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Tous les dimanches, Aymeric Pourbaix et ses invités abordent l’actualité d’un point de vue spirituel et philosophique dans #EQE

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00:00 [Musique]
00:11 Chers amis, bonjour. Il y a 230 ans, en 1793, les Vendéens se révoltaient contre les révolutionnaires.
00:18 Sur leurs étendards, on pouvait lire "pour Dieu et pour le roi",
00:22 mais cette révolte ne fut jamais admise.
00:24 Après avoir battu militairement les Vendéens,
00:27 la Convention a tout fait pour éradiquer l'âme de cette résistance
00:31 par les pires massacres, les destructions et les blasphèmes.
00:34 C'est cet épisode que nous évoquons aujourd'hui à l'occasion de la sortie du film "Vaincre ou mourir"
00:39 qui retrace l'histoire du général Charette,
00:42 pour essayer surtout de comprendre comment un peuple de paysans a pu se révolter.
00:46 Était-ce une question de foi, voire une guerre de religion ?
00:50 On en parle aujourd'hui avec Philippe de Villiers, ancien ministre et fondateur du Puy-du-Fou,
00:55 avec également Philippe Pichot-Bravard, docteur en histoire et spécialiste de la Révolution,
01:00 avec également, bien sûr, Véronique Jacquier,
01:03 pour cette émission qui est en partenariat avec l'hebdomadaire France Catholique.
01:06 Tout de suite les infos, Éloi Rochebrune.
01:09 Bonjour Éloi, et pour commencer, un nouvel attentat anti-chrétien,
01:24 cette fois en Espagne.
01:27 Oui, bonjour Aymeric, bonjour à tous.
01:28 À la une, cet attentat à la machette en Espagne,
01:31 l'assaillant présumé a tué un sacristain et a grièvement blessé un prêtre
01:35 au cri de "Allah Akbar" d'origine marocaine.
01:38 Il était en instance d'expulsion en raison de sa situation irrégulière depuis le mois de juin.
01:43 Le récit de Jeanne Cancart.
01:46 L'Église pleure dans le sud de l'Espagne.
01:54 L'assaillant est une personne qui a utilisé le nom de Dieu
01:57 et qui a fait tout ce qu'on peut faire de mal dans la vie,
01:59 puisque Dieu est amour et vie.
02:01 Ce qu'il a déversé, c'est de la haine et de la mort.
02:06 Cet homme, un Marocain de 25 ans, en instance d'expulsion,
02:11 a été arrêté par les forces de l'ordre, accusé d'avoir tué mercredi soir un sacristain
02:17 et grièvement blessé un prêtre dans une attaque à la machette.
02:20 Vers 19h, dans la ville d'Algeciras, située à la pointe sud de l'Espagne,
02:25 l'assaillant entre dans l'église de Saint-Isidore
02:28 et attaque le prêtre au cou, le blessant grièvement.
02:31 Il se rend ensuite à pied dans une seconde église à Notre-Dame-de-la-Palme.
02:35 Il s'en prend cette fois au sacristain, qui décède sur place.
02:38 Il s'appelait Diego Valencia.
02:40 Une enquête est actuellement ouverte pour des faits présumés de terrorisme.
02:44 À Paris, ce sont les églises qui sont prises pour cibles.
02:47 Trois édifices ont été attaqués par les flammes en moins de dix jours.
02:51 Un homme de 47 ans d'origine ukrainienne a été interpellé mercredi en début d'après-midi.
02:55 Il est soupçonné d'avoir commis un incendie devant l'église Saint-Laurent le 25 janvier.
03:00 Pour le journaliste Marc Hainaut, auteur d'un essai sur les actes antichrétiens,
03:04 ces incendies s'inscrivent dans un phénomène beaucoup plus large.
03:07 Ce phénomène d'incendie d'église, de tentative d'incendie d'église
03:11 en ce qui concerne ces trois églises parisiennes,
03:13 est un phénomène qui est tout sauf récent.
03:15 En fait, ça fait plusieurs années que des églises brûlent régulièrement.
03:18 Il suffit de se pencher sur l'actualité locale,
03:20 sur les coupures de la presse régionale, sur les rapports de police,
03:22 pour s'apercevoir que c'est un phénomène.
03:24 Alors, en mélangeant tout ce qui est profanation, incendie, en tout cas le hack d'auxil,
03:28 que c'est quasiment quotidien, le patrimoine catholique
03:30 et peut-être tout ce qu'il reste de sacré dans cette société.
03:34 Pourquoi est-ce que ce sont les églises ?
03:36 Pourquoi est-ce que la religion catholique est la plus touchée dans ce pays ?
03:38 Peut-être parce qu'elle touche aussi finalement à l'histoire de France,
03:41 elle touche à ce que nous sommes et d'où nous venons.
03:43 Le diocèse de La Rochelle veut aider à sauver la Vierge de la Flotte en Ré
03:47 après avoir reçu de nombreux messages de citoyens indignés par la décision de justice
03:51 confirmant le déboulonnage de la statue.
03:53 L'évêque de La Rochelle, Mgr Georges Collomb,
03:55 prône une vision plus apaisée de la laïcité chez nos confrères de RCF.
04:00 Il a affirmé "on peut se demander s'il ne faudrait pas en avoir une vision plus apaisée,
04:04 qui tienne compte de la vie des gens, qui respecte l'histoire des habitants".
04:08 Une manifestation a eu lieu hier au pied de la Vierge de la Flotte pour réclamer son maintien.
04:15 Le pape François se rend mercredi prochain en République démocratique du Congo
04:20 pour un séjour de trois jours à Kinshasa, une visite sous le signe de la paix,
04:23 à l'heure où les persécutions contre les chrétiens ne font qu'augmenter le récit de Célia Barotte.
04:30 Dans l'ensemble de la cathédrale Notre-Dame du Congo à Kinshasa,
04:33 les fidèles se pressent devant les étalages.
04:36 T-shirt, casquette, calendrier, chacun prépare à sa manière la venue du pape François.
04:41 "J'ai acheté ce calendrier, je suis heureuse d'avoir l'effigie du pape à la maison,
04:47 c'est une grande bénédiction pour moi et mes enfants".
04:51 Le pape atterrit mardi dans un pays où la menace djihadiste se propage,
04:56 et notamment sur les chrétiens, qui représentent plus de 95% de la population.
05:00 Entre 2021 et 2023, la République démocratique du Congo est passée de la 40e à la 37e place
05:07 dans le classement des 50 pays où les chrétiens sont les plus menacés.
