La série événement The Last of US : encore une histoire de fin du monde ! Et encore des infectés ! Du postapo et des zombies partout, tout le temps ! Vous en avez marre de l'apocalypse ? Dans cet épisode on va voir pourquoi la culture n'arrive plus à imaginer de futurs désirables et pourquoi elle ne nous promet plus rien d'autre que la fin du monde.
Liens utiles :
L'Atlas du Post-apocalyptique par Raphaël Colson :
https://intergalactiques.net/atlas-du-post-apocalyptique-par-raphael-colson/
https://www.youtube.com/watch?v=uD-5IfuqfOA
INApocalypse, notre série de chronique-fictions post-apo avec l'INA :
https://www.youtube.com/watch?v=QY7ARliQWK4&list=PLAUm9TsAe7fAKToH2ZpNApljXAK9ovP_9
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Une émission écrite et présentée par Benjamin Patinaud et Kate
Image : Le Fils de Pub
Montage : Ace Modey
Musique : 2080
Générique : Copain du Web
Production : Kathleen Brun
Miniature : Boidin
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La tête dans le flux, la chronique du service politique de l'Humanité.
Rendez-vous tous les jeudis à 18 heures : https://www.humanite.fr/video/chaine/...
La chronique vidéo d'Osons Causer
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POPulaire, la culture pop sous le scalpel de Bolchegeek
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AmusantTranscription
00:00 Pour moi, on ne va pas se réformer après l'effondrement, on doit se réformer avant l'effondrement.
00:07 Et là je reviens sur la question de Waking Dead, la compétition du tous contre tous, la guerre du tous contre tous.
00:12 Si on ne se réforme pas avant que tout se casse la gueule, ce n'est même pas la peine.
00:16 HBO vient de sortir sa nouvelle série phare, la très attendue adaptation du jeu vidéo The Last of Us.
00:22 Et bien je retire tout ce que j'ai dit ici sur l'audace perdue de cette chaîne qui a révolutionné la série télé.
00:28 Du post-apocalyptique, de zombies, quelle originalité !
00:33 Alors je t'arrête tout de suite, ce ne sont pas des zombies, ce sont des infectés. Sérieusement, on est d'accord que depuis pas mal d'années maintenant, il y a des zombies partout.
00:47 L'invasion avait commencé bien avant, mais alors là depuis 20 ans, c'est hors de contrôle. On bouffe du zombie à toutes les sauces.
00:53 C'est limite pire que les super-héros. Tenez, on a même du Marvel Zombies !
00:56 Du braquage avec des zombies, de la fantasy avec des zombies, des comédies avec des zombies, des comédies romantiques zombies tant qu'à faire,
01:04 des parodies, des remakes, des suites, des films, des séries, des spin-offs de séries, des adaptations, des livres, des manuels, des funk-o-pop, des zombie-walk pour de vrai,
01:13 orgueil et préjugé zombie, facho zombie, ils méritent !
01:17 Ils sont dans les campagnes, dans les villes ! Bref.
01:21 Arrête de dire ça ! Quoi ? Ça, le mot qui commence par Z, là, arrête ! Pourquoi pas ? Mais parce que c'est ridicule !
01:29 Alors oui, ça déploie des trésors d'imagination pour pas appeler ça des zombies.
01:32 C'est quand même assez criant avec cet arrivé en fanfare de The Last of Us. Derrière, il y a un enjeu énorme de surfer sur cette tendance, en prenant la place laissée vacante par le très, très populaire, le genre de zombie.
01:50 La BD d'origine s'étale sur près de 200 épisodes de 2003 à 2019, ce qui correspond parfaitement aux années de cette mode. L'adaptation télé s'est arrêtée en novembre dernier après 11 saisons et a engendré une tonne de programmes dérivés.
02:06 Fear the Walking Dead, Tales of the Walking Dead, Walking Dead World Beyond, Walking Dead à la plage, Darryl et Knuckles... Ok, j'arrête avec les énumérations, c'est relou et c'est bien mon problème.
