Faut-il craindre que la hausse des droits de douane américains impacte le caddie et de pouvoir d'achat des Français ? Regardez l'analyse de Michel-Edouard Leclerc, président du comité stratégique des centres Leclerc.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 19 mars 2025.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 19 mars 2025.
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00:007h41, l'invité de RTL Matin et Thomas, vous recevez ce matin celui chez qui beaucoup de nos auditeurs font leur course, Michel-Edouard Leclerc.
00:11Bonjour et bienvenue sur RTL, Michel-Edouard Leclerc.
00:13Bonjour, bonjour à tous.
00:14Alors il y a eu des négociations commerciales qui se sont achevées le 1er mars.
00:17Il y a ce contexte international avec Donald Trump qui veut faire augmenter voire exploser les droits de douane.
00:22Ma première question elle est très concrète, est-ce qu'il faut s'attendre à une hausse de prix supérieure encore à celle qu'on attendait ?
00:27Non, non, non, là on a bien négocié, c'est en train de se mettre en forme juridiquement.
00:32Vous savez tout le monde dit on négocie en un soir, en deux soirs, le dernier soir, mais les juristes mettent des jours et des heures à structurer tout ça.
00:41Non mais on a obtenu quand même pas des grandes baisses de prix mais de la déflation.
00:47Vous vous rappelez que sur un cycle de 3 ans l'alimentaire avait augmenté de 21%.
00:51Mais là le contexte international ne va pas changer ?
00:53Je vous dis, ça ce qu'on vient de négocier, c'est quand même pas mal de baisses de prix dans les magasins,
01:00en tout cas une inflation inférieure à 1% jusqu'à la fin de l'année, avant que Trump ait un prurit de colère.
01:07Maintenant Trump ce qu'il est en train de faire c'est de stresser le marché, c'est pas au niveau de l'approvisionnement du marché,
01:13c'est plutôt au niveau des investisseurs qui se demandent si c'est du lard ou du cochon,
01:17s'il faut être copain à copain avec lui ou si au contraire il faut retarder les décisions d'investissement.
01:22Ça, ça ne produit pas d'effet tout de suite, ça produit des effets sur les taux d'intérêt,
01:26sur les décisions d'investissement, est-ce qu'on met une usine de bagnole là ou...
01:30Effectivement, après là il a l'air de vouloir aller très vite sur les doigts de douane,
01:36c'est pareil, il commence très fort, on va voir comment la commission européenne réagit.
01:41En tout cas il n'y a pas le feu au niveau des hyper et des magasins ?
01:43Non, pas au niveau des hyper et des magasins.
01:45Comment consomment les gens en ce moment ? Est-ce qu'on reconsomme ?
01:47Est-ce qu'on fait des stocks parce qu'on est inquiet comme on l'avait vu pendant le Covid ?
01:50Non, la consommation est très intelligente, c'est-à-dire qu'elle est très arbitrée,
01:55les écrans plats, les investissements un peu lourds, les voyages sont arbitrés en famille un peu plus longtemps,
02:02mais la consommation tient son rang.
02:05Il y a une petite baisse en volume, mais le mois de février il ne faisait pas beau non plus,
02:08personne n'a consommé beaucoup, et puis bon, les jeunes font moins la cuisine,
02:14mangent moins de viande, c'est une réalité, donc ils achètent des objets un peu moins chers,
02:19On est raisonnable, mais on ne déconsomme pas, c'est ça ?
02:22On ne déconsomme pas.
02:23Est-ce que vous avez des problèmes de pénurie d'œufs ?
02:25Parce qu'il y a une histoire que nous racontait Olivier Dauverdière il y a quelques semaines,
02:27il y a une pénurie d'œufs aux Etats-Unis, et par mimétisme, on craint visiblement en France
02:31qu'on en manque aussi, ce qui n'est pas le cas au niveau de la production.
02:34Est-ce que dans les magasins, les gens se ruent sur les œufs ?
02:36Il y a eu des ruptures, et il y a encore dans quelques filières des ruptures,
02:40mais ce n'est pas des pénuries, c'est tout simplement que ceux qui achètent moins de viande
02:46parce que c'était trop cher, ils achètent des œufs parce que c'est de la protéine.
