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Chaque lundi dans la matinale de Dimitri Pavlenko, Philippe Val livre son regard sur l'actualité.

Retrouvez "Philippe Val - Les signatures d'Europe 1" sur : http://www.europe1.fr/emissions/philippe-val-les-signatures-deurope-1

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Transcription
00:00 Dans 10 minutes, votre club de la presse européen.
00:03 Mais d'abord, vos signatures européens comme chaque lundi.
00:06 D'abord Emmanuel Ducrot dans 5 minutes.
00:08 Bonjour Emmanuel.
00:09 Bonjour Dimitri et bonjour à tous.
00:10 On va jouer à Harry Potter.
00:12 Enfin bon, ou pas.
00:13 Ou on boycotte, on sait pas.
00:14 C'est dans un instant.
00:15 Mais d'abord, comme tous les lundis sur Europe 1.
00:17 Bonjour Philippe Ball.
00:18 Bonjour Dimitri.
00:19 Alors vous avez passé un peu de temps ces derniers temps à relire Gargantua.
00:22 Vous y avez tiré des leçons pour notre temps.
00:24 Oui, chez Aux Éditions Lafon qui viennent de tout rééditer.
00:28 C'est dans une très belle édition.
00:30 Et c'est là que j'ai pris mes… Voilà.
00:32 Je les cite parce que… Parce que vous en êtes très content.
00:35 Ils ont fait un gros travail.
00:36 En apprenant dans un journal que Poutine mesurait 1m67, j'ai retrouvé cette réflexion
00:44 de Rabelais.
00:45 Donc à propos, je cite Rabelais, de ces petits morceaux d'hommes qui sont facilement
00:49 colériques.
00:50 La raison physiologique en est qu'ils ont le cœur près de la merde.
00:54 Alors, c'est dans le premier livre.
00:57 La littérature satirique, sous François 1er, n'était pas encore empêtrée dans
01:01 la culture victimaire de l'offense à toutes les sauces.
01:04 Voilà maintenant à un an que Vladimir Poutine a envahi l'Ukraine.
01:07 Et en poursuivant ma promenade rabelaisienne jusqu'à la fin du deuxième livre qui raconte
01:12 les guerres picro-collines, j'ai trouvé des passages que je ne peux citer intégralement
01:17 mais qui racontent quasiment par le détail l'invasion de l'Ukraine par Poutine et
01:22 l'incroyable ressemblance entre les discours de Grandgousier et ceux de Volodymyr Zelensky.
01:28 - Grandgousier, père de Gargantua.
01:30 - Absolument.
01:31 Alors, je cite en changeant le nom de picro-colle en Poutine, c'est ma seule modification.
01:36 « Ma résolution n'est pas de provoquer mais d'apaiser, pas d'assaillir mais de
01:41 défendre, pas de conquérir mais de protéger mes fidèles sujets et mes terres héréditaires.
01:47 Sans cause ni raison, Poutine y est entré en ennemi et de jour en jour il poursuit sa
01:53 furieuse entreprise avec des excès intolérables pour les personnes libres.
01:58 Je me suis mis en devoir de modérer sa colère tyrannique mais pour toute réponse je n'ai
02:04 obtenu de lui qu'un défi arbitraire et la prétention au droit de disposer seul de mes
02:09 terres.
02:10 Et Grandgousier, Zelensky, contraint à faire la guerre contre son gré, prévient picro-colle
02:16 Poutine donc de la fatalité de sa défaite parce qu'on ne peut pas se maintenir à ce
02:22 niveau d'absolutisme.
02:23 Je cite « Telle est la fin de ceux qui ne peuvent modérer par la raison et la tempérance
02:30 leur bonne fortune et leur prospérité.
02:32 » Et la ressemblance devient troublante lorsque picro-colle, mis en déroute son aide de camp,
02:38 un sosie de Kadirov nommé Merdaille, lui donne ce conseil.
02:43 Je cite « Un beau petit ordre de mobilisation que vous enverrez aux Moscovites vous fournira
02:52 en un moment 450 000 combattants d'élite.
02:55 Oh, si vous me faites votre lieutenant, je tuerai un peigne pour un coiffeur.
03:00 Je mors, je rues, je frappe, j'attrape, je tue, je renie.
03:03 » Bon, c'est pas tellement des Moscovites qu'on mobilise, c'est plutôt des Tchétchènes
03:06 en l'occurrence.
03:07 Mais c'est vrai que les coïncidences sont incroyablement étonnantes.
03:10 Et plus encore lorsqu'après la débâcle du dictateur corrompu, Grandgousier vainqueur,
03:15 pour éviter de nouvelles guerres, aide à la reconstruction du pays vaincu.
03:19 C'est exactement le problème qui se pose non seulement à Zelensky, mais à toute la
03:23 coalition de l'OTAN.
03:25 Si la Russie s'effondrait, elle serait dépecée d'une part par la Chine, qui rêve de conquérir
03:31 les immenses territoires de l'Est, et d'autre part par la Turquie, qui s'empresserait de
03:35 mettre sous sa coupe tous les pays turcophones, Ouzbékistan, Turkménistan et autres Tadjikistans.
03:41 La petite Europe de l'Ouest, avec ses droits de l'homme, sa liberté d'expression et ses
03:45 systèmes sociaux, se verrait alors prise en tenaille entre la menace directe d'un empire
03:51 chinois totalitaire et d'un islamiste mégalomane qui dissimule son incurie sous des ambitions
03:58 impériales incuries.
03:59 Parce que quand on est incapable de secourir ses propres administrés agonisant sous les
04:03 décombres d'un tremblement de terre, et quand l'aide internationale arrive avant les secours
04:08 turcs, vouloir devenir maître du monde relève exactement du grotesque Rablaisien.
04:13 - Finalement, Philippe, il semble que l'humanité revive sans cesse le même roman tragique.
04:19 - Oui, et ce serait désespérant si elle n'était toujours sauvée par des héros qui se différencient
04:24 de leurs ennemis par une malice et une mystérieuse joie de vivre que l'on trouve déjà chez
04:30 Lulis, d'Homère, mais aussi chez Henri de Navarre, ou plus près de nous, chez Clemenceau,
04:35 Winston Churchill ou Volodymyr Zelensky.
04:37 Ils ne font la guerre que contraints et forcés, et ils puisent leur courage dans leur amour
04:43 des arts, de la bonne humeur et de la vie heureuse.
04:46 Quand même, on ne s'intéresserait que de loin à la politique.
04:50 Lisons au moins Rablais pour savoir avec qui on aimerait partir en vacances.
04:54 Erdogan, Poutine, Xi Jinping ou avec Zelensky ?
04:57 - Merci beaucoup Philippe, c'est Gaspard Proust demain qui sera dans votre ciel.

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