Jean-Michel Jacques, président EPR (Ensemble pour la République) de la commission de la défense à l’Assemblée nationale, était l'invité politique de franceinfo soir, jeudi 13 mars 2025.
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00:00France Info soir, l'invité, Aurélie Herbemont.
00:06Bonsoir Jean-Michel, Jacques.
00:08Bonsoir madame.
00:09Vous êtes député ensemble pour la République du Morbihan, président de la Commission de la Défense à l'Assemblée.
00:15Vladimir Poutine est d'accord pour un arrêt des combats en Ukraine, à condition que ça mène à une paix durable et à l'éradication des causes profondes du conflit.
00:24Est-ce que ce soir vous y voyez une avancée importante ou vous êtes mitigé ?
00:29On y voit tout de même une avancée.
00:32Maintenant il reste à définir si la définition de la paix durable est la même que la neutre et que celle des Ukrainiens, surtout.
00:40Et quelles sont les conditions ?
00:42Ce n'est pas forcément le cas.
00:43Il ne l'a pas explicitement décrite, sauf erreur de ma part.
00:47Non, ce soir il ne l'a pas explicitement décrite.
00:49Et donc c'est là que ça va être intéressant, c'est de voir qu'est-ce qu'il en est.
00:54Parce qu'il reste effectivement beaucoup de détails à régler, des questions sérieuses selon le président russe.
00:59C'est là où il faut rester particulièrement prudent après ces premières déclarations du président.
01:04Oui, il faut voir ça comme une ouverture, je pense.
01:06Mais maintenant, quel est le contenu précis ?
01:09Sachant que pour nous il est important que l'Ukraine puisse tout de même faire valoir ce qu'elle souhaite aussi.
01:16Et c'est important aussi de faire une paix durable, c'est-à-dire une paix où l'Ukraine garde sa capacité aussi de se défendre.
01:23Parce que la Russie pourrait recommencer à tout moment.
01:27Et on sait que les Russes cherchent encore à se réarmer encore plus.
01:31Et donc c'est important aussi de s'assurer que la paix soit durable et que l'armée ukrainienne puisse s'assurer sa sécurité.
01:39Avec bien entendu le soutien européen.
01:41Un peu plus tôt dans la journée, la Russie a averti qu'elle considérerait comme un conflit armé direct tout déploiement de soldats européens pour maintenir la paix en Ukraine.
01:51Est-ce que ça, ça risque aussi de compliquer la donne ?
01:54Écoutez, les déclarations du président Poutine sont ses déclarations.
02:00Là, ce n'était pas directement Vladimir Poutine, c'était son administration plus tôt dans la journée.
02:04Voilà.
02:05Ce qui distillait aussi des éléments qui n'étaient pas forcément très optimistes avant la déclaration de Vladimir Poutine ce soir.
02:12C'est ça. Donc en fait, c'est des ballons pour essayer de voir comment ça réagit, etc.
02:17Parce que la France considère, et même volontaire, et essaye d'organiser les choses pour envoyer des forces européennes pour maintenir la paix.
02:25Quand cesser le feu, il y aura.
02:27Alors, cinq pays européens se sont réunis sous l'autorité des différents ministres de la défense des cinq pays pour pouvoir...
02:37La Pologne, l'Allemagne, notamment, autour de Sébastien Lecornu hier.
02:40Voilà, avec l'Italie, la Pologne, l'Allemagne, l'Angleterre, la France, pour justement pouvoir voir qu'est-ce qui était possible de faire et préparer différents plans.
02:52Et donc, c'est la tâche qui a été demandée à ces Etats-majeurs.
02:56Donc, toutes les possibilités sont là.
03:00Et en écarter peut-être une par avance, ce serait déjà abattre ses cartes.
03:06Et à mon avis, en aucun cas, il faille le faire avec le président Poutine.
03:11Jean-Michel Jacques, vous arrivez quasiment à l'instant de la réunion avec le Premier ministre, le ministre des Armées, des dirigeants militaires français
03:18et les responsables des groupes parlementaires, oppositions comprises.
03:21Il y avait autour de la table Marine Le Pen, Jordan Bardella, Mathilde Panot pour LFI.
03:25D'abord, quelle était l'atmosphère, l'ambiance de cette réunion très solennelle, on l'imagine ?
03:31Écoutez, il faut imaginer, on était à Ballard.
03:34Le Ballard, pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est le pentagone français.
03:38C'est là où tout l'Etat-major français se trouve avec les différents services dans une pièce enfermée
03:44avec en face de nous les services de renseignement, des autorités militaires.
03:49Bien entendu, le Premier ministre et le ministre Sébastien Lecornu, ministre des Armées, sont au téléphone.
03:56Et là, avec une mise au point sur la situation ukrainienne
04:00et puis la position française dans ce monde qui bouge, donc c'était un point vraiment intéressant
04:09et je dirais très studieux de la part de tous les gens présents, de toute tendance politique.