02:50Mais bon, vous savez, il y avait eu de la grippe aviaire,
02:53donc pour relancer des bancs de poulets, des poules pondeuses,
02:58il faut un petit temps, mais je ne pense pas qu'il y ait de dramatisation.
03:01Dans ce contexte qui n'est quand même pas simple,
03:03vous n'avez toujours pas le droit de faire des super promos sur les produits d'hygiène et de protéin,
03:06l'interdiction a été prolongée jusqu'au 15 avril 2028,
03:09c'est une erreur dans le contexte qu'on connaît ou pas ?
03:11Je ne comprends pas les hommes politiques français.
03:14J'avais bien vu que pendant la crise du Covid,
03:17ils ne savaient pas acheter de masques que la grande distribution est allée acheter.
03:21Beaucoup d'entre eux n'ont jamais dirigé une cantine
03:25ou participé aux achats, aux appels d'offres de leur ville
03:27parce qu'on voyait bien que quand ils parlaient de shrinkflation,
03:30de changement de produit, ils oubliaient qu'ils pratiquaient tous les jours dans les cantines.
03:34Là aujourd'hui, c'était hier,
03:37ils ont discuté de deux dispositions qui sont inflationnistes.
03:41Je ne comprends pas.
03:43Si la politique veut renouer avec son peuple,
03:46s'il veut être populaire, si la politique veut revenir dans la société,
03:49pas sous forme d'injonction, mais de faire plaisir aux Français,
03:52dont la préoccupation première c'est le pouvoir d'achat,
03:55on n'interdit pas les super promos sur les couches,
03:57sur les protections mensuelles ou sur les lessives.
04:00C'est ce qu'ils sont en train de faire.
04:02Ils prolongent les dispositifs
04:04et puis aussi ils nous interdisent de vendre moins cher,
04:07ils obligent à mettre des marges de 10%.
04:10Ils disent que c'est pour que ça ruisselle sur les producteurs, sur les agriculteurs.
04:13Je vais vous poser la question, Soto,
04:15la question qui paralyse.
04:17En quoi le fait de me faire prendre une marge de 10% minimum sur le Coca-Cola,
04:21la partie agricole du Coca-Cola, je ne la connais pas trop,
04:25sur le Tropicana,
04:27sur le Nescafé ou le chocolat poulain,
04:31dites-moi en quoi le fait d'aller vendre plus cher,
04:33en tout cas de ne pas pouvoir les vendre moins cher,
04:35ça va ruisseler vers les éleveurs ?
04:37Ça va enrichir l'eau claire, mais ça ne va pas enrichir les éleveurs, ça ne va pas enrichir les producteurs ?
04:40Ça va enrichir peut-être les distributeurs,
04:42certainement les industriels, mais pas les agriculteurs.
04:44Donc je ne comprends pas
04:46que c'est quand même un niveau intellectuel qui...
04:50On ne se pose pas les bonnes questions dans l'histoire.
04:53Vous parlez du Coca, dans vos supermarchés,
04:55il y a une petite affichette, vous expliquez qu'il augmente de 15%,
04:57que c'est à cause de la taxe soda.
04:59Que vous êtes bien désolé de tout ça.
05:01Vous n'auriez pas pu prendre sur vos marges là-dessus ?
05:04Non, ce n'est pas si simple.
05:06J'étais contre la taxe soda,
05:08non pas en tant que telle.
05:10Évidemment, il faut lutter contre l'obésité, etc.
05:12Mais c'était dans le débat budgétaire,
05:14tout le monde est parti pour aller chercher des plus fous,
05:16un petit peu partout, et on a essayé
05:18d'anoblir la cause, alors qu'il s'agissait tout simplement
05:20d'aller racler dans les portefeuilles
05:22des consommateurs.
05:24Vous n'auriez pas pu compenser ça ?
05:26Peut-être, mais le sujet,
05:28ce n'était pas celui-là.
05:30On en reparlera peut-être si c'est maintenu.
05:32Non, non, c'est simplement que
05:34si on fait une politique anti-obésité, on y va carrément.
05:36On défend le Nutri-Score,
05:38là c'est fait, nous on est pour.
05:40Vous pourriez enlever des produits qui ont un mauvais Nutri-Score ou pas ?
05:42Non, il ne faut pas faire ça.
05:44Il faut arrêter, il faut laisser les consommateurs choisir.
05:46Les consommateurs, ils lisent des informations.
