🇸🇳🇫🇷 "Toute personne qui a été abandonnée ressent en permanence la peur de l'abandon."
Abandonnée par sa mère biologique au lendemain de sa naissance, Lise a été adoptée dès l’âge de trois mois. Des années plus tard, elle ressent le besoin de mieux comprendre ses racines, ce qui la conduit jusqu’au Sénégal, sa terre d’origine. La réalisatrice Gabrielle Niang l'a suivie dans sa quête. Elle en a tiré un documentaire "Née quelque part" à voir sur la plateforme France.tv Slash.
Abandonnée par sa mère biologique au lendemain de sa naissance, Lise a été adoptée dès l’âge de trois mois. Des années plus tard, elle ressent le besoin de mieux comprendre ses racines, ce qui la conduit jusqu’au Sénégal, sa terre d’origine. La réalisatrice Gabrielle Niang l'a suivie dans sa quête. Elle en a tiré un documentaire "Née quelque part" à voir sur la plateforme France.tv Slash.
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00:00Ma génitrice a donné un faux nom de famille et une fausse adresse.
00:03Donc, dès le départ, c'était très compliqué de la trouver.
00:05C'était vraiment une volonté de sa part de ne pas être retrouvée.
00:09Et ça, il fallait que je le respecte aussi.
00:10Elle ne m'a pas abandonnée dans une poubelle.
00:12Elle ne m'a pas abandonnée au bord de la route.
00:14Elle m'a abandonnée dans un hôpital où on a pris soin d'elle, de moi.
00:18Donc, elle a fait les choses...
00:20Elle a essayé de faire les choses au mieux, si tu veux.
00:22Et cette femme, je lui dois la vie déjà, pour commencer.
00:25Et je dois lui dire...
00:27Je dois lui dire merci, j'ai aucune haine, si tu veux, là-dessus.
00:29Bonjour, Brut. Je m'appelle Lise.
00:31Je suis créatrice de contenu, mannequin, mais aussi j'ai mon agence de consulting.
00:34Et aujourd'hui, on va parler de mon adoption et du documentaire N'est Quelque Part.
00:38Alors, je suis née en janvier 91, au Sénégal, à Dakar.
00:43Et j'ai été adoptée à l'âge de 3 mois.
00:44J'ai eu la chance d'être adoptée dans une famille qui était...
00:47Qui est très ouverte et surtout qui communique énormément.
00:49Et donc, dès mon plus jeune âge, mes parents m'ont expliqué mon adoption.
00:52Mais de toute façon, c'était assez facile pour moi de me rendre compte
00:54parce que physiquement, on ne se ressemblait absolument pas.
00:56Et à partir de 8-9 ans, je savais parfaitement d'où je venais.
00:59Où est-ce que j'étais née et quelles avaient été les conséquences de mon abandon.
01:02J'ai été abandonnée le lendemain de ma naissance.
01:04Et suite à ça, l'hôpital a appelé la police.
01:08La police est venue, est allée au domicile que ma mère biologique avait fourni.
01:15Au final, il n'y avait personne et personne de ce nom.
01:17Ma génitrice a donné un faux nom et une fausse adresse.
01:20Et suite à ça, j'ai été placée à la Pouponnière, juste à côté de la Médina,
01:25qui est tenue par des sœurs catholiques.
01:27Toute personne qui a été abandonnée ressent cette peur de l'abandon.
01:32C'est un trauma.
01:33On a beau dire ce qu'on veut, les gens essayent de trouver des mots à chaque fois.
01:36Pour moi, c'est juste un trauma.
01:37À chaque fois, j'ai voulu prouver d'abord aux gens,
01:41après ça a été à moi-même,
01:43mais prouver que je pouvais exister, que j'avais le droit d'exister,
01:46que je pouvais faire des choses.
01:47Le besoin de briller.
01:48Quand je faisais de l'athlétisme, il fallait que j'en fasse à fond.
01:51Il fallait que je performe à fond.
01:53Le besoin à l'extrême de prouver que j'avais ma place.
01:57Après, avec l'âge, ça s'est un petit peu calmé.
02:01J'ai plus eu des séquelles dans mes relations aussi.
02:03C'est plus tard, vers l'âge de 28, 29,
02:06où je me suis vraiment dit que j'aimerais savoir d'où je viens.