02:26 Alors là, je lis par un HBO qu'on file bébé au créateur de Tchernobyl. Tchernobyl, la série, pas la centrale, parce que ça serait pas très malin.
02:36 Une série hyper bien faite, malgré quelques profonds arrangements avec la réalité et avec déjà une excellente ambiance de fin du monde.
02:42 Sauf que, déjà que la chaîne tape pas dans la nouveauté la plus folle en s'essayant au post-apo, elle essaie même pas de renouveler le genre avec un concept original puisqu'il s'agit d'une adaptation.
02:51 Adaptation d'un jeu à succès qui lui-même, s'il a d'autres énormes qualités, ne brille pas par son originalité.
02:57 Lui-même transposait un genre bien balisé au médium du jeu vidéo dans une excellente synthèse de plein d'éléments classiques des histoires d'infectés et de post-apo en général.
03:05 Alors oui, ok, y'a des idées pour se démarquer, genre les différents monstres, avec cette histoire de champignons qui contaminent.
03:11 Le début, c'est les fils de l'homme, puis la route, et de base le road trip du type qui protège une gamine dans un environnement violent qui devient un père de substitution, on connaît.
03:20 Comme les passages obligés, le survivaliste reclus, les méchants pillards, les guichants militaires, le coup de "ohlala cette personne que j'aime a été mordu, je dois la tuer".
03:28 "Vas-y !"
03:29 "Mais quand est-ce que la folie des hommes Vatoldex va s'arrêter ?"
03:35 Là, ce qui était cool, c'était de jouer à ce genre.
03:38 En gros y'a que le dernier tiers de The Last of Us 1, où y'a une proposition qui est vraiment un peu originale et où y'a des trucs un peu "ohh" où tu fais "ah ouais merde putain, je vais pas spoiler mais..."
03:47 Et le 2, il part de ce truc là et entrez dessus.
03:50 C'est de la balle quoi, ça défonce quoi.
03:52 "D'où ça sort cette mode du zombie et pourquoi elle refuse de crever ?"
03:56 Et ben ça c'est lié à la trait pour le post-apocalyptique en général, c'est-à-dire les récits se déroulant à la suite d'une apocalypse.
04:02 Après l'apocalypse. Oui, je sais.
04:04 Qu'est-ce que vous feriez sans moi ?
04:05 Un monde après la fin, une catastrophe globale, un effondrement total, une disparition de la civilisation telle qu'on la connaît.
04:11 Même dans le jeu vidéo justement, ça a explosé ce genre.
04:14 Je pense que des jeux post-apo ça fait un moment qu'on en a, et quelques grands noms du médium y sont d'ailleurs associés, comme Fallout ou Gears of War.
04:20 Mais depuis quelques années, on enchaîne les gros titres qui se reposent dessus.
04:23 The Last of Us, Horizon Zero Dawn, Death Stranding, Metro Exodus, Nier Automata, ou même le dernier Zelda qui en reprend pas mal d'éléments.
04:31 Alors comme d'habitude, quand quelque chose devient trop tendance dans le JV, ça peut plomber la créativité.
04:35 Et même si on a peut-être pas encore atteint ce stade avec le post-apo, ça va être de plus en plus difficile d'être original avec.
04:41 Ce qui se trouve intéressant, et je pense que ce sera toujours le cas, c'est que ce setting, il oblige les créateurs à révéler leur vision de notre civilisation et de la nature humaine.
04:48 Parce que de par sa promesse d'un monde redevenu hostile et dans lequel il faut survivre, il agit comme une sorte d'exhausteur de moralité.
04:55 Est-ce que le summum du post-apocalyptique, ça serait pas la suppression du timbre rouge ?
04:59 Post-apocalyptique...
05:01 Énorme blague.
05:03 Bon.
05:04 On enchaîne.
05:06 Bon, c'est toujours compliqué de quantifier précisément des tendances culturelles.
05:10 Pour être certain du phénomène et de son ampleur, ça nécessiterait que quelqu'un s'amuse à lister toutes les oeuvres post-apo,
05:16 tous supports confondus, décennie après décennie, par pays, voire même de quel type de post-apo on parle.
