Témoignage n°4, lu par Audrey Looten

  • il y a 9 ans
Attention ce témoignage parle de violences sexuelles, il peut heurter la sensibilité de certains spectateurs.

Lectrice :
Audrey Looten

Réalisation : Catherine Zavlav et Cécile Nicouleaud
Image : Vincent Tulli
Assistante mise en scène : Sandra Moreno
Montage : Louis Beaugé de La Roque
Musique : Malik Ati
Mixage : VTP
Maquillage Marine Girondeau
Photos : Jérôme Godgrand
Régie : Tanya Artioli
Infographie : Christine Bruneteau

texte du témoignage :

Témoignage n°4, lu par Audrey Looten

"J’avais treize ans quand je suis parti à l’Ecole en bateau. Partir loin, sur un bateau, pour moi c’était vraiment l’aventure. J’en avais tellement rêvé, je voulais tellement y aller, maintenant que j’y étais, je ne pouvais plus reculer. Sur le bateau, on était une quinzaine d’enfants avec deux adultes, Léo et Bernard.
Léo, c’était le capitaine, c’était notre gourou .Il remplaçait mon père, je voulais qu’il m’aime comme un père aime son enfant.

Toutes les semaines, et à certaines périodes, tous les jours, on faisait une réunion où on devait tous se critiquer les uns les autres, dire tout ce qui n’allait pas chez nos petits copains.
Ça nous mettait une pression terrible. On était coupés de nos parents, de nos amis. On avait tous tellement besoin d’être aimés, qu’on était prêt à tout pour se faire accepter. Pour que Léo nous prenne sous sa protection, pour qu’il nous laisse tranquille pendant ces foutues réunions…

La première fois, pour moi, ça s’est passé en Grèce. Le bateau était au mouillage. Avec Léo, on a pris la barque pour rejoindre la terre ferme. On était tout nu, pour faire « comme les grecs anciens », comme il disait, pour faire du sport. A un moment, on s’est arrêtés. Il m’a dit de regarder quelque chose à l’horizon. Il s’est mis derrière moi, et il a commencé à me caresser… de partout. Sa main est venue sur mon sexe. J’étais pétrifié, je n’ai pas bougé. Il se frottait à moi par derrière, je sentais son sexe se durcir. Il s’est frotté contre mes fesses… et il a essayé de me pénétrer.
Je ne sais pas pourquoi, ce jour-là, il n’est pas allé plus loin.

Beaucoup d’autres enfants n’ont pas eu cette chance. Comme Benoit, qui est resté sur le bateau de 9 ans à 14 ans, l’un de ses « favoris », abusé par Léo pendant cinq longues années.
Quand je suis revenu de l’Ecole en bateau, je n’ai rien dit. Pendant plus de vingt ans, je n’ai rien dit, parce que c’était impossible de parler. Je n’arrivais pas à mettre des mots sur ce qui m’était arrivé. Jusqu’à ce que nous soyons plusieurs à décider de porter plainte. Pendant toutes ces années, Léo a continué de profiter d’autres enfants.
Si j’avais parlé avant, ces enfants auraient été épargnés. Aujourd’hui encore, je me sens coupable de ne pas avoir parlé. Je porterai cette culpabilité au fond de moi, toute ma vie… "

Recommandée