Les trafiquants de drogue "seront rattrapés par la patrouille", promet le directeur interdépartemental de la police nationale dans le Bas-Rhin, Jean Hayet, en cette journée dédiée au narcotrafic sur les ondes "ici Alsace".
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00:00Jusqu'à 9h, ici matin.
00:02Allez, il est 8h moins le quart, bon réveil à toutes et tous.
00:04Est-ce que vous avez l'impression qu'il est facile de trouver de la drogue près de chez vous ?
00:08C'est le débat du jour au 03 88 25 15 15.
00:11C'est une journée spéciale de narcotrafic ici à Alsace.
00:13Et on est ce matin avec l'un de ceux qui porte la lutte contre le trafic de drogue dans notre département du Barin.
00:20Bonjour, contrôleur général Jean Haillet.
00:22Bonjour.
00:22Un directeur interdépartemental de la police nationale dans le Barin.
00:25Il y a beaucoup de drogue à Strasbourg et dans les environs ?
00:28J'allais dire à taille de ville égale, on est dans la moyenne.
00:33On ne va pas nier qu'il y a un marché local.
00:35Mais il n'y a pas un phénomène plus marqué sur Strasbourg que sur les autres villes de même taille.
00:41Près de 1300 kilos de produits stupéfiants, tout confondu, ont été saisis l'an dernier.
00:46C'est beaucoup plus qu'en 2023, de quoi il s'agissait exactement ?
00:50C'est tout produit.
00:51Pour relativiser, mais c'est un résultat par rapport au succès des services d'enquête,
00:56c'est que sur cette augmentation, on a des grosses affaires.
00:59C'est-à-dire qu'on a interpellé des gens dans le cadre de trafic, voire des trafics internationaux.
01:04Donc avec des produits qui n'étaient pas encore mis en circulation sur Strasbourg,
01:09on a pu interpeller des livraisons qui se faisaient.
01:12Et ça, c'est lié au travail des enquêteurs.
01:14Des grosses prises.
01:15Donc c'est ça votre principal objectif ?
01:17C'est justement les attraper avant la mise en marché de ces marchandises, de ces produits ?
01:22Alors c'est un des objectifs.
01:24C'est-à-dire qu'en fait, on est dans une action qui est à différents niveaux.
01:27Il faut tenir les différents niveaux.
01:28Tout à l'heure, vous avez passé le reportage par rapport aux effectifs de terrain,
01:31dans leur lutte du quotidien sur les points de deal, sur les nuisances générées, sur les trafics.
01:38Après, on a aussi des services d'enquête à différents niveaux.
01:43On essaye d'avoir plusieurs lames dans notre action.
01:46L'action de terrain, l'action sur le petit trafic local, et l'action sur les gros trafiquants.
01:51Et tout ça, c'est un travail méticuleux, qui peut paraître fastidieux, qui prend du temps,
01:56mais qui nous permet d'avoir quand même des résultats, vous l'avez cité, en termes de saisie notamment.
02:01En collaboration avec les services allemands, notre situation géographique est très proche de l'Allemagne.
02:06Justement, est-ce qu'elle pousse ce trafic vers Strasbourg et sa région ?
02:10Alors, on travaille beaucoup avec nos collègues allemands dans tous les domaines,
02:14y compris dans le domaine des stupéfiants.
02:16On a notamment un travail actuellement d'analyse.
02:18Vous savez que la législation a évolué en Allemagne récemment.
02:21Donc, on a un travail d'analyse sur le cannabis, pour voir s'il y a eu un effet.
02:25Pour l'instant, ce n'est pas le cas, par rapport à la situation locale,
02:29comme les autres départements frontaliers.
02:31Donc, on a un travail effectivement de coopération internationale, je dirais,
02:35parce qu'il n'y a pas qu'avec les Allemands.
02:37Il y a aussi les Hollandais, il y a aussi les Espagnols.
02:40Il y a tout un travail qui est fait pour lutter contre les réseaux.
02:44Il faut nous-mêmes avoir nos propres réseaux.
02:46Du cannabis, il y en a encore beaucoup, énormément évidemment en Alsace.
02:49Il y a de plus en plus de drogues plus dures, de la cocaïne, de l'héroïne notamment.
02:53Alors, on est souvent sur de la polyconsommation.
02:57C'est-à-dire que, malheureusement, on arrive à un phénomène
03:01où le « simple » fumeur de cannabis, malheureusement, au bout d'un moment,
03:06et je crois que j'ai entendu que vous alliez évoquer tout à l'heure
03:09la problématique des addictions, on est sur des pluriaddictions.