05:48Et puis,
05:50entre nous, vous comme nous,
05:52de temps en temps, on se lâche,
05:54on achète des produits qui sont un peu plus gras
05:56ou on prend un verre d'alcool
05:58avec un taux de sucre un peu élevé.
06:00Ce sont nos choix de vie.
06:02Nos choix quand on a les moyens. Parce qu'en général, quand on n'a pas les moyens,
06:04on achète les produits bas de gamme qui sont
06:06moins bons pour la santé.
06:08Monsieur Soto, sur nos premiers prix,
06:10on a remarqué qu'au plus, il y a le Nutri-Score.
06:14Il y a un Nutri-Score qui est excellent.
06:16J'ai une question qui me tourne le pin depuis longtemps vous concernant.
06:18Vous promettez à longueur d'interviews et de campagnes de pub
06:20des prix justes pour les agriculteurs, on est d'accord,
06:22et des prix bas pour les clients.
06:24Comment expliquer à un enfant de 8 ans
06:26simplement qu'on peut à la fois
06:28bien payer ses fournisseurs et vendre pas cher
06:30aux consommateurs ? Où est le tour de magie ?
06:32La petite marge. Ca s'appelle la petite marge.
06:34Les centres Leclerc,
06:36en fin d'année, ils sortent un profit
06:38de l'ordre de 2,9%.
06:40C'est petit. Ca se passe sur
06:42beaucoup de volume. Ca leur permet d'amortir leur investissement.
06:44Mais c'est la petite marge. En gros,
06:46si vous voulez, ce qui faisait l'écart
06:48entre un magasin Casino
06:50qui aujourd'hui est en train de disparaître, acheté par des intermarchés
06:52ou par d'autres, et Leclerc,
06:54il y avait 30% d'écart de prix.
06:56C'était le fait que chez Casino,
06:58en achetant à peu près les mêmes
07:00conditions d'achat, il y en a un qui prenait
07:02une grande marge et l'autre, la petite marge.
07:04Le breton prenait la petite marge.
07:06Je ne comprends pas les Etats-Unis. Est-ce que symboliquement, vous pourriez
07:08boycotter des produits made in USA ?
07:10Les sortir des rayons, par exemple ?
07:12C'est un mouvement qui se met en place
07:14aujourd'hui dans l'Europe du Nord.
07:16Mais vous, chez Leclerc,
07:18pourriez le dire ? Ecoutez. Je vous écoute.
07:20C'est un mouvement qui se met en place.
07:22Il est à l'initiative des consommateurs.
07:24C'est un message dont je pense que
07:26les producteurs
07:28de marques américaines en Europe
07:30doivent écouter très fort.
07:32Evidemment, si dans le rapport de force,
07:34Donald Trump va
07:36taper trop fort nos petits viticulteurs,
07:38l'économie française et autres,
07:40c'est évident qu'il y aura un réflexe nationaliste.
07:42Vous ne suivrez ce réflexe ou pas ?
07:44Il ne sera pas...
07:46Les couches Pampers, fabriquées aux Etats-Unis, vous pourriez les sortir ?
07:48Pourquoi fabriquées aux Etats-Unis ?
07:50Elles sont fabriquées en France, d'abord.
07:52N'oubliez pas ça.
07:54Et donc, la question va être
07:56d'un rapport de force
07:58dans une négociation.
08:00Pour le moment, il faut être prudent.
08:02N'oubliez pas que c'est la Commission européenne
08:04qui avait commencé à reparler
08:06de négociations sur le bourbon américain.
08:08Ce que toute la profession a dit
08:10être une erreur. C'était chatouiller
08:12le président sur le mauvais produit.
08:14Mais si demain,
08:16il y a une négociation très forte,
08:18on s'appuiera sur les mouvements de consommateurs
08:20qui
08:22alerteront sur le fait qu'ils quitteront
08:24peut-être les marques américaines, qu'ils aiment.
08:26Et peut-être que ce message
08:28arrivera aux Etats-Unis et calmera
08:30leurs arguments.
08:32Les couches Pampers ne sont pas fabriquées aux Etats-Unis
08:34mais elles ne sont pas fabriquées en France non plus.
08:36Vous avez été assez dur avec les politiques tout à l'heure.
