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00:00Tout d'abord, effectivement, le pape François, cette procession magnifique ce matin,
00:05ces cardinaux vêtus de leur soutane rouge accompagnant la dépouille du pape
00:08depuis la chapelle de sa résidence Sainte-Marthe à la basilique Saint-Pierre-de-Rome,
00:13entouré des gardes suisses au son des cloches de Saint-Pierre sonnant le glas.
00:19Je m'adresse au philosophe Nathan Devers.
00:22Nathan, en quoi ces rites funéraires sont-ils aussi importants ?
00:27Je crois qu'ils sont extrêmement importants dans la mesure où, en Occident,
00:32dans l'Occident moderne qui est le nôtre, on a parfois un rapport assez complexe,
00:38mêlé de fascination, mais surtout de distance, de volonté de cacher, de volonté d'effacer,
00:43un rapport comme ça complexé à la mort.
00:46Et ce qu'il y a d'assez incroyable dans le spectacle, je dis le mot sans profanation,
00:51mais dans la vision de la vieillesse des papes de façon générale,
00:54c'est qu'à l'exception de Benoît XVI, ils assument, ils incarnent les faiblesses qui sont les leurs,
01:02la maladie qui les ronge peu à peu, et surtout leur vaillance devant la mort.
01:07Alors c'était le cas avec l'agonie extrêmement lente, semaine après semaine, de Jean-Paul II,
01:12c'était le cas de façon plus rapide avec le pape François.
01:15Chez le pape François, nous avons vu quoi ?
01:17Nous avons vu un homme qui, jusqu'au dernier jour de sa vie, a demandé à la médecine de ne pas l'empêcher de rester fidèle à sa mission.
01:26Et quand il a décidé, qu'il a ordonné à son infirmier d'aller se présenter au balcon de Saint-Pierre à la veille de sa mort,
01:33de faire ce bain de foule, de bénir le peuple, de bénir les chrétiens du monde entier,
01:37de livrer aussi un message politique, même s'il ne l'a pas lu avec sa voix, son corps le portait,
01:43et qu'on voyait le spectacle de sa maladie, il y avait quelque chose d'extrêmement fort.
01:48Et là, dans cette cérémonie funéraire, le fait que les papes soient, avant d'être inhumés,
01:55que leur corps soit montré, et que les gens puissent se recueillir devant,
01:59évidemment qu'il y a quelque chose, surtout en ces temps de Pâques,
02:02qui rejoue la passion du Christ de façon métaphorique.
02:06Et c'est pour ça, je crois, qu'il y a dans ces cérémonies,
02:09non seulement une beauté qui est évidente, mais un sens de la transcendance,
02:12et même si on est agnostique, on peut admirer ce sens-là.
02:16Jules Torres ?
02:17Bon, pas forcément avec les mêmes mots que l'entend de l'air,
02:20vous savez, j'ai l'habitude de tous les mercredis comme ça.
02:23Non, mais ce qui est intéressant, moi je trouve, dans cette mort,
02:26c'est que jusqu'au bout, ce sera sans doute la plus belle des morts d'un pape.
02:30En tout cas, moi, j'en ai pas connu 24, j'en ai connu 3,
02:34et encore, Jean-Paul II, j'étais très petit, et Nathan aussi d'ailleurs.
02:39Merci pour moi.
02:40C'est pas pour vous d'ailleurs.
02:42J'étais petite aussi.
02:44Mais ce qu'on peut dire, c'est que, bon, déjà,
02:48cette mort dans un lundi de Pâques,
02:51je pense que même lui ne l'avait pas espéré.
02:54Même lui n'y pensait pas, et Nathan a parlé...
02:56Vous pensez, parce que moi, ça a été ma...
02:57Pardonnez-moi de vous couper, mon cher Jules,
02:59mais ça a été ma première réflexion lundi.
03:03On disait, les mourants choisissent souvent l'heure de leur mort.
03:05Ce que je veux dire, c'est qu'il n'aurait jamais parié,
03:08tout au long de ses 88 ans,
03:09sur le fait de mourir un lundi de Pâques.
