev comme une offre qui avait été faite en 1956 à l'Ukraine.
17:45 La Crimée est un territoire qui, historiquement, appartenait à la Russie.
17:50 Il y avait eu un vote sur l'indépendance en 2014.
17:53 Il y a quand même eu un référendum bidon en 2014.
17:55 Après un vote d'indépendance du Parlement en 2014 à la suite de la révolution.
17:58 Votre collègue Thierry Mariani était venu comme observateur.
18:01 Et pas l'invasion par une armée régulière.
18:04 Il n'y a pas eu les crimes de guerre qu'il y a aujourd'hui en Ukraine.
18:07 Je pense que c'est un sujet qui est un peu à part et qui, à mon avis, n'est pas le cœur du sujet.
18:12 Donc c'est une souveraineté à la carte pour les Ukrainiens.
18:14 Ils n'ont pas droit à toute leur souveraineté, si je vous comprends bien.
18:17 Je pense que...
18:18 Pas sur tout leur territoire.
18:19 Je pense qu'ils ont évidemment droit à leur souveraineté.
18:21 Partielle.
18:22 Non, on ne peut pas être souverainiste en France et ne pas défendre la souveraineté de l'Ukraine.
18:27 On a été sans ambiguïté sur ce sujet.
18:29 Sur la climat, ce n'est pas ce que vous nous dites, Jean-Baptiste Bardel.
18:30 Je vais peut-être rappeler quelque chose qui relève de l'évidence.
18:33 Mais il y a dans cette affaire un État agresseur, la Russie, un pays agressé, l'Ukraine.
18:37 La Russie a très certainement sous-estimé l'existence même du sentiment patriotique
18:42 et du sentiment national qui existe aujourd'hui en Ukraine.
18:45 Et nous avons dit à plusieurs reprises que nous étions favorables à l'envoi de matériel défensif,
18:49 missiles anti-chars, systèmes antiaériens, de l'équipement individuel qui puisse permettre à l'Ukraine de se défendre.
18:56 Les canons César, encore une fois, on est à la limite du matériel offensif.
19:00 Mais oui ou non ?
19:01 Mais écoutez, est-ce qu'on en a des canons César ?
19:03 Parce que, en l'état actuel des choses, permettez-moi de vous rappeler que sur les 77 canons César que dispose l'armée française,
19:10 on en a cédé pour l'instant près d'un quart de notre stock.
19:13 Mais pas au risque de démunir totalement l'armée française.
19:17 Excusez-moi.
19:18 Si vous ne livrez pas d'armes, la conséquence c'est que les Ukrainiens perdent des batailles.
19:22 Ils n'ont pas assez de munitions.
19:24 Et nous devons aussi, excusez-moi, nous devons aussi nous préserver d'une forme de risque d'engrenage.
19:29 Et excusez-moi de rappeler, permettez-moi de vous rappeler que le président de la République lui-même,
19:35 qui a priori n'est pas adhérent du Rassemblement national,
19:38 a lui indiqué que la France devait elle aussi mettre des lignes rouges sur l'envoi d'avions de combat
19:44 et d'un certain nombre d'autres matériaux, notamment des missiles longue portée.
19:48 Si demain l'Ukraine devait avoir entre ses mains des missiles longue portée
19:51 et prendrait le risque de toucher des villes russes comme Rostov ou comme Sébastopol,
19:55 on rentrerait dans un engrenage qui aurait des conséquences cataclysmiques pour le reste de l'Europe.
20:00 Et encore une fois, cette position-là n'est pas seulement celle du Rassemblement national,
20:04 elle est celle, à l'heure où nous nous parlons, de la diplomatie française.
20:07 Et je pense que cette prudence est nécessaire.
20:09 Vous êtes à la tête d'un parti qui rembourse toujours un prêt de 9 millions d'euros à un créancier russe,
20:14 lié à des campagnes électorales passées. Vous en êtes où précisément ?
20:17 Nous remboursons chaque mois.
20:19 Je ne suis pas venu avec le plan comptable et le plan de financement de la dette,
20:23 mais je souhaite que ce prêt soit remboursé le plus rapidement possible.
20:27 Pour solder le passé et tourner la page de la Russie ?
20:30 C'était un prêt à 6%, donc ce n'était pas un prêt d'amis, si je peux me permettre de vous le rappeler.
20:35 Un prêt qui avait été contracté en 2015 auprès d'une banque tchécorusse,
20:38 parce qu'encore une fois, nous n'avions trouvé en France et en Europe
20:40 aucune banque qui acceptait de prêter au Rassemblement national.
20:44 Il y avait des liens avec la Russie aussi, Jordan Bardel !
20:47 Si vous faites un KIP au Kremlin en 2017, vous n'êtes pas redevable à Emmanuel Macron.
20:56 Parce que vous avez contacté une vraie banque française.
20:59 Et croyez-moi que si cette banque était liée au Kremlin, je pense qu'elle n'aurait pas fait faillite en Russie.
21:03 Question des auditeurs de France Inter, au standard 01.45.24.7000,
21:08 et notamment d'Élodie, qui nous appelle du département de l'Essonne.
21:11 Bonjour Élodie !
21:12 Oui bonjour et merci de prendre ma question.
21:15 Je voudrais interroger Jordan Bardel, sur le fait qu'on est déjà 8 milliards sur terre,
21:20 et que dans le contexte de la réforme des retraites, ça fait plusieurs semaines
21:23 que le Rassemblement national et d'autres leaders de droite appellent les Françaises à faire des enfants,
21:28 puisque les enfants d'aujourd'hui sont les quotidiens de demain,
21:31 ce que vous avez dit tout à l'heure.
