Ivan Rioufol et Véronique Jacquier passent en revue l’actualité de la semaine dans #FaceARioufol
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00:00 Quasiment 20h sur CNews, top départ de face à Riofol avec Yvan bien sûr.
00:05 Bonsoir Yvan.
00:06 Bonsoir.
00:07 On est ravis de vous retrouver.
00:08 Véronique Jacquet est également là.
00:09 On fait le point sur l'info et on commence l'émission juste après.
00:10 En Seine-et-Marne, perquisition du domicile de Pierre Palmad à Séli en Bière.
00:19 Une vingtaine de policiers et gendarmes ont été mobilisés deux jours après le grave
00:23 accident de la route qui a impliqué l'humoriste testé positif à la cocaïne.
00:28 Une enquête est ouverte pour homicides et blessures involontaires.
00:31 Les trois autres blessés graves sont toujours hospitalisés.
00:34 Plus de 33 000 morts en Turquie et en Syrie.
00:38 Le bilan ne cesse de grimper.
00:40 Un nouveau convoi de l'ONU est arrivé en Syrie.
00:43 Une dizaine de camions apportant de quoi confectionner des abris d'urgence.
00:47 L'acheminement de l'aide humanitaire reste compliqué dans les régions syriennes déchirées
00:52 par la guerre.
00:53 Hier, l'OMS a lancé un appel urgent pour collecter 42,8 millions de dollars.
00:58 En Allemagne, échec cuisant pour le SPD.
01:01 Les berlinois étaient appelés aux urnes pour élire les députés de la capitale au
01:05 Bundestag et les membres du Parlement local.
01:08 L'Union chrétienne démocrate est arrivée en tête avec près de 28% des suffrages contre
01:14 environ 18% pour le parti du chancelier Olaf Scholz, le pire résultat du SPD depuis la
01:19 fin de la Seconde Guerre mondiale.
01:21 A la une de Fasari ou Folles, 2,5 millions de personnes dans les rues en France ce samedi
01:30 selon la CGT contre la réforme des retraites.
01:32 Le mouvement ne désemplit pas.
01:34 Au contraire, pour l'instant, c'est bien plus tendu à l'Assemblée que dans la rue.
01:38 Mais faut-il craindre une radicalisation du mouvement ?
01:41 Éléments de réponse dans un instant.
01:43 A la une également, c'est l'une des catastrophes les plus lourdes de ce siècle.
01:46 Plus de 33 000 personnes ont perdu la vie dans le séisme qui a frappé la Turquie et
01:50 la Syrie.
01:51 Dans cette zone, sinistrés, les chrétiens d'Orient tentent de venir en aide aux populations
01:54 malgré la menace de Daesh.
01:56 Yvan Rioufol va revenir sur le manque de soutien de la France et de l'Occident aux chrétiens
02:00 d'Orient.
02:01 Sont-ils les grands oubliés ? Pourquoi ce silence ? On en parle dans cette émission.
02:06 Enfin, Yvan, vous recevez ce dimanche Yves Jobic, ancien patron de la brigade anti-gang
02:12 du 36K des Orfèvres, auteur de Secrets de l'anti-gang, flic, indic et coup tordu.
02:17 Vous allez revenir sur son histoire, sur la police et la lutte contre les trafiquants.
02:21 Voilà le programme de face à Rioufol.
02:24 C'est parti, on va commencer avec la manifestation, cher Yvan, de ce samedi.
02:28 Est-ce qu'elle laisse présager une radicalisation des oppositions à la réforme des retraites
02:33 ?
02:34 C'est plus que probable.
02:36 Déjà, il y a une grande journée de grève générale qui a été annoncée pour le 7
02:40 du mois prochain.
02:41 La CGT et la CFDT sont toujours d'accord pour mener ce mouvement de revendication.
02:46 Je pense malgré tout que cette radicalisation risque d'être vaine dans la mesure où seule
02:51 la gauche tente de s'approprier cette revendication-là.
02:54 Et c'est un petit peu à chaque fois le travers que je vois apparaître dans ce récit officiel
03:01 qui nous laisse croire que toute la France populaire, que tout le monde du travail se
03:05 reconnaîtrait dans ces manifestations.
03:07 Ces manifestations sont incontestablement très importantes, en effet.
03:10 Mais encore une fois, ce sont des manifestations qui excluent une partie de la France populaire.
03:15 J'en parle régulièrement.
03:16 Quand vous entendez encore ce matin le patron de la CFDT, il dit, il dénie à des représentants,
03:20 par exemple du Rassemblement national, de venir rejoindre cette manifestation-là.
03:24 Et donc, cela peut décourager une partie de ceux au Rassemblement national qui ont voté
03:28 Marine Le Pen parce qu'elle proposait la retraite à 60 ans, alors qu'eux ont voté
03:37 pour Macron, qui l'a proposé à 65.
03:39 Donc, je pense qu'en effet, au-delà de l'apparent succès de ces manifestations, il y a un échec
03:48 programmé dans la mesure où d'abord ces manifestations ne représentent pas toute
03:52 la France populaire.
03:53 Et en plus, ce sont des manifestations qui essayent de réduire l'effondrement très
03:57 général que connaît notre société au seul problème des retraites.
04:00 Donc, je vois là une fragilité, d'autant que, en plus, si effectivement, il y a eu
04:04 beaucoup de monde dans les rues incontestablement et singulièrement en province, où là, on
04:10 a vu à nouveau que les petites villes se mobilisaient.
04:14 - 250 mobilisations dans la France.
04:15 - Ce sont des villes, surtout des villes de fonctionnaires ou des villes dans lesquelles
04:19 il y a des grosses industries avec un monde ouvrier qui est encore présent.
04:22 Donc, cela est vrai.
04:23 Mais par exemple, à Paris, je suis allé à Paris, je n'ai pas vu à Paris l'inédit
04:29 dont Laurent Berger a dit qu'il se flattait de le voir apparaître dans les rues.
04:33 À Paris, pour ce que j'en ai vu, en tout cas, il y avait beaucoup de monde aussi,
04:36 incontestablement.
04:37 Mais j'y ai revu les vieilles processions habituelles, le vieux théâtre de Grand Boulevard,
04:41 si je puis dire, avec la CGT, la CFDT, Sud, etc.
04:46 Les mêmes slogans.
04:47 J'ai entendu "pas de retraite pour les fachos", etc.
04:50 Une même intolérance, même avec un côté bon enfant, mais quand même une sorte de tension.