03:11Et moi, je pense, un petit peu comme vous, chère Stéphanie,
03:13qu'après avoir fait ce dernier bain de foule,
03:17où justement, c'est son infirmier,
03:18qui lui dit, mais vous êtes en état,
03:22vous pouvez y aller.
03:24Et les derniers mots qui ont été rapportés
03:26par justement l'infirmier Massimilienio Strapetti,
03:30de mémoire,
03:31et bien, rapportés au Vatican News,
03:34c'est, merci de m'avoir offert
03:37ce dernier bain de foule sur cette place.
03:40Et en réalité, c'est la raison pour laquelle,
03:42je pense que le pape François,
03:43comme vous l'avez dit,
03:44il s'est abandonné à la mort.
03:45Et il a décidé de mourir en ce lundi de Pâques.
03:48Et c'est là où c'est évidemment beau,
03:51puisque Benoît XVI, un petit peu plus tôt,
03:54avait décidé d'abdiquer.
03:55Il est mort quelques années plus tard,
03:57même huit années plus tard.
03:59Et c'est en ça que cette mort est belle
04:02et que tout ce qui va suivre est beau.
04:04Certes, il y a des critiques
04:06qui ont été émises contre le pape François,
04:08mais ce qu'on ne peut pas lui reprocher,
04:09c'est d'avoir incarné cette fonction de pape
04:13qui est un chef d'État,
04:14qui est un chef religieux,
04:15mais qui est aussi, et avant tout,
04:16un guide moral, un guide moral
04:17pour 1,5 milliard de personnes.
04:22Et on voit,
04:24on l'a vu dimanche,
04:26ce bain de foule à la place Saint-Pierre.
04:28On le voit, la sonalité et la gravité
04:29qu'il y a dans le monde entier.
04:32Il n'y a pas qu'à Rome
04:34que les chrétiens et les non-chrétiens
04:36sont touchés.
04:36Et je pense que c'est ce qu'on retiendra aussi
04:39du pape François,
04:40c'est une mort et une des plus belles morts
04:42qui m'est en tout cas été donnée
04:44d'apercevoir et de commenter.
04:46Nathan Devers,
04:47vous soulignez à juste titre tout à l'heure
04:49que dans le monde occidental,
04:50on cache la mort.
04:51Or, on voit des dizaines de milliers
04:53de fidèles qui attendent,
04:55qui patientent en ce moment même
04:56sur le parvis de la basilique Saint-Pierre à Rome.
05:01Ils attendent de se recueillir.
05:03C'est important pour faire une forme de deuil
05:06de voir le mort comme ça en face,
05:09de voir la mort en face ?
05:11Ça peut en effet avoir cette importance-là.
05:14Je crois que le problème
05:16quand on essaye de cacher la mort,
05:18quand on essaye de la rendre invisible,
05:20quand on essaye vraiment de faire
05:21comme si elle n'existait pas,
05:23le problème c'est que parfois
05:24elle ressurgit dans la civilisation
05:27de façon désarmante.
05:28Nous l'avons vu pendant la crise du coronavirus.
05:31où nous étions dans nos sociétés
05:33qui n'ont pas connu fort heureusement
05:35touchant du bois de guerre,
05:37en tout cas sur la métropole,
05:38depuis des décennies,
05:39dans nos générations qui ne savent même pas
05:40ce que veut dire par exemple l'idée de guerre,
05:43ce que veut dire le fait
05:43qu'il puisse y avoir des gens
05:44qui massivement meurent tous les jours.
05:46Le moment du coronavirus,
05:48ça a été une sorte de presque
05:49de tsunami métaphorique,
05:51d'irruption, de raz-de-marée de la mort
05:53dans nos sociétés qui ne voulaient plus
05:54en entendent parler.
05:55Et certains n'ont pas pu dire au revoir
05:55surtout à leur proche.
05:56Exactement, bien sûr.
05:57Et je crois qu'il y a quelque chose
05:59de plus sain
06:00à exister,
06:01à faire son métier d'homme,
06:03comme disait Camus,
06:04en sachant dès le début
06:06que nous sommes dans un état de finitude
06:08et en essayant de voir la mort en face.
06:10Alors juste pour raconter
06:11la manière dont moi j'ai vécu
06:13la mort du pape François,
06:14c'était incroyable.