05:11 Les autorités peinent à endiguer la menace des groupes armés rebelles.
05:15 Une étape de la visite du pape dans l'est du pays a d'ailleurs été annulée pour des raisons sécuritaires.
05:21 Alors, pour les catholiques congolais, le souverain pontife doit délivrer un message de paix et d'unité.
05:27 "Compte tenu de la situation du pays, nous osons croire que lui va nous apporter un bon message
05:36 et avec une paix durable".
05:39 Mercredi, le pape célébrera une grande messe à l'aéroport Ndolo.
05:43 Entre 1 et 1,5 million de fidèles sont attendus.
05:47 L'Allemagne a reconnu officiellement le génocide des yézidis par l'État islamique
05:53 qui a organisé un véritable massacre en 2014 lors de sa conquête de l'Irak.
05:58 Poussés à l'exil, les 200 000 survivants en Irak vivent pour la plupart dans des camps de réfugiés.
06:04 Reportage sur place, les images vous sont commentées par Alexis Vallée.
06:08 En 2014, ils ont vécu l'enfer.
06:12 Lorsque les combattants de l'État islamique ont déferlé sur l'Irak,
06:16 ils ont massacré leurs frères, leurs sœurs, leurs enfants.
06:20 La reconstruction est difficile, la reconnaissance du génocide est une première étape.
06:26 "Nous sommes heureux de la décision qui a été prise en Allemagne
06:30 et nous voulons que le monde fasse la même chose afin de ne pas perdre nos droits.
06:34 Nous, les yézidis, nous avons été grandement lésés et nous allons passer une 9ème année ici".
06:41 Pour faire passer le temps, les hommes jouent aux cartes et aux dominos.
06:46 Ils veulent revenir un jour à Sinjar, leur ville d'origine ravagée par la guerre.
06:51 "Nous voulons reconstruire la ville de Sinjar
06:56 et nous permettre de ramener les personnes kidnappées par l'État islamique.
07:00 Nous voulons récupérer les filles yézidis des mains de ces infidèles.
07:04 C'est notre demande et la chose la plus importante à laquelle nous pensons".
07:10 Selon les estimations du Parlement allemand,
07:12 plus de 5 000 yézidis auraient été tués par les combattants de l'État islamique.
07:17 Beaucoup d'hommes ont été forcés à se convertir à l'islam.
07:20 Les femmes, violées et réduites en esclavage.
07:24 C'est la fin de votre journal.
07:25 Emric, c'est à vous pour la suite d'Enquête d'Esprit.
07:28 Merci Eloi.
07:29 L'histoire des guerres de Vendée a-t-elle des résonances jusqu'à nos jours,
07:33 230 ans après l'instauration de la terreur révolutionnaire ?
07:37 On en parle aujourd'hui d'Enquête d'Esprit avec Philippe Devilliers.
07:40 Merci beaucoup d'être avec nous.
07:42 Vous êtes ancien ministre fondateur du Puy du Fou,
07:44 auteur de nombreux livres et notamment d'une biographie de Charette chez Albain Michel.
07:50 Avec nous également Philippe Pichot-Bravard.
07:51 Bonjour.
07:52 Merci également d'être avec nous.
07:53 Vous êtes docteur en histoire, spécialiste de la Révolution et de l'Ancien Régime
07:57 avec un ouvrage notamment sur la Révolution française publié chez Via Romana.
08:02 Et puis bien sûr Véronique Jaquet.
08:03 Bonjour Véronique.
08:04 Bonjour à tous.
08:05 Vous nous parlerez d'un épisode dont l'horreur dit bien
08:08 la répression qui s'est abattue sur la Vendée,
08:10 le massacre dans une église des Lucs sur Boulogne avec au moins 500 morts.
08:15 Depuis deux siècles donc, l'histoire des guerres de Vendée
08:18 est l'objet des plus vives controverses.
08:21 En témoigne notamment récemment les polémiques qui ont accompagné,
08:24 dès sa sortie, le film Vaincre ou mourir, produit par Nicolas Devilliers
08:28 et consacré à la figure de Charette, cette officielle marine
08:31 qui a pris la tête du soulèvement vendéen pendant la Révolution française.
08:35 Alors Philippe Devilliers, au-delà de la polémique, parlons du fond,
08:39 c'est-à-dire essayons de comprendre pourquoi est-ce que les Vendéens
08:41 se sont révoltés par de là la géographie ou les caricatures.
08:45 Que s'est-il passé ? Est-ce que c'est notamment la conscription,
08:47 en mars 1793, la levée en masse des soldats français
08:51 pour contrer les armées étrangères à la Révolution qui a provoqué ce soulèvement ?
08:56 Pour vous répondre, je me tournerai vers la mémorialiste reconnue
09:03 par les historiens des deux bords, madame Delahoze-Jacquin,
09:08 qui a dit ceci, il y a eu l'étincelle et il y a eu la cause.
09:14 L'étincelle, c'est la conscription, la levée en masse,
09:18 le tirage au sort de 300 000 hommes pour aller se battre aux frontières,
09:23 en mars 1793. Mais la cause, c'est la liberté.
09:31 En fait, la Révolution, au nom du peuple, avec un grand P,
09:35 au nom de la liberté avec un grand L, a combattu un petit peuple de Paria
09:43 qui voulait sa liberté. Les Vendéens se sont levés,
09:48 se sont battus, se sont morts pour la liberté de pensée,
09:53 la liberté de conscience, la liberté du culte,
09:55 la liberté de pratiquer une foi ancestrale.
09:59 Et s'ils se sont battus et s'ils se sont morts, c'est parce qu'ils se sont battus
10:04 contre une nouvelle religion, qui était la religion d'un homme sans Dieu,
10:11 d'un homme nouveau, mais pas l'homme nouveau polygien,
10:16 il n'y a ni juif, ni grec, ni homme, ni femme, ni esclave, ni homme libre,
10:21 Saint Paul, mais l'homme nouveau jacobin, c'est-à-dire une égalité sans Dieu.
10:28 Une religion de l'homme sans Dieu, avec trois éléments
10:34 que chacun percevait à l'époque.
10:37 Le premier élément, c'est l'idée de la table rase,
10:41 qui conduit à la désaffiliation.
10:45 Le deuxième élément, c'est l'idée folle du recommencement absolu
10:50 de l'humanité, vous vous rendez compte, Robespierre.
10:53 D'ailleurs, c'est la régénération.
10:58 L'idée qu'un monde puisse se régénérer est une idée biblique corrompue.
11:07 Et enfin, la régénération qui, finalement, conduit à effacer l'ancien monde.