04:16Monsieur le député Aurélien Raumont, on va juste faire une toute petite pause dans cette interview
04:20parce que Donald Trump, le président américain, vient de prendre la parole en réaction aux déclarations de Vladimir Poutine.
04:26Je vous redonne la parole dans quelques instants, mais c'est important d'écouter ce qui se passe actuellement à la Maison Blanche.
04:31À l'heure actuelle, il y a des gens qui parlent en Russie.
04:34Nous avons des représentants, Vitkov et d'autres, qui s'entretiennent et qui ont des discussions très sérieuses.
04:41Comme vous le savez, l'Ukraine a accepté de cesser le feu complet.
04:47Nous espérons que la Russie en fera autant.
04:49Il y a des milliers de gens, des jeunes essentiellement, qui se font tuer.
04:54On était en train d'en parler.
04:55Des milliers de jeunes qui sont tués chaque semaine et il faut mettre un terme à cela.
05:02Ils ne sont pas américains, ils ne sont pas hollandais pour l'essentiel.
05:06Ils sont russes et ukrainiens, mais ce sont des gens, des personnes.
05:11Et je crois que tout le monde partage ce point de vue.
05:14Il faut mettre un terme à cela.
05:16Cela représente un coût énorme pour les États-Unis et pour d'autres pays.
05:20Et c'est quelque chose qui ne se serait jamais produit sous ma présidence.
05:24Et je suis extrêmement déçu que cela se soit produit.
05:27Maintenant, il faut y mettre un terme puisque cela s'est produit.
05:32Voilà, Donald Trump qui évoque des bons signaux de la Russie et qui redit qu'un rejet serait décevant.
05:38Pour les mots de Donald Trump, il y a quelques instants dans le bureau Oval.
05:41Jean-Michel Jacques, président de la commission de la défense à l'Assemblée.
05:45On parlait juste avant d'entendre le président américain de la réunion avec le gouvernement français et les parlementaires.
05:52Qu'est-ce que vous pouvez nous dire de ce qui s'est dit dans cette réunion ?
05:55On imagine qu'il y a eu des éléments confidentiels, mais qu'est-ce qu'il en est ressorti ?
05:59Par nature, je ne pourrais pas vous dire ce qui s'est dit parce que c'est sous le sceau de la confidentialité.
06:04Mais il y a une prise de conscience en tout cas globale de l'ensemble des gens qui étaient présents.
06:10Une prise de conscience globale parce qu'on sait que ces dernières heures,
06:13la France insoumise, par la voix de Jean-Luc Mélenchon,
06:15estimait qu'Emmanuel Macron faisait, je cite, de la gesticulation sur la menace russe.
06:19Marine Le Pen, qui était dans cette réunion il y a quelques jours, disait que le président jouait avec les peurs.
06:24Est-ce que cette réunion de cet après-midi a fourni des éléments ORN et ALFI pour leur faire changer de regard sur la situation ?
06:31Alors oui, et j'irai même plus loin parce que ça c'est un élément d'ambiance.
06:36Je peux vous en parler, c'est qu'une collègue qui était présente à cette réunion
06:41disait qu'elle se satisfaisait même de l'ambiance qu'il y avait eue
06:45et qu'elle trouvait ça vraiment dissonant par rapport à l'ambiance qu'il y avait en hémicycle.
06:52Notamment hier, un débat à l'Assemblée nationale.
06:54Et c'est là qu'on voit bien que parfois les postures politiques-politiciennes vont à l'encontre de l'intérêt supérieur de la nation.
07:01Ce qui est, à mon sens, dramatique.
07:04Il y avait moins de postures dans cette réunion, y compris du ORN et de l'ALFI ?
07:08Totalement. Dans cette réunion, les gens étaient attentifs, concentrés,
07:14avec des questions tout à fait pertinentes, de tous bords, avec des réponses précises.
07:19Et donc vraiment très différente cette ambiance en hémicycle, où on voit que les postures politiciennes se jouent.
07:25C'est vraiment troublant, effectivement, mais c'est une réalité de la vie politique.
07:30Et peut-être à vos auditeurs qui nous écoutent de bien le prendre en compte.
07:34Et vous espérez que ça fasse évoluer les positions ?
07:37Ou les postures, comme vous le dites, ne vont pas bouger malgré cette réunion d'information à haut niveau ?
07:42Moi, je crois que, pour être clair, que ce soit la France Insoumise ou le Rassemblement National,
07:49ils font leur jeu à travers cette posture.
07:54Et au-delà de l'intérêt général de notre pays, pour leur écurie, pour leur système politique,
08:04eh bien, ils garderont ces positions et ils ne vont pas évoluer.
08:08Alors que, effectivement, quand on se retrouve sur des réunions sérieuses et sur du fond,
08:12les postures ne sont pas les mêmes que quand ils sont devant une caméra.
08:15Jean-Michel Jacques, Sébastien Lecornu, le ministre de la Défense,
08:18cible environ 100 milliards d'euros pour la défense française à horizon 2030.
