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L'examen de la réforme des retraites en commission s'est terminé mercredi 1er février. Dans une ambiance tendue, les députés n'ont pas eu le temps d'étudier 5000 amendements. Alors, est-ce que cette étude de réforme était un vrai débat parlementaire? L'analyse de notre éditorialiste Matthieu Croissandeau.

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Transcription
00:00 Mathieu Croissando, l'examen du projet de réforme des retraites s'est achevé hier en commission,
00:05 dans une ambiance d'ailleurs aussi houleuse que l'élu.
00:08 - Tôt et beau hue, on est connu.
00:10 - D'ailleurs, est-ce qu'on peut dire "achevé" ?
00:12 - C'est un bien grand mot, parce que 28 heures de débat n'ont pas permis aux députés d'examiner l'ensemble du texte,
00:18 qui ne fait que 20 articles, ce n'est pas non plus la meilleure à voir.
00:21 Oui, mais voilà, les oppositions avaient déposé tellement d'amendements que 5 000 par exemple n'ont pas pu être examinés.
00:27 C'est important un amendement, c'est ce qui permet aux députés de faire son boulot de législateur,
00:31 c'est-à-dire de fabriquer, de corriger la loi, c'est avec des amendements qu'on peut amender,
00:36 donc corriger, faire évoluer un texte.
00:38 Mais c'est aussi un amendement, un moyen de ralentir les débats,
00:41 quand vous jouez la carte de l'obstruction, parce qu'il suffit d'en déposer toute une série,
00:44 vous changez une lettre, un chiffre, pour ralentir.
00:47 Je vous donne un exemple.
00:48 Alors, lorsqu'il y a eu la discussion sur la pénalité envisagée par le gouvernement
00:52 pour le non-respect de l'index senior,
00:54 la députée écologiste Sandrine Rousseau a déposé une trentaine d'amendements
00:57 proposant de fixer cette pénalité non pas à 1%, mais à 30%,
01:01 puis un autre à 29%, là c'est la liste des amendements,
01:03 puis un autre à 28%, puis un autre à 27%.
01:06 Vous voyez l'idée, ça prend du temps et ça ne sert pas forcément à grand-chose,
01:09 en tout cas pour faire avancer les débats.
01:11 Donc ce n'est pas une bonne stratégie ?
01:13 Ça permet de faire durer, c'est ce que je dis, d'enliser les débats,
01:15 de fatiguer tout le monde et de laisser le temps à la rue.
01:18 Alors ça je parle quand c'est des débats dans l'hémicycle,
01:20 quand on fait traîner, quand on joue la carte de l'obstruction,
01:22 ça permet de laisser le temps à la rue, de faire pression.
01:25 Ce qui n'est d'ailleurs peut-être pas un mauvais calcul,
01:26 quand on voit notre sondage, la mobilisation doit-elle se poursuivre ?
01:29 66% des Français veulent que ça continue
01:31 et 60% déclarent même qu'ils comprendraient le blocage du pays.
01:34 On ne les a pas interrogés sur le blocage du Parlement.
01:36 Mais cette stratégie d'obstruction a aussi un revers,
01:38 c'est qu'elle fait passer le Parlement en gros pour une vaste pantomime,
01:42 ça décrédibilise un peu l'opposition, ça éclipse les débats sur le fond
01:46 et puis ça permet généralement au gouvernement un alibi facile,
01:49 de dire "Voyez, l'opposition fait de l'opposition systématique,
01:51 ils font de l'obstruction, on ne peut pas discuter avec eux,
01:54 ils ne sont pas ouverts au dialogue".
01:55 C'est d'ailleurs intéressant de voir que dans les débats qui vont s'ouvrir,
01:58 les différents groupes d'opposition ont choisi des stratégies différentes.
02:01 Il y a donc la gauche qui a déposé beaucoup d'amendements,
02:04 plus de 5000 amendements, il y en a 3000 pour l'LFI par exemple.
02:08 Et puis vous prenez le Rassemblement national, qui n'en a déposé que 75.
02:11 Marine Le Pen est toujours dans sa stratégie de notabilisation,
02:14 de normalisation, elle veut essayer de jouer la carte de l'élu responsable.
02:17 L'opposition ne se mesure pas au nombre d'amendements,
02:19 surtout quand ce sont des amendements aussi grotesques, dit-elle.
02:22 - Ça sert à quelque chose ?
02:24 - Ça sert à quelque chose, pas en l'occurrence pour le texte,
02:27 parce qu'il faut expliquer aux téléspectateurs qu'un texte budgétaire,
02:30 quand c'est examiné en commission, c'est surtout pour le débat,
02:34 mais que c'est le texte initial du gouvernement,
02:36 qui sera lundi dans l'hémicycle.
02:38 Alors qu'est-ce qui se passe lundi ?
02:39 Les débats doivent commencer d'abord par une motion de rejet préalable,
02:42 ça c'est une motion de procédure déposée par la NUPES,
02:44 et ensuite une motion référendaire,
02:46 c'est-à-dire les députés qui veulent renvoyer ça à un référendum,
02:49 ça, ça sera défendu par l'ORN, ce que la gauche conteste.

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