06:15J'étais dans l'émission de Pascal Praud
06:17sur Europe 1 et CNews à la fois
06:18et nous commencions l'émission à 9h
06:21en commentant les images
06:24de la veille du pape à la basilique Saint-Pierre.
06:26Pascal fait son édito
06:27en disant cette phrase incroyable
06:29« Les papes ne se couchent que pour mourir ».
06:31Une demi-heure de débat
06:32où nous voyons ces images
06:34sans nous douter
06:34que c'étaient les images
06:36de quelqu'un à la veille de sa mort
06:37et le débat était à peine fini
06:39que la nouvelle tombe.
06:41Il y a eu quelque chose, je crois,
06:43c'est la grande question,
06:43vous l'avez posé,
06:44de savoir si un individu
06:46n'a pas choisi sa mort
06:47mais en tout cas si la mort d'un individu
06:49ressemble à la vie qu'il a eue.
06:50Je crois que dans le cas du pape François,
06:52ça a été exactement ça.
06:53Il a eu une mort
06:54qui a été jusqu'au dernier moment
06:55à l'image
06:57de la grandeur
06:58qu'il a incarnée.
07:00Jules Thorez,
07:00vous parliez de cette autorité morale,
07:02figure morale et spirituelle
07:03qu'est le pape.
07:05Le parvis est noir de monde,
07:07ça arrive de partout,
07:10c'est important.
07:10Effectivement,
07:11il faut rappeler quand même,
07:12peut-être aux auditeurs
07:13qui l'ignoreraient,
07:14le pape est considéré
07:15par les catholiques
07:16comme le successeur
07:17de Saint-Pierre,
07:18le vicaire du Christ sur Terre.
07:19Le pape est une institution singulière
07:23qui n'a pas d'équivalent
07:24dans le monde.
07:25Je l'ai dit,
07:26c'est l'autorité
07:27de 1,5 milliard chrétiens
07:31et ça n'existe pas
07:32dans les autres religions.
07:34Il n'y a pas de chef religieux
07:36qui dirige,
07:37entre guillemets,
07:38mais qui est une caution morale
07:39et qui incarne une religion
07:40avec autant de fidèles.
07:43Et par ailleurs,
07:44c'est aussi le chef d'un État,
07:46en même temps que cela,
07:48un État qui, certes,
07:50ces dernières années
07:50a perdu un petit peu d'influence
07:53parce que le pape François
07:54n'était pas un grand diplomate,
07:55a perdu de son influence
07:57sur la scène internationale.
07:58Il a voulu peser
07:59sur ce qui se passait
08:00pendant la guerre en Ukraine.
08:02Il a voulu peser
08:03sur les crises au Moyen-Orient.
08:05Il a voulu peser
08:06sur ce qui peut se passer
08:08en Afrique.
08:09Mais c'est quand même
08:11quelqu'un
08:12qui n'a pas d'équivalent.
08:14Donc c'est en cela
08:14que ça heurte aussi
08:16et que ça touche les gens
08:17et ça ne touche pas
08:18que les chrétiens.
08:20Moi, j'ai beaucoup de personnes
08:21qui ne sont pas forcément
08:22catholiques
08:24qui m'ont dit
08:25être touchées
08:25par cette disparition du pape
08:27et je pense que
08:28ça touche tout le monde
08:29puisque c'est quelqu'un
08:30en réalité,
08:31depuis deux jours,
08:32on essaye,
08:32enfin,
08:33certains essayent
08:34de faire un débat politique
08:36et de dire
08:37qu'il est progressiste
08:38ou qu'il est conservateur
08:39ou machin cela.
08:39Il y en a eu de la politique.
08:41On va en parler justement
08:42dans quelques instants
08:42avec cette polémique
08:43des drapeaux en berne
08:44et puis aussi
08:44ce qui se joue en marche
08:46peut-être,
08:46ce qui se jouera en marche
08:47des funérailles samedi.
08:4913h28,
08:50restez avec nous
08:50la suite d'Europe 1 13h.
08:51C'est dans un instant
08:52avec Stéphanie Demuru.
08:53Bon début d'après-midi
08:54sur Europe 1.

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