08:38On évoquait à 7h15 dans notre événement
08:40un sondage qui nous disait que
08:422 Français sur 3, vous verrez bien un entrepreneur
08:44à l'Élysée. Il y a quelques semaines, vous vous disiez
08:46disponible pour la nation dans la perspective
08:48de 2027. Sauf qu'avec vous,
08:50Michel-Édouard Leclerc, on ne sait jamais si c'est une pirouette
08:52ou une conviction.
08:54Pourquoi vous ne créditeriez pas
08:56un chef d'entreprise ?
08:58Je crédite, je vous pose la question pour clarifier.
09:00Pourquoi tout de suite le qualifier de pirouette ?
09:02Non, non, je n'ai pas dit ça.
09:04On vous connaît, vous êtes très
09:06à l'aise au micro. En général, vous aimez bien
09:08la bouddha. C'est vous qui m'avez appris. On ne sait pas si c'est du
09:10premier ou du second degré. Est-ce que
09:12vous réfléchissez sérieusement à une
09:14candidature pour 2025 ? Moi, je me sens
09:16utile et plus utile sur le terrain.
09:18Je fais des trucs.
09:20Je n'ai pas besoin de passer par l'Assemblée nationale
09:22pour faire de la décarbonation, pour mettre des panneaux
09:24solaires, pour mettre des bornes.
09:26Mais en même temps, quand j'ai vu
09:28certains chefs d'entreprise qui se
09:30mettaient bien en scène pour dire
09:32c'est mieux le système américain là-bas,
09:34c'est plus facile pour licencier, on paye moins d'impôts,
09:36c'est pour Bernard Arnault. Je pense que c'était
09:38important de dire aussi,
09:40politiquement,
09:42que des chefs d'entreprise aussi
09:44pouvaient faire nation, pouvaient faire société,
09:46pouvaient faire cœur avec la société française.
09:48Vous pourriez être candidat, parce que là, vous êtes en train d'attraper
09:50déjà la langue de bois des politiques sans répondre à la question.
09:52Au contraire, je suis en train de vous dire
09:54que des chefs d'entreprise
09:56aujourd'hui, on
09:58devrait pouvoir dire
10:00qu'ils font de la politique en France, qu'ils font de la politique
10:02pour la France, et pas simplement
10:04plaider pour le pognon, pour moins de taxes
10:06et tout ça. Ce qui sont des sujets légitimes,
10:08parce qu'il y a 15 jours,
10:10quand on a commencé à avoir ce front
10:12patronal, c'était le titre du monde,
10:14sur
10:16les patrons s'apprêtent
10:18à partir ou à délocaliser.
10:20C'était important déjà de s'engager.
10:22Vous avez envie d'être candidat ou pas ? Ça vous travaille, ça vous traverse l'esprit ou pas ?
10:24On vient me chercher. Non, non, je préfère
10:26rester sur le terrain, oui, oui.
10:28Et si on vient vous chercher ? Je vous répondrai.
10:30Je viens vous chercher. Avec vous ?
10:32On part ensemble, tous les deux ?
10:34Arrêtez de vous embarquer dans toutes vos affaires.
10:36En tout cas, vous n'excluez rien.
10:38En vous rasant, là, le matin.
10:40J'adore votre jeu à tous les deux.
10:42C'est Sarko qui se rase. Vous, vous n'avez
10:44pas de quoi vous raser.
10:46Moi, non, mais vous...
10:48C'est pas très délicat, cette question.
10:50Moi, non, mais vous n'y pensez
10:52jamais, vraiment ? Je pense que les entreprises
10:54ont des impacts politiques
10:56très forts. Et vous voyez, par exemple,
10:58le pouvoir d'achat, c'est le thème des Français.
11:00C'est le premier thème des Français, c'est le pouvoir d'achat.
11:02Je veux me battre pour le pouvoir d'achat.
11:04Dites-moi les hommes politiques, aujourd'hui, là, qui s'expriment
11:06sur le pouvoir d'achat. Dites-moi les hommes politiques
11:08qui prennent des dispositions
11:10pour que, aussi bien sur le plan des revenus, politique
11:12de revenus, libération des salaires,
11:14remise en route
11:16de l'ascenseur social. Où est-ce que vous
11:18entendez ça ?
11:20On a déjà le programme qui se dessine, en tout cas.
11:22Voilà. Merci beaucoup.