05:22 Impossible.
05:23 Donc je me suis dit "ok, 2012, je vais décider de référencer".
05:28 C'est-à-dire de 8 ans de recherche, à donc bouffer les listes, à chercher toutes les références de tous les pays possibles.
05:34 Et donc j'ai référencé tout ce qui s'est fait du 19ème à nos jours.
05:37 Je suis arrivé aujourd'hui à référencer 3600 références.
05:42 Impossible n'est pas Raphaël Colson, car Raphaël Colson, c'est lui.
05:45 L'essayiste a beaucoup travaillé sur la science-fiction, notamment le rétro-futurisme et le cyberpunk, et donc le post-apo.
05:51 Je voyais pas le bout.
05:52 Chaque année, amener son nouveau lot de production, et tu dis "à quel moment je m'arrête ?"
05:58 À la fin du monde.
05:59 Voilà.
06:00 Le résultat de ce taf monstrueux, l'Atlas post-apocalyptique,
06:03 vous pouvez le retrouver gratos sur le site du festival de SF, les Intergalactiques, via le lien en description.
06:09 Et regardez, c'est bien ce que je dis.
06:11 Les récits post-apo, c'est vieux comme la fin du monde, et ça fait quasiment que monter tout le temps.
06:15 Et puis boum, là, t'as le passage à l'an 2000.
06:18 Les nouveaux millénaires s'y propisent aux angoisses dites "millénaristes", d'où le nom...
06:22 Je suis le bug de l'an 2000.
06:24 Whiz, whiz, whiz, whiz.
06:27 Quelle époque ?
06:30 Ou alors ça.
06:31 Désilluminés venus du monde entier, les habitants de Bugarach redoutent d'en voir affluer
06:36 lors de la présumée fin du monde.
06:38 Je m'appelle Sylvain Durif, et mon nom, au plan cosmique, c'est Oriana.
06:42 Donc j'incarne l'énergie de l'homme vert du grand monarque,
06:45 qui est annoncé par les prophéties de Nostradamus.
06:47 Alors, la décennie 2010 est vlaaard.
06:50 Les années 2010, donc 2010-2019, j'ai référencé 1 400 références.
06:56 Et on arrive à je sais plus combien d'oeuvres par semaine publiées ou diffusées ou produites.
07:02 Et tout ça, c'est juste l'apocalypse zombie.
07:04 Mais alors, pourquoi ?
07:05 Là, ça devient intéressant de regarder les types d'apocalypse,
07:08 et donc les types de peur de chaque époque.
07:10 Globalement, à la base, on a surtout des catastrophes naturelles, voire cosmiques.
07:14 La nature, ça fait bien flipper.
07:16 C'est quelque chose dont l'humanité doit se protéger, qu'elle doit maîtriser, dominer.
07:20 Ça, c'est un héritage des Lumières.
07:21 On s'est déjà tapé à l'époque des bonnes frayeurs à base de séismes qui rasent des villes entières.
07:25 Jusqu'à ce qu'il arrive 1914, et là, étonnamment, la guerre s'impose comme une raison de la catastrophe.
07:31 La guerre, mais aussi l'épidémie,
07:33 puisqu'en bonus et pour encore plus de victimes que la Première Guerre Mondiale, on s'est tapé une bonne grippe.
07:38 La mort en espagnol, au cas où tu causes pas le mexicain.
07:41 En fait, à ce stade, vous pouvez presque tout deviner.
07:44 L'apocalypse nucléaire s'impose tout au long de la guerre froide,
07:46 pour passer un peu de mode après la chute de l'URSS.
07:49 Et qu'est-ce qui prend alors petit à petit le dessus ?
07:51 Les craintes vis-à-vis de la technologie et de l'industrie,
07:54 vis-à-vis des effondrements sociaux,
07:56 et vis-à-vis de l'environnement.
07:57 Mais plus encore que tout ça,
08:00 vous l'avez, hein...
08:02 Les WOK !
08:03 La colère du Dieu va s'abattre sur la France.
08:06 Non, je déconne.
