L'Orchestre philharmonique de Radio France joue, sous la direction de Mikko Franck, Don Juan, poème symphonique composé par Richard Strauss en 1888-89. Extrait du concert donné le 17 juin 2022 à l'Auditorium de la Maison de la Radio et de la Musique.
En octobre 1885, Richard Strauss devient l’assistant du chef d’orchestre Hans von Bülow à Meiningen. S’il n’occupe ce poste que six mois, c’est pourtant durant cette période qu’il change d’orientation esthétique : jusqu’alors admirateur de Brahms, il rallie le camp de la « Nouvelle école allemande » incarnée par Liszt et Wagner, et se lance bientôt dans la composition d’œuvres à programme. Aus Italien (1886) et Macbeth (1887-1888, révisé en 1891) lui servent de galop d’essai. En 1889, Don Juan s’impose comme son premier accomplissement dans le domaine du poème symphonique.
Strauss ne s’inspire pas de la pièce de Tirso de Molina, ni de celle de Molière, pas plus du poème inachevé de Byron. Son Don Juan, c’est celui Nikolaus Lenau, auteur en 1844 d’un poème dramatique resté lui aussi inachevé. En quête du plaisir charnel dont il espère ne jamais épuiser la jouissance, le séducteur est toutefois capable d’amour véritable, comme de repentir. « Comme chaque beauté est unique en ce monde, tel est aussi l’amour qui s’y complaît. En route et partons pour des victoires toujours nouvelles, tant que palpiteront les ardentes pulsations de ma jeunesse ! », s’exalte le héros de Lenau (ici dans la traduction de Walter Thomas).
Ces lignes font partie des trois extraits que Strauss cite au début de sa partition. Mais Don Juan finit par éprouver la satiété qu’il redoutait, et se laisse donc tuer par le fils du Commandeur. « Peut-être un éclair, venu de hauteurs que j’ai dédaignées, a-t-il mortellement atteint ma puissance d’amour, et pour moi subitement le monde devenu désert s’est couvert de ténèbres. Peut-être aussi que non... la matière inflammable est consumée, et le foyer devient froid et sombre. » Strauss choisit de refermer son épigraphe sur ces lignes.
Bien qu’il n’ait pas cherché à transposer toutes les étapes de l’intrigue, il en évoque la trajectoire générale. Bravaches et conquérants, les motifs associés au personnage de Don Juan s’élancent sur des motifs ascendants et cravachent d’impétueux rythmes pointés. L’évocation des scènes de séduction motive des épisodes au lyrisme ardent, tandis que le hautbois candide et cantabile incarne l’une des futures victimes du héros. Une accalmie accompagnée de couleurs plus sombres, d’harmonies indécises, interrompt une première fois la frénésie hédoniste du chevalier. Don Juan se relève vaillamment, mais un léger alanguissement trahit l’irruption du doute, confirmée par une seconde rupture, brutale. Le matériau se dissout dans une atmosphère mystérieuse et funèbre, tandis que le séducteur exhale son dernier souffle.
En octobre 1885, Richard Strauss devient l’assistant du chef d’orchestre Hans von Bülow à Meiningen. S’il n’occupe ce poste que six mois, c’est pourtant durant cette période qu’il change d’orientation esthétique : jusqu’alors admirateur de Brahms, il rallie le camp de la « Nouvelle école allemande » incarnée par Liszt et Wagner, et se lance bientôt dans la composition d’œuvres à programme. Aus Italien (1886) et Macbeth (1887-1888, révisé en 1891) lui servent de galop d’essai. En 1889, Don Juan s’impose comme son premier accomplissement dans le domaine du poème symphonique.
Strauss ne s’inspire pas de la pièce de Tirso de Molina, ni de celle de Molière, pas plus du poème inachevé de Byron. Son Don Juan, c’est celui Nikolaus Lenau, auteur en 1844 d’un poème dramatique resté lui aussi inachevé. En quête du plaisir charnel dont il espère ne jamais épuiser la jouissance, le séducteur est toutefois capable d’amour véritable, comme de repentir. « Comme chaque beauté est unique en ce monde, tel est aussi l’amour qui s’y complaît. En route et partons pour des victoires toujours nouvelles, tant que palpiteront les ardentes pulsations de ma jeunesse ! », s’exalte le héros de Lenau (ici dans la traduction de Walter Thomas).
Ces lignes font partie des trois extraits que Strauss cite au début de sa partition. Mais Don Juan finit par éprouver la satiété qu’il redoutait, et se laisse donc tuer par le fils du Commandeur. « Peut-être un éclair, venu de hauteurs que j’ai dédaignées, a-t-il mortellement atteint ma puissance d’amour, et pour moi subitement le monde devenu désert s’est couvert de ténèbres. Peut-être aussi que non... la matière inflammable est consumée, et le foyer devient froid et sombre. » Strauss choisit de refermer son épigraphe sur ces lignes.
Bien qu’il n’ait pas cherché à transposer toutes les étapes de l’intrigue, il en évoque la trajectoire générale. Bravaches et conquérants, les motifs associés au personnage de Don Juan s’élancent sur des motifs ascendants et cravachent d’impétueux rythmes pointés. L’évocation des scènes de séduction motive des épisodes au lyrisme ardent, tandis que le hautbois candide et cantabile incarne l’une des futures victimes du héros. Une accalmie accompagnée de couleurs plus sombres, d’harmonies indécises, interrompt une première fois la frénésie hédoniste du chevalier. Don Juan se relève vaillamment, mais un léger alanguissement trahit l’irruption du doute, confirmée par une seconde rupture, brutale. Le matériau se dissout dans une atmosphère mystérieuse et funèbre, tandis que le séducteur exhale son dernier souffle.
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