04:56 Et donc, je ne vois pas où est la nouveauté.
04:59 Et encore une fois, je pense que l'on oublie d'analyser le fait que toute une partie de
05:04 la société, toute une partie de cette France populaire ne se reconnaît pas forcément
05:08 dans les slogans syndicaux, dans ces bannières syndicales, d'autant qu'il y avait également
05:13 des drapeaux palestiniens dans ces manifestations.
05:15 En tout cas, à Paris, on se demande bien ce que vient faire la Palestine là-dedans,
05:20 sauf à voir qu'elle est cornaquée, bien sûr, par l'extrême gauche et l'islamo-gauchisme.
05:24 Donc, c'est parfaitement désobligeant.
05:26 Et puis, vous avez toute une partie, encore une fois, de cette France silencieuse qui,
05:30 elle, veut travailler, ne se reconnaît pas non plus dans le droit à la paresse, qui
05:32 au contraire voudrait davantage de travail, voudrait davantage de respect.
05:35 Et vous avez eu, mardi, pour illustrer ce que je veux dire, toute une grande manifestation
05:39 également du monde rural, du monde paysan sur l'esplendade des invalides qui lui réclamaient
05:45 à ce qu'on les laisse travailler en dehors des normes qui sont édictées par l'Union
05:51 européenne et dans l'indifférence de leur propre vision.
05:54 Je n'ai pas vu qu'ils réclamaient, eux, la retraite.
05:56 Ils sont prêts, effectivement, à travailler un peu moins.
05:58 Mais pour l'instant, ils veulent travailler.
05:59 Et cette notion de travail est une notion qui est partagée par beaucoup de ceux qui,
06:04 en France précisément, trouvent un peu indécent de voir ces fonctionnaires ou ces salariés
06:11 relativement privilégiés, relativement privilégiés, je mets plein de guillemets, naturellement,
06:15 vouloir moins travailler, alors qu'il y en a d'autres qui voudraient travailler tout simplement.
06:18 Donc, c'est pour ça que je mets beaucoup de bémol sur cette radicalisation qui profite
06:27 à la gauche, qui est instrumentalisée par la gauche, en plus, avec une sorte de raisonnement
06:31 un peu dangereux dans la mesure où même Laurent Berger laisse comprendre que lorsque
06:37 les Gilets jaunes, qui étaient 300 000, c'est-à-dire trois fois moins, ont commencé
06:40 à passer à la violence, ils ont immédiatement obtenu l'argent qu'ils réclamaient.
06:46 Tandis que là, pour l'instant, ces grandes manifestations populaires, qui se passent
06:50 d'ailleurs très bien et menées d'une manière très intelligente, je dois le dire, par les
06:53 syndicats, avec la modération de la CFDT sans doute, parce qu'elles manifestent sans
06:58 bloquer le pays, que ces grandes manifestations-là pourraient passer à un grade, à un stade
07:02 supérieur en allant vers cette violence précisément qui ferait reculer le gouvernement.
07:06 Donc, voilà, je suis, c'est bien que je ne rentre pas dans le discours commun et dans
07:10 le discours dominant, mais je trouve que le récit officiel qui nous sommes de nous faire
07:13 croire que c'est une colère populaire qui agrège toutes les colères, encore une fois,
07:19 je persiste à dire que ce n'est pas vrai.
07:21 Mais qu'est-ce qui vous fait dire, Yvan, que la gauche cherche aujourd'hui la radicalisation ?
07:25 Elle cherche la radicalisation parce que d'abord, elle est en position de faiblesse et on voit
07:31 bien que le procédé de la radicalisation est un procédé d'intimidation qui peut
07:34 marcher.
07:35 En plus, cette radicalisation est familière, en tout cas, à une partie de la gauche, la
07:41 gauche la plus radicale.
07:42 Il est intéressant de voir, par exemple, que les fantômes de 1793 reviennent à travers
07:47 certains personnages.
07:48 On a vu, par exemple, Thierry Porte, le député de la France insoumise qui a été sanctionné
07:57 de 15 jours d'exclusion à l'Assemblée nationale parce qu'il s'est fait prendre avec la tête
08:02 sur un ballon.
08:03 Le ballon représentait les filiges de M.
08:06 Dussault, le ministre du Travail, et donc avec une sorte de mimétisme sur ce qui aurait
08:11 pu apparaître comme étant une tête coupée et donc avec une faute de goût invraisemblable.
08:17 Nous avons vu également l'autre député de la France insoumise, M.
08:20 Louis Boyard, hurler que la police tue et sommet d'ailleurs les étudiants de prendre
08:27 d'assaut les universités ou quasiment.
08:29 En reparenthèse, c'est M.
08:31 Boyard maintenant qui est menacé, accepte que la police le protège.
08:35 J'ai entendu ce matin sur une radio que Mme Rousseau, qui n'a rien à voir avec Jean-Jacques,
08:43 elle nous l'a rappelé d'ailleurs, trouvait que toute l'opposition qui se tramait du
08:48 côté du Rassemblement national était une opposition fasciste avec une sorte d'enfermement
08:53 intellectuel terrible.
08:54 On a vu également l'effigie pendue de Mme le Premier ministre dans une manifestation
08:59 de la CGT à Marseille.
09:00 Donc, on voit qu'il y a toute cette résurgence de la terreur de 93 qui n'effraie pas du
09:06 tout cette extrême gauche-là.
09:08 Mais en même temps, cette intolérance gagne une gauche qui est une gauche qui pourrait
09:14 être plus modérée.
09:15 Et j'en ai deux exemples très rapides.
09:17 Je ne voudrais pas monopoliser trop la parole et laisser la parole également à Véronique,
09:22 bien sûr.
09:23 Vous avez vu, le Monde a fait paraître presque d'une manière successive deux articles qui
09:30 s'empruntent très violemment, l'un à Philippe de Villiers et l'autre à notre chaîne, à
09:36 travers son propre propriétaire, Vincent Bolloré.
09:39 Alors, je vous lis, le premier papier a été signé par encore deux députés de la France
09:45 Insoumise, Alexis Corbière et Mathias Stavelle, qui ne supportent pas le succès tout à fait
09:50 spectaculaire rencontré par le livre du Puy du Flou, "Vaincre ou mourir", qui gagne
10:00 maintenant plus de 200 000 ou 300 000 spectateurs, alors que malgré tout, les salles sont assez
10:06 mal distribuées.