08:07 C'est bon, tout le monde voit ce que c'est une pandémie maintenant.
08:09 Et là, on parle en général, hein, les épidémies de zombies viennent se rajouter à ça.
08:13 D'où le fait que "ce ne sont pas des zombies, ce sont des carfeckés".
08:16 Ça a en fait sa petite importance.
08:18 Vous le savez sans doute, à la base, le zombie est un mort-vivant.
08:20 Ça nous vient du vaudou, et c'est comme ça qu'il s'est d'abord développé dans la culture populaire mondiale,
08:25 à commencer par la version de George Romero avec la nuit des "morts-vivants".
08:29 Ça relève donc plus du fantastique, de l'horreur et de l'occulte que de la SF.
08:33 Cependant, très vite, on l'associe à une apocalypse,
08:35 donc au post-apo et à la contagion.
08:38 Certes, dans de nombreux cas, c'est juste que les morts reviennent à la vie sous cette forme.
08:41 Mais même dans ce cas, ils transportent l'idée de contamination,
08:44 comme avec la morsure qui fait de toi l'un d'eux,
08:46 avec l'idée de fièvre, tout ça, que tu vas transmettre aux autres.
08:49 Une véritable épidémie, donc, qui propage le mal partout,
08:52 provoque un effondrement de la civilisation incapable de le contenir,
08:55 et dont on doit trouver un remède.
08:57 D'où le fait que la notion de mort-vivant ait pu disparaître au profit de l'infecté,
09:01 qui garde des caractéristiques du zombie tout en permettant des variantes,
09:04 le fameux zombie qui court, ou donc les spores de The Last of Us,
09:08 avec ces malades totalement transformés par des champignons.
09:11 C'est comme dans Mario.
09:12 Avec le Covid, l'épidémie de zombie pourrait avoir encore de beaux jours devant elle,
09:16 et les créateurs de la série The Last of Us ont décidé de privilégier cet aspect
09:20 au point que ça a énervé des fans du jeu.
09:22 Pourquoi du zombie et du post-apo tout le temps, partout ?
09:25 On peut reformuler la question ainsi.
09:27 Pourquoi on n'arrive plus à imaginer des futurs qui ne passent pas par la case catastrophe ?
09:31 Il est loin le temps de la SF à vaisseaux spatiaux et jetpacks lasers.
09:35 Quelle paraît désuète la société d'abondance de Star Trek,
09:38 prête à repousser les dernières frontières.
09:40 C'est qu'à une certaine époque,
09:41 progrès social et progrès technologique semblaient n'être qu'une seule et même chose.
09:45 Progrès général, positif et irrémédiable,
09:48 rempli par les promesses d'un moment d'effervescence de la science moderne
09:51 et de la révolution industrielle,
09:53 où on pouvait se dire "ouais mais imaginez ce qu'on aura dans quelques décennies".
09:58 Et ben...
10:13 Avec le confort !
10:14 Alors, pas étonnant qu'on soit graduellement passé des voitures volantes
10:20 à la lutte à mort pour l'essence.
10:22 Dans 20-30 ans, il n'y en aura plus.
10:24 Le post-apo est le symptôme culturel d'une perte de foi dans le futur.
10:30 La téléportation sur Mars, ça paraît assez lointain
10:32 quand on se dit qu'on aura déjà pas de retraite et en fait même pas de planète vivable.
10:36 Dans le cas du zombie, c'est même une perte de foi en l'humanité.
10:39 L'humanité, les gens, pas le journal.
10:41 Le journal, abonnez-vous !
10:43 Avant la fin du monde.
10:44 Le monde, pas le journal.
10:46 T'as une partie de la fiction post-apo qui va traiter du réchauffement climatique,
10:50 de la fin des énergies, voilà.
10:52 Mais le gros, c'est la pandémie, c'est ce qui prédomine,
10:56 c'est des œuvres comme Walking Dead,
10:58 et ça occulte complètement toutes ces questions-là.