21:33 Votre collègue Chenu a dit que les enfants d'aujourd'hui sont les ouvriers de demain,
21:38 sauf que demain, on sera peut-être 9 milliards.
21:40 Donc face à l'urgence climatique, comment vous vous positionnez sur le fait d'appeler une politique nataliste,
21:45 dans le contexte de la réforme des retraites, alors qu'on a déjà 8 milliards d'habitants sur terre ?
21:49 Merci à vous Élodie. Jordan Bardel a ?
21:51 Le débat, vous avez raison de le rappeler, il est démographique.
21:54 On est effectivement 8 milliards sur terre.
21:56 Le seul souci, c'est que si nous ne faisons pas,
22:00 si nous ne soutenons pas une politique, encore une fois, il n'y a aucune contrainte,
22:03 mais si nous ne créons pas les conditions favorables pour la natalité dans notre pays,
22:08 d'autres civilisations le font à notre place.
22:10 Je me permets de vous rappeler que sur les 8 milliards d'habitants que nous sommes aujourd'hui sur terre,
22:14 il y en a 4 milliards en Asie, et qu'il y en aura d'ici à 2050, 2 milliards 500 millions en Afrique,
22:21 c'est-à-dire dans un continent qui fera face à 450 millions d'Européens.
22:26 Donc si nous ne soutenons pas aujourd'hui des politiques natalistes,
22:30 qui visent à encourager la natalité pour ceux qui le souhaitent, encore une fois,
22:34 eh bien nous disparaîtrons.
22:36 Pour une raison très simple, c'est que la démographie c'est la seule science exacte,
22:39 et que c'est elle qui fait l'histoire.
22:41 - Question d'Estelle également sur ce thème, monsieur Bardella, est-ce que votre politique nataliste
22:45 sous-entend comme en Pologne l'abolition du droit à l'avortement ?
22:48 - Non, absolument pas, moi je ne suis pas du tout pour une remise en cause quelconque de la loi Veil,
22:55 et très très loin de ça, mais encore une fois, il y a un rapport qui avait été remis il y a quelques mois,
23:02 je n'ai plus la date exacte, par François Bayrou, et qui rappelait que la vraie cassure sur la courbe de natalité
23:07 dans notre société sur l'accroissement de la population, elle s'était faite en 2014,
23:11 lorsque François Hollande avait pris des mesures très dures contre la famille,
23:14 qui fait que ça a découragé beaucoup de faire des enfants.
23:17 - Avant la baisse, tout à l'heure c'est 2010 la baisse du taux de fécondité.
23:19 - Oui, et dans ce rapport de François Bayrou, il rappelait qu'il y avait une vraie cassure supplémentaire en 2014.
23:26 - Question politique, Jordan Bardella, le magazine "L'Incorrect", le mensuel "L'Incorrect"
23:30 a réuni ce mois-ci, dans un entretien croisé, les présidents des trois mouvements jeunes des Républicains
23:36 de génération Z, Eric Zemmour, Reconquête, et chez vous, le RNJ, le Rassemblement National de Jeunesse.
23:42 La question c'est, est-ce que vous diriez que vous appartenez au même camp ?
23:44 Les trois répondent "Oui, et j'espère que nous combattrons ensemble", nous dit le représentant jeune du RN.
23:52 Est-ce que c'est le retour de l'Union des Droites ?
23:54 - Non, mais c'est la nécessité de rassembler tous les patriotes dans un même camp,
23:59 parce que je pense que la France est menacée de disparition, et qu'il y a beaucoup de gens qui s'inquiètent
24:04 de voir disparaître notre langue, notre culture, et les Français veulent rester eux-mêmes dans ce XXIème siècle.
24:09 Ils veulent que la France reste la France, et précisément ce sentiment patriote, cette attache à notre nation,
24:15 il existe chez nous, il existe chez des patriotes sincères, chez LR, et aussi probablement chez des gens à Reconquête,
24:20 et même ailleurs d'ailleurs.
24:21 - Ce qui ne se fait pas avec Marine Le Pen pourra se faire demain, avec la génération qui vient ?
24:25 - Non, mais vous savez... - Droite, extrême droite, unie, au gouvernement, modèle italien peut-être ?
24:31 - Non, mais on a le droit de s'unir, on se parle, et c'est vrai que les personnes que vous citez sont des gens
24:35 avec qui on a tous grandi politiquement. - Vous parlez à Éric Zemmour par exemple ?
24:38 - Non, je ne parle pas à Éric Zemmour, mais on était dans les mêmes soirées étudiantes,
24:45 et certains ont choisi le RN, d'autres ont choisi Debout la France à l'époque,
24:49 vous savez aujourd'hui on a beaucoup de députés qui viennent par exemple de Debout la France,
24:54 et je me souviens d'une discussion avec Alexandre Loubet, qui était aujourd'hui député du RN,
24:58 qui était hier président des jeunes de Debout la France, et on savait, il y a 10 ans,
25:02 quand on fréquentait les mêmes soirées étudiantes, qu'on finirait un jour par se retrouver et par travailler ensemble.
25:06 Et moi je souhaite que tous les amoureux de la France puissent se rassembler,
25:10 parce que je pense que s'ils sont unis, nous remporterons la prochaine élection présidentielle.
25:14 - Merci à vous Jordan Bardella, invité du Grand Comprétien sur France Inter ce matin.