02:08Ce serait peut-être important de y retourner.
02:11Il y a pas mal de femmes qui ressentent ce besoin-là,
02:13ce désir-là en tous les cas, ce désir de maternité.
02:16On va dire que c'est à ce moment-là que je me suis dit,
02:18si je donne la vie, à un moment donné, il va falloir que j'explique à mes enfants
02:21d'où je viens, donc d'où ils viennent aussi un petit peu.
02:24Et c'est là que tout a commencé.
02:27On se dit que chaque enfant adopté veut retrouver sa famille biologique,
02:31ce qui n'est pas vrai.
02:32En fait, il faut savoir que chacun a ses raisons, chacun a ses motivations.
02:36Moi, personnellement, je me suis toujours sentie rassurée.
02:41J'ai tellement une famille en or que je me sens faire partie de cette famille.
02:44Donc, je n'avais pas le besoin de retrouver une potentielle autre famille, si tu veux.
02:48En revanche, ce qui était super important pour moi,
02:50c'était ce côté biculturel, c'était vraiment le côté de retrouver
02:54cette partie sénégalaise en moi qui me manquait.
02:56De retourner à la Pouponnière, de retourner à l'hôpital,
02:59d'Abbassène d'Ao, c'est là où je suis née.
03:01Déjà, dans un premier temps, je voulais aller à la rencontre
03:03de la culture sénégalaise, du peuple sénégalais.
03:05Il y avait aussi cette question de mon ethnie, je suis d'origine peule.
03:08Et ça aussi, je voulais en apprendre un petit peu plus sur eux,
03:11sur la langue, sur leur patrimoine.
03:13Ce voyage, il était primordial, il était complètement vital pour moi d'y aller.
03:18J'avais besoin de compléter une partie du puzzle qui manquait.
03:21Et c'était pas qu'une petite partie.
03:23Je me suis sentie, en fait, incomplète toute ma vie.
03:25Pendant mon adolescence, j'y pensais pas trop, si tu veux.
03:29Mais à un moment donné, c'était devenu complètement nécessaire pour moi d'y retourner.
03:34Ce documentaire est venu grâce à l'idée d'une personne.
03:37Et ensuite, c'est une équipe qui s'y est attelée.
03:39Je pense que sans cette équipe, je ne sais pas si je serais allée jusqu'au bout.
03:42Parce que c'est fort.
03:43C'est difficile de pousser les portes de ton passé
03:47et de te dire, peu importe ce que je vais y trouver, ce qu'on va me dire,
03:51il va falloir que j'y fasse face après.
03:53Avant le départ au Sénégal, c'est très simple, j'étais complètement terrorisée.
03:57Il y a même un moment donné, je me suis dit, mais en fait, pourquoi je fais ça ?
04:00Au moment où je pose les pieds à Dakar, déjà, c'est indescriptible.
04:03J'ai ressenti, en fait, une odeur quand tu arrives.
04:06Ces odeurs-là, cette vibe-là, je la reconnaissais.
04:09C'était très particulier, du coup, comme sensation.
04:14Et après, si tu veux, je me suis sentie toute petite.
04:18Je regardais tout ce qui se passait autour de moi.
04:20J'écoutais les gens, je regardais comment ils étaient habillés.
04:23Je me sens beaucoup plus complète, plus alignée.
04:25J'ai l'impression de ne plus me mentir, en fait.
04:28Avant, je disais, oui, je suis née au Sénégal, à Dakar.
04:31Mais au final, je ne savais pas à quoi ça ressemblait, le Sénégal.
04:34Là, au final, mine de rien, dans le cadre du tournage, on a beaucoup...
04:38On a beaucoup sillonné le Sénégal, si tu veux, donc on a vu pas mal de choses.
04:42Je ne veux pas dire que je le connais, ce n'est pas vrai.
04:43Mais j'en connais, je connais déjà un peu plus qu'avant.
04:46Et au-delà de ça, moi, j'ai envie d'y retourner pour faire du tourisme,
04:49pour voir mes amis sur place.
04:51Et puis, petit à petit, loin des caméras,
04:53reconnecter avec ce pays qui est celui de mes ancêtres, au final.
04:57Et pour pouvoir aller de l'avant, continuer mes projets, etc.
05:02C'était tellement important de savoir d'où je venais.