11:00 Ça ne concerne que l'humanité,
11:02 parce que déjà l'humanité elle a à se poser la question de,
11:05 effectivement, si tout s'effondre, qu'est-ce qu'on pourra faire
11:08 si ce n'est se foutre sur la gueule, puisqu'on nous a conditionnés pour se foutre sur la gueule.
11:12 En plus de la contamination globale, propre à une période de mondialisation,
11:16 le zombie renvoie à une peur bien particulière, celle de l'autre.
11:20 Peur de masses étrangères prêtes à nous submerger et à nous assimiler.
11:23 Peur des inconnus, des foules anonymes que l'on croise au quotidien
11:26 et qui pourraient dissimuler tant de menaces.
11:28 Peur soudaine de son propre voisin, qui semblait pourtant si tranquille,
11:31 voire de ses proches les plus intimes.
11:33 Plus généralement, peur d'une société de moins en moins pacifiée,
11:37 où la civilisation s'est effondrée et cesse de nous protéger
11:40 de ce que nous serions vraiment, au fond, un lot pour l'homme.
11:44 Je vous découpe ! Je vous découpe les genoux !
11:46 Arrête ! T'es clairement sous pression, t'as vraiment besoin de calme.
11:49 Ça va très bien ! Ça va mieux que toi.
11:51 Des peurs qui en disent long sur l'état de société, où les gens sont atomisés
11:55 et les liens collectifs toujours plus rompus.
11:57 On est dans ton look-up, ça fait trop réfléchir, je vais devenir le Joker.
12:02 C'est pas pour rien que c'est les USA qui sont premiers sur le post-apo.
12:06 Et pas pour rien qu'ils sont aussi premiers sur le survivalisme.
12:08 Le zombie ne joue pas qu'à nous faire peur.
12:10 Le post-apo en général, et nos morts-vivants préférés tout particulièrement,
12:14 peuvent souvent se faire le terrain de jeu jouissif d'une violence graphique,
12:17 fun même, une catharsis dans un monde où tout est permis.
12:20 C'est pas pour rien qu'il reprend tant de figures et d'esthétiques
12:23 issues de l'imaginaire du Far West.
12:25 Avec le zombie, tout est permis, car c'est un zombie.
12:27 Cependant, ça passe par un processus qui peut revêtir des aspects plus... inquiétants.
12:32 Car la zombification, c'est littéralement une déshumanisation.
12:35 La menace n'est pas un alien bizarre ou un monstre chelou,
12:38 c'est à la base quelqu'un.
12:39 Un étranger, un anonyme, un voisin ou un proche.
12:42 La déshumanisation, c'est ce qui permet justement de justifier le pire.
12:47 Vas-y, tire-la là !
12:48 Allez !
12:49 Allez !
12:50 Oui !
12:51 C'est ça !
12:52 Vas-y, tu veux la grosse saucisse à roi ?
12:55 On ne massacre pas ici un blob ou des démons,
12:58 on massacre un monstre à forme humaine qui fut une personne,
13:01 mais qui ne l'est plus, et de toute façon, c'est lui et ou nous.
13:05 Retourne en enfer, immonde créature, tes gueules !
13:08 Oh !
13:09 Non mais ça va là, c'est bon, t'as gagné mon gars,
13:12 t'as un flingue pointé sur ma tête, t'es obligé de m'humilier sur mon physique en plus !
13:15 Le post-apo n'est pas qu'une peur, c'est aussi un fantasme.
13:18 L'effondrement de la civilisation, la disparition de toute institution,
13:22 à commencer par l'état de droit et toute structure collective.
13:25 Le signal dont rêvent certains pour commencer à massacrer leurs prochains
13:29 qu'ils ont au préalable déshumanisés.
13:31 Et on sait comment, parmi ceux qui agitent la crainte d'une situation de guerre civile,
13:35 beaucoup s'y préparent, surtout l'espèrent et feront tout pour l'amener.
13:38 Et ça, c'est jamais bon signe.
13:40 Mais attention, ça, ça ne résume pas le post-apo, loin de là.
13:44 C'est un des affects qui porte la popularité de ce genre,
13:47 et il s'y mêle à d'autres, y compris contradictoires.