10:07 Et donc, qui propose une lecture, une relecture de la tragédie vendéenne à travers l'épisode
10:14 de Charrette et donc Corbière, notamment, qui a écrit un livre qui s'appelle "Robespierre
10:19 revient", et donc avec un hymne à celui qui a insufflé la terreur de 1793, on en
10:24 est quand même là, et vend debout naturellement.
10:27 Et il trouve que ce film est une offensive culturelle de l'extrême droite, une falsification
10:34 de l'histoire nationale.
10:35 Et il appelle à bloquer cette offensive en déniant naturellement qu'il y ait eu un
10:41 génocide, alors qu'il y a eu tout de même 200 000 personnes qui ont été massacrées
10:46 lors de cette guerre civile, et que cela s'apparente bien à la définition qu'en donne en tout
10:51 cas la Cour pénale internationale.
10:53 Pour aller vite, je ne vais pas vous la donner, mais je voulais gagner du temps.
10:56 Puis le deuxième papier qui est paru, c'était mercredi et toujours dans Le Monde, a été
11:00 signé par le très pâtelin académicien Éric Orsenat, qui lui s'en prend très directement
11:06 à Vincent Bolloré, c'est-à-dire le patron de cette chaîne, en disant de lui "pique-pendre",
11:11 il en consacre un roman, et il considère Bolloré comme étant dangereux pour la démocratie,
11:17 tout en lui reprochant d'être au service d'une parole de haine, c'est-à-dire la parole
11:21 de haine, c'est cet élément de langage qui fait aujourd'hui que vous êtes sommé
11:24 de la bouclée dès que vous empiétez, dès que vous contredisez le discours dominant.
11:30 Et Orsenat accuse M. Bolloré d'avoir fait reculer la liberté sur cette chaîne, coupable
11:39 sans doute visiblement d'accueillir la gauche dans des confrontations d'idées qui n'existent
11:45 nulle part ailleurs.
11:46 Et donc Orsenat et Corbière, de ce point de vue, se montrent comme étant les deux
11:50 figures de l'ascension morale.
11:52 Mais ça a été plus loin, et nous avons vu en effet également jeudi et sur France Inter
11:57 cette fois-ci, ce sectarisme être porté par la propre ministre de la Culture, Mme
12:03 Fatima Abdul-Malak, toujours contre CNews qui vraiment focalise maintenant toutes les
12:09 irritations de la bien-pensance et qui a suggéré et qui a fait comprendre que CNews pourrait
12:16 ne pas avoir son autorisation de rediffusion dans deux ans parce que CNews, selon Mme Malak,
12:24 ne respecterait pas ni le pluralisme ni le débat d'idées, ce qui est quand même
12:28 ce fiche du monde, d'autant qu'elle a fait cette déclaration à France Inter qui,
12:33 précisément, est une radio de service public qui ignore totalement le pluralisme dans la
12:38 mesure où elle exclut du débat un certain nombre de commentateurs, j'en fais partie,
12:43 ça fait 40 ans que je ne vous le dis, je n'ai jamais mis les pieds à France Inter
12:47 et qui donc, elle, a un pluralisme qui est tout à fait sangrenu.
12:51 Et donc cette déclaration de la ministre de la Culture est parfaitement dangereuse,
12:56 d'abord parce que la ministre de la Culture n'a pas une obligation de neutralité vis-à-vis
13:01 de la communication, elle n'a pas non plus à faire pression sur l'instance de régulation
13:07 qui distribue les fréquences, or là, elle fait comprendre que ce qui a succédé au
13:14 CSA est instrumentalisé par le pouvoir politique et que d'ailleurs, cette instance-là,
13:21 dans le fond, est un instrument de domination idéologique du politique et donc,
13:28 je n'ai vu personne protester contre cette grave mise en cause d'une liberté d'expression
13:33 et une grave mise en cause d'un pluralisme qui, au contraire, est exemplaire dans cette
13:38 chaîne CNews, je ne dis pas cela parce que j'y suis accueilli, enfin en même temps,
13:42 je remercie bien que l'on m'y accueille parce que c'est bien,
13:45 il y a bien que là que je pourrais être accueilli, mais on devrait applaudir au contraire
13:49 à ce pluralisme-là, or on voit bien qu'aujourd'hui, la gauche et le progressisme en général,
13:53 la gauche, l'extrême-gauche, mais également le progressisme représenté par la Macronie
13:57 commence à s'irriter et à s'inquiéter de voir qu'elles n'ont plus le monopole
14:00 du récit officiel et que la pensée unique qu'elles comptaient pouvoir défendre est
14:04 une pensée qui commence à être ébranlée parce que précisément, les spectateurs
14:07 ont une envie d'avoir un discours différent et on les comprend naturellement.
14:12 D'ailleurs, vous avez constaté que la ministre de la Culture n'a pas voulu parler de la
14:15 chaîne M6 qui pourrait être achetée par AXA.
14:17 Et en plus…
14:18 Ce n'est pas mon rôle, ce n'est pas mon rôle.
14:20 Pour CNews et C8, là par contre…
14:22 Je ne pense pas rapidement à ce que je voudrais faire.
14:23 Vous avez dit que vous vouliez peut-être réagir sur cette radicalisation du mouvement.
14:27 Vous partagez le constat de Yvan ou pas ?
14:29 Alors, oui et non.
14:32 C'est-à-dire qu'incontestablement, les quatre journées de mobilisation sont un succès.
14:37 Celle d'hier, bien entendu.
14:39 Il y a quelque chose à souligner, c'est effectivement que le mouvement est assez
14:43 vivace dans les petites villes, dans les villes moyennes, dans les sous-préfectures.
14:47 Et d'ailleurs, les têtes d'affiche des syndicats ne s'y trompent pas puisque la
14:50 prochaine journée de manifestation, c'est le 16 février.
14:52 Et l'épicentre de la mobilisation nationale, ça va être à Albi.
14:56 C'est quand même tout un symbole, Albi dans le Tarn, pour dire "ben voilà, on continue
15:00 le mouvement et effectivement, on parle de maintenant bloquer le pays".
15:03 Bon, moi je n'y crois pas.
15:05 Je rejoins évidemment Yvan sur le fait que c'est une gauche, ce sont les fonctionnaires
15:10 qui manifestent.
15:11 Il y a une France qui reste très très silencieuse.
15:13 Pourquoi ? Parce qu'il y a quand même un grand paradoxe à travers cette mobilisation.