03:12C'est-à-dire que, généralement, les gens, au bout d'un moment,
03:14ne se contentent plus du cannabis et passent à des drogues plus dures.
03:17Et, comme toute règle commerciale, ça crée un marché.
03:20– Ce serait effectivement tout à l'heure, entre 9h et 10h,
03:23cette spéciale addiction puisqu'on continue à parler des drogues
03:26en cette journée spéciale narcotrafic sur votre radio ici à Alsace.
03:29C'est nuisant ces points de deal dont vous parlez, contrôleur général Jean Haillet.
03:33Est-ce que vous, qui nous écoutez, qui nous regardez,
03:35vous en êtes victime, vous en êtes témoin ?
03:37Vous venez témoigner au 03 88 25 15 15.
03:41Cédric nous appelle de Blotheim. Bonjour Cédric.
03:44– Bonjour Hubert, bonjour tout le monde. – Bonjour Cédric.
03:46Cédric, qu'est-ce que vous souhaitez nous dire ce matin ?
03:48– Moi, je pense que, niveau drogue, il n'y en a pas plus ou moins qu'avant,
03:52c'est juste que c'est plus médiatisé actuellement.
03:55Je salue le travail de la police qui font des saisies, c'est très bien,
03:59mais je pense que, niveau des drogues, moi, depuis mon adolescence,
04:03j'ai toujours connu des gens qui consommaient de la drogue.
04:08J'en connais pas plus, j'en connais pas moins.
04:10C'est juste qu'actuellement, c'est plus médiatisé,
04:12donc on a l'impression, effectivement, qu'il n'y a plus.
04:14J'habite à côté de la frontière suisse, à Bâle, où il y a des saisies souvent records.
04:19Il y en a toujours eu, je ne pense pas qu'il y en ait plus ou moins actuellement.
04:23– Merci Cédric. Pas plus, finalement, de drogue qu'hier, monsieur le contrôleur général.
04:29– C'est difficile à évaluer, parce qu'on est sur un système
04:34où on essaye justement d'avoir la connaissance la plus fine,
04:37mais il reste quand même une zone grise,
04:39pour savoir si on arrive à, de par nos saisies,
04:45à quantifier exactement ce qui circule.
04:48Parce que vous avez différentes analyses possibles.
04:50La première analyse, c'est de considérer que nos saisies font
04:55qu'il y a moins de produits sur le marché.
04:58La deuxième analyse pourrait consister à dire
05:00qu'on est toujours sur un ratio qui est à peu près le même en termes de saisies,
05:03donc ça veut dire que si on saisit plus, c'est qu'il arrive plus.
05:06En réalité, on le voit, on est sur Strasbourg en tout cas,
05:10on est sur une action qui est, encore une fois, quotidienne,
05:14et donc on a un travail à faire là-dessus,
05:17sur les consommateurs, c'est une cible principale,
05:20parce que c'est eux qui génèrent le marché,
05:22mais également sur les nuisances générées par les points de deal,
05:25et là-dessus on y est très attaché, et c'est notre quotidien
05:29par rapport à l'augmentation du trafic tel que vous l'imposiez.
05:32– Il faut être plus dur avec les consommateurs ?
05:35– Il faut arriver à dissuader les consommateurs.
05:38C'est une approche, encore une fois, qui est pluridisciplinaire,
05:42c'est-à-dire que la répression en elle-même ne suffit pas,
05:45mais elle participe du phénomène.
05:47Ce que je veux dire, c'est qu'il faut à la fois avoir une action forte
05:51sur les consommateurs par rapport aux points de deal,
05:54pour arriver à assécher les points de deal,
05:56et le deuxième aspect, c'est que je pense qu'il y a un travail partenarial
05:59qui existe déjà et qu'on doit encore développer avec le monde médical,
06:02pour justement essayer de trouver des solutions sur le long terme.
06:06– On va retrouver Patricia qui est à Strasbourg, bonjour Patricia.
06:10– Bonjour Patricia. – Oui, bonjour.
06:13– Vous êtes témoin, vous, de ces points de deal dont on parle ce matin,
06:17de personnes qui font du trafic ? – Ah oui, beaucoup.
06:21– Dites-nous. – Beaucoup.
06:23Parce que j'habite déjà, quand on va en centre où j'habite,
06:28il y a des points de deal en pleine journée, devant les commerces.