11:18 Et enfin, la dépréterisation avec un clergé d'État
11:23 porté par la constitution civile du clergé.
11:26 En réalité, les Vendéens, on le voit maintenant avec le recul,
11:31 ont sauvé la liberté de conscience, ils ont sauvé l'honneur.
11:36 C'est le mystère des consciences dressées.
11:39 - Justement, parlons de cette constitution civile du clergé,
11:43 Philippe Pichot-Bravard, puisqu'elle est votée en 1790.
11:47 Si on résume, on peut dire qu'elle fait des prêtres,
11:50 des fonctionnaires de l'État, en gros résumé.
11:53 Et le peuple vendéen, de l'autre côté, ne veut pas qu'on lui enlève
11:56 ses bons prêtres, c'est-à-dire les réfractaires à cette constitution.
11:59 Pourtant, de 1790 à 1793, le soulèvement vendéen,
12:03 il se passe trois ans. Comment se fait-il, finalement ?
12:06 Est-ce qu'on peut dire qu'effectivement, c'est une guerre de religion
12:09 qui a mis du temps à émerger ?
12:12 - Alors, la constitution civile du clergé date du 12 juillet 1790
12:18 et elle est aggravée quatre mois plus tard par le décret
12:22 sur le serment des prêtres.
12:24 L'Assemblée s'est parfaitement rendue compte qu'une partie
12:28 de la population ne suivait pas, et notamment,
12:31 beaucoup de prêtres n'adhèrent pas à la Révolution.
12:34 Et ce serment est là pour imposer un acte de soumission
12:41 à ces prêtres. C'est une première violence
12:46 faite aux consciences. Les contraindre à adhérer officiellement
12:51 par un serment à un bouleversement révolutionnaire
12:58 auquel ils ne croient pas. Et tous les prêtres qui refusaient
13:02 de prêter serment, et ce fut le cas de la moitié
13:06 des curés de France, étaient ipso facto écartés
13:12 de l'exercice de leur ministère. Alors, à partir de ce moment-là,
13:15 dès le début de l'année 1791, il y a une résistance spirituelle
13:21 qui s'organise pour protéger ces prêtres.
13:25 Une résistance qui, parfois, est menée par les municipalités
13:28 elles-mêmes, qui protestent. J'ai en tête, notamment,
13:31 la lettre de la municipalité de Meulay, près de Chemillé,
13:36 en Anjou, qui annonce presque naïvement que, oui, ça fait des semaines
13:41 que notre prêtre a dit qu'il ne prêterait pas serment.
13:45 Nous le savons, et on ne vous l'a pas dit parce qu'on craignait
13:49 que vous nous le retiriez, alors qu'il veille sur nous
13:52 depuis 38 ans. Et évidemment, à chaque fois,
13:57 l'administration répond à ces protestations, à ces lettres,
14:02 avec une très grande dureté. Au mois d'octobre 1791,
14:09 l'Assemblée législative a envoyé une mission en Vendée
14:12 pour enquêter sur ce qui se passait. Et au retour,
14:16 François de Neufchâteau, rapporteur, propose un durcissement
14:22 des règles et explique que le serment est vraiment l'acte
14:28 d'adhésion qui est exigé de chaque citoyen, et notamment
14:33 des prêtres en tant que citoyens. Leurs réserves religieuses
14:37 sont balayées d'un revers de main. On ne veut pas les prendre en compte.
14:41 Alors, cette résistance spirituelle, elle a été discrète,
14:45 elle a été simple. D'abord, c'est la participation
14:49 à des messes illégales, discrètement, plus ou moins secrètement,
14:54 parce que quand une messe réunit des centaines, des milliers
14:57 de personnes, il est difficile que ce soit secret.
15:00 Et puis, ce sont ces prêtres, lorsque la persécution s'est aggravée,
15:04 qui ont trouvé refuge dans les familles. Les familles accueillaient
15:09 ces prêtres, les cachaient chez elles, accueillaient la messe
15:15 chez elles, et à partir de 1993, au péril de leur vie.
15:20 Cette résistance toute simple, et puis, au fur et à mesure,
15:25 se multiplient les violences, se multiplient les persécutions
15:29 qui vont entretenir dans la population un ressentiment
15:35 de plus en plus grand.
15:37 - On va y revenir, juste après la pub, Philippe Devilliers,
15:39 juste avant. Est-ce qu'on peut présenter ces guerres de Vendée
15:42 comme une révolte royaliste, voire contre-révolutionnaire,
15:46 c'est-à-dire, finalement, à but politique ?
15:48 Parce que les polémiques d'aujourd'hui, on sent que cette histoire,
15:52 ces blessures ne sont pas refermées, montrent cet affrontement
15:55 entre deux idéologies, finalement.
15:57 - Alors là, vous abordez la question clé. Est-ce que c'est une guerre civile ?
16:03 Est-ce que c'est un crime de guerre ? Ou encore, est-ce que c'est
16:10 un populicide ? C'est l'expression du communiste Gracchus Baboeuf
16:14 qui a fait un livre qui s'appelle "Le système de dépopulation",
16:18 qu'on ne trouve plus en librairie, d'ailleurs, où il dénonce
16:21 ce qui s'est passé en Vendée. Alors moi, ma réponse, elle est simple.
16:24 Raphaël Lemkin, en 1944, et la Convention de Nuremberg,
16:30 qui a jugé les nazis, ont apporté une réponse très claire
16:35 qui a été reprise par William Golnadel dans la préface
16:38 qu'il a faite, magnifique préface au livre de Reynald Seychère
16:43 sur le génocide et le mémoricide vendéens.
16:47 Qu'est-ce que dit la Convention de Nuremberg ?
16:50 Pour qu'il y ait un génocide, il y a trois conditions.
16:55 La première, c'est qu'il y ait une extermination de masse.
17:01 Je dis bien extermination de masse.
17:04 Deuxièmement, deuxième condition, d'un groupe humain
17:08 de type politique, social ou religieux.
17:11 Et troisième condition, à partir d'un plan conçu et contrôlé
17:16 par un État, par une puissance publique.
17:18 Alors regardons la Vendée, c'est très simple.
17:21 Je renvoie les gens qui nous écoutent et qui seraient sceptiques,
17:24 à Internet, on trouve tout. D'ailleurs, Philippe Pichot-Bravard,
17:28 qui était vraiment un grand spécialiste, que je respecte profondément,
17:31 peut attester ce que je vais vous dire maintenant.
17:35 Il y a trois lois et il y a un plan.