15:17 C'est que même les gens qui manifestent savent très bien que la retraite à 99% de
15:22 chances d'être votée, alors pas comme ils l'entendent bien entendu, mais parce qu'elle
15:26 fait partie du projet de loi de finances rectificatives sur le budget de la Sécu.
15:31 Et que donc, si au bout de 20 jours, rien n'est réglé à l'Assemblée, ça part
15:34 au Sénat et que si au Sénat, rien n'est réglé, ça va se jouer grâce aux ordonnances.
15:40 Donc de toute façon, c'est prévu dans la Constitution.
15:42 Donc la loi va être amendée, mais de toute façon, la réforme va passer.
15:46 La retraite des retraites, enfin pardon, la réforme des retraites va passer.
15:51 Les syndicats vont perdre la main, je ne veux pas faire de la science-fiction, mais enfin
15:54 globalement, c'est comme ça que ça va se passer.
15:56 Ce n'est pas la première fois en France que c'est le grand barnum pour une réforme
15:59 des retraites.
16:00 En revanche, ce qui peut se passer, c'est que les Français, pour certains, vont rester
16:07 sur leur faim.
16:08 Et ceux qui manifestent, j'en suis convaincue, font payer l'addition à Emmanuel Macron.
16:11 Ce n'est pas simplement les retraites qui font qu'ils descendent dans la rue.
16:14 C'est le déclassement, c'est la pauvreté, c'est la précarisation de la classe moyenne.
16:18 Et même si ça passe par ordonnance, même si les syndicats perdent la main parce qu'ils
16:23 ne représentent pas grand monde en France, effectivement, il y aura quand même des Français
16:27 qui vont dire "moi je veux le grand soir".
16:30 Et on voit cette forme de contamination dans la violence, dans la mentalité des Français,
16:35 on le voit dans l'hémicycle avec la France insoumise qui ne rêve que de ça, d'une vraie
16:41 bordélisation.
16:42 Ensuite, le gouvernement s'est fait piéger d'abord d'une part parce qu'il a déjà
16:45 quasiment tout négocié.
16:46 La deuxième chose c'est qu'il n'arrête pas de faire des chèques, chèques carburants,
16:50 chèques énergie etc.
16:51 Donc les Français on l'entend, les députés l'entendent en circonscription "vous avez
16:54 les moyens de payer, on n'est pas obligés de travailler plus".
16:58 Donc voilà, tout ça fait que les Français vont rester sur une grande insatisfaction,
17:02 qu'ils se mobilisent ou non.
17:04 Et ça peut se traduire par une radicalisation dans la rue dans quelques mois sur d'autres
17:09 sujets, d'après moi.
17:10 Yvan, en un mot, votre pronostic vu que Véronique Jacquet est sur la réforme des retraites,
17:14 quel est le vôtre ?
17:15 Je pense que la réforme des retraites passera, mais elle passera en lambeaux.
17:19 C'est-à-dire qu'on voit que le gouvernement malgré tout recule successivement.
17:22 C'est une retraite qui devait économiser 15 milliards ou 17 milliards, elle n'en
17:26 économisera plus maintenant que 7 ou 8 parce qu'il y a eu déjà des amendements etc.
17:31 Donc elle passera.
17:32 Et elle ne règle rien des vraies injustices.
17:34 Et ça laissera des traces.
17:35 Autre thématique, on va parler des chrétiens d'Orient.
17:38 Yvan Rioufol, le terrible séisme qui a frappé une partie de la Turquie et de la Syrie rappelle
17:43 le sort oublié des chrétiens d'Orient.
17:46 Question assez sensible que vous voulez qu'on traite aujourd'hui.
17:50 Est-ce que la France doit renouer avec la Syrie d'Assad ?
17:52 Oui, c'est cette question-là qui se pose parce que c'est un séisme affreux qui a
17:57 fait près de 30 000 morts et qui touche naturellement en priorité des populations musulmanes de
18:05 Turquie et de Syrie.
18:07 Mais il y a également les chrétiens d'Orient qui d'ailleurs lancent le SOS chrétien d'Orient,
18:12 leur laissent un SOS parce que les aides n'arrivent pas dans la mesure où le gouvernement français
18:16 a coupé les ponts avec le gouvernement d'Assad.
18:18 Depuis maintenant dix ans, il n'y a pas d'ambassade et Assad reste maintenant le
18:23 seul protecteur hélas de cette communauté des chrétiens d'Orient qui est une communauté
18:27 historique puisque c'est dans ces pays et dans ces pays-là que les chrétiens sont
18:33 apparus et se sont enracinés.
18:35 Je rappelle que dans Terre Sainte, il ne reste plus maintenant que 2% de chrétiens et donc
18:39 partout ailleurs, l'éradication des chrétiens est épouvantable.
18:42 Et en plus, la France, depuis François 1er, a un devoir de protection et de parrainage
18:48 de ces chrétiens d'Orient-là.
18:49 Donc, il faudrait en effet se poser cette question très gênante, mais il faut se la
18:54 poser de savoir s'il ne serait pas temps malgré tout de reprendre contact, en tout
18:57 cas des contacts diplomatiques avec le régime d'Assad afin de venir en aide à ces chrétiens
19:03 d'Orient, d'autant que ces chrétiens d'Orient représentent malgré tout ceux que nous sommes,
19:07 cette part occidentale qui reste dans le monde oriental et que s'il y a un paradoxe à vouloir
19:11 venir en aide aux Ukrainiens sans vouloir venir en aide à ceux qui nous ressemblent
19:16 également, même si ce sont eux des Arabes, on ne voit pas pourquoi, parce qu'ils seraient
19:19 Arabes, ils n'auraient pas non plus le droit du soutien de la civilisation occidentale
19:25 avec qui ils ont cette filiation.
19:26 Et donc, je trouve qu'il y a une sorte d'injustice et il faudrait, il me semble que le gouvernement
19:31 devrait s'attacher effectivement à voir comment faire en sorte afin de venir en aide
19:36 à ces chrétiens.
19:37 Véronique ? Un symbole, Antioche, la ville de Turquie
19:42 qui est le berceau du christianisme a été complètement rasée de la carte.
19:45 Donc c'est dire que même symboliquement les chrétiens d'Orient sont en miette.
19:50 Bien entendu, il faut que la France se bouge.
