Denis Van Weynbergh est le premier skipper belge à boucler le Vendée Globe. Arrivé dernier de la course après 117 jours en mer, le Brabançon de 57 ans a été au bout du monde, et de lui-même, pour ne pas abandonner. Il est venu en studio nous raconter son périple.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Denis Wallenberg, marin professionnel, je viens de terminer le Vendée Globe,
00:05tour du monde sans escale, sans assistance, tour du monde à la voile, en solitaire, en 117 jours.
00:15Il se passe de manière un peu agitée quand même,
00:19parce qu'on a beaucoup de sollicitations, beaucoup de boulot avec les médias.
00:24Après, il se passe quand même très bien, parce qu'on est très heureux d'être arrivé.
00:28C'est vrai que les premières 24 heures, par exemple, sont un peu bizarres,
00:31parce qu'il y a plein de gens que j'ai vus, mais que je n'ai pas vus.
00:34Donc, j'aurais dit, quand je les croise maintenant, je me rappelle avoir vu.
00:38On a des flashs comme ça, donc c'est assez particulier sur les premières 24 heures.
00:42Et puis, tout ça se platit, je dirais, s'uniformise petit à petit.
00:46Donc, on retrouve les embouteillages, on retrouve le beau soleil de Belgique, la pluie.
00:53Donc, on retrouve ses habitudes.
00:55Alors, ce n'était pas vraiment un rêve d'enfant.
00:57C'est un projet qui a mûri petit à petit, je dirais, depuis 2010-2012.
01:02C'était devenu une sorte d'aboutissement, en tout cas, dans une vie professionnelle et une vie de marin.
01:09Parce que, voilà, c'est la plus grosse course, c'est la plus grande course.
01:13C'est vraiment le graal quand on fait de la course au large.
01:15C'est quelque chose à aller chercher.
01:16Voilà, c'est quelque chose que je voulais tenter.
01:18Et puis, ne pas avoir de regrets, surtout, je dirais, dans 10 ou 15 ans,
01:21parce que je n'aurais pas essayé.
01:22Donc, là, on a coché toutes les cases.
01:25Donc, c'est plutôt pas mal.
01:30C'est sûr qu'on y pense à un moment.
01:32Puis, en fait, on a une face, on dit, OK, c'est peut-être mieux d'abandonner.
01:36Après, moi, le vrai paramètre, c'était la sécurité du bateau et ma sécurité.
01:41Je me suis dit, tant que ces paramètres-là ne sont pas mis vraiment à très forte contribution,
01:46il faut que je continue, il ne faut rien lâcher.
01:48Donc, on avait des points de repli à gauche et à droite sur la dernière partie,
01:52sur les derniers 15 jours, en sachant que si je n'arrivais pas à atteindre tel endroit ou tel endroit,
01:56ça me donnait dangereux, parce que je n'arrivais pas à faire progresser le bateau
02:00et que j'étais plus manœuvrant, surtout avec le bateau,
02:02puisque j'ai quand même fait une grande partie sans ma grande voile,
02:04donc la voile de l'arrière, et qu'un bateau, ça a besoin au minimum de deux voiles pour avancer correctement.
02:09Donc, voilà, je m'étais mis des points de passage
02:11et je savais que je pouvais m'arrêter à tel endroit, tel endroit, tel endroit.
02:14Mais chaque fois, j'arrivais à progresser, ce n'était pas simple,
02:17parce que parfois, on n'avançait pas beaucoup.
02:19Il y a un jour, j'ai fait à peine 100 km sur la route directe en 24 heures,
02:23donc c'est rien, alors que normalement, on en fait 500 par jour facilement.
02:26Ça, c'était assez désespérant et assez dur mentalement,
02:29mais je me suis dit tant qu'on avance et tant qu'on n'est pas en insécurité,
02:33il n'y a pas de raison d'abandonner.
02:35J'ai assez à manger, ça prendra peut-être plus de temps,
02:38mais tant pis, ce qu'il faut, c'est terminer.
02:45En fait, moi, c'est vraiment les contacts sociaux et les contacts humains
02:48qui m'ont manqué le plus.
02:50Après, on peut faire le rapprochement avec une période qu'on a connue il y a 5 ans.
02:53C'est vrai que le confinement, on a bien vu qu'il y avait des gens
02:55qui étaient totalement isolés pendant de longues périodes
02:57et que ça créait vraiment des problèmes psychologiques.
02:59Donc, on peut imaginer que sur un bateau, dans les difficultés,
03:02avec des tas de fatigue, forcément, ça travaille l'esprit.
03:06Donc, voilà, moi, ce qui m'a vraiment manqué le plus, c'est ça,
03:09c'est les réels contacts humains.
03:11On a beaucoup de contacts via les réseaux et via WhatsApp, entre autres,
03:15puisqu'on a une antenne satellite qui fonctionne très bien.
03:17Et ça ne remplacera jamais les vrais contacts sociaux.
03:23Je vais retenir un moment, c'est le passage du Cap Horn,
03:25parce que je m'en faisais vraiment une fête.
03:28Quand on est marin, quand on fait de la course au large,
03:31et qu'en plus, on va le passer en solitaire, c'est vraiment un grand moment.
03:35En fait, j'ai passé de nuit et j'ai passé vent de face,
03:37donc ça veut dire que j'ai dû tirer des bords.
03:39Finalement, je n'ai rien vu.
03:40Et donc, je me suis dit que l'année prochaine,
03:42j'allais louer un camping-car et aller faire des barbecues sur ce Cap Horn
03:45pour en profiter et puis voir la vue et puis voir où j'étais passé.
03:49Voilà, c'est une petite île, là, au bout de l'Amérique du Sud.
03:52Donc, voilà, c'est une des envies.
03:53Donc, ça, voilà, c'est une des anecdotes un peu croustillantes.
04:00Je ne pense pas que je referais le Vendée Globe comme skipper.
04:03Ça a été six ans de ma vie, beaucoup de sacrifices.
04:06Et les projets et le Vendée Globe ont été vraiment compliqués.
04:09Donc, ça use moralement, physiquement aussi.
04:13Non, ce que j'aimerais peut-être faire, c'est, voilà, c'est un des projets,
04:16c'est pouvoir transmettre mon expérience à d'autres skippers,
04:19peut-être des plus jeunes skippers ou peut-être un skipper belge.
04:22Donc, ça, on va voir de quoi l'avenir est fait.
04:24Mais c'est vrai que c'est une des idées qui est notée dans mon calepin,
04:29à l'idée que j'avais sur le bateau et que j'ai évidemment eu le temps d'y penser beaucoup.