17:38 La première loi, c'est le 1er août. Écoutez la gradation.
17:42 Le 1er août, donc ces barères qui montent à la tribune, au lutrin,
17:48 et qui dit "Détruisez la Vendée !"
17:51 Mais derrière cette expression, il y a un dispositif.
17:56 Premièrement, cette loi, elle dicte l'extermination des hommes.
18:02 Ce n'est pas moi qui invente le mot, il est dans la loi.
18:05 La déportation des femmes, des enfants et des vieillards,
18:10 ce n'est pas moi qui invente le mot, il est dans la loi.
18:12 Et enfin, le grand brûlement.
18:15 Il s'agit de brûler, de tout brûler.
18:19 De brûler les récoltes, de brûler les campagnes, les forêts et les maisons.
18:24 Donc, un désert de sable.
18:27 Deuxième loi, la loi du 1er octobre.
18:30 On monte d'un cran, vous allez voir.
18:32 Avec la loi du 1er octobre, il n'y a plus la discrimination entre les femmes,
18:36 les enfants et les vieillards d'un côté, les hommes de l'autre.
18:39 Il faut tout dépopulationner.
18:42 Et quand je suis arrivé aux épaisses, je suis allé aux archives départementales,
18:46 quand j'ai voulu faire le Puy du Fou,
18:48 et j'ai découvert une lettre que je suis prêt à vous lire si on a du temps,
18:53 de deux commissaires, de deux représentants en mission,
18:57 qui se plaignent qu'il y ait des fours dans lesquels on met des hommes et des femmes aux épaisses.
19:02 Et non seulement des blancs, mais aussi des bleus.
19:06 Des femmes bleues.
19:07 Donc, en fait, il n'y a plus de distinction.
19:09 Ça, c'est la deuxième loi.
19:11 Et la troisième loi va encore plus loin.
19:13 Le département de la Vendée est supprimé,
19:15 est remplacé par un autre département qui s'appelle le département Venger.
19:19 Et là, il y a dans cette loi, une nouvelle préconisation.
19:26 Il faut repeupler la Vendée.
19:27 Donc, changer de peuplement.
19:30 En d'autres termes, comme le dit très bien William Golnadel,
19:35 dans cette préface au livre de Renald Seychère,
19:40 qui a été l'homme qui a fait la percée conceptuelle.
19:43 Il l'a payé d'ailleurs, puisqu'il a été viré de l'université.
19:47 Les Vendéens n'ont pas été exterminés pour ce qu'ils ont fait,
19:57 mais pour ce qu'ils étaient.
20:00 Et donc, il y a eu le génocide.
20:03 Et tout à l'heure, on entendait parler du génocide des Yézidis.
20:09 Moi, je suis un petit Yézidi de Vendée, un héritier.
20:13 Et je ne veux pas mourir avant d'avoir tout fait, tout fait, tout fait,
20:17 pour qu'un jour, le prisonnier de la République française,
20:21 qui cherche à unir les mémoires, en parlant de la colonisation,
20:25 en parlant de l'esclavage, peut-être, il pourra avoir une pensée un jour.
20:30 Parce qu'il n'y a jamais eu de sépulture.
20:33 On va en reparler, on marque une courte pause.
20:35 Et on se retrouve sur cette question, effectivement.
20:37 Les guerres de Vendée ont-elles été un génocide ?
20:40 Vous restez avec nous.
20:41 De retour dans "Enquête d'esprit", nous parlons des guerres de Vendée.
20:46 Sont-elles une guerre de religion et surtout un génocide ?
20:50 C'est la question qu'on se pose avec Philippe de Villiers,
20:53 qui est avec nous, le roman de "Charette", notamment,
20:55 chez Albin Michel, avec Philippe Pichot-Bravard,
20:58 l'épopée de la Vendée chez Viaromana, et puis Véronique Jacquier,
21:01 qui nous parlera dans un instant, justement, du massacre
21:04 dans une église des Lucs, sur Boulogne, dans cette émission
21:07 qui est en partenariat, je le rappelle, avec l'hebdomadaire
21:10 France Catholique.
21:11 Alors, Philippe Pichot-Bravard, je commence par vous.
21:14 En 2007, 2012, 2013, il y a eu trois propositions de loi
21:18 destinées à faire reconnaître par la République
21:20 l'existence d'un génocide vendéen de 1793-94.
21:25 Elles n'ont pas abouti.
21:26 Pourquoi est-ce que c'est difficile encore aujourd'hui
21:29 de faire reconnaître l'effet, finalement, en 2023,
21:33 en France ?
21:34 - Alors, pour des raisons politiques, évidemment.
21:37 Et pourtant, comme l'a rappelé Philippe Bévilliers
21:41 il y a quelques instants, les mots sont là.
21:45 Robespierre au Jacobin, le 8 mai 1793,
21:49 "Il faut exterminer tous les rebelles de la Vendée."
21:52 Le terme d'extermination revient très souvent.
21:56 - On va montrer, pendant que vous parlez, ce décret
21:59 de la Convention du 1er octobre 1793,
22:03 qui cite le mot "exterminer", effectivement.
22:05 - Frank Castel, qui a été le bourreau d'Angers
22:09 au cours de l'hiver 94, dit à plusieurs reprises
22:13 "Il faut exterminer cette race abominable,
22:17 ou cette race infernale."
22:18 - Impure.
22:19 - Et là, on voit bien que pour les acteurs
22:25 de l'extermination, les Vendéens étaient
22:30 une catégorie à part.
22:32 Il est considéré comme tel, il y a chez ces acteurs
22:36 une intention génocidaire.
22:38 - Véronique Chacquier.
22:39 - Oui, Philippe Bévilliers, pourquoi n'arrive-t-on pas
22:41 à apaiser les mémoires aujourd'hui ?
22:42 Est-ce que c'est parce que c'est un gros mot,
22:44 ou c'est trop violent de dire que la République
22:46 a du sang sur les mains ?
22:52 - Alors, d'abord, pour vos réponses, je dirais que
22:58 la Vendée a été condamnée deux fois.
23:02 Elle a été condamnée à mourir, à être éradiquée,
23:07 on vient de le dire, et ensuite, elle a été condamnée
23:12 au mémoricide, c'est-à-dire qu'on est encore
23:15 dans le déni.
23:17 - L'ablation de la mémoire.
23:19 - C'est-à-dire le mémoricide, pour reprendre
23:21 l'expression d'André Nadezécher.
23:23 Alors, en fait, ils sont en train de perdre.
23:27 Les Robespierreistes, qui tiennent encore la Sorbonne,
23:32 se réuniront bientôt sous un abri à trottinette.