19:53 Alors, est-ce qu'elle peut faire quelque chose toute seule ? Ça paraît compliqué,
19:58 mais c'est évident qu'il faut que le monde occidental et que le monde chrétien se bouge
20:01 pour les chrétiens d'Orient.
20:02 Les pays du Golfe sont capables d'aider les sunnites, ils font des investissements.
20:07 L'Iran aide les chiites de par le monde, c'est pas un mystère.
20:11 Il y a cette espèce d'idée que seule la générosité suffit, mais n'oublions pas
20:18 les paroles de François Fillon qui disait "si nous ne les aidons pas, ce qui leur arrive
20:22 à eux nous arrivera un jour chez nous".
20:24 Alors, petit point positif quand même en parlant des Arméniens et de l'Arménie,
20:28 puisqu'on sait quand même que l'Arménie vit un martyr.
20:29 Emmanuel Macron, là, essaye d'être en première ligne sur le plan diplomatique pour
20:34 aider les Arméniens.
20:35 Il sait qu'il y en a 120 000 qui sont bloqués au Haut-Karabas et il essaye de faire quelque
20:39 chose.
20:40 Mais bien entendu, il faut se réveiller pour aider les chrétiens d'Orient, sinon leur
20:43 sort sera notre sort.
20:45 Oui, tout à fait d'accord.
20:46 Il faut effectivement qu'en Arménie également, la France se dépêche de venir en aide aux
20:50 Arméniens qui sont également des chrétiens.
20:52 Et je pense qu'il faut aussi quand même faire preuve d'intelligence sur cette drôle
20:55 de paix.
20:56 Comme il y avait eu une drôle de guerre en 1939, il y a une drôle de paix aujourd'hui
20:59 qui s'installe en Europe avec cette guerre en Ukraine qui n'a pas été débattue.
21:02 Et on voit qu'encore cette semaine, l'Union européenne est en train de monter d'un
21:07 grade pour essayer dans un affrontement de civilisation qui est un affrontement qui ne
21:11 profitera à personne.
21:12 Et encore une fois, je renouvelle ici l'appel à plus de sagesse et à une solution diplomatique.
21:18 Mais qui l'entend pour l'instant ? Pas grand monde.
21:20 La publicité, on revient dans un instant puisque vous recevez Yves Jobic qui est grand
21:24 flic, ancien patron de la célèbre brigade anti-gang du 36K des Orfèvres.
21:29 Vous avez plein de choses à lui dire cher Yvan et on se retrouve dans un instant.
21:33 Quasiment 20h30 sur CNews, la deuxième partie de Face à Ari ou Fol.
21:41 D'abord le point sur l'information avec Isabelle Puyboulot.
21:43 La France sera-t-elle à l'arrêt le 7 mars prochain ? C'est du moins la stratégie
21:51 envisagée par l'intersyndicale qui appelle à une cinquième journée d'action le 16
21:56 février.
21:57 Si la majorité présidentielle campe sur ses positions sur la réforme des retraites,
22:01 la CGT évoque des grèves reconductibles, la CFDT parle d'opérations ville morte.
22:07 La mobilisation d'hier a réuni au moins 963 000 manifestants.
22:12 Manifestation massive à Madrid, selon la préfecture.
22:16 Près de 250 000 personnes ont défilé dans la capitale espagnole pour défendre le système
22:21 de santé publique dans la région.
22:23 Ce dernier étant miné depuis des mois par le manque d'effectifs et de moyens, cette
22:28 mobilisation est la troisième de grande ampleur organisée depuis trois mois dans la ville.
22:33 Et puis encore un peu de patience, coup d'envoi du Superbowl à minuit trente, la finale du
22:39 championnat opposera les Chiefs de Kansas City aux Eagles de Philadelphie, rencontre
22:44 marquée par le retour très attendu de la chanteuse Rihanna.
22:47 La star performera pour le traditionnel show de la mi-temps après sept ans d'absence
22:52 sur la scène musicale.
22:53 Elle sera précédée par le français DJ Snake.
22:57 La deuxième partie de Face à Rio Folle, toujours avec Yvan bien sûr, avec Véronique
23:05 Jacquier.
23:06 Vous recevez aujourd'hui Yvan, Yves Jobic pardonnez-moi.
23:09 Bonjour Yves Jobic, c'est un plaisir de vous retrouver.
23:11 Pourquoi vous invitez Yves Jobic ?
23:13 Parce que c'est un grand flic comme on dit.
23:16 Yves Jobic, pour ceux qui sont un peu plus vieux, a été dans les...
23:21 a fait la chronique des médias pendant des années, dans les années 90 à peu près.
23:25 D'autant plus d'ailleurs que vous aviez été à l'époque, vous étiez le patron
23:28 de l'anti-gang, le 36 cas des heures faibles, la célèbre 36 cas des heures faibles.
23:32 Et vous avez fait de la prison pendant 17 jours, je crois.
23:36 Oui, c'est ça.
23:37 Faussement accusé de proxénétisme et de corruption par un juge d'instruction, M.
23:41 Hayat, qui était proche du syndicat de la magistrature, avec un procès alimenté par
23:45 la presse et notamment on y retrouvait également Edwi Plenel, etc. avec une opération de déstabilisation
23:50 dont vous avez été blanchi.
23:52 Et pour toutes ces raisons et surtout pour votre expertise sur l'état de la police aujourd'hui,
23:57 je suis très heureux de vous inviter et soyez le bienvenu.
24:00 Et vous avez écrit un livre très intéressant qui se lit comme un véritable roman policier,
24:05 véritablement policier avec tous les guillemets, parce que c'est vraiment là où vous y décrivez
24:08 la pêche.
24:09 Et j'aurais voulu savoir quel était le message, dans le fond, que vous vouliez soutenir à
24:13 travers ce livre déjà, pour que l'on comprenne votre état d'esprit.
24:17 Alors, j'ai écrit ce livre puisque je suis à la retraite depuis peu de temps, donc j'ai
24:20 le droit de m'exprimer.
24:22 J'ai voulu dévoiler l'envers du décor de ce que j'ai vu et vécu et faire voyager le
24:29 lecteur au cœur d'un 36 Quai des Orfèvres, donc là où j'ai fait l'essentiel de ma
24:33 carrière.
24:34 Quai des Orfèvres qui était à l'époque au sommet de sa gloire et de son efficacité,
24:39 qui était une véritable machine de guerre contre la voyoucratie.
24:43 Et donc faire voyager aussi le lecteur au cœur du milieu parisien qui était lui aussi
24:47 très actif.