13:49 Le zombie, est-ce qu'au fond, c'est pas l'autre face de la pièce
13:52 avec l'autre grande mode qu'est celle du super-héros ?
13:55 Avec ce rêve que des êtres supérieurs tombés du ciel
13:58 viennent nous protéger et régler tous nos problèmes.
14:00 Le post-apo colle de manière générale à des générations de doumeurs,
14:04 fruit d'une période de fin de l'histoire décrétée à partir des années 80,
14:07 mais ayant totalement perdu les espoirs qu'elle était censée porter.
14:10 Toujours les années 80, j'arrête pas de le dire, personne m'écoute, on me traite de fou.
14:15 Après les désillusions des contre-modèles du XXe siècle,
14:17 ceux qui voient à quel point le modèle court à sa perte,
14:20 mais à qui on a expliqué "there is no alternative",
14:22 ne peuvent plus imaginer que la catastrophe.
14:25 C'est vraiment là qu'il y a un cas, c'est là, c'est la catastrophe.
14:28 Et comme le veut la célèbre formule,
14:30 il est plus facile d'imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme.
14:33 Est-ce qu'elle est pas là, la racine du problème ?
14:36 Notre incapacité à imaginer autre chose.
14:38 La bonne vieille SF à papa qui imaginait des avenirs désirables
14:41 cohabité avec des grands idéaux transformateurs et les grands récits utopiques.
14:45 Entre temps, comme disait le philosophe Daniel Bensaid,
14:48 les mots sont sortis blessés du XXe siècle.
14:50 Les grandes promesses de monde meilleur ont tant de fois viré au cauchemar
14:53 avec leur lot d'échecs.
14:55 Les grandes illusions ont laissé la place à une grande désillusion.
14:58 Comment dans ces conditions imaginer à nouveau des lendemains qui chantent ?
15:01 Par exemple, c'est ce qu'essaie de faire un roman comme Utopia de Camille Le Boulanger,
15:05 qui s'inspire des dépossédés d'Ursula Le Guin et qui renoue sans complexe
15:09 avec la tradition du récit utopique
15:11 en racontant la vie d'un homme dans une société inspirée, je vous le donne en mille,
15:15 des travaux de Bernard Friot.
15:17 C'est du salaire !
15:19 Et ici, justement, c'est pas la fin du monde qu'il imagine,
15:21 c'est bien la fin du capitalisme.
15:23 Tout est du salaire !
15:24 Ça c'est du salaire !
15:25 Toi t'es du salaire !
15:26 J'en ai rien à foutre !
15:28 D'ailleurs, les intergalactiques cette année,
15:31 fin avril, je sais plus la date,
15:33 table ronde, Camille Le Boulanger,
15:35 Bernard Friot, et moi !
15:37 (chante)
15:39 Ça va être trop bien !
15:40 Aussi, depuis quelques années, ça cause d'une ESF
15:42 qui renourait avec ses imaginaires désirables.
15:44 J'ai plusieurs fois ici utilisé le terme "solar punk",
15:47 un genre qui imagine un avenir sain, positif et solaire,
15:50 d'où le nom, à base de sociétés nouvelles,
15:53 de technologies utiles et d'énergie propre,
15:55 d'où le nom pour l'énergie solaire,
15:57 qui ici remplace le cyber du cyberpunk
15:59 et la vapeur du steampunk.
16:01 Alors, c'est très chouette, ça fait rêver,
16:03 mais ça illustre parfaitement un autre problème.
16:05 Le solar punk, on en parle beaucoup,
16:07 mais bon, est-ce que c'est pas juste un vœu pieux ?
16:10 Y a pas encore une production énorme,
16:12 pas d'œuvres majeures,
16:13 et pas d'impact culturel massif,
16:15 surtout si on compare au post-apo.
16:17 Un mouvement culturel, ça se définit surtout après coup,
16:19 à l'épreuve du temps, et pas juste en le souhaitant.
16:22 On peut demander à la ESF d'être optimiste,
16:24 mais ça reste des incantations, et ça ne se le décrète pas.