08:22L'ancien chef de l'État, François Hollande, ce matin sur France Info,
08:25considérait que 100 milliards, ça n'était pas possible et même que ça n'était pas forcément nécessaire.
08:30Qui est-ce qui a raison ? L'ancien chef des armées ou l'actuel ministre des armées ?
08:35Au-delà des chiffres, ce qu'il faut, c'est une armée qui soit cohérente
08:40et qui puisse remplir sa mission avec toute sa cohérence.
08:45La particularité de l'armée française, c'est qu'on a le nucléaire,
08:48on a une capacité d'analyse, de renseignement et d'action
08:53qui ont tout lieu à n'importe quel moment et partout dans le monde.
08:57Ça, ça nous demande d'avoir des capacités dans l'espace,
09:01des capacités maritimes, sous la mer, même dans les fronts marins.
09:06Et donc 100 milliards, c'est le bon niveau ou c'est un peu surévalué ?
09:10100 milliards, c'est un poids de forme pour avoir une armée dans un contexte tel qu'il est,
09:14qui soit au meilleur de sa capacité.
09:17Après, au-delà des chiffres, parce qu'il faut sortir aussi des chiffres,
09:21c'est vrai qu'on a besoin de repères.
09:23En l'occurrence, le financement fait débat, donc les chiffres sont importants.
09:25Oui, c'est important, mais il faut bien se rendre compte que, de toute façon,
09:28déjà pour produire, au-delà d'avoir l'argent, il faut avoir une production
09:31qui puisse être en cohérence avec l'argent que l'on va délivrer.
09:35Et que les besoins militaires correspondent aussi.
09:38Est-ce que la mobilisation de l'épargne des Français,
09:41c'est une des pistes sérieusement envisagées par le gouvernement,
09:44va suffire à financer cet effort de défense ?
09:47Alors, non. Ça va surtout aider.
09:51Il faut bien comprendre ce mécanisme-là.
09:54Ça va aider nos entreprises d'industrie et de technologie de la défense
09:59à pouvoir avoir plus de trésorerie.
10:01Parce qu'en ce moment même, qu'est-ce qui se passe ?
10:03C'est qu'il y a beaucoup d'équipements qui sont nécessaires
10:06pour armer et remilitariser toute l'Europe.
10:09Et donc, il faut que nos entreprises puissent avoir des fonds propres
10:12pour investir, pour agrandir leur espace,
10:15pour faire de nouvelles chaînes de production.
10:17Et pour cela, ils ont besoin d'argent.
10:20Et si l'épargne des Français, comme vous semblez le dire, ne suffisait pas,
10:23c'est quoi l'autre levier ?
10:25La hausse d'impôts, on a l'impression que c'est tabou.
10:27Ça doit rester tabou ?
10:28Alors, la hausse des impôts, ce n'est pas ce qu'il y a de mieux.
10:31Il faut éviter, bien sûr.
10:33Après, l'épargne des Français, c'est flécher l'épargne des Français.
10:37En ce moment, l'épargne des Français, c'est 84 milliards d'euros
10:42dormant, qui dorment à la banque.
10:44En fait, l'idée, c'est que les Français puissent le mettre dans des comptes
10:47qui leur produira toujours des intérêts,
10:49mais que cet argent, au lieu qu'il soit immobilisé et inutile,
10:52puisse aider ces entreprises qui, elles, vont créer de la richesse
10:56parce qu'elles vont pouvoir produire plus d'équipements,
10:59créer de l'emploi et du coup, pouvoir augmenter les volumes de production
11:05pour remilitariser, pour pouvoir être dans une posture de découragement
11:09face à cette Russie qui, elle, s'arme aussi et ne veut qu'une chose,
11:13c'est grignoter et grignoter tant qu'on ne l'arrête pas.
11:16Voilà un peu le mécanisme.
11:18C'est vraiment amener notre base industrielle de défense
11:22à produire plus et plus rapidement.
11:24Aujourd'hui, Jean-Michel Jacques, il y a aussi une nouvelle réunion
11:26des partenaires sociaux sur les retraites.
11:28Est-ce qu'il faut aller dans cette direction-là,
11:30de faire travailler les Français plus longtemps ?
11:33Alors, là, on sort du schéma...
11:36Enfin, c'est deux choses différentes.
11:38Il ne faut pas mettre en opposition...
11:40Il ne faut pas mettre en opposition l'effort de défense et le modèle social.
11:42Pourquoi ? Parce qu'avoir une défense de 100 pays,
11:46c'est préserver un modèle social.
11:48C'est préserver la République.
11:50C'est préserver toute une société.
11:52Et donc, on ne peut pas mettre en opposition
11:54la retraite que je vais toucher,
11:56ma sécurité et la défense de mon pays.
11:58Ça doit rester deux sujets séparés.
12:00On aura entendu. Merci Jean-Michel Jacques.
12:02Et merci Aurélie Herbemont.
12:04On se retrouve à 20h pour les informer.