24:48 Donc, je raconte le quotidien des enquêteurs de la police judiciaire parisienne, qui à
24:56 l'époque étaient des chasseurs, qui étaient soutenus par une direction qui avait une stratégie
25:03 très dynamique et très offensive contre les délinquants, ce qui a changé à la fin
25:07 des années 90.
25:09 Je fais un certain nombre de révélations sur des méthodes, des innovations que nous
25:14 avions faites.
25:15 Nous avons notamment été à la Bairie le premier service à écouter un téléphone
25:20 portable, mais enfin je donne aussi d'autres exemples, des révélations sur des figures
25:25 du grand mandatisme parisien.
25:27 Et je fais aussi un bilan de ce que j'ai vécu pendant toutes mes années en police
25:34 judiciaire.
25:35 Le bilan est assez simple, il est qu'on ne peut pas faire de bonne police judiciaire
25:39 sans avoir des yeux et des oreilles dans le milieu, c'est-à-dire sans avoir de bonnes
25:43 sources, de bons informateurs.
25:44 Sans avoir des indiques, ce qu'on appelle les indiques.
25:46 Voilà.
25:47 Et puis, accessoirement, il faut également être très présent sur le terrain de jour
25:50 comme de nuit.
25:51 Et au-delà, donc je raconte dans mon livre des tas d'histoires qui ont un intérêt
25:56 anecdotique.
25:57 Bon, certaines sont drôles, d'autres sont dramatiques, mais je fais surtout en fin de
26:02 livre des propositions pour améliorer la situation des services d'investigation français.
26:08 On va y revenir.
26:09 Mais donc, c'est parce que vous aviez, vous travailliez avec des indiques que ces indiques
26:12 ont cherché à vous déstabiliser.
26:14 Racontez-nous en quelques mots.
26:16 Oui, pardon.
26:17 Ce n'est pas les indiques qui m'ont déstabilisé, c'est plutôt le syndicat de la magistrature
26:20 et le juge d'instruction de Nanterre.
26:22 Alors, racontez-nous effectivement cette opération de déstabilisation du syndicat
26:26 de la magistrature, parce que cela reflète aussi, malgré tout, ce que l'on voit encore
26:29 aujourd'hui d'une opposition presque structurelle entre la police et la justice.
26:34 Idéologique.
26:35 Allez-y.
26:36 Donc, mon affaire m'a valu un surnom, c'est un point commun que nous avons un petit peu
26:43 tous les deux au niveau du surnom, ou tout au moins du prénom, qui est celui d'Edmond
26:49 Dantes.
26:50 Parce que j'ai été victime d'un scandale judiciaire, j'ai vécu un calvaire et un
27:01 cauchemar pendant un an et demi.
27:03 L'affaire avait démarré parce que j'étais intervenu avec mon bras droit auprès d'un
27:06 juge d'instruction de Nanterre, qui était le juge Ayat, que nous ne connaissions pas,
27:11 pour décrocher, enfin intervenir en faveur d'un informateur qui avait été interpellé
27:16 avec une petite quantité de cannabis, quelques dizaines de grammes, ce qui était rien.
27:20 Donc, non seulement ce magistrat a mal perçu notre démarche, n'a rien fait pour notre
27:27 informateur et au contraire a nourri une suspicion au sujet de notre intégrité.
27:33 La mienne est celle de mon service.
27:34 Et une machine infernale s'est déclenchée.
27:38 Donc, j'ai été victime d'une machination orchestrée par des voyous que nous avions
27:43 arrêtés.
27:44 J'ai été victime d'une erreur judiciaire de la part de ce juge d'instruction, donc
27:47 le juge Ayat, qui m'a inculpé et incarcéré pendant 17 jours de prison quand j'avais
27:56 29 ans, mais il m'a incarcéré sans aucune raison valable.
27:59 Ce qu'il faut préciser, c'est qu'il était le mari de la présidente, son épouse était
28:08 la présidente du syndicat de la magistrature qui était Adeline Hazan.
28:12 Et il a fait une instruction uniquement à charge, jamais à charge et à décharge.
28:16 Et comme si cela n'était pas suffisant, il a voulu m'impliquer dans un assassinat
28:21 politique qui avait eu lieu à Paris.
28:22 Et quand vous racontez ça, c'est absolument aberrant.
28:25 C'était l'assassinat de Maitre Ali Messili en opposant Algériens.
28:27 Et le plus scandaleux, c'est que ce juge d'instruction a été promu.
28:32 C'est bien cela.
28:33 Alors voilà.
28:34 Donc, non seulement, enfin, juste, je dis deux mots des accusations portées contre
28:38 moi puisque j'ai été accusé par trois prostituées algériennes et marocaines dont
28:43 nous avions arrêté les souteneurs qui ont prétendu m'avoir remis l'équivalent de
28:47 300 000 euros, ce qui était évidemment totalement fantaisie.
28:50 C'était des prostitues de la rue de Budapest qui représentaient les bas fonds de la prostitution
28:56 parisienne à côté de la gare Saint-Lazare.
28:58 Donc, le juge d'instruction, non seulement n'a pas trouvé dans mon patrimoine le moindre
29:02 centime provenant de cet argent soi-disant reçu, lorsque il m'a incarcéré, il m'a
29:08 montré pour me passer un marché en me disant "Monsieur Jobig, je suis persuadé que vous
29:12 avez touché cet argent-là, je ne l'ai pas trouvé, mais je suis persuadé que vous
29:16 faites partie d'un réseau de policiers qui alimentent le RPR, donc l'ancêtre des
29:21 républicains, avec l'argent de la drogue et la prostitution.
29:23 Si vous le reconnaissez, je vous remets en liberté."
29:27 Bon, donc je n'ai pas accepté ce marché parce qu'il était totalement surréaliste.
29:31 Et la dernière hypothèse du magistrat pour expliquer qu'il n'avait pas trouvé trace
29:35 de l'argent, c'était que cet argent était parti en Algérie.
29:37 Et là, bien évidemment, il ne pouvait pas poursuivre ses recherches.
29:40 Donc j'ai été en bout de course renvoyé devant le tribunal par lui, j'ai été blanchi,
29:46 relaxé et j'ai été dédommagé par la Cour de cassation.
29:49 À l'époque, j'ai reçu la plus grosse indemnité au pro rata du nombre de jours
29:54 de prison que j'avais subi.