06:32Sinon, j'ai une fois assisté à une scène,
06:36en rentrant le soir du match de foot à l'Amino,
06:40les jeunes qui deal dans le tram,
06:44et il y a même une fois un jeune qui s'est pris une raclée devant tout le monde,
06:48parce qu'il n'avait pas fait le chiffre d'affaires.
06:52– Oui, cette violence. – Mais ils parlent de ça,
06:56sans don, sans rien, pour eux c'est tout à fait naturel.
07:00– Décomplexer désormais le trafic de stupéfiants.
07:03Patricia, merci de votre témoignage ce matin sur notre antenne ici à Alsace.
07:07On n'a plus de complexe, les dealers font ça à ciel ouvert,
07:12monsieur le contrôleur général ?
07:14– Non, à ciel ouvert c'était dans un tram déjà, donc c'était pas à ciel ouvert.
07:17– Oui, elle parlait aussi de devant… – Elle parlait aussi de points de deal.
07:20– C'est une boutade. Je vous parlais d'action quotidienne,
07:26s'il n'y avait pas justement cette notion de points de deal,
07:30on n'aurait pas besoin, nous services de police, d'avoir une action quotidienne.
07:34C'est-à-dire que clairement, et je le disais en introduction, il y a un marché,
07:39donc il y a une action à avoir pour lutter contre ce marché.
07:42Quant à l'attitude des dealers, on est dans l'argent facile,
07:47on est dans le revenu facile, et cette notion de se sentir avec un sentiment d'impunité.
07:56Je tiens à dire ici que ce n'est qu'un sentiment d'impunité,
07:59c'est-à-dire qu'à un moment ou à un autre, ils seront rattrapés par la patrouille.
08:02– Vous pensez justement que la patrouille doit y aller plus fort, plus vite ?
08:06Il y a cette loi narcotrafic qui est en discussion à l'Assemblée nationale,
08:09est-ce que vous pensez, de votre expérience du terrain,
08:11qu'un durcissement de la loi pourrait permettre de dissuader les trafiquants ?
08:14– Encore une fois, ça va participer de l'action, c'est un plus.
08:19On évoquait le sentiment d'impunité, à partir du moment où on aura des réactions plus fortes,
08:25y compris dans l'arsenal législatif, on aura un impact.
08:29– Surtout que votre travail à vous, en tant que policier, change aussi,
08:32il y a les points de deal qu'on évoquait à Strasbourg, dans certains quartiers du Sud notamment,
08:38mais il y a aussi maintenant tout ce deal mouvant, j'ai envie de dire,
08:42avec ces dealers qui se déplacent eux-mêmes en scooter, en voiture parfois,
08:46avec des commandes faites directement sur les réseaux sociaux,
08:49type Snapchat, Instagram parfois, ou des messageries critiquées comme Telegram,
08:54comment est-ce que vous travaillez avec ces nouvelles données-là à vous, à la police ?
08:58– C'est ce que je vous disais sur…
08:59– J'ai pu ne faire que des tours dans le quartier.
09:01– C'est ce que je vous disais, c'est les différentes lames,
09:03où là, effectivement, c'est un travail d'enquête, de longue haleine,
09:07pour arriver à identifier les réseaux, il y a des régimes d'enquête qui sont particuliers
09:13et qui nous permettent d'enquêter sur ces sujets-là.
09:16Vous savez, les grands trafiquants, moi j'ai eu l'occasion de travailler à l'international,
09:20les grands trafiquants sont devenus vraiment des businessmen,
09:25et ils ont leurs business plans, et dans ces business plans, il y a les méthodes,
09:29et dans les méthodes, il y a le ratio avec le risque par rapport aux méthodes de vente, etc.
09:33Donc c'est à nous de nous adapter, pour être le plus, nous aussi, en réaction,
09:38voire en anticipation par rapport aux nouvelles méthodes.
09:41On parle des livraisons, il ne faut pas donner de marque,
09:45mais nous on appelle ça les livraisons Uber, dans notre jargon, ça n'a rien à voir avec Uber.
09:49– L'uberisation de la société, c'est devenu le langage courant,
09:53et vous le connaissez aussi dans votre métier.
09:55En tout cas, on vous remercie, contrôleur général Jean Haillet,
09:58vous êtes le directeur interdépartemental de la police nationale dans le Bas-Rhin,
10:01c'est vous qui menez notamment cette lutte contre le trafic de drogue,
10:04chez nous en Alsace et dans le Bas-Rhin.
10:06Merci à vous, je renvoie aussi au reportage avec vos équipes,
10:08réalisé hier avec Émilie Pou, c'est à réécouter sur le site ici.fr Alsace, merci.