23:36 Il reste Jean-Clément Martin, l'homme qui nie
23:40 le massacre des Lucs, et qui continue à dire
23:43 que c'est une guerre civile, alors qu'en fait,
23:46 la guerre civile, elle a lieu au début de mars,
23:49 au 1er août, à partir du 1er août, quand il y a
23:52 le plan d'extermination, on n'est plus dans la guerre civile,
23:54 et quand il y a les colonnes infernales de Thuraux,
23:56 à partir de janvier 1794, 12 colonnes de feu
24:00 qui avancent sur la Vendée, on est dans l'extermination,
24:02 on est dans le génocide, on n'est plus dans la guerre civile.
24:05 - Parce que l'insurrection est en quelque sorte matée.
24:07 - Absolument. Alors, en fait, pourquoi je dis
24:12 qu'ils sont en train de perdre ? Les négationnistes,
24:15 ceux qui nient ce qui s'est passé en Vendée.
24:18 Parce qu'il y a des historiens qui se sont levés.
24:21 François Furet, Mona Ozouf, le dictionnaire
24:23 de la Révolution française, c'est un tournant capital.
24:26 Et François Furet dit ceci, "La Vendée a suscité
24:34 une élection de haine qui en fait aujourd'hui
24:38 le monument contraire à la malédiction révolutionnaire."
24:45 Donc, en 1789-73, il y a eu le dictionnaire
24:50 de François Furet et Mona Ozouf.
24:53 Il y a aussi eu tout le travail de Pierre Chaunul,
24:55 le grand historien. Et maintenant, il y a des gens
24:59 qui méditent ce qu'a dit Solzhenitsyn.
25:02 Solzhenitsyn a dit, "Il y a dans toute révolution
25:08 le gène exterminateur de la terreur."
25:13 - Toute révolution est porteuse de violence.
25:16 - Pardon ?
25:17 - Toute révolution est porteuse de violence.
25:19 - Toute révolution est porteuse de violence
25:22 et d'extermination. C'est-à-dire pas simplement
25:24 la violence, il s'agit d'exterminer une population.
25:28 Et en fait, Solzhenitsyn, quand il est venu
25:33 le 25 septembre 1993 pour commémorer le bicentenaire,
25:41 a dit ceci dans son discours des Lucs.
25:45 "C'est ici, en Vendée, qu'a été inventée la matrice
25:51 des terreurs du XXe siècle."
25:54 Deuxièmement, Lénine exhortait ses tueurs,
25:59 "Il nous faut des Vendées", c'est-à-dire des exemples
26:06 de terreurs réussis. Et donc il a ajouté,
26:13 "Ceux qui veulent juger la révolution française
26:16 peuvent le faire à partir de la révolution soviétique,
26:19 de la peste brune et de la peste rouge,
26:22 et de la révolution nazie, qui sont les enfants,
26:26 enfin Robespierre est le père spirituel de Lénine,
26:30 de Pol Pot, de Mao."
26:32 - Il y a un lien entre toutes ces révolutions ?
26:34 - Oui, il y a un lien. Et le lien c'est quoi ?
26:36 C'est de vouloir refaire à chaque fois un homme générique,
26:38 un homme nouveau. Un homme nouveau détaché de toute forme
26:43 de puissance supérieure et de toute forme de valeur supérieure.
26:47 Et c'est la raison pour laquelle la Vendée est en train
26:50 de devenir un archétype, l'archétype de la résistance.
26:55 Soljez Signe a terminé son discours en disant,
26:58 "Les Français seront un jour de plus en plus fiers
27:02 du sacrifice, du courage et de la résistance des Vendéens."
27:06 - On va revenir sur Soljez Signe. Juste avant, Véronique,
27:08 j'aimerais qu'on s'attache à un épisode particulièrement marquant
27:11 de ces guerres de Vendée, qui, je le rappelle, ont fait
27:14 200 000 morts environ, selon les historiens,
27:16 170 000 côté Vendéen et 30 000 côté républicain.
27:20 Cet épisode, c'est le massacre des Lucs sur Boulogne,
27:24 ces colonnes infernales, le 28 février 1794.
27:29 C'est le massacre le plus célèbre qui a fait plus de 500 morts.
27:32 Racontez-nous, Véronique.
27:33 - Oui, un massacre qu'on surnomme "Doradour sur glane Vendéen".
27:36 C'est dire à quel point des atrocités ont été commises.
27:39 564 personnes tuées, torturées, des femmes enceintes et ventrées,
27:44 victimes donc des colonnes infernales des troupes républicaines.
27:48 Parmi les 564 personnes, 127 enfants de moins de 10 ans,
27:53 des villageois qui étaient sans défense,
27:55 la plus jeune victime, un bébé de deux semaines,
27:58 la plus âgée, une femme de 84 ans.
28:01 Pourquoi sans défense ?
28:02 Parce que les hommes en capacité de porter des armes
28:04 avaient rejoint les troupes du chef vendéen Charette
28:08 dans les contrées alentours.
28:09 Donc, ils étaient vraiment sans défense.
28:11 Il n'y a aucune raison valable pour les avoir massacrés.
28:14 Et là, qu'est-ce qui se passe ?
28:15 Ces villageois vont rentrer dans l'église du petit Luc,
28:23 du petit Luc sur Boulogne, bien entendu.
28:25 Ils se réfugient au pied de la Vierge Marie dans cette église,
28:28 évidemment une église qui est trop petite pour contenir plus de 500 personnes.
28:31 Et là, les troupes républicaines arrivent
28:34 et non seulement ils les massacreront à coups de baïonnette,
28:36 mais ils incendieront l'église.
28:38 Et pour être sûrs que plus personne ne sorte de là,
28:42 comme si c'était encore possible,
28:43 ils tirent sur l'édifice à coups de canon.
28:46 Alors, les atrocités ne se sont pas arrêtées là.
28:48 La cruauté suprême pour éviter ce massacre,
28:52 pour tenter d'éviter ce massacre,
28:54 le curé du petit Luc, l'abbé Voineau,
28:57 était allé au devant des militaires pour s'offrir en victime.
29:00 C'était un prêtre réfractaire,
29:01 c'est-à-dire qu'il avait refusé de prêter serment
29:03 sur la constitution civile du clergé,
29:05 donc il savait que sa tête était mise à mort.
29:07 Il savait que lui, il allait y passer,
29:08 mais il s'est dit "je vais m'offrir pour mes oies".