29:55 Mais si on vous comprend bien, cette guerre entre la justice et la police serait alimentée
30:00 simplement par le syndicat de la magistrature.
30:02 C'est lui qui, encore aujourd'hui, est un petit peu le révélateur de toutes ces tensions.
30:06 Alors à l'époque, on est donc à la fin des années 80.
30:09 Nous avons découvert, parce que je vous avoue que nous étions pris par le quotidien de
30:15 nos arrestations.
30:16 Nous avions de très bonnes relations avec les magistrats parisiens.
30:19 Et nous avons découvert au travers de mon affaire que le syndicat de la magistrature
30:23 avait dans le viseur depuis déjà plusieurs années le quai des heures fèvres, qui représentait
30:27 pour lui une citadelle de 3300 policiers et commissaires et inspecteurs.
30:33 C'était vraiment une très grosse machine et qui, selon le syndicat de la magistrature,
30:38 n'était pas assez transparente vis-à-vis des magistrats.
30:41 Ce qui était faux.
30:42 Et d'autre part, le syndicat de la magistrature ne supportait pas que des policiers et des
30:48 sources humaines, des informateurs, partant du principe qu'on ne peut pas négocier avec
30:53 des voyous ou donc avoir des informations auprès de délinquants.
30:57 En réalité, il est difficile de faire autrement.
31:00 Dans votre présentation initiale, vous avez suggéré que la police aujourd'hui était
31:05 moins bien armée, en tout cas techniquement, déontologiquement, pour faire face au grand
31:12 banditisme.
31:13 Est-ce que la police actuelle a le droit encore de faire appel à des indics ? On se rappelle
31:18 du film Bachnor qui remettait en scène effectivement la nécessité pour la police, mais avec des
31:24 dérapages, de travailler avec des voyous.
31:26 Il y a ce lien entre flics et voyous qui apparaît également assez souvent.
31:29 Est-ce que ce lien est rompu ? Est-ce que malgré tout, on peut toujours travailler avec
31:33 des indics ou est-ce qu'aujourd'hui, la police a perdu en effet une partie de ses indicateurs
31:39 ?
31:40 Alors, dans l'épilogue de mon livre, je cite Frédéric Vaud, qui est l'actuel directeur
31:47 de la police nationale, qui en 2015, il était à l'époque le numéro 2 de la direction
31:52 centrale de la police judiciaire, avait déclaré à Libération que le recrutement d'un informateur
32:00 représentait souvent le début d'ennuis.
32:02 Ce qui veut dire que malheureusement, depuis la fin des années 90, le recours aux sources
32:09 humaines est devenu de plus en plus difficile, aussi bien au sein de l'institution policière
32:16 qui ne voit pas forcément ça d'un très bon œil, alors que moi, je considère qu'il
32:21 faut, pour que la police soit efficace, la police judiciaire, il faut revoir le logiciel
32:26 de la police judiciaire pour donner la priorité au renseignement humain.
32:30 De son côté, au niveau de la magistrature, l'opposition aussi au recours aux sources
32:36 humaines s'est développée.
32:37 Le syndicat de la magistrature était vent debout, mais malheureusement, une autre partie
32:42 des magistrats considère que c'est assez sulfureux, que ce n'est pas politiquement
32:48 ou judiciairement correct d'avoir des contacts avec des délinquants, puisque par définition,
32:54 les meilleures sources humaines font partie du milieu.
32:58 Donc, il est de plus en plus difficile…
33:00 Donc, aujourd'hui, vous dites que la police est désarmée face à la nouvelle grande
33:02 criminalité, c'est bien ça ?
33:03 Elle est en partie désarmée, effectivement.
33:07 Le projet de réforme de la police judiciaire, qui viserait d'ailleurs à supprimer la
33:14 police judiciaire, viserait à aggraver cette situation, si je vous comprends.
33:18 Tout à fait.
33:19 Il y a eu en fait deux étapes de ce que j'appelle la démolition de la police judiciaire
33:24 en France, qui était une institution, qui était une vitrine, qui était jalousée d'ailleurs
33:31 par les pays étrangers, les pays européens et dans d'autres continents, qui considéraient
33:36 que la police judiciaire française était excellente, aussi bien à Paris, au sein de
33:41 la préfecture de police, qu'au plan national.
33:43 Et à la fin des années 90, donc il y a un peu plus de 20 ans, sous Jospin, on a cassé
33:50 le quai des Orfères, c'est-à-dire qu'on lui a enlevé le tiers de ses effectifs, au
33:55 36, pour le basculer à la police en tenue, pour créer une nouvelle direction, la police
33:59 urbaine de proximité, ce qui n'a pas été une réussite.
34:02 Et là, la réforme qui est actuellement portée par Gérald Darmanin va aller plus loin, puisqu'elle
34:08 vise en fait à supprimer la direction centrale de la police judiciaire, qui est composée
34:13 de 4 à 5 000 enquêteurs spécialisés, qui luttent contre le haut du spectre de la criminalité,
34:19 donc tous les trafics organisés, drogues, les assassinats complexes, la cybercriminalité,
34:27 la délinquance économique et financière.
34:29 Et le projet en fait vise à faire passer ces experts de la police judiciaire, sous
34:33 l'autorité d'un nouveau directeur départemental qui coiffera tous les policiers du département,
34:39 ceux de la sécurité publique, qui sont des généralistes, et les experts, les experts
34:43 venant en renfort des enquêtes portant sur la petite et moyenne délinquance, c'est-à-dire
34:48 qu'on va délaisser totalement le champ de la grande criminalité, un peu comme si en
34:55 médecine, face à un manque de médecins généralistes sur le territoire, on disait
35:01 "on va prendre des spécialistes, cancérologues, cardiologues, tous les spécialistes, ophtalmo,
35:10 pour venir renforcer les cabinets des généralistes", ce qui serait totalement une erreur.
35:16 Véronique Jacquier.
35:17 Et le constat que vous faites a une incidence sur le trafic de drogue, est-ce que la France
35:21 est plus qu'avant encore justement la proie du trafic de drogue ?
35:25 On complète cette question.
35:26 Aujourd'hui on voit qu'il y a apparaît des cartels de drogue très importants aux
35:30 Pays-Bas, en Belgique notamment, peut-être même en France.
35:33 Est-ce que la police va pouvoir résoudre, s'opposer à cette gangrene ?
35:38 On a vu ce qui se passait au Havre aussi.