16:27 La positive attitude, c'est une question presque de philosophie.
16:30 On n'a pas le droit d'être désespéré.
16:33 Alors forcément, aux yeux du Premier ministre,
16:35 les manifestants de samedi dernier
16:37 étaient loin d'avoir adopté cette fameuse positive attitude.
16:40 Mais pour finir, comme je veux pas vous déprimer,
16:42 je vous propose de voir le problème autrement.
16:44 Le rôle de l'anticipation, c'est pas de nous couconner,
16:46 ou de nous fournir un manuel.
16:48 La ESF n'a pas à nous dire qu'on va arrêter de faire des conneries,
16:51 vu qu'on n'est pas parti pour.
16:53 Elle sert aussi d'avertissement, et questionne notre monde.
16:55 D'ailleurs, moi-même, j'avais utilisé la fiction post-apo
16:58 pour donner un autre regard sur notre siècle
17:00 à travers les archives de l'INA.
17:01 Et oui, allez voir, ça s'appelle Inapocalypse,
17:03 on vous le met en description,
17:04 c'est co-réalisé avec Slexno du Nexus 6,
17:06 et avec une bande originale de Chronomusique.
17:08 Quelque part, zombie ou autre,
17:10 c'est pas tant l'apocalypse l'intérêt,
17:12 que comment les gens vont y réagir.
17:14 Les récits de crise servent de révélateur,
17:16 et comme disaient les vieux résistants par chez moi en limousin,
17:18 "Lui, j'aimerais pas le voir en temps de guerre."
17:20 Ces récits montrent des gens s'entretuer,
17:22 mais aussi s'organiser,
17:24 reproduire les pires rapports sociaux,
17:26 ou en créer de nouveaux,
17:27 se montrer impitoyables, autant que solidaires.
17:29 "Je prendrais l'exemple par exemple de Nausicaa,
17:31 qui est au moins le film,
17:33 justement, qui oppose
17:35 ces types de communautés,
17:38 c'est-à-dire, la communauté de Nausicaa,
17:40 c'est vraiment une communauté utopique,
17:42 qui est arrivée à faire un équilibre avec la nature,
17:45 et qui va subir une agression extérieure.
17:47 Et en fait, ce que rappelle Miyazaki,
17:49 c'est qu'il lui développe, en fiction, des utopies,
17:52 mais que ces utopies, à un moment,
17:53 elles sont toujours confrontées au réel,
17:55 à la réalité du choc."
17:57 Est-ce que le post-apos, c'est forcément un genre pessimiste ?
18:00 Est-ce qu'on doit l'opposer à une SF utopique ?
18:03 Ou est-ce qu'il peut lui-même se faire porteur d'utopies,
18:05 en se mettant à imaginer des avenirs désirables,
18:07 mais débarrassés de l'illusion
18:09 que c'est la voie qu'on est en train de prendre,
18:11 et qu'au contraire, ils nécessiteront que du passé,
18:13 on fasse table rase par la fin de leur monde ?
18:17 Aujourd'hui, en les paroles du blé et du sinistre philosophe Émile Tchorin,
18:22 "réconcilié avec le terrible,
18:24 nous voyons une contamination d'utopie par l'apocalypse.
18:28 Les deux genres, qui se sont à l'époque semblables,
18:31 s'interpénétrent, se râpent les uns sur les autres,
18:33 pour former un troisième."
18:35 Cette interpénétration est vivide
18:37 dans ces hancours écologiques profonds
18:39 pour un monde écrasé et brisé par les humains.
18:42 La scourge devient le rêve.
18:44 Il y a un an encore, on prévoyait la fin du monde.
18:46 On ne devrait même pas être là.
18:48 Mais on est là.
18:50 Ça n'a rien de sorcier de détruire une machine infernale
18:53 qui vous bourre le crâne et qui vous persuade que vous êtes condamné.
18:56 Ce qui est moins évident, c'est de savoir ce qu'on va inventer à la place.
19:00 C'est un défi de taille.
19:02 On n'y arrivera pas tout seul.
19:04 On a besoin de vous.
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