29:10 Et là, cruauté suprême, les "bleus", comme on dit,
29:14 l'attachent à un poteau, lui coupent les doigts,
29:18 parce qu'on coupe les doigts de l'homme qui consacre,
29:20 qui donne les sacrements.
29:22 Donc vraiment, on attaque ce qu'il y a de plus sacré en l'homme.
29:26 On lui coupe la langue,
29:27 parce que c'est la langue qui porte l'évangile,
29:29 et puis on finit par le couper en deux
29:31 et par lui arracher le cœur.
29:32 Voilà donc les atrocités qui ont été commises au Luc sur Bologne.
29:37 Terminons en disant que c'est un autre abbé,
29:39 l'abbé Barbelette,
29:40 qui ensuite est arrivé sur le lieu du massacre,
29:43 qui a enterré toutes les personnes,
29:45 qui a mené une enquête pour que tout cela ne s'oublie pas.
29:49 Et c'est à lui qu'on doit la liste des 564 martyrs
29:52 des Luc sur Bologne,
29:53 que l'on peut voir désormais dans l'édifice,
29:55 dans l'église,
29:56 qui a remplacé évidemment cette chapelle martyr.
29:59 Les faits sont saisissants,
30:00 ils sont historiques,
30:01 Philippe Pichot-Bravard.
30:02 Est-ce qu'il n'y a pas dans ce déferlement de haine
30:04 quand même quelque chose qui échappe
30:06 à la lecture de l'historien
30:08 dans l'application de la terreur en Vendée ?
30:10 Et pourquoi tant de haine ?
30:12 Comment est-ce qu'on peut expliquer ça ?
30:14 Alors je crois que la Vendée est
30:16 la mauvaise conscience de la Révolution.
30:19 La Révolution, comme cela a été rappelé,
30:21 a été faite au nom du peuple.
30:24 Et prétend-on par le peuple ?
30:27 Un peuple abstrait,
30:29 le peuple des militants révolutionnaires ?
30:31 Parce que pour les révolutionnaires,
30:33 le peuple ce sont simplement ceux qui adhèrent à la Révolution.
30:36 Ce n'est pas l'ensemble de la population.
30:37 C'est un mot piégé.
30:39 Et en Vendée, le vrai peuple
30:41 s'est dressé contre la Révolution
30:45 pour défendre sa liberté.
30:48 Et donc les Vendéens révèlent
30:51 l'imposture du discours révolutionnaire.
30:54 Ils révèlent que ces révolutionnaires
30:57 ne peuvent pas compter sur la population.
30:59 Au moment du paroxysme révolutionnaire en 93-94,
31:04 les Jacobins sont très peu nombreux.
31:06 On en a des exemples saisissants
31:08 qui parfois me surprennent moi-même.
31:11 Lorsque Lyon est massacrée au mois d'octobre,
31:18 les pro-consuls qui sont à Lyon
31:20 envoient aux Jacobins une lettre
31:22 pour leur demander 40 militants jacobins
31:24 pour régénérer la ville.
31:26 40 types pour régénérer une ville de 150 000 habitants.
31:30 Et les Jacobins répondent
31:31 "On peut vous en envoyer 4,
31:33 on ne peut pas se dégarnir à ce point."
31:35 C'est dire à quel point ils sont très peu nombreux.
31:38 Je pense que c'est la raison fondamentale
31:42 de cette terreur, qui est une terreur d'Etat.
31:46 Contrairement à ce qui est affirmé par certains,
31:49 il était question tout à l'heure de Jean-Clément Martin,
31:52 le gouvernement a enterriné tout cela.
31:58 L'extermination de la Vendée
32:00 repose sur des lois votées par la Convention.
32:03 Ce ne sont pas des bavures.
32:04 Ce ne sont pas des bavures.
32:05 Il y a un représentant du comité de salut public,
32:09 Prière de la Marne,
32:10 qui est auprès des armées républicaines
32:13 envoyées en Vendée,
32:14 à partir du 15 novembre,
32:16 et pendant plusieurs mois,
32:19 c'est lui qui a supervisé la mise en place
32:23 des commissions militaires
32:25 qui ont massacré les prisonniers à Antrin,
32:27 au Mans, à Angers, à Savenay, à Noirmoutier.
32:31 Il s'éloigne de Nantes en janvier, février.
32:35 Il y revient quand Carrier retourne à Paris.
32:39 Il est en Vendée, à Montaigu,
32:41 à la fin du mois de février,
32:43 quelques jours avant le massacre des Lucs.
32:46 Je peux ajouter, M. le professeur,
32:49 un mot sous votre contrôle.
32:51 Je vous pose la question suivante.
32:52 Moi, j'ai retrouvé les archives
32:55 sur Thurot et sur Carrier.
32:59 Thurot écrit à la Convention
33:02 pour demander confirmation du plan d'extermination.
33:07 Donc, en janvier, février 1794.
33:12 Il se plaint de ne pas avoir de réponse.
33:15 Et il a une réponse un peu plus tard
33:18 qui lui dit de faire son travail
33:20 et il sera jugé sur le résultat.
33:23 Et quand Carrier va passer devant un tribunal,
33:30 ensuite termidorien,
33:33 parce que les termidoriens vont essayer de dire
33:36 "C'est pas nous, on n'était pas concernés".
33:38 - On calme le jeu.
33:39 - Et vous savez ce que dit Carrier ?
33:41 Carrier qui avait dit
33:42 "Je veux purger la terre de la liberté de ces monstres".
33:46 Bon, Carrier qui a fait les noyades de Nantes.
33:48 Il mettait les gens dans des bateaux,
33:50 il mettait la soupape,
33:51 bon, on connaît cette histoire.
33:53 Et là il dit "Si je suis coupable, monsieur le président,
33:56 alors tout est coupable ici jusqu'à la sonnette du président".
34:00 En d'autres termes, on ne peut pas s'en tirer
34:03 en disant "C'est des bavures".
34:05 C'est impossible.
34:06 Historiquement, ce n'est pas possible.
34:07 Mais il y a un point-clé dans tout ça.
34:10 Pourquoi c'est fascinant cette histoire de Vendée ?
34:13 Parce qu'il y a le pardon.
34:17 C'est une révolte chrétienne.
34:20 Le vendéen pardonne.
34:22 - On va revenir sur le pardon.
34:24 - Pardon de bon champ.
34:25 - Dans un instant.
34:26 - J'ajouterais à propos de Carrier
34:27 que lorsqu'il revient à Paris le 16 février,
34:29 il se présente à la convention,
34:31 il va au Jacobin.
34:33 Les Jacobins s'épuraient eux-mêmes.