35:40 Le Havre étant la principale porte d'entrée en France de la cocaïne, donc il y a plus
35:45 de 300 tonnes de cocaïne qui rentrent en France tous les ans, et on estime que tant
35:51 les douanes que la police découvrent entre 10 et 15% de ces 315 tonnes.
35:58 Ce qui veut dire qu'il en passe énormément.
36:01 Ceci au soci, alors qu'aujourd'hui on a quand même des services de police judiciaire
36:07 qui sont très actifs, très compétents.
36:08 En Belgique et aux Pays-Bas, ils ont malheureusement depuis des années baissé la garde face
36:14 aux trafiquants, puisqu'ils n'ont pas de police judiciaire, ils n'avaient pas de
36:18 services de police judiciaire vraiment prêts et capables de lutter contre les trafiquants.
36:25 Donc le risque c'est qu'avec la réforme qui est dans les tuyaux, que porte Gérald
36:30 Aramanin, d'une part le ministère de l'Intérieur va tirer une balle dans le pied de la police
36:34 nationale et va offrir un cadeau inespéré à tous les groupes criminels qui opèrent
36:40 sur le territoire.
36:41 Donc ce qui veut dire que la criminalité organisée en France, n'ayant plus en face
36:45 d'elle des experts de la police judiciaire, aura un boulevard ou une autoroute et donc
36:51 pourra se livrer à ses exécutés.
36:53 Mais quelle est la lecture de ces réformateurs à travers cette réforme ? Ils veulent une
36:57 réforme simplement bureaucratique ? Ils veulent quoi ? Une centralisation excessive ? Quelle
37:01 est l'explication ? Parce que j'imagine qu'ils voient ce que vous voyez également.
37:04 Alors je ne suis pas sûr qu'ils voient vraiment, qu'ils mesurent vraiment la gravité
37:07 des conséquences que cela va entraîner.
37:10 Ah oui.
37:12 Je crois qu'il y a en fait, à l'origine, puisque cette réforme au départ a été
37:16 portée par M. Castaner, Gérald Darmanin a pris le train en marche sur cette réforme-là
37:21 et veut la mettre en application.
37:22 L'idée est d'avoir tous les policiers d'un département chapeautés par le préfet,
37:29 qui fourniront, je pense, de meilleures statistiques en matière d'interpellation, de contrôle
37:36 sur des délinquances, sur la délinquance du quotidien.
37:38 Perdus chiffres sur la petite délinquance.
37:40 Voilà, donc les deals de rue, les rodeos urbains, les violences intrafamiliales, sur
37:46 lesquelles les résultats, les cambriolages.
37:48 Vous avez vu qu'en 2022, d'après les statistiques fournies, les cambriolages ont augmenté de
37:52 11 %, les homicides ont augmenté de 8 %.
37:56 Bon, les chiffres de la délinquance ne sont pas bons actuellement.
37:58 Et cette réforme ne va faire qu'aggraver les choses parce que non seulement elle ne
38:03 permettra pas de solutionner la petite et moyenne délinquance, dont je rappelle que
38:08 quand il y a des interpellations, les gens qui sont interpellés, placés en garde
38:12 et interpellés, sont très, très rarement écroués, alors qu'à contrario, les services
38:18 de la police judiciaire qui opèrent sur le haut du spectre, qui s'attaquent à des
38:22 criminels professionnels et organisés, solutionnent 90 % de leurs dossiers et tous leurs clients
38:29 partent en prison.
38:30 Il nous reste une minute et demie.
38:32 En une minute et demie, est-ce que vous pouvez nous faire le profil du grand banditisme tel
38:36 que vous nous l'avez connu ?
38:37 Est-ce qu'il est devenu ?
38:38 Est-ce que c'est le même ?
38:39 Est-ce qu'il y a les mêmes règles ?
38:40 Est-ce qu'il y a la même éthique, entre guillemets, ou est-ce que tout ceci a disparu
38:45 ?
38:46 Alors je crois qu'il y a actuellement deux équipes sur le terrain au niveau du banditisme.
38:51 Il y a d'une part toujours des gens issus des vieux voyous, donc issus un petit peu
38:57 de l'aristocratie du banditisme, qui avaient fait leur classe en gravissant progressivement
39:01 les échelons.
39:02 Donc il en reste plusieurs.
39:05 Deux d'entre eux ont été arrêtés il y a quelques jours après avoir attaqué un
39:09 fourgon blindé en Allemagne, donc eux-mêmes étant connus pour des attaques de fourgons
39:13 blindés en France.
39:14 Donc ces criminels de haut niveau existent toujours et ils cohabitent avec, pour faire
39:20 court ce que j'appelle moi la génération Kalachnikov, c'est-à-dire des voyous essentiellement
39:24 issus de banlieues, qui s'y livrent essentiellement à du trafic de stupéfiants, mais qui n'ont
39:31 pas le même raisonnement.
39:35 Donc on a deux milieux qui cohabitent et l'important c'est que la police nationale soit en capacité
39:40 de traiter les deux milieux simultanément.
39:42 Et ce contre-milieu est perméable ou imperméable par exemple à ce qui pourrait rester d'indic
39:48 ou est-ce que vous n'arrivez plus à pénétrer ces milieux ?
39:51 Alors moi je considère qu'il faut redonner ces lettres de noblesse au renseignement,
39:55 c'est-à-dire au traitement des informateurs, ce qui se fait aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne
39:59 et dans d'autres pays.
40:00 Sinon, bon, le combat est totalement perdu parce que sans yeux et sans oreilles, la police
40:06 ne peut pas travailler, ne peut pas arrêter des élinqueurs.
40:09 Très bien, écoutez, c'était un plaisir.
40:11 Merci beaucoup Yves Jobic.
40:13 Je rappelle votre ouvrage "Les secrets de l'anti-gang, flic, indic et coup tordu".
40:18 Merci Véronique, merci cher Yvan Réoufolle.
40:20 On vous retrouve lundi pour La Parole aux Français.
40:23 Yvan ? Oui.
40:24 Quant à vous, cher Véronique, c'est dans quelques instants.
40:27 Voilà, quelques instants pour Enquête d'Esprit, une belle émission consacrée au handicap,
40:30 rendre sa dignité aux personnes handicapées, rendre leur dignité, pardon.
40:34 "Les secrets de l'anti-gang, flic, indic et coup tordu".
40:36 Merci encore Yves Jobic.
40:38 L'info se poursuit sur CNews.
40:39 ♪ ♪ ♪