Dans les Côtes-d'Armor, Christelle Narbonne a ouvert sa boulangerie en septembre 2022. À cause de la hausse des prix de l'énergie, sa facture a atteint les 12.000 euros. Ne pouvant pas la régler et avec des aides de l'État trop faibles, elle a décidé de fermer sa boulangerie.
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00:00 nous sommes en direct avec Christelle Narbonne,
00:01 qui est boulangère à Dinan, dans les Côtes d'Armor.
00:05 Bonjour Christelle et merci de nous rejoindre ce matin sur BFM TV.
00:09 Malheureusement, dans un contexte difficile pour vous,
00:11 parce que vous avez décidé de fermer votre boulangerie, c'est bien cela ?
00:16 – Oui, on a fermé en date du 24 janvier.
00:21 – Ce qui est terrible dans votre cas, c'est que ça venait d'ouvrir.
00:24 Vous aviez ouvert à la rentrée de septembre ?
00:28 – Début septembre, oui.
00:30 – Alors qu'est-ce qui s'est passé ?
00:31 C'est vraiment la facture d'électricité qui vous contraint à tout arrêter ?
00:38 – Principalement, oui.
00:39 Disons qu'on avait déjà prévu dans le prévisionnel une augmentation de 50%
00:44 par rapport aux chiffres qu'on a repris.
00:48 Et là, sur les quatre mois, on était déjà au plein de ce qu'on n'électrifie plus.
00:54 – Donc là, malheureusement, vous n'aviez plus la trésorerie pour pouvoir…
00:58 – Non, on n'a pas eu le temps de faire de trésorerie, non.
01:01 – Mais on a entendu beaucoup de responsables politiques,
01:06 responsables du gouvernement expliquer qu'il y avait des moyens de s'en sortir.
01:10 Est-ce que vous avez tenté des choses ?
01:13 Qui vous a aidé, tout simplement ?
01:16 – Pour le moment, on n'a pas eu le temps.
01:18 Nous, on a pris cette décision assez rapidement,
01:21 c'est notre choix personnel.
01:24 Quand on a essayé de regarder les aides qui avaient été mises en place par l'État,
01:28 on n'était pas concerné parce que nous venions juste d'ouvrir.
01:34 – D'accord.
01:34 C'est intéressant de vous entendre, et terrible, pardon,
01:37 mais parce qu'en effet, ça montre aussi la complexité parfois de ces dispositifs
01:43 qui sont soumis à différentes conditions.
01:48 Et puis, il y a aussi, et c'est ce que je crois comprendre,
01:52 une espèce de lassitude à un moment donné, quelque chose qui…
01:56 Vous n'aviez plus la force, quoi ?
01:59 – Non, on n'avait plus la force.
02:01 Quand vous arrivez à un stade où vous vous dites que vous travaillez
02:04 pour payer l'énergie et qu'on ne sait pas comment la situation va évoluer,
02:10 et en plus, quand on se dit que vu qu'on n'avait pas de N-1,
02:14 c'est-à-dire qu'on n'avait pas d'exercice précédent
02:17 pour pouvoir bénéficier des aides de l'État actuellement,
02:22 on se dit que vu tout l'investissement qu'on fait,
02:24 personnel, financier également, on préfère s'arrêter.
02:29 Même si on est tous les deux dépassionnés
02:35 et qu'on avait des excellents retours de la clientèle,
02:39 on a préféré arrêter.
02:41 – Oui, vous faisiez cela avec votre mari.
02:43 Que vous ont dit vos clients d'ailleurs ?
02:47 – Pour beaucoup, ils étaient tristes.
02:51 – Alors, est-ce que cette situation à Dinant est isolée
02:55 ou d'autres commerçants sont dans une situation difficile ?
02:58 – Il y a des commerçants qui sont dans des situations difficiles,
03:01 il y en a qui ont fermé, il y en a qui essayent de trouver des solutions
03:04 pour éviter de fermer et ce n'est pas que dans le secteur de la boulangerie.
03:09 Sur Dinant, il y a un boucher qui a fermé il n'y a pas très longtemps,
03:12 alors qu'il venait également aussi de s'installer.
03:15 Et il y en a d'autres qui menacent de fermer.
03:19 Ils attendent leur facture d'électricité avec la peur au ventre, malheureusement.
03:26 – Qu'est-ce que vous avez fait Christelle avec votre mari ?
03:28 Est-ce que vous avez commencé à réfléchir à l'après ?
03:34 – Oui, mon conjoint est déjà en recherche d'activité
03:40 et moi pour le moment j'attends, comme on a des enfants qui sont tout petits,
03:44 il faut pouvoir les garder.
03:49 Et puis après on n'a pas le choix, il faut avancer dans la vie.
03:54 – Dans quel état d'esprit vous êtes aujourd'hui ?
03:59 – On a dépassé la phase de la colère et puis après on est fatigué,
04:07 il y a le contre-coup de la fatigue et après on est des bâtons,
04:12 on va continuer à se battre mais c'est vrai que dans le contexte actuel,
04:17 l'entreprenariat, l'artisanat c'est compliqué.
04:24 On n'a pas l'impression qu'on peut avancer.
04:31 – Merci Christelle pour votre témoignage, merci beaucoup.
04:35 On voulait vous entendre parce qu'effectivement
04:38 on dit beaucoup de choses sur les boulangers,
04:39 on les entend crier leur colère, manifester
04:44 et puis il y a la réalité qui soudain peut rattraper certains d'entre vous
04:50 et vous contraindre de plier bagage, de fermer boutique.
04:57 – Ce n'est pas une théorie, c'est une hécatombe.
05:00 – Absolument, absolument.
05:02 Bon courage à vous Christelle, merci beaucoup encore pour votre témoignage.