34:35 Il passe le scrutin épuratoire, il est maintenu.
34:38 Ses amis Hébertistes, parce qu'il était prof des Hébertistes,
34:41 sont éliminés le mois suivant.
34:43 Il ne fait pas partie de la fournée,
34:45 il est maintenu au Jacobin.
34:47 - Je vous propose, avant de revenir sur le pardon,
34:50 de regarder ce reportage.
34:52 On va à Saint-Laurent-sur-Sèvres,
34:54 parce que c'est le poumon spirituel de la Vendée.
34:56 C'est là qu'un homme est enterré,
34:58 Saint Louis-Marie Grignon de Montfort,
35:00 qui a évangélisé la Vendée un siècle plus tôt.
35:03 On y revient.
35:05 - Louis-Marie Grignon de Montfort
35:08 était un drôle de paroissien.
35:10 Il avait trouvé le moyen de se faire haïr
35:12 par le clergé de Louis XIV,
35:14 car il organisait d'énormes feux
35:16 dans lesquels il faisait jeter les livres de sorcellerie.
35:19 Une personnalité colérique qu'il reconnaissait lui-même.
35:23 - Il avait comme devise "Dieu seul",
35:25 et il prêchait.
35:27 Il prêchait de la mission,
35:29 c'est-à-dire qu'il allait de village en village,
35:31 de bourg en bourg, pour prêcher, prêcher l'évangile.
35:33 - Un prêtre violent, mais qui partageait ses habits
35:35 avec les pauvres, par exemple.
35:37 Il a même dormi dehors, sous un escalier, à Paris,
35:40 avant de venir évangéliser la Bretagne,
35:42 Poitiers, la Rochelle, l'Ile-Dieu et la Vendée du continent.
35:45 Madame de Montespan, la maîtresse de Louis XIV,
35:48 et surtout le pape Clément XI, l'envoient sur les routes.
35:52 - On ne veut pas qu'il aille au Canada,
35:54 il va demander au pape "Où est-ce que je peux aller ?"
35:56 Chose curieuse, le pape lui dit carrément
35:59 "Retournez dans l'ouest de la France, d'où vous venez,
36:03 soyez soumis aux évêques",
36:06 chose qui n'était pas dans sa nature,
36:09 "soyez soumis aux évêques et faites renouveler les promesses du baptême".
36:15 Sa spiritualité, c'est bien sûr la Vierge Marie.
36:18 - Né à Montfort-sur-Meux, près de Rennes,
36:20 Saint Louis-Marie Grignon de Montfort est enterré
36:23 dans la basilique vendéenne de Saint Laurent-sur-Sèvres
36:25 depuis trois siècles.
36:27 En 1996, le pape Jean-Paul II était venu se recueillir
36:31 sur le tombeau de ce prêtre, connu dans le monde entier
36:34 grâce aux trois congrégations qu'il avait créées.
36:38 - Philippe de Villiers, il a cette phrase, cette devise vendéenne
36:41 "Le pardon n'est pas l'oubli", qui est encore cour aujourd'hui.
36:45 Et finalement, c'est ça, vous aviez commencé à en parler,
36:49 qui explique que la Vendée se soit relevée
36:51 après ces guerres révolutionnaires, après ces exterminations.
36:54 - Oui, c'est la même expression qu'au Yad Vashem.
36:58 Quand je suis allé visiter le Yad Vashem,
37:01 j'ai vu la phrase "Le pardon n'est pas l'oubli".
37:05 Et tout est dit, parce que l'oubli, c'est le ressentiment
37:08 où vient se loger la rancœur, c'est le pardon qui dénoue.
37:12 Et en fait, les Vendéens, au pire moment de la bataille,
37:17 quand ils sont défaits à Cholet, le 17 octobre 1793,
37:22 vont oublier à leur chef, Bonchamps, qui est sur un brancard,
37:25 qui est en train de mourir, et qui lève le bras, qui dit
37:27 "Grâce aux prisonniers, grâce aux prisonniers", trois fois.
37:30 Et les Vendéens vont s'agenouiller et vont libérer les prisonniers,
37:33 ce qui est une folie sur le plan militaire.
37:35 On voit cette sculpture de David d'Angers à l'écran actuellement.
37:38 Exactement.
37:39 Elle a été reproduite un siècle plus tard.
37:41 David d'Angers, c'est un grand sculpteur,
37:44 qui est le fils d'un bleu qui a été libéré par Bonchamps.
37:49 Et en fait, c'est ce qu'a façonné Sojé Hétzine,
37:53 cette culture du pardon, cette alchimie du sentiment
37:57 qui convertit le mal en nouvelle chance.
38:00 Sans le pardon, il n'y a pas de société possible.
38:02 C'est le génie du christianisme, le tamis du pardon,
38:06 qui permet justement d'évacuer, d'oublier.
38:09 Et les Vendéens ont pardonné.
38:12 Et alors le paradoxe extraordinaire, c'est qu'aujourd'hui,
38:16 beaucoup de gens disent "la Vendée, incroyable, le département, il y a le miracle".
38:19 Le miracle Vendéen, développement économique.
38:21 Le miracle économique Vendéen.
38:22 Et pour moi, le miracle économique Vendéen, il recèle dans le pardon.
38:29 C'est-à-dire que beaucoup de peuples qui ont souffert,
38:34 ont gardé dans leur cœur meurtri,
38:39 à partir de cette souffrance, en cultivant cette souffrance,
38:43 une pointe d'amertume qui les éloigne de la création,
38:49 de la recréation, de la nouvelle vie.
38:54 Parce qu'après tout, il faut revivre.
38:56 Pas du tout en Vendée.
38:58 En Vendée, au 19e siècle et au 20e siècle,
39:01 vous avez un renouveau spirituel incroyable,
39:04 avec le premier séminaire créé en France par le père Louis-Marie Baudouin,
39:09 salué d'ailleurs par Napoléon lorsqu'il vient le 8 août 1808
39:13 et qui traverse la Vendée.
39:15 Il salue ce prêtre qui était en exil à Tolède,
39:18 avec 70 prêtres vendéens pour échapper à la guillotine,
39:21 qui revient et son premier geste, c'est de créer un séminaire.
39:24 Renouveau patriotique, puisque les petits Vendéens,
39:28 il y a 25 000 Vendéens qui vont mourir dans la tranchée des Baïonnettes en 1914,
39:31 enveloppés dans le drapeau de Tricolore,
39:33 donc il ne faut pas nous faire le coup, les Vendéens, la sécession, etc.
39:37 C'est les premiers à mourir pour la France,
39:40 parmi les épimurs et les blémoissonnés.
39:43 Et puis la Vendée donne au 20e siècle deux vainqueurs de guerre mondiale,
39:47 Clémenceau et Delattre quand même, c'est pas mal.
39:49 Donc en fait, la Vendée, elle a pardonné, elle a sublimé.
39:52 Et si vous faites, j'ai fait un exercice un jour,
39:56 quand j'étais président du Conseil général,
39:58 j'ai mis un papier beurre sur la carte des grands massacres,
40:02 et sur le papier beurre, il y avait la carte des grandes réussites économiques,
40:06 ces raccords.
40:07 Ça se superpose.
40:08 Et ça veut dire quoi ?
40:09 Ça veut dire que les Vendéens ont fait de leur souffrance,
40:13 non pas une occasion d'amertume, mais l'occasion d'une sublimation.
40:20 Il nous reste quelques minutes, malheureusement, Philippe Pichot-Bravard,
40:23 il y a cette phrase aussi de Charrette, justement, du général Charrette,
40:27 à qui on demande finalement tant d'héroïsme perdu,
40:30 et qui répond "Rien ne se perd jamais".
40:31 Est-ce que l'historien que vous êtes confirme également
40:36 que cet héroïsme n'a pas été perdu ?
40:38 Il n'a pas été perdu parce que la résistance vendéenne,
40:43 si elle se termine par une défaite militaire à 1796,
40:47 c'est une défaite militaire.
40:49 Et puis en 1799, il y a un retour de flamme,
40:52 mais les Vendéens et les Chouans se sont fait couper l'herbe sous le pied
40:58 par Bonaparte.
41:00 Et pourtant, il y a eu le concordat, qui n'est pas un bon texte,
41:06 il faut le dire, qui place l'Église...
41:08 Donc le concordat entre le Saint-Siège, donc le pape, et Napoléon,
41:12 qui rétablit la liberté de religion.
41:14 Mais ce concordat, malgré tout, rétablit la liberté sacerdotale,
41:18 la liberté sacramentelle, et ça c'est considérable.
41:21 Et vous l'attribuez à la révolte vendéenne.
41:23 Et il n'y aurait pas eu de concordat s'il n'y avait pas eu la révolte vendéenne.
41:27 On prête même à Napoléon cette parole,
41:30 "Je me suis fait catholique pour mettre fin à la guerre de Vendée".
41:33 C'est dire à quel point la guerre de Vendée a été importante
41:36 dans sa réflexion.
41:38 Et il dit aussi "je me suis fait musulman pour conquérir l'Égypte", etc.
41:42 Tout cela montre qu'il était très relativiste.
41:44 La Vendée était pour lui importante,
41:49 il en avait noté l'importance,
41:53 et il avait de l'admiration pour le courage des Vendéens.
41:56 Dernier mot de conclusion, Philippe de Villiers ?
41:59 Il a même dit "c'est une terre de géants".
42:02 Et il avait refusé de venir.
42:04 La Convention voulait l'envoyer pour réprimer la Vendée,
42:07 il avait refusé, il dit "je ne veux pas participer à une guerre civile".
42:11 Et Napoléon est venu en Vendée dans une visite réparatrice.
42:15 Il a plein de défauts par ailleurs.
42:17 Mais sur la Vendée, il a compris,
42:20 il a été un des rares hommes politiques depuis deux siècles.
42:23 On attend les autres.
42:24 La conclusion est pour vous, Philippe de Villiers,
42:26 est-ce que la Vendée a encore quelque chose à nous dire aujourd'hui,
42:29 230 ans après ces événements dont on vient de parler ?
42:32 Oui, parce que les adversaires de la Vendée,
42:35 ceux qui nient les négationnistes,
42:38 ont fait de la Vendée un archétype de la résistance.
42:41 C'est ça qui est en train de se produire avec ce film magnifique...
42:45 "Vaincre ou mourir" sur les écrans actuellement.
42:49 Ce film a cette vertu de faire sortir le loup du bois.
42:55 Mais le loup est blessé, il n'est plus pareil.
42:59 Il y a un article dans Libération.
43:00 Le loup est tout pelé.
43:02 Un archétype de résistance, ça veut dire quoi ?
43:06 Ça veut dire qu'en fait, on trouve dans la Vendée,
43:08 dans la révolte vendéenne, dans le soulèvement vendéen,
43:10 dans sa pureté même, des valeurs fondatrices de notre civilisation.
43:16 Le pardon, qui est au cœur de la geste vendéenne.
43:20 Le panache, cette élégance française qui permet de toiser l'adversité.
43:26 Et puis surtout, je dirais, l'esprit de tradition,
43:30 le sens des sacralités d'incarnation
43:33 qui vous éloigne de la table rase de l'homme générique
43:39 et de la fabrique de sable, la fabrique de l'homme de sable.
43:43 Et donc en fait, la Vendée, c'est au fond,
43:47 c'est le feu qui permet en soi d'éteindre toute tentation de la désaffiliation.
43:57 Quand on voit aujourd'hui la tonaille dans laquelle on est prise,
44:03 le mouvement woke qui cherche à déciviliser
44:08 et le mouvement islamiste qui cherche à reciviliser
44:12 les deux mouvements qui s'entendent dans l'intersectionnalité,
44:15 nous sommes tous des Vendéens.
44:17 Une province de l'esprit, c'est aussi une expression que vous avez employée.
44:20 Merci infiniment. Merci Philippe Devilliers.
44:22 Merci Philippe Pichot-Bravard.
44:24 Véronique Jacquelle, un dernier mot sur le thème de l'hebdomadaire France catholique cette semaine.
44:29 France catholique s'emploie à décrypter l'esprit de Résistance Vendée 1
44:35 avec l'accroche actue de ce film "Vaincre ou mourir" qui est sur grand écran.
44:40 Et puis il y a des sujets qui n'ont pas été évoqués dans l'émission.
44:42 Je vous renvoie notamment aux dernières heures d'un roi très chrétien, Louis XVI,
44:46 où on apprend vraiment par le menu comment sa montée à l'échafaud a été un chemin de croix.
44:50 Merci beaucoup. Merci à vous d'avoir suivi cette émission.
44:53 Rendez-vous la semaine prochaine pour les belles figures de l'histoire, samedi à 11h.
44:56 Et puis dimanche prochain, nous parlerons de la providence divine, est-elle à l'œuvre dans l'histoire ?
45:01 L'info continue sur CNews.
45:03 Je vous dis à la prochaine.